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X SORCIÈRES
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messe
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S'il est un constat d’évidence à faire,
c’est que le mouvement anarchiste
n’est pas resté muet, ni dans la prati-
que, ni dans la théorie en ce qui con-
‘cerne l'éducation. Nous ferons donc
un historique de ce qu’ont été les pra-
tiques et les théories libertaires en
matière d'éducation pour finir avec
les bases de ce que devra être l’éduca-
tion libertaire aujourd’hui.
Les alternatives» à l'école ne datent pas
d'hier. Comme nous le disent Fremion et Volny
{1}: «à chaque époque, dans toutes les civilisa-
tions où l'école est soumise à la loi de fer d'un
pouvoir autoritaire ou d'une église, des projets et
tentatives pour laisser vivre aux enfants leur vie
naturelle naissent et durent au milieu dé la tem-
pêtes. C'est surtout dans les années 1880-1920
que le mouvement s'ampiifie. Mais là encore, le
stalinisme, & guerre mondiale et l'Eglise catholi-
que auront raison de bien des enthousiasmes,.
ferrer.…
Le premier à être victime de l'Eglise. catholi-
que sera Francisco Ferrer, fondateur de l'Escuela
Moderna (ancêtre de toutes les écoles moder-
nes, Freiret compris). Assimilé à un terroriste, il
sera fusillé en 1909. C'est en 1901, à Barce-
one, qu'il fonde la première école moderne dans
une Espagne profondément atteinte par l'analpha-
bétisme. Il lui faudra mener une lutte achamée
face à l'Eglise, véritable Etat dans l'Etat, qui
n'accepte pas la remise en cause de son hégé-
monie: tirer le peuple de son ignorance c'est
mener une entreprise hautement subversive. Sa
première tâche fut de créer des livres scolaires
puis de former des éducateurs. Son école, ou
plutôt son foyer d'éducation populairer est
ouverte aux enfants comme aux adultes, de
même qu'elle est mixte (n'oublions pas que nous
sommes au début du siècle et qu'en Espagne,
encore en 1980, la mixité n'existe toujours pas!).
Son école se veut insérée dans la lutte des clas-
ses où syndicats, groupements d'ouvriers, socié-
tés de résistance travaillent à obtenir leur émanci-
pation complète. En faveur de «l'éducation inté-
grale» Ferrer privilégie malgré tout l'éducation
intellectuelle, C'est sur le savoir livresque et la
connaissance plus cérébrale qu'expérimentale
que s'appuie l'école moderne. A la lumière
d'autres, dont nous allons parler, sa pédagogie va
moins dans le sens d'une éthique libertaire, sa
vocation étant plus la création d'une éducation
nationale laïque.
A — —
| Notons aussi au passage que les punitions n'exis- |
| tent pas.
| d'autres, a vu que la croissance démographique
| est dangereuse.
| sommaire en ce temps, pour l'éducation sexuelle
robin. |
Autre victime de l'Eglise catholique, Paul |
Robin, fondateur de:l'orchelinat de Cempuis en |
1880. Farouche partisan de d'éducation inté-
grale» et de la mixité, léducation dans son école
est la même pour garçons et filles. Grande nou- |
veauté pour l'époque: un tiers du ternps est con- |
sacré à l'éducation physique. Toute activité est | cieux et
éducation <intégraler (globale) qui prenne en
proposée aux enfants, jamais imposée. Les
apprentissages manuels nombreux se font dans
les ateliers que les élèves choisissent selon leur |
gré. Ils peuvent aller dans les champs, faire toutes |
les activités créatrices et artistiques, suivre les |
cours en pleine nature... Freinet empruntera
beaucoup à la méthode Robin. À douze ans,
sions se règlent par là discussion entre les par- |
ties. Il est l'ancêtre de l'éducation sexuelle ce qui |
lui attirera les foudres des ecclésiastiques et des | À HIER “
ë q | à l'enfant un savoir». Ainsi, plutôt que d'imposer
bourgeois bien pensants. À tel point qu'une cam-
pagne de presse se déchaîne contre lui, fondée |
esentiellement sur le fait que les cours sont mix- |
tes. Ceci des 1891. Robin continue à enseigner |
l'histoire des civilisations (et non des grandes |
batailles), à apprendre l'horreur de la guerre. |
«Pas de cerveaux sans mains, pas de mains sans |
cerveaux», adopte:t-i| comme principe de base. |
Ecolodiste avant la lettre, Robin, comme bien
il lutte pour la contraception,
des adultes et des femmes en particulier, publie
des dizaines de brochures pour expliquer com-
ment ne pas avoir d'enfants quand on en a trop.
L'Eglise fait courir les calomnies les plus folles sur
Cempuis, décrit par sa presse comme un vérita-
ble bordel. Condamné pour ses écrits sur la santé
des femmes, il s'exile en Nouvelle-Zélande. [lse |
suicide en 1912.
faure.…
Poursuivant l'expérience de Robin, Sébastien
Faure (1842-1945), vieux routier de l'anarchie,
fonde en 1904 une ferme, la Ruche. !l loue vingt
hectares pour y installer l'école (le miel cultivé sur |
la propriété servira à alimenter les caisses). Il crée
une coopérative qui achète les produits de la
ferme et les distribue. Véritable modèle alternatif
pour le prolétariat, la Ruche vivra jusqu'à la guerre
mondiale où les difficultés financières auront
Faure à l'usure.
L'enseignement dispensé est celui «intégral»
de Robin. La Ruche fonctionne comme un soviat
ALTERNATIVE LIBERTAIRE - ASBL 22 MARS - N° 67 - Novembre 84 - Page 2
| Aujourd'hui,
| aident à mieux cerner la forme et le contenu que
dont la direction dépend de l'assemblée génerale
hebdomadaire composée des enseignants, des
élèves les plus âgés, de Faure. 1ly a une cinquan-
taine d'enfants à la Ruche dont beaucoup sont
des enfants de victimes de la répression politique.
On y apprend l'espéranto. Les enfants font ce
qu'ils veulent jusqu'à dix ans où ils sont mis en
apprentissage (ils papillonnent d'atelier en atelier
— imprimerie, menuiserie... — deux, trois mois à
chaque fois). Les enfants sont salariés et produi-
sent pour l'école. L'éducation sexuelle et la mixité
sont reprises de Robin.
Comme l'expliquent Raynaud et Ambauves
| (2) «avec l'expérience de P. Robin, la liberté de
| l'enfant pressentie à des niveaux différents par
| certains théoriciens anarchistes (Sbrner, Prou-
| dhon st Bakounine) entre dans lé domaine de la
| réalité. L'échec de l'autoritarisme de la famille et
l'école n'était donc pas inéluctable, Mais
| l'échec de Cempuis montrait cependant qu'un
| système social autoritaire ne pouvait toiérer en
| son sein de-tels îlots de liberté». Aussi convenait-il
| de définir une stratégie de l'éducation libertaire
| par rapport à la société existante et future. Bakou-
| nine pensait qu'un changement de structures
| économiques permettrait seul et nécessairement
| une éducation «intégrale». Séhastien Faure, en
replaçant l'éducation libertaire dans une dynami-
| que de luttes autogestionnaires démontra au con-
fraire que la liberté de l'enfant devait d'ores et
| déjà être envisagée. C'est toute l'originalité de
| son proief éducatif qui, de notre point de vue,
. réprésente un aboutissement théorique synthéti-
que de la mentalité anarchiste».
C'est à partir d'exemples d'écoles de type
| libertaire, parmi beaucoup d'autres en Europe
(Espagne, Angleterre, URSS, Portugal, Allems-
| gne, France), et à partir des premiers jalons théo-
riques posés par Stirnèr, Proudhôn et Bakounine,
que se sont élaborées les lignes conductrices de
| ce qu'on appelle depuis un siècle «d'éducation
libertaire» (le mot fut uHisé pour la première fois
puis systématisé par Robin en 1895 lors de la
création de son journal, Le Libertaire).
des expériences concrètes nous
doit se donner une éducation de caractère liber-
taire. L'Histoire de ces histoires nous fournit des
enseignements précieux et précis pour bâtir une
compte les besoins de l'enfant et de l'adulte ainsi
que les diverses façons de les extérioriser, res-
pectant les spécificités régionales, culturelles…
ï AT. 7 EURE D Si
| les théoriciens anarchistes
| l'enfant choisit un méfier qu'il va perfectionner. Au |
| plan moral on lui apprend les notions de libertéet |
| de fraternité. En 1883, Robin crée la première |
colonié de vacances. Tous les problèmes et ten- |
Max Stirner (1806-1856) est un des tout
premiers à pressentir la finalité de l'éducation telle
qu'elle se pratique encore aujourd'hui: intégration
à un systeme social autoritaire: «Nous avons pris
dès notre enfance l'habitude de nous résigner à
tout ce qui nous était imposé, l'éducation impose
un savoir (celui de la classe dominante évidem-
ment}, développons ses possibilités créatrices,
son rapport à la liberté. Stirner prône ici la liberté
de l'enfant comme condition de celle de l'homme.
Faut-il croire que cette évidence soit tellement
dérangeañte pour ne pas être appliquée
aujourd'hui encore ?
lssu du peuple, Proudhon a envisagé l'éduca-
tion dans une perspective de classe, comprenant
bien que le peu d'instruction reçu par les enfants |
du peuple consistait (consiste?) à donner à des
enfants inférieurs juste un degré de savoir que
réclame une consciencieuse obéissance. \|l
dénonce l'existence de l'enseignement d'un côté
TL) SAIS: MAMAN, JE NN
VELX ALLER À LA MA:
TERNÉLLE ETÉTUDER
BEAUCOUP, COMME CA
PLUSTARD JE NE DE-
VIENDRAI PAS UNE FEM-
: ME FRUSTRÉE
ET MEDIOCRE
COMME TOI
«Tout projet particulier
n'a de sens que comme
partie d'un BOIeE deneiae
J. Monot
pour _—
et de l'apprentissage de l'autre comme ne servant
qu'à reproduire sous une autre forme la sépara-
tion des pouvoirs et la distinction des classes. Il
tire donc l'inévitable conclusion: +<Le système
bourgeois est incapable d'offrir aux masses une
instrüction sérieuse».
Sa pensée en matière d'éducation basée
essentiellement sur la philosophie du travail, Prou-
dhon pense qu'il convient de réhabiliter le travail
manuel et avance pour la première fais l'idée que
l'instruction doit durer toute la vie. Bref, que l'édu-
cation soit permanente. Comment en arriver dune
éducation permarñente? «| s'agira dé faire d'un
établissement public une institution économiques.
L'Ecole ne sera plus coupée ni de la vie ni de la
production. Unifiant l'intellectusl et le manuel, elle
sera productrice de biens “économiques et par là
même rentable et autonome d'un point de vue
financier. La polytechnie permettra d'éviter que
ces «ateliers-écolesr soient plus des ateliers que
des écoles. La finalité reste la formation d'hom-
mes et de femmes complèt({e)s. Proudhon a bien
saisi là l'un des moyens d'émancipation de la
classe ouvrière: «Le nombre de spécialistes
réduit au minimum, chacun étant à même de eom-
prendre les tenants et les aboutissants de son tra-
vall, les travailleurs seraient à même de se passer
de tous ces parasites qui tirent un profit social de
l'ignorance humaines.
Par là même, Proudhon replace donc le pro-
blème de l'éducation et de l'enseignement dans
uné perspective sociale: il donne les moyens à
une éducation libertaire de sortir du marginalisme
pour, en entrant dans le champ social et socié-
taire, devenir authentiquement populaire.
Bakounine, tout comme Proudhon, et ce sera
une constante du mouvement anarchiste en
matière d'éducation, constate et dénonce la divi-
sion des hommes et des femmes en manuels,
intelléctuels ou savants. || s'insurge contre la
domination de la science issue principalement du
dix-huitième siècle (le siëcle”des”lümières)"où
s'est fondée l'idéologie bourgeoise : détentrice du
savoir, la bourgeoisie le concrétise en pouvoir sur
la vle de ceux qui «ne savent pass. Et comme le
savoir n'est accessible qu'à caux qui ont le pou-
voir.….! De même que Proudhon le réclame: pour
sortir de ce cercle infernal at donner au peuple les
moyens d'accéder au pouvoir, il faut se doter
d'une instruction populaire qui sera l'une des
bases de la société socialiste et qui n'instituera
aucune hiérarchie entre manuels et intellectuels.
I faut qu'il n'y ait eni ouvriers, ni savants mais
seulement des hommes». Si à cette instruction
manuelle et intellectuelle on ajoute, comme
Bakounine, l'éducation physique, on obtient là ce
qui est encore l'une des constantes du mouve-
ment anarchiste: une éducation «intégrales.
C'est sur ces bases théoriques que 5e sont
fondées des expériences multiples comme La
Ruche et Cempuis : l'éducation serait permanente
et intégrale, ayant l'enfant pour but et non comme
moven, avec comme régle de base la liberté et le
respect de chacun dans sa spécificité ét sa
faculté d'adaptation st d'évolution. Ouverte sur
l'extérieur, car l'école doit être la vie, elle serait
égale pour tous et constituerait un des piliers de
base pour l'édification d'une société communiste
| libertaire,
| (1} Fremon-Volny, Les organes de l'histoire.
L'éducation libertaire
Alain
Extrait du Q-Lotté
Journal libertaire du Québec
64 rue Moissonneuve, App. 4
Québec GIR 2C3
(2) Raynaud-Ambauves,
(Ed. Spartacus).
CA FAT FLAIGIR
BE RÉCOUFORTER
&A MAMAN !
UN AUTRE PROJET PEDAGOGIQUE QUE CELUI DE LOUIS MICHEL
La grève des mineurs anglais, qui
a débuté le 6 mars pour défendre
70.000 emplois menacés par le
N.C.B. (National Coal Board), se
poursuit. 80% des mineurs sont tou-
jours résolus à résister à la restructu-
ration imposée par le gouvernement.
La grève des débardeurs à commencé par un
refus des ouvriers à Hunterston (Ecosse) de
décharger du charbon jaune destiné à l'aciérie
RBavenscraig. La cargaison a été déchargée par des
membres de la I.S.T.G. (Iron and Steel Trades
Confeteration), le plus important des syndicats
de l'acier, hostile à la lutte des mineurs. Leur
grève visait à s'opposer au plan gouvernemental
de restructuration. Malheureusement, cette grève
vient de se terminer avec l'accord de 60% seule-
ment des ouvriers. Leurs chefs ayant négocié une
solution préjudiciable à la lutte des mineurs, ceux-
ci continuent. Le N.C.B. a essayé d'organiser un
mouvernent en vue de la reprise du travail, mais
sans succès perceptible. Un petit nombre de «jau-
nes» ont passé les piquets de grève.
La N.U.M. (National Union of Minewor-
kers) refuse de négocier avant que la N.C.B.
annule sa décision de fermer plusieurs mines, sou-
tenue en cela par Thaitcher. Il est évident qu’un
compromis ne sera pas possible. Les mineurs
d'ailleurs ne se font aucune illusion: leur lutte sera
longue et difficile. Lois de la récente conférence
de à T.U.C., ils n’ont pas appelé à la grève géné-
rale. Ils savent en effet qu'ils ne peuvent compter
sur le soutien dont ils ont besoin.
On assiste donc à l’une des grèves les plus
acharnées de Grande Bretagne, depuis la grève
générale de 1926. Deux mineurs ont été tués, six
mille arrêtés, plusieurs milliers blessés, Mais même
après sept mois de pauvreté, les mineurs consér-
vent leur courage.
Leur lutte continue uniquément grâce à
l'assistance qu'ils réçoivent des syndicats et comi-
tés de soutien. Le soutien étranger est d'ailleurs
une source financière indispensable et constitue
un encouragement pour les grévistes et leur
famille. L'assistance des anarcho-syndicalistes
(sections de PA.I.T. et. de l'O.V.B. en Hollande et
de l’I.W.W.) est particulièreient appréciée.
Il y a quatre ans, !
Pour éviter que la faim ne force les mineurs à
répréndre le travail, 11 faut continuer à les soute-
nir. Comment? En envoyant des dons financiers
(mandats internationaux) à la D, AM. (Direct
Action Movement), commission de langue fran-
çaise; en envoyant des lettres de solidarité à la
N.U.M, et à son journal «The Miner», St
James’ House, Vicar Lane. Sheffield, Grande Bre-
tagne et enfin en envoyant des badges, insignes
d'organisations, etc qui pourront servir à une lote-
rie destinée à récolter des fonds.
D.A.M.
Commission de Langue Française
147, Marlborough Ave
Hull
Grande Bretagne
LA PAGE DES ENFANTS: ROBIN DES BOIS, ZORRO, MICKEY, BABAR... ALTERNATIVE LIBERTAIRE - ASBL 22 MARS - N° 67 - Novembre 64="Pages
La en de iques ins-
que la preuve soit la,
voir avec la direction de la Société
nérale, il nous a été assuré que le
que de quatre millions — n'était pas
provisionné».
Parquet a relu ses notes avec une
feinte compassion: «La banque n'a |
reçu à cet égard aucune instruction de |
la direction centrale de Bruxelles»...
‘On n'en dira pas plus. La faillite est déclarée
séance tenante, ce qui rend le jugement «exécu-
toire sur minute». Le soir-même,
teurs Delande et Bourlée, fait main basse — mais
«en toute justice» — sur le patrimoine d'Emile |
Sablon. Un homme apparemment sans foi niscru- |
pule.
Au fait, qui est Sablon? Un chef d'entreprise |
honorable et coté: son affaire donne du travail à
quatre cents personnes. La trentaine bien faite,
plein de la volonté de se battre, le jugement du 14
septembre ne l'a pas fait plier.
l'est victime d'une injustice, de cela non seu-
lement ilest sûr, mais il peut le prouver. À son
sens, la motivation du tribunal est fondée, c'est
évident, sur deux appréciations tofalement erro- |
nées. Dans la première, il est affirmé que «depuis |
mars 71, date de l’assignation en faillite, les défen- |
à l'ONSS, |
malgré diverses promesses». Or une attestation |
délivrée par la Banque de Paris et des Pays-Bas |
deurs n'ont effectué aucun versement à
prouve exactement le contraire: 1,5 million à été
Uour lega havé never heeni in better shape.
1e
effectué? D tons *Ù
E
_ proyisionné. Là encore l'argumentation et les pié-
ces avancées par Sablon Brillent comme du vif
“argent
précise mot pour mot: «{/ n'est pas dans nos habi-
| de nos clients. La réponse ne sera donnée que lors
ation téléphonique que je viens |
chèque de rnonsieur Sablon — chè-.
Le représentant du
De toute évidence, certains magistrats ont du mal |
| bon sens ?
le juge- |
comrmussaire Jacquemin, accompagné des cura- |
nsuite Fhistoire du chèque soi-disant non
elles proviennent... de la banque elle-
même. Dans une correspondance écrite, celle-ci
tudes de donner des renseignements par téléphone
au sujet de la provision d’un chèque émis par un
de la présentation du chèque pour encaissement.
Quel aveu. Si le tribunal avait simplement agi avec
sérénité, dans sa manière de procéder, il lui aurait
suffi d'attendre — ne füt-ce que quelques heures
et l'ouverture des guichets — pour rendre son
jugement et s'apercevoir que je compte était cou-
vert. Mais non, «en rédigeant en connaissance de
cause la feuille d'audience, de la Chevalerie se jai-
sait le responsable direct d'un jugernent erroné.
Le Tribunal commetfait un faux et en a fait usage.
Alors que mon crédit n'éfait pas ébranlé». Telle
est la vérité d'Emile Sablon. |
Justice lui sera-t-elle donc rendue? Que du
contraire: elle persiste, elle s’acharne, la Justice. |
à supporter les contestations et, devant les juge-
ments portés par leurs propres pairs, leur sens de
la solidarité va littéralement se défoncer.
Suite au verdict de 71, la deuxième Chambre
du Tribunal correctionnel de Nivelles poursuit
Sablon pour «émission de chèque sans provision»
et le condamne, en 1976, à une peine de deux ans
d'emprisonnement. Un an plus tard, la Cour
d'Appel conforte la sentence: ce sera trois ans. La :
cause semble définitivement entendue quand, le 4 |
janvier suivant, vient le camouflel: la Cour de
Cassation récuse les arrêts précédents et l’on se dit
que tout va enfin se régler. Pas le moins du
monde. Sablon, réintégré dans ses droits, a natu-
rellement porté plainte contre le jugement rendu
en 1971. Or c’est contre lui, Sablon, que des pour-
suites sont à nouveau engagées du chef de «ban-
queroute frauduleuse» par la seconde Chambre |
du tribunal correctionnel de Nivelles. Celle-là
même qui l’a condamné en 76,
À ce point du dossier, on saisit mai — ou trop
bien — dans une petite juridiction où les magis- |
trats sont dmenés à se côtoyer quotidiennement,
pourquoi il faudrait à tout prix que Sablon com- |
paraisse une nouvelle fois devant dès juges qui, à |
Ânatoc.
+
ALTERNATIVE LIBERTAIRE - ASBL 22 MARS - N° 67 - Novembrebre 84 - Page 4
tout le moins, pourraient ne pas avoir le recul
indispensable pour apprécier objectivement les
choses et les faits. C'est le bon sens même, non?
Mais le bon sens, dans les prétoires, est souvent
inconvenant. Aux demandes répétées d'être jugé
devant une autre juridiction, les tribunaux vont
chaque fois répondre négativement parce que «les
circonstances invoquées ne sont pas de nafure à
Jaire présumer, dans l'opinion générale, que le
Tribunal Correctionnel se laisserait guider dans sa
décision par des raisons autres que celles de la J'us-
tice». Ce dernier acte, il faut le noter, date de
1983, soit douze années après le début de toute
l'affaire. Tant et si bien qu'on se demande effecti-
vement s’il n’est pas digne d'intérêt, pour les pro-
fanes du moins, de connaître le sentiment de cette
| fameuse «opinion générale»: célle qu'invoque si
généreusernent une certaine magistrature du siège.
En fait, dans l'arrondissement de Nivelles, ile se |
trouve personne de bonne foi pour oser soutenir |
| que le Tribunal de Commerce ne fait pas l'objet
| de critiques multiples, acerbes et concordantes.
Mais comment donner caution à cet état d'esprit
frondeur? Un coup d'éclat semble nécessaire. Il
trouvera bientôt ses artificiers: Marius Larose et
Michel Graindorge. «du sein du Tribunal de
Commerce, dénoncent les deux hommes, ur
| groupe, une bande, une clique, une mafla consti-
| tue une association de malfaiteurs qui, au prix de
combines et de magouilles, continue de détourrter
des fonds et de refuser les reddifions de comptes
réclamées par les faillis». C'est que Sablon n’est
| désormais plus seul. À ses côtés, d'autres person-
nes ont porté des accusations précises et graves.
Contre les mêmes «beaux linges»: le président
Léonard, les curateurs Bourlée, Delande et Ber-
touille.
civilement mort
Sur le haut de la sonnette, une carte de visite
collée avec du scotch: «Ligue de soutien des faillis
et de leurs créanciers... Anpuyez fort pour son-
ner».
«Ça ne sert à rien, la sonnerie ne fonctionne
| plus»: Marie-Louise Jacobs a retiré la chaîne qui
rétient la porte du magasin d'antiquités. Enfin, ce
| n'est pas exactement «le sien» parce qu'elle loge
chez son fils, «depuis l'affaire, vous comprenez».
D
| En tout cas, son fils — tout comme elle — est
amoureux fou des beaux arts et, dans les deux sal- |
les d'exposition, il faut y regarder à deux fois pour |
ne pas se cogner aux bibelots et aux meubles gom- |
nés. Marie-Louise Jacobs continue à porter beau
il est indélicat de lui.
demander son âge. Et puis, il y a un autre petit
mais, galanterie oblige,
bémol dans son histoire à elle: à l'évidence, elle ne
se retrouve pas complètement «sur la paille».
C'est-à-dire qu'on pourrait croire — parce que les
images d’'Epinal fonctionnent ainsi dans l’imagi-
naire collectif — que les faillis sont tous des pau-
vres gens. Ce n'est pas toujours vrai., En 1972,
| date de ses premiers démêlés avec les tribunaux de |
Nivelles, madame Jacobs-Veuve Demeter ne vivait | funes, La curatelle les a évacués, à la «va comme
| pas non plus dans la misère: «Mon parrimoine |
était évalué à 150 millions, mon cher monsieur».
«Cent cinquante millions» : elle prononce le chif-
fre comme si l'idéalisme de sa passion allait tran-
quillement de soi, Dans les années 60, c’est cette
même inspiration qui l'avait d’ailleurs décidée,
elle et son mari, à créer une institution à vocation
d'assistance scientifique et de mécénat pour les
artistes. Pour cette embellie, elle n'avait pas lésiné
sur les moyens: acquisitions de «la Charte de
Christophe Colomb» et de collections de mon-
naiés ancienrnés, tOufes en or,
Malgré des fortunes diverses — erreurs nota-
| riales, ventes judiciaires sur base de cahier de
charges inaccessible, folles. enchéres — c'est pour
1972 qu'elle préparait l'ouverture de son Centre
Culturel et la création du «Prix Marie-Louise
Demeter», quand tomba le bras de la Justice. Le
20 juin 1972, madame Demeter-Jacobs, non-
commerçante, ayant du crédit, n'étant pas en ces-
sation de paiement, convoquée tardivernent, sans
dossier, m conseil, absente, est déclarée en faillite
d'office à titre personnel.
«Je n'ai pas peur de le dire: quelques mafto-
sis, déguisés en magistrats, On! galvaudé mon
patrimoine. galvaudé, le mot n'est pas assez
fort, Il y avait les curateurs successifs, Olivier Ber-
touille et Philippe Cuvelier. Mais tout s'est fait
sous le contrôle et la surveillance du Tribunal de
Commerce, de Philiope Léonard».
Philippe Léonard: dans toutes les pièces
citées, il fait figure de personnage-clé. Non seule-
ment parce que la chose jugée est de son ressort
mais parce qu'en tant que magistrat, il couvre les
agissements, tous les agissements, de ses subor-
donnés. Michel Graindorge: «je ne comprends
pas le non aboutissement des plaintes et lettres
répétées, quarante-trois exactement, adressées au
Ministre 4 la Justice. Faut-il que le président
Léonard ait, pendant des années, corrompu de
manière effective l».
«Corrompu»…. est-ce que le mot n'est pas
insolent? «Je vais vous parler de tout, cher mon-
sieur, vous verrez bien par vous-même. Les mon-
naies ? C'était une collection de trois cents pièces
provenant d'une grande famille espagnole: wisi-
gothiques, doblas, ducats, Louis d'or... Sur les
conseils «avisés» de l'expert Franceschi, le cura-
teur Bertouille en était arrivé à la conclusion
qu'elles étaient principalement fausses. Bertouille
était content: il allait pouvoir me confondre.
Franceschi était heureux: en évaluant les pièces à
moins de deux millions, il allait pouvoir les rache-
ter lui-même à bas prix. Sans prévenir personne,
Bertouille a préparé la vente, confiée par ses bons
soins à l'expert Vinchon de Paris. Elle eut lieu à
Bruxelles. Regardez les coupures de presse, c’est
«Le Soir» du 22 mai 1974 les monnaies 5e sont
vendues pour. dix-huit millions. Maïs quand on
| lit, beaucoup plus tard, le livre de comptes du
| curateur, gu'apprend-on? Trois millions ont dis-
paru. On n’y trotive frace que de quinze. Deuxie-
mement, l'argent y est porté avec un retard de six
mois. Alors quela loi impose les versements à hui-
taine. Où sont passés, pendant six mois, les dix-
huit millions? Selon moi, dans une banque où le
curateur les à déposés à terme. Cette combine lui a
rapporté 900.000 francs d'intérêts».
En 1974, ladite «faillite» pourrait en fait se
clôturer sur le champ, les dix-huit millions cou-
vrant largement «le passif» estimé. Rien de tel ne
va se passer. Dix ans plus tard, les choses sont tou-
jours en état, Mais on en a profité pour brader les
livres et les vins.
«Les livres, il n'y en avait pas moins de onze
mille volumes, évalués à prês de douze millions de
je le pousse» dans des entrepôts humides. Un
désastre, Seul un tiers a pu être décemment mis en
verte au prix d’un million dérisoire. Quant aux
vins, c'est aussi scandaleux. Nous possédions
douze mille bouteilles d'une valeur de quinze mil-
lions. Ce sont les fournisseurs qui nous l'ont dit.
Un jour, nous apprenons par le journal que les
bouteilles sont mises en vente dans une localité
pratiquement inconnue, Lillois. Au moment
même où une autre vente de vin se lient à Bruxel-
les. Des amis ont télénhoné à l'expert Renault
pour savoir dans quelles conditions les enchères
allaient avoir lieu. On leur a répondu: «Vous ne
PONEZ pas assister à celte dégustation, elle est pu
A NIVELLES-CHICAGO LE GANG A LA TOGE DES JUGES
D ee ee men - + 0 Gen mn
nt pm ge ge
vée; sauf si vous obtenez l'autorisation du cura-.
ir, cela voulait dire quel la dégustation
ient s rictement ‘réservées à leurs
| les douze mille vins fins, seules
cg mille bouteilles ont été finalement vendues
_pour 850. 000 francs! Que sont devenues les sept
‘mille autres 2 «Elles étaient devenues impropres à
la co consommation», ROUS a. répondu finement Oli-
*vier Bertouille. Et ce n’est pas Jini, il y a encore la
Charte de Christophe Colomb».
La Charte, il faut le souligner, la presse en a
parlé en son temps et le second curateur, Philippe
Cuvelier, aussi. Mais lui, ce n'était pas exactement
pour.les mêmes mobiles, Cuvelier s’est en effet
déclaré publiquement «très fier de lur» re avoir
vendu le manuscrit au prix de 150. 000 francs car
«c'était un faux, pas même d'époque». Qr le
manuscrit non seulement était d'époque —l'Uni-
versité de Gand l'avait certifié dès 1967 — mais il
s'agissait, qui plus est, d’un «faux de chancelle-
rie» portant sa valeur à dix millions de dollars.
Marius Larose, conseil de madame Jacobs:
«Le manuscrit est appelé «jaux de chancellerie»
parce qu "à son retour des Amériques, l'acte offi-
ciel qui confère à Colomb avantages et titres héré-
ditaires est contresigné par d'anciens membres de
la Chancellerie qui ne sont plus en exercice, Bref.
ayant séquestré le manuscrit, Cuvelier l’a envayé à
New York où, en mars 1984, il s'est vendu pour
3.000 malheureux dollars. Il faut vous dire que
1492, ca compte pour les Américains. Chaque
année, en actabre, il y a le «Colambus Day» qui
est journée fériée. Alors, quand arrive le nouveau
Centenaire de cette date historique, vous pensez
bien qu'on assiste dans ce pays à une mobilisation
générale où fout ce qui se rapporte à cetle fas-
fueuse année prend une valeur sentimentale et
pécuniaire extraordinaire. Or, en 1992, cela fera
exactement un demni-millénaire, Question: celui
qui a acheté dl Charte aux Etats-Unis, n'était-il
pas un homme de paille ? Je ne crois pas aux coin-
cidences, oute Larosé sentencieux: dernière-
ment, Léonard, Cuvelier et Reñault se sont rendus |
à New York. Ce n'était certainement pas pour y
passer quelques jours de congés...».
,
«Association de malfrats dans la Justice de
Mivelles?», «aGraindorge accuse avec Max le
Jerailleur», «Croisade pour les faillis» :
qué dans la presse, Les accusations non plus.
Pourtant les échos venant des Palais et des Offices
ministériels en sont restés comme assourdis,
comme prisonniers du même règne: l’éternelle loi
du silence. Ou loi du Milieu, c'est selon.
«Bien sûr, les curateurs Bourlée, Cuvelier et |
Delande m'ont assiené devant le Tribunal civil,
commente Graindorge, ef ont déposé plainte con:
tre moi du chef de calomnies. Mais ces quelques
rares exceptions ne sont rien à côté du silence des
Perquets, de l’Union des magistrats, de l’Union
des juges consulaires. En temps normal, l'office
du Procureur du Roi aurait réagi le lendemain aux
accusations que je lance». C’est qu’à travers les
requêtes en suspicion légitime lancées contre le |
Fribunal de Commerce de Nivelles, il y a des hom- |
mes nornmément visés pour des pratiques contes- |
tables et la mise en cause d’une loi dont la philoso- |
plie est aujourd'hui ouvertement contestée.
La loi sur les faillites, on le sait trop peu, est
ei effet complètement désuète, date de 1851 et n’a
jamais été modifiée. C’est une règlementation de
«police commerciale» permettant à l'appareil
judiciaire de prendre toutes mesures utiles, immé-
diates et draconiennes. Dans [a pratique, elle est
terriblement opérationnelle: descente, scellés,
inventaires, le failli se retrouve «vite fait, bien |
fait» civilement mort, Bien sûr, le principe d'agir
«vitement» ne serait pas faux en soi si on n’accor- |
dait pas, dans le même temps, d'énormes pouvoirs |
aux fonctionnaires chargés des poursuites. Le
curateur, par exemple: choisi en raison de ses
compétences, il est presque toujours avocat de |
profession et désigné, à ce poste, selon le bon vou-
LES MAGISTRATS FERONT TOUTE LA LUMIERE QUOIQU'IL E EN COUTE (LE SOIR, 1310)
ces der- |
niers mois, les titres acerocheurs n'ont pas man- f
loir du Tribunal, Depuis 133 ans, il y a par consé-
Re une place légalement ouverte à tous les arbi-
aires puisqu’ aucun arrêté royal n° ‘est venu règle-
menter ni la désignation des. curateurs ni de
système de leur rémunéralion. À Nivelles, comme
Dieu le Père «fait la pluie: et le beau temps», c’est
Philippe Léonard qui fait la loi, au plein sens du
terme: en désignant systématiquement le tandem
«Delande-Bourlée» à cette lucrative mission,
Théoriquement, le curateur — en défendant
la masse des créanciers — pourrait $ opposer à la
faillite, la rapporter, au nom de leurs intérêts bien.
compris. Dans la réalité, la chose est rarissime,
| pratiques Masse oh 1 nee a ét |
ruine DE $ st en ces ones que débute sa
hésiter: il ya eu Faux, usage de faux et corruption.
Associé à une certaine madame L. dans la
gestion d’un fonds de commerce à Braine
l’'Alleud, les ennuis de Pietro De Luca avaient vite |
commencé: quatre mois seulernent après leur ins-
Imaginez un banquier qui siège au tribunal
et qui gère les saisies financières qu'il suggère
Car pour les curateurs, plus la faillite s’alanguit et
se prolonge, plus leurs honoraires s’amoncellent.
Et comme les barêmes sont laissés à la libre discré- |
tion de chaque tribunal, à Nivelles, faire partie de :
| la curatelle tient du privilège:
les émoluments y
sont calculés selon le chiffre d’affaires brut des
entreprises naufragées.
En 1981], par exemple, le juge Léonard et le
juge consulaire Rasquinet — un nom à retenir —
estiment de concert «délai des honoraires promé-
rités de Messieurs les curafeurs Bourlée et
Delande» pour la faillite de l’usine Fabelta. Le |
Tribunal va ainsi juger «juste de leur attribuer des
honoraires de 1% sur le montant du chiffre.
d'affaires brut réalisé soit... 38,6 millions».
Mars 81, même faillite : à Bruno Renault, «en |
qualité d'expert-gardien sous la surveillance des
curateurs» sont attribués parce que «c'es juste», |
6,9 millions. Deux ans plus tard, une nouvelle ral- |
longe est accordée à l’expert-gardien:.. 12,3 mil-
lions.
Dans la faillite de la S.A. Van Hoegaerden-
Boonen, le gardien Renault «promérite» 2,6 mil-
lions. Et ainsi de suite.
Mais dans l'arrondissement judiciaire de
Nivelles, il est d’autres spécialités locales encore.
Ainsi, dans chacun de ses jugements, Philippe
Léonard se trouve-t-1l secondé par le juge consu-
laire Rasquinet, «honorable» parmi les honora- |
bles s’il en est, Car Rasquinet n'est pas seulement
juge-assistant. Il n’a pas seulement la haute main
sur le Centre de Dépistage ces faillites, Il n'est pas |
seulement juge-commissaire chargé de veiller à la |
«bonne gestion» des dites faillites. Non. c’est |
| aussi un banquiér, le patron du Crédit Général de
Nivelles. «Et alors ?». Graindorge: «Et alors? La |
loi, dans ce cas-là, est formelle: tous les avoirs
recueillis par les curateurs doivent être déposés à
la Caisse de Dépôt et de Consignation, une caisse
instituée officiellement pour recevoir les verse- |
ments des sociétés faillies, Les intérêts y sont net-
tement inférieurs à ceux des grandes banques. Et
| Rasquinet là-dedans? Mais c'est justement chez
| Rasquinet, à sa banque, que tout l'argent recueilli
| par la curatelle transite longuement, sur des
dépôts à long terme aux taux beaucoup plus éle-
vés. À travers la confusion des rôles qui sont les |
siens, on peut légitimement penser que Rasquinet |
est un être intéressé au point d'en faire profiter sa | 1
| la valeur du stock de manière à obtenir une lrTé-
propre banque».
mais c’est bien sûr !
Pietro De Luca est un homme consciencieux.
Dans son attaché-case, les fardes sont méthodi-
quement classées: à chaque année, sa couleur, Et
il fait bien, car son dossier, sans être compliqué,
est un véritable coupe-gorge d'actes de justice, de
correspondances RU Me de mises en demeure,
de rappels à l’ordre.
:
honoraires obligent
tallation, son associée décide de rompre leur con- |
vention. Retirée précipitamment de l'affaire, la |
dame s'arrange alors pour obtenir, auprès du Tri- |
bunal de Commerce, l’éviction de De Luca. Cela
ne lui demandera pas beaucoup de peine. Avec
l'aval du tribunal, elle obtient en 1974 la nomina- |
tion d'un séquestre, Bruno Renault, et dépose le
bilan comme si elle était encore — et méme seule |
— propriétaire du commerce, «Eïait-ce encore un |
curieux hasard? s'interroge De Luca dix ans
après. L'avocat de madame L. éfait maître
Delande et tout me porte à croire qu'il y avait cot-
lusion évidente entre lui, l'expert, certains magis-
trats et les curaleurs»,
Dans «l'affaire de Nivelles», de Luca est en
quelque sorte le troisième homme. Son témoi-
gnage sonne, bien sûr, comme la confirmation de
tous les autres. Mais, plus encore, c'est un cas de
figure où il transparaît que des actes illégaux ont
été conduits avec l’aide d'un avocat — Willy
Delande — professant, nous le savons aussi, les
talents de curateur. Deélande, en l'espèce et pour
un temps, est redevenu le défenseur d’une tierce
pas de continuer à maintenir avec les membres de
la curatelle des affinités privilégiées, une commu-
nauté évidente d'intérêts. Justement, à propos de
curateurs, c'est d'abord Olivier Bertouille qui est
désigné et Renault, de séquestre qu'il était,
devient expert chargé de le seconder dans sa tâche
de liquidation des biens.
Mille neuf cent septante quatre: le conseil de |
De Luca écrit à l’expert Renault que son client
| détient les fonds pour couvrir le passif. Effective-
ment, De Luca a liquidé toutes les dettes dues aux
fournisseurs, mais rien n'y fait. On serait même |
tenté de dire: «Bien sûr». En 1976, le Tribunal
de Commerce donne entièrement raison à
madame L, Ainsi que le Tribunal du Travail |
appartenant au même arrondissement. À Bruxel-
les par contre, la Cour d'Appel et la Cour du Tra-
vail sollicitées sont d’un avis contraire. À chaque
fois. Qu'à cela ne tienne: quatre ans ont passé et,
au lieu de consacrer au moins une partie des recet-
| tes à l’apurement progressif de la faillite, on tente
— sous l'œil approbateur et paternel de Renault et
de Bertouille — de la rendre irréversible. D'une
part, les deux hommes ont grossi inconsidérément
médiable liquidation et le rachat à vil prix du reste
de commerce par la famille de madame L.
Ensuite, les émoluments du curateur et de son
expert continuent à s’enfler à plaisir: le 21 septem-
bre 1976, ils s’élèvent déjà à 400.000 francs. «Un
jour, raconte De Luca, le curateur esi venu me
réclamer 600.000 francs «pour couvrir le passif» et
me permettre d'accéder à mon magasin. C'était
inoui:
d RASE sans aucune contrepartie évidemment.
ALTERNATIVE LIBERTAIRE -
La Cour d'Appel me donnait le droit |
Nec De ta. & été He en faillite d'office sept
ans plus tôt mais, pour ses avocats, il n’y a pas à | | I
à leur donne
ver, Le Tri
avez déjà vu ça, Fe
bunal qui récuse ne ordonn
curateur cesse ou le ras
ferme le mepans Paul Su peut
commerce. Le coup de pu peut être
Enfin. Par voie judiciaire, autorisation. est
dée au curateur de vendre toutes les march
Je matériel et le mobilier restants. Pour D Lu
Le C rest AE Échos
66 C'est todi les p'tits
«Depuis le début, ils se sont dit, c'est un Ta-
lien, ce type. I n'y comprendra rien. Etilrepar-
tira dans son pays. Maïs moi, je me suis accroché:
Et j'ai tout compris. Les curafeurs pouvaient'arré-
ter de faillite. Tout dans tout, j'ai versé 1150/6000
| francs pour la clôturer. Maïs ils ne voulaient pas.
Delande, lPavocat de mon ancienne associée, «à
chaque fois que le curateur recevait des fonds de
ma part, intentait de nouvelles actions en justice
pour empêcher la clôture. Depuis 1979, ma faillite
court toujours. Vous savez pourguoi? Un jour,
Bourlée m'a dit, fanfaron: «MonsieurDe Luca,
les comptes sont là si vous voulez..». Et moijelui
ai répondu: «Eï le pape, il est à Rome». Pour-
quoi? Parce que si ma faillite est clôturée,«ils
| devront me rendre leur comptabilité, les cura-
teurs, et on s’apercevra qu'avec leur bénédiction"il
y a eu détournement de fonds et d'actifs. Avant
même de servir les intérêts de la famille L., "ils se
sont servis les premiers. En grossissant la valeur
des stocks, de 800.000 francs en 1974 à près dutri-
ple deux ans plus tard, leurs honoraires s'enflaient
d'autant, Sur mon affaire, ces escrocs on{ dûtous
; Free S | cher au bas mot un million...».
| personne, madame L. opposée directément à De |
| Luca. Maïs tout cela ne l'empêche évidemment
association
de malfaiteurs
Onze février 1982: les sénateurs PSE Sondag
et Dumonceau de Bergendael interpellent, le
Ministre de la Justice sur «/e caractère intempestif
et brutal» de la faillite des entreprises Henricot,
L'intervention, haute en couleur, n’est pas parti-
| culiérement tendre à l'égard du «comporterrtent
pour le moins léger du juge Léonard» : «Le Tribu-
nal de Commerce a déclaré la faillite d'office dela
| Société Henricot sans en respecter les conditions
légales. Nous demandons des précisions sur le
Jait que ce sont les mêmes curateurs qui furent
| désignés au cours des dernières années pour.les
| faillites Baladex, Fabelta, VHB.. Ÿ at-il une
| règle de sélection el de désignation des curateurs 2?
1 Le système actuel de la rémunération n'est-il pas
| malsain? Est-ce bien le rôle des curateurs de 5e
livrer à un véritable plaidoyer en faveur du main-
tien de la faillite ?».
Apparemment, la Ligue des Faillis 5e
retrouve donc en très bonne compagnie. Etl'accu-
sation, portée contre certains des membresles plus
éminents du Tribunal de Commence de Nivelles,
non dénuée de fondements. «C’est hier une as50-
ciation de malfaiteurs, au sens pénal du terme,
assure Michel Graindorge. Parce que ce sont des
| individus «ayant des liens entre eux, agissant avec
une certaine permanence dans le but d'attenter
aux personnes ef aux biens...». Seule question qui
reste pendante: et si Nivelles n’était pas le seul
arrondissement à répondre, avec son Tribunal de
Commerce, à cette perfide définition? !
Jean ne à
ASBL 22 MARS - N° 67 - Novembre 84 - Page 5
ÉTDUR ser
ENT, 4]
pa 1-4
L
0 L
VE
IL -
LE
«
Le
| Notre pays compte actuellement
| 524.000 chômeurs, c’est-à-dire 14% |
_ de la population active. Selon l’heb-
domadaire britannique «The Econo-
mist», le chômage ne fera que croï-
| tre. «The Economist» a fait réaliser
| une enquête universitaire dans six
pays européens sur l’évolution du |
_ | chômage. Il en ressort que d'ici à |
| 1990, les chômeurs représenteront |
24% de la population active dans |
notre pays. Un Belge sur quatre sera |
LIU
.
il
«,
4 et nt
”
D - et 2. est:
CEE
Originaires des quatre coins du pays,
bon nombre de chômeurs envisa-
geaient depuis quelque temps de créer
un syndicat qui leur soit propre. Ce
pas a été franchi voici quelques
semaines à Anvers au cours d’une
assemblée générale. Celle-ci a adopté
deux motions, la première reprenant
les objectifs de la nouvelle organisa-
tion, la seconde pour la suppression
du pointage journalier et contre la
création d'une carte de travail,
Le syndicat des chômeurs est une auto-
organisation qui n'a aucun lien avec des partis
politiques, des organisations d'intérêts ou des
groupes de pression. À l'origine de cette initia-
tive: la répression croissante dont sont victimes
tes sans-emploi et qui se traduit par des sacrifices
financiers, des sanctions, une discrimination
sociale généralisée. En fait, ce syndicat de chô-
meurs est plutôt un groupe d'action, un organe de
concertation entre chômeurs ou comités actifs
décidés à lutter et non pas une organisation struc-
turée. Si ses fondateurs ont opté pour le terme
«syndicat», c'est pour souligner la nécessité
urgente d'une organisation qui défende les inté-
rêts des chômeurs. Cette dernière considère en
74-84: 10 ans déjà. Et en 10 ans: plus
de 500.000 chômeurs, les revenus
sans cesse rognés, des priX qui aug-
mentent, des loyers qui augmentent,
efc. efc….
Face à la crise, la risposte est difficile, le mou-
vement ouvrier est désemparé, le discours de la
droite passe de plus en plus et la politique d’austé-
rité se met en place, s'attaquant aux acquis
sociaux conquis de haute lutte. Pourtant, à la
base, dans les groupes locaux, qu'ils soient des
groupes de chômeurs de la CSC, des groupes de
femmes, de jeunes, on s'organise, on se solidarise,
on essaie de trouver des réponses concrètes aux
problèmes quotidiens. Ainsi s'organisent des
bourses de vêtements, des formations au français,
aux mathématiques, des coopératives, des ateliers
de couture, de cuisine, mais aussi des actions
auprès des pouvoirs communaux, des actions de
sensibilisation, etc.
Tout cela porte ses fruits, concrètement, mais
si nous voulons aller plus loin, si nous voulons
vraiment une autre politique qui ne soit plus une
politique d’exclusions, de remise en cause de la
sécurité sociale, maïs une politique de formation,
de répartition du temps de travail, de respect des
droits acquis, il faut que ces expériences se coor-
donnent, se complètent, se donnent les moyens
d'agir dans un mouvement plus global. C’est
pourquoi le M.O.C. du Brabant Wallon se pro-
pose, out au long de cette année, de mener une
campagne d’informatioon et d'action contre les
exclusions et d'aboutir à l'élaboration d’un mani-
feste contre les exclusions. Ce n’est qu’ensernble
que nous y parviendrons.
comment mener
cette campagne ?
Tout d’abord, en permettant aux groupes qui
font déjà quelque chose de se rencontrer. Des
AUTERNATIVE LIBERTAIRE.- ASBL 22 MARS -
exclusions
groupes de vie féminine également. La mutualité
effet que les syndicats existants ne se préoccu-
pent pas du sort des sans-emploi. Cependant,
dans la mesure où la lutte ouvrière fait partie de
leurs préoccupations, le syndicat des chômeurs
les considère comme des alliés naturels avec les-
quels il peut engager le dialogue.
Le syndicat des chômeurs a mis en avant
quatre revendications fondamentales :
-un revenu décent pour tous les sans-emploi,
c'est-à-dire pour tous ceux qui ne vivent pas d'un
revenu professionnel. Par revenu décent, il con-
vient d'entendre un minimum de 19.000 francs
par mois;
-un emploi décent pour tous ceux qui le désirent:
-le démantèlement immédiat des services d'ins-
pection de l'ONEm. Sous aucun prétexte, des
individus ne peuvent être sanctionnés parce qu'ils
n'ont pas de travail ou parce qu'ils ne sont pas à la
recherche d'un emploi;
-l'arrêt de la discrimination sociale à l'égard des
chômeurs.
Le syndicat des chômeurs exige donc la sup-
pression immédiate du pointage quotidien.
s'oppose d'ailleurs à toute forme de contrôle, qu'il
soit hebdomadaire, mensuel ou sur appel comme
en Allemagne de l'Ouest. De plus, il exige que les
discussions relatives à la suppression du pointage
d'une part et à la création de la carte de travail
d'autre part soient totalement distinctes. Il s'élève
d'ailleurs avec fermeté contre la création de cette
carte.
Depuis deux ans, les ministres Dehaene et
Hansenne ont déclaré à plusieurs reprises que le
pointage pourrait être supprimé. Jusqu'ici cepen-
dant rien n'a été fait dans ce sens de sorte que de
telles déclarations ne peuvent être considérées
que comme de la démagogie destinée à calmer
les esprits. Le syndicat des chômeurs exige que
les ministres mettent un terme à leur petit jeu et
qu'ils prennent de réelles initiatives en la matière.
groupes de chômeurs, chômeuses s'organisent, les
organise des services aux pensionnés, des assern-
blées d’information aux malades... La J.O.C.
organise des activités pour les jeunes, les Equipes
Populaires font de la formation. Tout ce monde
travaille parfois sur une même localité sans jamais
se rencontrer. Ensemble, nous serions plus forts
pour lutter contre les exclusions.
Il faut ensuite informer, informer et encore
informer. Aujourd’hui, c’est le discours de la
droite qui passe. L'opinion publique sait-elle ce
qu'est la vie d’un chômeur ? Saït-elle que des gens
n'arrivent plus à payer leur loyer? Que certains
s'éclairent à la bougie? Comment faire compren-
dre à l'opinion que d'autres politiques sont possi-
bles? C’est une action prioritaire que nous devons
mener dans cette campagne.
il faut aussi agir ensemble, répondre à des
besoins concrets dans les localités. Nous y vivons
et nous y agissons: il y existe des besoins auxquels
personne ne répond. Des services existent dans
nos organisations, services que d’autres ne con-
naissent pas et qu'ils pourraient utiliser pour ren-
dre leur action plus efficace. Nous proposons que,
dans cette campagne, les groupes locaux se ren-
contrent et décident ensernble de mener une action
sur un problème qui n’est encore pris en charge
par personne.
Enfin, il est indispensable d’agir politique-
ment, On ne peut se contenter d'actions locales,
même si elles sont le point de départ indispensable
et le plus important de notre action, Mais répon-
dre uniquement aux besoins, c'est aussi mettre des
emplâtres sur une jambe de bois. C’est aussi per-
mettre à une société à deux vitesses de se dévelop-
per sans que cela pose trop de questions, puisque
des organisations sociales assurent des palliatifs. Il
faut donc agir politiquement, condamner ce type
de politique, proposer des alternatives globales,
agir pour faire aboutir nos revendications.
Infor-Moc
14, rue des Canonniers
1409 Nivelles
N° 67 - Novembre 84 - Page 6
Le pointage n'a d'autre ambition que celle
défendue par la Fédération des Entreprises de
Belgique, à savoir une sanction psychologique à
l'égard des chômeurs. Leur rendre la vie dure afin
d'obtenir d'eux qu'ils continuent à chercher un
emploi. I! semble bien d'ailleurs que ce soit sur-
tout la F.E.B. qui s'oppose à la suppression du
pointage. |] est indiscutable que la F.E.B. cherche
à entretenir la peur du chômage parmi les travai-
leurs: si on ne respecte pas les conditions impo-
sées par les patrons, gare! Bien entendu, une
telle politique vise à créer des forces de travail
meilleur marché.
Les chômeurs sont las des humiliations quoti-
diennes. D'autant que l’on constate que des gens
sont sanctionnés parce que les instances respon-
sables ne se préoccupent pas de leur procurer un
emploi. Le Gouvernement et l& F.E.B. font
comme si les files de chômage étaient consti-
tuées de coupables. Or, si responsabilité il y a, ce
n'est certainement pas dans le chef des chû-
meurs.
Des études ont démontré que les chômeurs
ne sont pas davantage responsables du travail au
noir qui est évalué à 15% de l'économie natio-
nale. |! s'avère que les chômeurs ne sont à l'ori-
gine que de 1% du travail presté en noir et ce
alors qu'ils sont les premiers poursuivis et sanc-
tionnés. || serait bon de consulter à ce sujet des
études qui démontrent que les employeurs, eux,
n'ont pas à craindre de sanctions pour le travail au
noir qu'ils organisent. En matière de lutte contre le
travail clandestin, le pointage quotidien est donc
totalement inefficace. De plus, il empêche bon
nombre de chômeurs de se livrer à des actions
sociales.
Il faut absolument que la discussion relative à
la création d'une carte de travail sait dissociée de
celle qui porte sur la suppression du pointage.
D'ailleurs cette carte ne servira pas à organiser un
contrôle du travail au noir comme il a été dit, parce
qu'elle offre trop de possibilités de fraude. Ce
système n'aurait aucune prise sur les 99% de tra-
vail au noir effectué par des non-chômeurs.
D'autre part, un chômeur pourrait facilement se
procurer deux cartes en prétendant qu'il a perdu
la première. |l pourrait dès lors remettre une carte
à l'ONEm s'il souhaite percevoir des indemnités
de chômage et conserver la seconde pour le con-
trôle.
Peu importe ce qui se trouve sur cette carte
(tes cartes de banque ne comportent en effet
qu'une longue série de chiffres). Ce qui importe,
ce sont les informations que l'ordinateur pourra
fournir sur ses détenteurs. Personne n'aura le
moindre contrôle sur ces informations. Il est donc
possible qu'un jour chaque employeur dispose de
son propre ordinateur qui lui permettra d'obtenir
toutes les informations possibles sur son person-
nel. Il est évident que ces renseignements
seraient utilisables en cas d'embauche ou de
grève par exemple. De plus, au stade actuel du
Jrène Grandadam
Chomage CRT
HA Diaz. Ro nr
donc sans emploi.
954.000 !
Au cours d’un symposium de la FGTB, le 20
septembre dernier à Bruxelles, le nombre de
chômeurs a été évalué comme suit:
e 524.000 chômeurs indemnisés
+150.000 sans-emploi n'ayant pas droit aux
indemnités, dont 1.000 venant de quitter
l'école
*100.000 personnes mises au travail (stagiai-
res, CST, etc...)
“120,000 personnes suspendues
* 35.000 chômeurs partiels
* 25.000 personnes n'entrant pas en ligne de
compte pour une indemnisation mais inscri-
tes à l'ONEm comme demandeurs d'emploi.
Au total: 954.000! Sur une population active
de 4 millions d’individus. Soit 24% de ch0-
meurs...
LA PAUVRETE
Moi, JAFFIPHE ve c'esT
ov/L FAUDRAIT TAXER.
CA INCTERAIT /ES GENS
À DEVENIR RICHES.
projet, chaque employeur pourrait exiger que son
employé lui remette sa Carte de travail ce qui aug-
menterait encore la pression qu'il pourrait exercer
sur lui en la retenant, en la perdant...
L'annonce de la création de cette carte de
travail a été justifiée par les ministres de l'Emploi
et du Travail Hansenne et des Affaires Sociales
De Haene par le fait qu'elle permettrait de suppri-
mer le pointage quotidien. Or voilà que le projet
de loi n° 942 relatif à la carte de travail et qui sera
prochainement soumis à l'approbation du Parle-
ment ne prévoit rien quant au pointage. Il convient
à ce sujet de préciser que la Belgique est le seul
pays de la Communauté européenne à imposer le
pointage quotidien. Au Luxembourg, le contrôle
est hebdomadaire, en Italie, aux Pays-Bas, au
Danemark, en lrlande et en Grèce, il est mensuel
tandis qu'en France et en Angleterre, il est bimen-
suel. L'alémagne de l'Ouest pratique un système
sur appel.
* » LA
la petite histoire
de la carte
Le 7 août 1982, le ministre Hansenne
annonce que le pointage journalier pourrait être
supprimé pour le 1* janvier 1983, reconnaissant
qu'il ne peut juguler le travail au noir ét qu'à cet
effet serait créée une carte de travail. À la fin de
l'année, chaque travailleur recevrait une petite
carte de travail, une sorte de carte de banque
reprenant son nom ainsi que ses numéros de
sécurité sociale et de carte d'identité. Les sans-
ernploi devraient remettre cette carte à l'ONEm
afin de percevoir des indernnités de chômage.
Cette carte faciliterait le contrôle de l'inspection
sociale sur les chantiers et dans les entreprises:
celui qui ne peut présenter sa carte est soup-
çonné de travailler en noir. Hansenne précisait
qu'en la matière un accord était intervenu au sein
du gouvernement et que les partenaires sociaux
ne s'y étaient pas opposés. Selon lui, la carte de
travail permettrait de dépister les deux mille tra-
vailleurs au noir ce qui entraînerait une économie
de O,4 milliard.
Le 14 septembre, De Standaard titre en pre-
mière page que la F.E.B. exige le maintien du
pointage journalier. Lors d’une réunion du comité
de l'ONEm, le représentant des patrons & pro-
posé que, pour des raisons psychologiques et
indépendamment de la création de la carte, le
pointage cornmunal soit maintenu. Outre ce con-
trôle, d'autres mesurés (à préciser) peuvent
encore être prises contre le travail au noir. Si on
part du principe que le pointage est gênant et
ennuyeux, a dit le porte-parole du patronnat, il a
au moins l'avantage d'inciter les chômeurs à con-
sentir des efforts personnels pour trouver du tra-
vail. Enfin, il Se déclarait convaincu que la Sup-
pression du pointage quotidien serait difficilement
acceptée par la population active.
524.000 CHOMEURS OFFICIELS x 954.000 CHOMEURS REELS
… Le8 avril 83, il semble bien que la suppres-
sion du pointage est reportée aux calendes grec-
ques. D'un article publié dans De Morgen, il res-
sort qu'une partie des 60,000 chômeurs partiels
devront également pointer tous les jours.
Dans un article du Sfandaard, le 10 avril 84,
on reparle du projet de création d'une carte de
travail. Dans le mémoire relatif à ce projet, on peut
ire notamment:que «le contrôle, ét plus spéciale-
ment le contrôle quotidien, n'offre plus de garan-
ties suffisantes et n'a pas davantage un effet
d'intimidation». L'article fait état d'une prise de
position publique du ministre Dehaene qui dit que
la création d'une carte de travail suppose la sup-
pression du pointage quotidien.
Le 8 juin 1984, De Morgen signale que le
projet de loi sur la carte de travail a été approuvé
par la commission des affaires sociales de la
Chambre. Le journal remarque que, dans ce pro-
jet, il n'est pas question de la suppression du
pointage. Les amendements dans ce sens pré-
sentés par l'opposition ont été systématiquement
rejetés par les partis de la majorité «sous la pres-
sion du ministre de la Justice Go».
Le 13 juin 1984, De Morgen toujours men-
tionne une nouvelle fois la prise de position publi-
que du ministre des’affaires sociales Dehaene qui
estime qu'«on ne doit pas attendre l'établissement
de la carte de travail pour remplacer le pointage
journalier par un contrôle hebdomadaire».
Le 28 juin 1984, le conseil communal de
Turnhout adopte une remarquable motion. À l'una-
nimité, il considère que le contrôle journalier des
chômeurs constitue une humiliation dénuée de
sens et déplore que les victimes de la crise en
soient considérées comme les boucs émissaires.
Selon le conseil communal, la suppression du
pointage quotidien pourrait entraîner une écono-
mie d'argent et de temps pour les fonctionnaires
communaux. Le contrôle ne répond pas à son but
initial, à savoir la lutte contre le travail au noir. Le
pointage quotidien rend plus difficile la recherche
d'un emploi plutôt qu'il ne la stimule. Le conseil
communal à également pris position contre la
carte de travail en raison des problèmes qu'elle
pose sur le plan de la vie privée.
Le 10 août 1984, le comité de la CSC
annonce en première page du Volksmacht que la
suppression du pointage quotidien constitue pour
alle une condition absolue à la création d'une
carte deitravail. Pour elle, la carte doit être neutre,
c'est-à-dire qu'elle ne peut mentionner aucune
donnée essentielle (nom, prénom, date de nais-
sance et numéro de registre national). La CSC se
pose d'autres questions à ce sujet; qui réglera les
différends? le travail au noir ne doit-il pas étre
combattu d'abord chez les employeurs? Selon
elle, il faut redéfinir le «travail autorisé», Les sanc-
tions doivent être identiques à l'égard des
employeurs et des travailleurs. Enfin, la carte ne
peut être confiée à l'employeur qui pourrait la per-
dre ou refuser de la restituer …
points de vue
Le 10 mai 1979, l'hebdomadaire Humo
publie une interview d'Albert Schoofs qui évoque
notamment le cas de Willy, un chômeur que le
pointage journalier cblige à se rendre tous les
jours:à Saint-Trond. Pour ce faire, il part de chez
lui à 6 heures 30 et ne rentre qu'à 18 heures 30.
«C'est dur, précisait Willy, mais je le fais, qu'il
pleuve ou qu'il vente». Et Schoofs de répondre :
«ll y a peu, les chômeurs ont été exemptés de
pointage pendant deux jours en raison du mauvais
temps, ce que je comprends, même si cette
mesure a été fort critiquée. Mais qui a dû sortir par
ce temps? Nous, les travailleurs! J'ai mis vingt
minutes à pied pour me rendré à la gare. Per-
sonne n'avait encore marché dans ma rue»...
Le 31 août 1981, De Morgen a rendu pubili-
que une note Interne de thérapie de choc» émise
par le CEPIC, centre d'étude du PSC. Dans cette
note, ilest notamment proposé d'obliger les chô-
meurs, tout comme lé personnel communal, à
ètre présent sept heures par jour ou trente-cinq
heures par semaine à la maison communale, quel-
ques contrôles devant être spérés chaque jour.
Cette mesure pourrait mener à l'exclusion du chè-
mage des travailleurs au noir et de ceux qui font
leur ménage pendant la jeurnée…
En août 1982, De Standaard publie les résul-
tats d'une enquête réalisée par les inspecteurs
sociaux qui concluent que les chômeurs ne pren-
nent à leur compte qu'un pour cent du travail au
noir. «Contrairement aux pensionnés, chômeurs
temporaires et autres travailleurs au noir, les chô-
meurs complets courent un véritable risque en
cas de contrôle éventuel parce qu'ils doivent avoir
sur eux leur carte de pointage paraphée par
l'employeur». C'est pour cette raison que les ins-
pecteurs sociaux ne croient pas à l'efficacité
d'une carte de travail qui né constitue pas le
moyen de combattre le travail illégal. Encore une
fois, elle permettrait de contrôler les chômeurs
mais pas les 99% de travail au noir effectués par
les autres.
Dans le périodique Pañnopticon (janvier
1983), un fonctionnaire de l'inspection sociale,
Guy Loenders, souligne que «pour l'employeur
qui se base sur une analyse réelle des frais et pro-
fits, la menace de pénalité en cas de travail au noir
perd tous ses effets. Les amendes minimes, com-
parées aux fortes marges bénéficiaires, ne sont
considérées que comme uné utilisation positive
du travail au noire.
Dans un texte récent de la Ligue des Droits
de l'Homme, John De Wit et Lode Van Outrive
avancent une série d'arguments visant à la SUpo-
pression du pointage journalier «qui est une
atteinte au droit au travail et donc à l'article 6 puis-
que les Belges qui ne peuvent user de ce droit
parce qu'il n'y a pas d'emplois vacants sont dou-
blement punis. Le citoyen est victime de sanc-
tions parce que l'Etat et l'initiative privée man-
quent à leurs devoirs. Le pointage ne répond plus
à son but initial, à savoir la lutte contre le travail
clandestin. Troisièmement, le pointage quotidien
rend difficile la recherche d'un emploi. En ces
temps difficiles sur le plan économique, il est
important de nouer et d'entretenir des relations
afin de savoir où existent des possibilités
d'emploi. Ce processus est rendu difficile par le
pointage journalier qui rend quasi-impossible la
prise de rendez-vous. Ensuite, ce pointage
entrave aussi toute possibilité de travail bénévole.
Comme il est possible d'obtenir une exemption de
pointage lorsqu'on s'engage volontairement dans
des organisations d'utilité poublique, le véritable
bénévolat est entravé. Ces organisations bénéfi-
cient d'une sorte de possibilité de sanction à
l'égard de leurs volontaires ce qui n'est pas très
sain (Journal de la Ligue, mai 1984).
Dans ce même texte, les deux arguments sui-
vants sont avancés contre la création de la carte
de travail:
données elle comportera ce qui implique donc
une atteinte possible à la vie privée. De plus, cette
carte ne serait en fin de compte qu'une nouvelle
édition du carnet de travail en vigueur au 19° siè-
cle et il semble inadéquat qu'un employeur soit au
courant de toutes les démarches et de toutes les
erreurs que quelqu'un peut avoir faites durant sa
carrière professionnelle.
Dans Doppers Info, le journal destiné aux chô-
meurs de la FGTB d'Anvers, quelques arguments
sont développés en juillet 84 contre la création de
la Carte de travail: le fait que le patron peut la con-
server renforce la pression patronale sur les tra-
vailleurs. Pour ce qui concerne le contenu de la
carte, il est uniquement prévu qu'elle ne pourra
contenir aucune information sur le passé profes-
sionnel et sur la situation familiale des intéres-
sés. Mais ce qui peut s’y trouver, c'est, par exem-
ple, l'appartenance à un syndicat où les sanctions
administratives prises dans le passé contre le tra-
vailleur. «Que la carte permette de mieux lutter
contre la fraude à la sécurité sociale, c'est de la
vaste blague. Il suffira en effet d'avoir «perdu» sa
carte et d'en demander une nouvelle pour être en
possession de deux cartes de travail dont l'une
servirait pour le travail et l'autre serait remise à
l'organisme de sécurité sociale», écrit Joris Derre.
«Dans le bureau de chômage de Louvain ont
été affichées cet hiver plusieurs interdictions: un
silence absolu doit régner, on ne peut pas fumer
ni entrer avec des voitures d'enfants»( De Mor-
gen, 17 juillet 1978). «Ces gens devraient, ne
füt-ce qu'une seule fois, prendre place dans la
fle. Entendre comment on nous traite, soit en
aboyant, soit en lénifiant. L'ambiance dans le local
de pointage est parfois infernale. || y a des gens
qui ont la manie d'inspirer la peur aux autres. Ces
jours-ci, ils clament que toutes les fermes
mariées vont être exclues»... (De Standaard, 25
novembre 1980). «Ce pointage journalier est une
terreur, de la dictature. Dans ce pays, vous êtes
tourmenté lorsque vous êtes chômeur. Je ne suis
pas un homme difficile, mais je n'ai pas cotisé
durant près de trente ans à la sécurité sociale
pour être traité de la sorte» (NRC-Handelsblad, 3
mars 1981). De nombreux chômeurs vivent ça
tous les jours...
Pastbus 20
3000 Leuven |
JX SUIS UN ÊTRE INUTILE.
MALBRE ŒLA, LS RER SENT
DE ME SUPPRIMER.
tout d'abord, on ne sait pas quelles |
Syndicat des Chômeurs |
charité ?
non merci
Au lieu de me donner 8.000 francs
| par mois pour élever, nourrir et
habiller mon fils d’un an, ensuite ten-
ter de survivre avec ce qui reste
(???), ne pourriez-vous pas,
messieurs-dames du C.P.A.S.,
m'aider à trouver un travail?
À plusieurs reprises j'ai trouvé un travail
mais dès que mes employeurs apprenaient qui je
suis et l'endroit où se trouve mon mari, les portes
se refermaient l’une après l’autre. Il est difficile de
cacher certaines choses lorsque, deux fois par
semaine, on va voir son mari à la visite.
Que dire aussi de l’assistante sociale avec qui
je suis obligée d’avoir un contact hebdomadaire ?
Qu'a donc fait cette personne pour avoir le titre
d’assistante sociale ?
Que penser du labyrinthe administratrif où
l’assistée sociale, telle une balle de tennis, est ren-
voyée d’un bureau à l’autre et d’un formulaire
administratif incompréhensible à un autre
n'ayant vraiment rien à envier au premier? À ceci
il faut ajouter un facteur chance: il est fréquent
que tel fonctionnaire soit en congé ou malade (et
oui! même les fonctionnaires sont «parfois»
malades).
Après quelques mois d'expérience, je me suis
rendu compte que les C.P.A.S. cherchent à garder
les gens dans l'ignorance de leurs droits et de leurs
devoirs. À ce propos, 5 ‘il est vrai que chaque
citoyen est en principe sensé connaître la loi et ses
droits, qui peut prétendre les connaître tous et à la
limite, si tel était le cas, les faire reconnaître ou
exécuter est certes encore bien moins évident dans
la vie de tous les jours. À qui s'applique donc l'ali-
néa 1 de l’article 25 de la Déclaration universelle
des Droits de l'Homme dont voici un extrait:
Toute personne a droit à un niveau de vie suffisant
pour assurer sa santé, son bien-être el ceux de sa
famille, noïamment pour l'alimentation, le loge-
ment, des soins médicaux, etc». Et l'alinéa 2 de ce
même article 25: La maternité et l'enfance ont
droit à une aide et une assistance spéciale. Tous les
enfants, qu'ils soient nés dans le mariage ou hors
mariage, jouissent de la même protection.
Il y à un siècle ou deux, on aurait écrit ces tex-
tes en latin afin d’être bien sûr que les personnes
les plus directement concernées ne puissent en
prendre connaissance, laissant ces lignes à une
élite instruite ét donc non concernée, puisque nan-
tie, Maintenant que ces textes sont disponibles
dans toutes les langues, le pouvoir agit d’une
manière plus subtile: c’est par le manque d’infor-
mation que l’on tente de garder le peuple dans
l'ignorance de ses droits.
Bien plus que de l'argent, je crois queles
C.P.A.S. devraient donner de l'information ne
serait-ce que: information sur les documents a,se
procurer ou à fournir, information sur le droit des
personnes ou le fait dé ne pas y avoir droit, infor-
mation sur les personnes à contacter et comment
les contacter, information sur les différents servi-
ces de tout ordre et de toute nature, sur leurs pos-
sibilités, leurs limites.
Il y a peu, j'ai lu un article trésintéressant sur
plusieurs expériences en. France et en Belgique
concernant des groupes autonomes autogérés.
Pourquoi d'autres C.P.A.S. ne prennent-ils pas
exemple sur ces diverses expériences qui ont'été
tentées avec succès dans de nombreux cas?Je
crois savoir pourquoi. Il faut un certain courage
politique pour prendre de telles décisions permet-
tant de rendre possibles des actions de cet ordre.
C’est probablement la peur qu’un groupe auto-
géré réussisse là où les lenteurs bureaucratiques de
l'administration ont échoué. Je pense également
que l’une des principales raisons est la/peur dela
perte du contrôle des assistés sociaux qui,deve-
nant autonomes et pouvant subvenir à leurs
besoins, s’empresseraient de casser la «tutelle»
envahissante des C.P.A.S. (quelle horreur, des
pauvres qui en ont marre d'être pauvres et.qui
veulent s’en sortir par le travail!)}.
De plus, les personnes trouvant ou retrouvant
leur autonomie financière, leur dignité aussi, sor-
tiraient du système où elles sont (entre)tenues, I}
est bien plus simple d'effectuer des contrôles sur
des personnes entièrement dépendantes, n'ayant
d’autres sources de revenus que ceux alloués par
cette «charité» organisée que sont les C:P'A:S;:
Pour un C.P.A.S., la difficulté réside aussi
dans le fait qu'il doit être très difficile, presque
inconcevable pour ces «maîtres», de faire con-
fiance à un petit groupe de personnes, de leur don-
ner là possibilité de s'épanouir bien plus digne-
ment qu’en faisant la file chaque semaine devant
un bureau d'aide sociale afin d’y recevoir de quoi
survivre encore une semaine. Cela bien sûr devant
le regard indifférent, voire moqueur, d'un person-
nel déjà dégoûté de travailler avant de commencer
son boulot.
Pour terminer, jé tiens à dire que plusieurs
personnes dans la même situation que la mienne
(forcément, il ne nous est pas encore interdit de
parler dans la file devant le bureau du C.P.A:S°)
pensent comme moi, Tous nous aimerions nous
en sortir, contrairement à ce que semblent.penser
certains de nos dirigeants politiques.
Il est très désagréable de dépendre d'un cen-
tre d'aide sociale ét de subir toutes les vexations
qu'entraîne une telle dépendance.
M.W.R.
BIENTOT DES REGIONALES À BRUXELLES ET EN WALLONIE?
ALTERNATIVE LIBERTAIRE - ASBL 22 MARS - N° 67 - Novembre 84 -Pagen
+
Mai 1989. La Belgique est toujours
gouvernée par une coalition de
droite, appuyée par un puissant
appareil répressif: la gendarmerie.
Du procès François, son état major a
tiré quelques enseignements précieux.
Certains politiciens et magistrats ont
passé un compromis avec la gendar-
merie. Pour réaliser leur grand rêve:
asseoir un régime d’extrême-droite
au moyen d'un coup d'état.
Tel est en gros le thème de «Drugs», |
un livre de Jef Geeraerts publié il y a
moins d'un an. C’est avant tout un
polar avec des ingrédients classiques :
trafic de drogue, meurtres,
enquêtes. C'est aussi un ouvrage de
réflexion. Jef Geeraerts n'est pas un
. visionnaire: cette histoire est le fruit
de son imagination. Mais on se sur-
prend à frémir. L'opération Mam-
mouth: n'a-t-on pas assisté à la répé-
fition générale de l'opération Octo-
pus au cours de laquelle une rafle est |
Le en une nuit, dans les milieux |
e gauche? Toujours est-il que nous |
avons pris une option pour la traduc- |
tion ef la publication en français de |
èe bouquin que nous espérons bien |
publier dans les moïs qui viennent.
au château du baron Jean-Philippe du Mes-
nil à 5023 Marchovelette. Le lieutenant-
général Dossogne, commandant de la gen- |
darmerie vient de jurer fidélité à l'Eglise |
catholique, au Roï des Belges et respect aux
autorités civiles, religieuses, académiques et
militaires. Dossogne est parrainé par Jean-
Paul Mertens {J.P.M. ), politicien proche du
CEPIC. La cérémonie terminée, J.P.M.
décrit à ses compagnons l'Opération Octo-
DES.
En costume civil à présent, ils étaient installés
dans des fauteuils de cuir démodés, affaissés,
devant le feu de bois qui crépitait doucement et |
buvaient un vieux Cognac de là cave du château,
aménagée au début du siècle par le grand-père du
Mesnil. J.P.M. tirait à sa «pipe de chevet», une |
Dunhill usée, le général Dossogne fumait une ciga-
retie américaine, Mesnil un havane de vingt centi-
mètres de iong. Bloy d'Hespel ne fumaïit pas, il
était assis dans sa position habituelle, regardant |
droit devant lui,
JP P.M. parlait depuis un bon moment sur un
ton posé, concis, comme s’il présidait un conseil
des commissaires. Il semblait bien connaître sa |
matière: Le général Dossogne surtout lécoutait |
avec une attention visible.
«Après unaperçu général de la situation poli-
tique et'socio-économique de notre pays qui peut
être, compte tenu du problème qui nous occupe |
aujourd'hui, qualifiée de «raisonnablement pro-
metteuse», avec votre permission, je passerai au |
stade du «pré-coupy» au cours duquel nous action- |
nerons le premier lever, à savoir la «subversion
gauchiste latente», par une provocation déguisée, |
soigneusement préparée par nos milices. En prati- |
: Réunion de lOrdre du Chêne Celtique
lun livre
'Ær
Le
nes avant la date du coup d'état, le pays sera |
secoué par des attentats et des irrégularités con- |
çus sur un mode classique. C'est-à-dire: en un |
lieu prévu sera exécuté un attentat à la bombe ou
un attentat contre un individu. Ce lieu ou ceite
personne portera une étiquette d’extréme-droite,
Ce sera par exemple le local du Front de la Jeu-
nesse, de Forces Nouvelles ou de la Croix Celti-
que, la maison d'un avocat ou d'un député de
droiîte et même une église où un palais épiscopal,
la maison de campagne d'un riche industriel, une
librairie catholique, la rédaction d'un de nos jour-
naux, etc... Les attentats seront... énergiques, il
faut donc qu'ils provaquent des dégâts matériels
importants afin que la presse et les autres médias y
accordent la plus grande attention. Une deuxième
vague d’attentats suivra, dès que l'opinion publi-
que aura été suffisamment informée. Après quoi,
des représailles bien compréhensibles seront opé-
rées par la droite contre des organisatioons d'étu-
locaux syndicaux, des librairies de gauche, des
maisons et des propriétés de personnes notoire-
ment à gauche. Naturellement, il devra s’ensuivre
des confrontations entre les milices de gauche et
de droite, avec victimes, voitures et immeubles
endommagés, interventions de la police, dirigées
contre les gauchistes qui seront bien entendu à |
Porigine de tout ce désordre. Il ne faut surtout pas |
que la situation s’apaise, bien au contraire, Une
nouvelle vague d’attentats que nous mettrons au
point contre des immeubles et des individus de
droite devra la faire évoluer jusqu'à son point de
fusion, dans une escalade jamais vue jusqu'ici. Et
si par exemple la gauche ne réagit pas d’une
manière assez résolue — nous savons, messieurs,
que la gauche n’est pas suffisamment organisée et
qu'elle n’est pas animée par la motivation néces-
saire —, des membres déguisés de milices de droite
agiront à sa place. Au bout de quélques semaines,
un climat d'angoisse et d'insécurité régnera dans
notre pays. Tous les médias et l’opinion publique
exigeront des autorités une intervention efficace
qui mette fin au malaise. Pas pour en revenir à un
status quo, oh non! Pas davantage pour qu’un |
coup d'état non sanglant renverse le gouverne- | !
ment actuel, mais pour restaurer certaines tendan-
ces, principalement le caractère unitaire de la
nation, C'est-à-dire la suppression des exécutifs et
conseils régionaux, un couvre-feu provisoire,
arrestation de certains gauchistes — car les irrégu-
larités sont nées à gauche, n'est-ce pas? — inter- |
diction de se rassembler et de manifester, censure |
des médias, etc. L'organisation stratégique et tac-
tique du coup proprement dit, je la laisse à des
spécialistes en la matière, à savoir la gendarmerie, |
l’arrnée et les différents services de renséigne-
ments. Je crois d’ailleurs savoir que, vendredi pro-
chain vraiseblablement, en séance secrète, le
comité ministériel chargé de la sécurité fixera [a |
date du coup d'état. Réunion à laquelle tu seras
invité, Alex, ceci entre parenthèses. 11 me faut |
naturellement ajouter que l'actuelle coalition gou- |
vernémentale PSC-PRL restera en place et que
seront maintenus les pouvoirs spéciaux. Et on pro- !
fitera de l’occasion pour y ajouter des arrêtés plus |
sévères en matière de subversion, de sécurité, de | |
liberté d'expression, de problèmes éthiques, de ||
droit pénal, d'immigration, de privacy, etc... La | |
gendarmerie, et ceci te concerne, cher Alex, se |
verra confier des tâches plus vastes: missions de |
surveillance, de police et de prévention, patrouil- |
- les, road blocks, razzias, actions coup de poing
avec d'éventuelles provocations qui devront
entraîner des interventions plus vigoureuses et
dont je laisse la mise en pratique sur le terrain à
l'imagination du Corps».
(.)
ALTERNATIVE LIBERTAIRE - ASBL 22 MARS - N° 67 - Novembre 84 - Page 8
naire
bonjour les dégâts!
Nous n’éprouvons aucune sympathie
pour aucun groupernent d'action
«terroriste» en Belgique actuelle-
ment, et surtout pas pour l’organisa-
tion se faisant appeler «Cellules
Communistes Cormbattantes»
Car leurs actions tendent, objectivement, au
renforcement de Fappareil répressif de l'Etat (qui
de toute évidence n'a pas besoin qu'on l’aide à se
renforcer), en donnant l’occasion à celui-ci de
laisser'croire à la nécessité de ce renforcement, et
d’en permettre ainsi la justification.
Dans le cas précis des CCC, l'idéologie
marxiste-léniniste dont elles semblent se réclamer
nous fait douter au plué haut point de leur capa-
cité à libérer quiconque de l'oppression du Capifa-
lisme et de l'Etat.
L'émergence d’un phénomène «terroriste» en
Belgique sert trop bien les intérêts de certains —
partisans d’un Etat fort, appareil d'Etat, partis
politiques, puissances étrangères diverses — pour
qu’on nesoit pas en droit de douter de la fiabilité
politique et de l’origine réelle des CCC. Sont-elles
infiltrées, manipulées, voire organisées où encore
simplement utilisées par ceux & qui servent objecti-
vement leurs actions: le résultat est le mème!
Pour nous, la lutte nécessaire contre Le capi-
talisme et l'Etat, vers l'autogestion généralisée et
la libérté passe par des moyens compatibles avec
ces fins. L'histoire nous montre que le terrorisme,
s’il peut à la rigueur être compris (pas justifié)
dans le cas limite d’une révolte qui-ne trouve pas
d’autres moyens de s'exprimer, n’a jamais, utilisé
comme mode d'action politique en soi, fait avan-
cer la cause que nous entendons défendre.
Face aux moyens de répression que possède
P'Etat, face au contrôle de la presse par divers
groupes financiers, dont le but n'est certes pas la
création ou le maintien d’une opinion libre, les
moyens des terroristes, quels qu'ils soient, seront
toujours la partie faible du rapport de forces.
L'illusion que peuvent créer quelques attentats
fera rapidement place à l'amère réalité: sur le ter-
Es + enr | rain de la violence, comme stratégie politique,
| diants gauchistes dans les universités, contre des k
l'Etat a toujours le dernier mot!
Inquisition, perquisition “5%;
et Palais de Justice
Ce qui ne veut pas dire...
Que nous soyons particulièrement altristés (ou
réjouis) par les dégâts causés aux succursales
de diverses entreprises ou partis politiques.
Que nous sommes prêts à hurler avec les loups, en
entrant dans la campagne d’hystérie anti-
terroristes {ou anti-sympathisants) qui risque |
de se jouer incessamment, Nous revendi-
quons le droit de n'être ni avec l'Etat, ni avec
les terroristes.
Que nous resterons sans protester contre les cam-
pagnes d’intimidation du type «opération
Mammouth», opération qui, à elle seule,
nous semble aussi grave pour la libertéique
ls actions des CCC.
À cet égard, l'opération Mammouth, censée
être la recherche d'un groupe terroriste, nous
apparaît comme un merveilleux prétexte à:
-une énorme opération de remise à jour des
fichiers;
-une grande manœuvre de stigmatisation: sil'on
n'a rien trouvé, on a quand même émis l'idée
qu’on aurait pu trouver, et par là devient possible
l’'amalgame d'une grande partie de la «gauche» à
d'éventuels «terroristes», selon le bon vieux prin-
cipe que l'on n’est pas perquisitionné si on n'a
rien à se reprocher.
-une répétition générale, visant à habituer l'opi-
nion publique à un Etat policier de plus en plus
omniprésent, le manque de réaction des démocra-
tes est, À ce sujet, un symptomeé alarmant.
En conséquence,
-Nous affirmons notre désaccord et notre Opposi-
tion à la pratique «terroriste» et à l’action «politi-
que» des prétendues «Cellules Communistes
Combattantes».
-Nous exprimons notre indignation face à la très
théâtrale «opération Mammouths, partie visible
de l’iceberg qu’est le renforcement de‘la répression
politique dans notre pays.
-Nous engageons les groupes libertaires, les mili-
tants et les sympathisants se réclamant du mouve-
ment libertaire à réfléchir et à ne pas se mettre en
position d'être (peu ou prou) pris dans le cercle
vicieux répression-riposte, élément fondamental
de l'engrenage ferroriste,
Cercle Bakounine ULB
Coordination Libertaire à lULB
25 octobre 84
Lu pôur vous par Christiane |
ruxelles dort encors. La
2 grande ville appartient tou-
jours aux métiers de la nuit, Un
peu plus nombreux que d'ordi-
naire en ce vendredi sur le
coup de 4 h 30. :
Rue de Louvain, la gendar-
meérié se protège de chevaux de
frise couleur rouille. Ils dissi-
mulent mal l'animation qui
règne, tant à l'intérieur qu'é
l'extérieur.
Un cortège de véhicules quit-
te les lieux, se scinde place Ma-
dou, éclate dans toutes les di-
rections. Combis blancs rayés
de rouge, Fans Roover aux vi-
tres teintées de l'Escadron spé-
cial d'intervention, voitures
hanalisées trahies par l'anten-
ne. Tout un eharroi prend la
route pour une opération
«Mammouths de grande échel-
le. La chasse aux terroristes des
«Cellules communistes combat-
tantess passe des coulisses à la
scène.
L'un des actes de cette repré-
sentation matinale se joue à
quelques pas de la large chaus-
sée de Louvain. Contrastes en-
tre les projecteurs puissants de
l'axe routier et les faibles am-
La palme pour l'opération
Mammouth à cet article
de la Libre Belgique
Engagez-vous
dans la police,
vous vivrez des aventures
fantastiques.
Plus besoin du feuilleton
d’RTL pour se donner
des frissons dans le dos.
Le journalisme
c'est quand même
un beau métier...
poules de la rue de l'Inquisi-
tion. Dans l'ombre, le long du
trottoir de pavés, un véhicule
stationne parmi d'autres. Sem-
blable à celui de Monsieur-
Tout-le-Monde… si ce n'était
sés occupants. Dans la rue de
Pavie voisine, un chien Con-
iraint sa maîtresse à la balade.
Cinq heures précises. Go l Le
claquement de quatre portières
déchire le silence. Une demi-
douzaine d'hommes courent.
Un seul a l'uniforme de la poli-
ce communale. Les autres, eru
civil, ont glissé le brassard rou-
ge frappé de la grenade de la
endarmerie sur le bras gau-
che. Plusieurs ont l'arme à la
main. Certains ont revêtu le gi-
let pare-balles. ak
Les événements se précipi-
tent. Le policier se dissimule,
accroupi, derrière un taxi
blanc à l'arrêt. Revolver au
poing. Un gendarme traverse la
rue de Pavie, prend position
sur le trottoir. Un deuxième
s'arrête face à l'immeuble por-
tant le numéro 2, au carrefour
des rues de Pavie et de l'Inqui-
sition, l'arme pointée vers Îe
deuxième étage éclairé. Derrié-
re les volets clos du rez-de-
chaussée, l'a.s.b.l. «22 marsr a
établi ses quartiers généraux et
son imprimerie bien outillée.
Les milieux de gauché la con-
naissent. Les services de sécuri-
té aussi.
D'autres gendarmes se ruent
vers la porte, reculent à plu-
sieurs épis pour prendre
force et élan. Les coups dé bu-
toir, sourds, mais secs, réveil-
lent l'habitant d'en face. I] ap-
paraît à sé fenêtre, l'ouvre pour
a refermer bien vite sur in-
jonction. «Polices. |
Six minutes seront nécessai-
res pour que la porte de bois
cède aux assauts répétés. À son
ouverture, l'un des gendarmes
en observation prend appui sur
le toit d'une voiture en station-
nement pour mieux asseoir son
arme. Les forces de l'ordre in-
vestissent l'immeuble à la vi-
tesse de l'éclair, occupent ses
étages pour les avisiters de fa-
con approfondie. Personne ne
f'habite ce matin. Un émeétteur-
récepteur crachote.
Nous n'en saurons pas plus
pour l'instant. Notre présence
vient d'être jugée suspecte.
5 h 15 : deux gendarmes s'ap-
prochant, l'un de face, l'autre
de côté : «Les mains sur la té-
te !» Fouille corporelle rapide.
- Que faites-vous icl ?
- Journaliste.
- Yous ne nous direz évidem-
mént pas comment vous avez
été renselgné ?
- Votre carte de presse |
Le stylo à bille court sur un
morceau de papier. Les papiers
d'identité sont ainsi recopiés. À
la fenêtre du deuxième étage,
deux yeux observent. Quelques
instants de répit puis un appel :
Monsieur!» Suit une invits-
tion : «Puisque vous voulez être
informé, on vous emmène au
Palais de Justice où vous saurez
tout...»
Sans d'autres commentaires,
une voiture pérNGUteS nous
emmène vers la place Poelaert,
grillant au passage des signali-
sations lurnineusés au rouge.
Un officler de police quitte son
bureau au premier étage de
l'annexe. L'Éhange de propos
sera bref, malë des plus cour-
tois:
- Je vous demanderai de ne
plus retourner dans le quartier.
Pour des raisons de sécurité. On
ne sait jamais... des coups de
feu.
De la rue de l'Inquisition,
nous ne voyons plus qu'une,
porte fermée, celle du numéro
2, Deux policiers bruxellois
aussi, en patrouille qui se
volent agresser verbalement
par un voisin : «Vous n'êtes qué
des veaux...»
Ph. V.
NI GOL NI LES CCC
Depuis quelques semaines le souffle des explosions
balaie la vie politique belge jusque dans ses racines.
Des questions sont sur toutes les bouches : pourquoi
le terrorisme en Belgique, que veulent les CCC?
Réfléchissons ensemble et avançons les éléments
d’une analyse qui, sans avoir la prétention d’être
complète, a le mérite d'exister. En vrac.
réfléchi ÎSS
Compromis à la belge, Il est de couture de
dire que la Belgique est un pays calme où il
ne se passe jamais rien. Que c’est le pays de
la paix sociale, de la concertation, de la
négociation, de la discussion. Rappelons
quand même que ce pays a été dans les trente
cinq dernières années deux fois au bord de la
guerre. civile. D'abord avec laffaire royale
en 1950 où des forces qu’on ne peut pas qua-
lifier de marginales étaient prêtes, à la faveur
de la révolte sociale, à instaurer une républi-
que socialiste wallonne, Ensuite, durant les
événements de 1960-61 où l’on a vu un chimat
pré-insurrectionnel se développer lors de la
grève générale contre la Loi Unique. Belgi-
que, pays de dialogue, hélas oui, sauf quand
en face, du côté du pouvoir, on se fout de la
gueule du populo.
Intolérance., C'est le credo du libéralisme
made-in-Jean Gol que de refuser de dialo-
guer avec les gueux, surtout quand ceux-ci
s'expriment directement par des grèves ou
des manifestations. Cette attitude de mépris
pour toute opposition est constitutive du
phénomène terroriste. Jean Gol méprise tout
qui refuse son credo à la libre entreprise et à
la loi de la jungle. Il tend à mettre tout oppo-
sant en accusation. Il chasse l’opposition de
l’espace «démocratique», il la criminalise et
l’oblige par son intransigeance à recourir à
des moyens extra-légaux pour se faire enten-
dre,
Deux causes parmi d’autres. Il est, à notre
avis, deux causes fondamentales à l’émer-
gence du terrorisme en Belgique. D'abord le
fait de vivre dans une situation politique blo-
quée face à un pouvoir qui refuse d’entendre
Le parti communiste vous l'avait dit:
les CCC c'est les services secrets amé-
ricains. Nous en apportons la preuve
avec ces blasons. Fais-moi peur
Johnny, Johnny, Johnny ka ha ha!
Recon Team Alabama (variation)
CCC (Command and Control
Central)
UNE REPETITION GENERALE ?
les voix de l'opposition même si celle-ci,
comme c’est le cas de l’opposition anti-
missiles, rassemble quatre cent mille person-
nes dans la rue et est aujourd’hui majoritaire
sur ce sujet dans les sondages. Société blo-
quée, tu parles, on s’en fout, tu tires, on
t’écoute. C’est le texte que nous avions placé
il y a quatre ans sur l’affiche expliquant le
geste des trois de Vielsalm devant la RTBF.
Elle est plus que jamais d’actualité face à un
gouvernement qui refuse d'entendre nos cris,
d'écouter nos protestations et nos proposi-
tions. Ensuite, regardons dans notre propre
jardin et trouvons y cet autre ferment du ter-
rorisme qu'est le sentiment d’impuissance
qui nous submerge depuis quelques années.
Si l’on peut vivre face à un pouvoir autori-
taire, en étant animé du souffle d’un com-
bat, cela devient impossible quand on est
privé de toute perspective de révolte positive,
de la formulation d’une alternative et de vic-
toires même limitées sur ce pouvoir, Ce
sont nos défaites, toutes nos défaites qui ont
fait le lit des CCC. C’est la faillite d’une
extrême-gauche qui a démontré son incapa-
cité à construire des situations de victoire qui
ont poussé certains, et peut-on les blâmer, à
utiliser d'autres moyens. Dans notre édito-
rial, nous avons expliqué pourquoi nous
sommes en complet désaccord avec ces
méthodes, mais que cela ne nous empêche
pas de comprendre que certains militants ne
croient plus aux manifestations et aux tracts
des gauchistes pour combattre le régime
autoritaire qui s'affirme. Face à Gol, qui
doute encore, après les quatre cent mille anti-
missiles du 25 octobre 83 que le jeu démocra-
tique n’est qu’un jeu de dupes.
Command and Control Central
Recon Team CCC.
|
OMS...
Contradictoire. Et payons-nous le luxe et
lhonnêéteté intellectuelle d'être contradictoi-
res et de présenter à votre réflexion le con-
traire de ce que nous venons de dire. Un
autre scénario imaginerait que les CCC ne
seraient qu’un groupe provocateur, infiltré
et manipulé par une fraction de l’Etat qui ne
parvient plus à imposer ses solutions en
matière de défense nationale. Scénario
parano qui verrait derrière l’étoile rouge des
CCC une fraction de l’Etat qui obligerait
l’opinion publique à quitter les eaux anti-
missiles et pacifistes pour rejoindre son sein
sécurisant face à «la barbarie terroriste».
Cette analyse a le défaut d’envisager la réa-
lité sous un angle paranoïaque, privant de la
moindre initiative politique ceux qui peut-
être sont effectivement des adversaires de
l'Etat. Elle ne peut en tout cas pas être exclue
d'office des éléments d’analyse. Ceci relève
de votre liberté.
Mammouth. 19 octobre, 5 heures du matin,
De cing cents à mille policiers participent à la
plus grande rafle jamais organisée en Belgi-
que depuis la guerre. Relevons pour com-
meéncer que l'opération Mammouth ne
s'appuie en rien sur des faits issus d’une
enquête policière. C’est une opération politi-
que, une chasse aux sorcières. Les cent-vingt
perquisitionnés n’ont pas été choisis en fonc-
tion d'éléments de l’enquete sur les CCC,
mais bien sur base des opinions présumées
des personnes visées. Il est acquis
aujourd’hui que les polices ont dressé une
liste de cent-cinquante noms soupçonnés par
elles «d’avoir recours à un moment où à un
autre au terrorisme». De même, une autre
liste de mille cinq cents noms cette fois a été
constituée. Elle rassemblerait tous ceux qui,
selon les polices, seraient prêts à porter aide
aux terroristes.
Ces listes noires où l’on trouve tout le monde
et personne qui a un passé politique, sont
d'autant plus dangereuses, et l’opération
Mammouth est là pour nous le prouver, que
parfois elles regroupent des gens qui n’ont
jamais eu ou n’ont plus aucune accointance
même avec les milieux dits «subversifs».
Imaginez demain ces listes circulant, et vous
comprendrez toutes les potentialités et tous
les dangers d’une chasse aux sorciéres. A
quand un Mac Carthy au gouvernement... À
quand les interdictions professionnelles
(Berufsverbot) telles qu’on les a connues en
Allemagne de l'Ouest durant les années sep-
tante.
La peur, Pour arriver à ses fins, c’est-à-dire
pour recréer un consensus social autour et
pour la défense de l’État, du Gouvernement,
Jean Gol se doit de jouer avec le feu.
Lorsqu'il apparaît à la télévision, qu'il prend
la parole à la radio, c’est d’abord la peur
qu’il crée pour se présenter ensuite comme le
seul homme fort capable de défendre la
société. [1 est incontestable que les attentats
des CCC, du moins les trois premiers contre
des firmes d'armement, n’ont pas créé de
traumatismes dans la population, bien plus,
c'est parfois la sympathie qui accompagnait
les actions des CCC contre les industries de
mort. C'est le Pouvoir qui se doit de susciter
et d'entretenir la panique pour nous obliger à
rejoindre son bras protecteur. Quand on
parle de la sauvegarde de l’ordre public, on
oublie la manipulation de l’index, le chô-
mage, les inégalités sociales quis S accentuent.
LE
Utilisation. Que l’opération Mammouth ait 1 ki
également été utilisée par les polices Pour
remettre à jour leurs fichiers sur ce que mon-
sieur Gol appelle avec une pointe de crachat
dans la bouche «la fourmillère de gauche»,
aujourd’hui personne n'en doute, C’est là
sans doute qu’on perçoit la dimension dialec-
tique du terrorisme. En croyant affaibli
PEtat par la lutte armée, il le renforce en lui
donnant prétexte de quadriller tous. les
milieux subversifs. Et quand on s'appelle
Gol et qu’on voit le KGB à tous les’coins\de
rues de la Porte de Namur, ça donne des per-
quisitions qui visent des associations de ten-
dances aussi différentes qu’anarchistes,
socialistes, chrétiennes, pacifistes, commu-
nistes, tiers-mondistes, écologistes," Atout
le moins un panel de mouvements. où vous et
moi sommes sûrs de nous retrouver.
Maïs où sont les copains ? Et malgré ce ratis-
sage large on ne peut être que frappé de stu-
péfaction en voyant la pratique inexistence
des réactions face à la rafle de Gol: Dans
n’importe quel scénario de politique-fiction
des années septante, on n’aurait imaginé une
telle rafale de perquisqitions sans une explo-
sion de réprobation, Eh bien non, en 1984,
Gol lache ses flics comme on lache des fauves
et personne ne bouge. Quelques critiques
modérées excusant presque l’opération
Mammouth nous arrivent du parti socialiste.
Dans les milieux syndicaux, on en est pres-
que à croire que l’opération Mammouth/n°a
jamais existé, Faut-il que la dégénérescence
de l’opposition soit telle que, cadenassée par
la peur du terrorisme, elle se sente obligée de
soutenir une logique porteuse de dangers
pour la «démocratie» elle-même; "par la
banalisation de procédures exceptionnelles:
Faudra-t-il comme en Italie que des militants
soient emprisonnés sans jugement pendant
douze ans, comme le prévoient les lois
d'exception anti-terroristes, pOur que nos
bons esprits démocratiques et de gauche
s'élèvent contre une offensive autoritaire de
l'Etat qui, aujourd’hui, touche sa périphérie
avant de toucher la gauche bien-pensante
demain. |
Répétition générale. Et soyons conscients de
ce que l'opération Mammouth, du fait même
de ses limites et de ses imperfections, n’est
qu’une répétition générale d’une rafle qui
cette fois-ci ne se contenfera plus de perquisi-
tionner, mais placera sous les verrous"des
prisons les militants soupçonnés. Ceux qui
me taxeraient de paranoïa n’ont qu'à se ren-
seigner sur les rafles organisées par. l'Etat
aux moments agités de notre histoire (affaire
royale, 60-61) dans les milieux communistes
de l’époque. Aujourd’hui il ne s’agit encore
(et heureusement, pourvu que ça dure) que
de violences contre des biens. Demain, si par
malheur il s'agissait de persotines, soyez sûrs”
que le mammouth ne se contentera pas de
vous réveiller avec une mitraillette sur l’esto-
mac, mais vous mènera passer la nuit sui-
vante en cellule. Gageons (l'espoir fait vivre)
qu’à ce moment au moïns, les bons démocra-
tes de gauche réagiront avec la plus extrême
vigueur, refusant le piège infernal dans
lequel ils sont tombés cette fois-ci: «être con-
tre l’abus de pouvoir de l'Etat, c’est être
pour le terrorisme». Notre position doit être
nette: refuser l’installation d’un état fort et
autoritaire venant directement de l’intérieur
même des ministères ou par le biais du terro-
risme. Notre choix c'est la liberté. Et notam-
ment la liberté de se gouverner soi-même
sans Gol, ni les CCC.
Le Collectif du 22 Mars
ALTERNATIVE LIBERTAIRE - ASBL 22 MARS - N° 67 - Novembre 84 "Page 9
limitées, comme le montre
e la fin du 19° siècle.
Article 10 de la Constitutiort
«Le domicile est inviolable: aucune visite domici-
liaire ne peut avoir lieu que dans les cas prévus par
la loi et dans la forme qu'elle prescrit».
Par exception à ce principe, le Code d'Instruction
Criminelle permet au Juge d’Instruction d'ordon-
ner des perquisitions :
Article 87:
«Le Juge d'instruction se fransportera, s'il en est
requis et pourra même se transporter d'office dans
le domicile de l’inculpé pour y faire la perquisition
des papiers, effets et généralement de tous les
objets qui seront jugés utiles à la manifesfation-de
la vérité».
Article 88:
«Le Juge d'Instruction pourra pareillement se
transportér dans les autres lieux où il présumerait
qu'on aurait caché les objets dont il est parlé à |
Particle présent».
«ll est certain que la Constitution ayant fait de |
Finviolabilité du domicile une liberté garantie aux |
citoyens, les cas de violation de cette liberté doi- |
vent être commandés par les nécessités absolues de |
l'instruction et de la découverte de la vérité» (Pan- |
dectés}).
En d'autres termes, pour ordonner une pérquisi- |
tion, le magistrat instructeur doit avoir des indices
graves, selon lesquels telle personne est suspecte
d’avoir participé à l’infraction ou de posséder (de
cacher!) des pièces à conviction.
«Toutes les maisons ne sont pas ouvertes à la Jus- |
lice, mais seulement celles qui sont frappées de
suspicion» (M. Faustin Helie, Traité de l'Instruc-
tion Criminelle).
De cela, il convient de déduire que pour ordonner
une perquisition, il faut d’abord une personne
soupconnée d’avoir commis un crime ou un délit.
Car, aux veux de la loi, la pérquisition ne vise pas
à rechercher des infractions: elle constitue une
mesure d'instruction-et est réservée à la recherche
de preuves, Elle n’a pas pour but de découvrir des
faits, mais d'acquérir des preuves d’une culpabi-
lité présumée. Les auteurs contemporains du
Code d'Instruction Criminelle considéraient
comme illégal de requérir d’une façon vague et
générale à charge d’inconnus.
L Le Conseil de Fédération du Mouvé-
ment Ecolo, à l'occasion de son
assemblée mensuelle à Namur, a exa-
miné la situation politique créée par
| les attentats des Cellules Cormmunis-
| {es Combaftantes et par l'opération
Mammouth, rnenée par d’importan-
tes forces de police pour lutter contre
les activités terroristes de ce groupe.
Ecolo estime qu'il faut mener une lutte active
contre les groupes économiques et politiques qui,
comme les institutions visées par les attentats,
contribuent effectivement à la course suicidaire
aux armements et alimentent les marchés de la
mort de par le monde, Mais Ecolo condamne clai-
rement et vigoureusement les moyens violents uti-
lisés par les groupes extrémistes, de quelque bord
qu'ils soient: la violence n'engendré jamais la
démocratie.
| Par ailleurs, les procédés utilisés par les
enquêteurs dans le cadre de l'opération Mam-
mouth pour trouver une piste pérmettant d'arrêter
les auteurs des attentats sont inappropriés et met-
tent en danger notre démocratie en banalisant
l'usage de procédures exceptionnelles.
ALRERNATIVE LIBERTAIRE - ASBL 22 MARS - N° 67 - Novembre 84 - Page 10
ecrase la démocratie
NS SP UD PRE me cap me DT Pme ere
—
es orwell, 1984
bombes et les fusées qui tombaient chaque
jour sur Londres étaient lancées par le gou-
vernement lui-même, «juste pour main'enir
la population dans la terreur». C'était une
idée à laquelle il n'avait litféralement jamais
pensé...».
Comment justifier dès lors légalernent 120 perqui-
sitions effectuées auprès de «suspects» qui
n'avaient aucun lien entre eux; comment justifier
ce déploiement de forces, le réveil à $ heures du
matin de personnes braquées par des revolvers et
des mitraillettes et qui n'ont parfois été emmenées
que pour être photographiées, même pas interro-
gées! Comment justifier la saisie de livres vendus
dans toutes les librairies et dont les liens avec un
attentat sont pour le moins suprenants.
Que le Ministre de ia Justice ait cru devoir faire
une série de déclarations paraît peu compatible
avec la sérénité et la mesure qui doivent présider,.à
une instruction. La teneur dè ses déclarations est
moins compatiblé encore avec les exigences de la
loi en matière d'instruction pénale et de perquisi-
tions: il n’est pas question d'indices sérieux, de
culpabilité ou de recel de pièces à conviction, mais
de déclarations politiques.
Le citoyen Gol a le droit d’estimer inacceptable
que d’aucuns aient des vues politiques divergentes
des siennes, le Ministre de la Justice ne peut utili-
ser les institutions judiciaires pour criminaliser
une opposition,
Collectif d'Avocats
Bruxelles
jean gol et cicéron
| Longtemps après l'avènement de la société
| du spectacle, la religion, qui a toujours été un
prototype d'idéologie fonctionnelle pour
tous les anciens pouvoirs, avail inventé le
complet du Royaume de. Dieu. La religion ne |
| faisait que projeter dans le monde métaphy- |
sique la simple nécessité de fout pouvoir réel |
et concret. Ainsi, Cicéron avait besoin
d'ampliier le risque que corstituait Catilina,
pour magnifier sa propre gloire de Sauveur de
la patrie et justifier la multiplication de ses
| propres abus. Pour tout pouvoir, la seule
| catastrophe c'est d’être balayé par l’histoire.
| Une fois affaibli ef sentant l'imminence de sa
| Jin, il a toujours tenté de se consolider en fer-
| grant de mener une lutte inégale contre un
adversaire commode parce que non fonda-
| menfaiement dangereux. L'histôtre est rem-
| plie de semblables exemples.
Ecolo constate ampleur des moyens.utilisés
par les forces de l’ordre et ne peut s'empêcher de
rappeler que, lors de l'incendie criminel de l'heb-
domadaire Pour, les recherches effectuées n'ont |
été entamées que pour le principe et ont été rapi-
dement abandonnées.
De plus, le Parquet a choisi comme cibles les
milieux d’extrême-gauche, mais également des
groupes non-violents et tiers-mondistes, soi-disant
parce que la piste «menaït à des milieux proches
de l’extrême-gauche dévoyée» comme le préten-
dait le Ministre de la Justice à la RTBF. À l'évi-
dence, les rmiliéux concérnés devaient être en prio-
rité ceux qui se revendiquent de la violence politi-
que, aussi bien à l'extrême-droîte qu’à l’extrême-
gauche. Car le Ministre a reconnu lui-même que
certains attentats revendiqués par les uns avaient
été commis en réalité par les autres. L'opération a,
en tous cas, permis à la police judiciaire d'amélio-
rer son état des lieux des mouvements progressis- |
tes à Bruxelles et ailleurs, puisque des fichiers ont |
été emportés.
Enfin, la perquisition dans le bureau du séna-
teur Yves de Wasseige constitue manifestement un
abus, assimilable à une violation de l’immunité |
parlementaire.
Boujevard Charlemagne, 38
1040 Bruxelles |
diable, premier et suprême agent provoca- | |
leur, qui devait assurer le triomphe le plus | | 4% ee 2 DE AR
. pions ét avance ses cartes. [1 y a là une opération
| Reichstag mais c'est le même scénario, en plus
| mesquin. On accuse et désarme la gauche pendant
1 que les nazis impunis, protégés, s'organisent, rem-
| plissent leurs arsenaux, préparent leurs prochains
| dynamitages.
| Pabri d’un gouvernement lâche ou miné. Exigez
Qui peut agir sous
Est-ce l’action immature de jeunes
angoissés par l'avenir bouché, le vide
absolu, la nuit noire que leur offre le
régime? Est-ce l’œuvre de despera-
dos, de certains éléments d’une gau-
che délirante aigris et déboussolés qui
passent du piétinement stérile à la
course à l’abîme? Mais ne s'agit-il
pas de bien autre chose? N'est-il pas |
remarquable que ces attentats tom-
bent à pic pour renforcer les projets |
de certains protagonistes d’une droite |
musclée ? Si bien qu'on pourrait se
trouver devant
provocation-intoxicafion.
En tout cas, le mammaouth Jean Gol n'a pas
perdu son temps. Doté de sa nouvelle grande |
police anti-terroriste, il a déclenché une opération
qu'il a voulue spectaculaire. Interpellations, arres-
tations, saisies d'archives, de fichiers, de machines
à écrire, de ronéos, d'appareils offset, de carnets.
d'adresses, perquisitions d'ordres divers, écoutes
téléphoniques se sont multipliées en direction de |
locaux politiques, d'imprimeries, de militants
pacifistes, de dirigeants du mouvement wallon, de
tiers-mondistes, de défenseurs des droits de |
l'homme, etc, La flicaille était déchaînée, témoi- |
gnant d’ailleurs d'un mépris total de la légalité |
démocratique à tel point qu’elle est même allée, en
s'en prenant au sénateur Yves de Wasseige,
jusqu’à violer délibérément l'immunité parlemen- |
taire. Rarement la démesure policière a atteint un
tel degré dans notre pays.
Opération d'intimidation visant à créer un |
climat de peur et d’instabilité. Opération qui pro-
longe les projets visant à museler les syndicats, la
R.T.B.F., les jeunes, à imposer un enseignement
aux bottes de la droite, à développer une politique
raciste et xénophobe, à instaurer urie législation
répressive, à institutionnaliser les pouvoirs spé-
ciaux. Tout cela s'enchaîne. La droite place ses
intimidation politique
Le secrétariat fédéral du Mouvement Ecolo, réuni à
Liège, marque sa profonde indignation quant à l’intimi-
dation politique manifeste dont s’est rendu coupable le
Parquet en violant le domicile privé du député Olivier
Deleuze. Celui-ci s'apprétait, le jour-même, à interroger
le Ministre de la Justice en séance publique de la Cham-
bre à propos précisément de l'opération Mammouth.
l'affaiblissement du pouvoir législatif par rappoprt aux
pouvoirs exécutif et judiciaire, avec tout ce que cela
comporte de meriaces pour la démocratie parlementaire.
Des pouvoirs spéciaux au mépris de l’iramunité parle-
mentairé, lé pas serait-il franchi?
Ecolo attend que le Parlement, à l'unanimité des for-
ces politiques qui y sont représentées, réAgissé vigOureu-
sement pour défendre les prérogatives démocratiques de
chacun de ses membres.
coup de pub
contre. .
coup de gène
Alors? On se fait sa petite publicité gratis sur
les ondes de la Reuteubeu ? T1 fallait bien le coup
de poing et de «génie» de Monsieur Gel pour qu’il
soit question de l'imprimerie du 22 Mars au jour-
ual parlé.
Tout ceci n'a pas l’ampleur de l'incendie du
Dénoncez! Dénencez la levée du nazisme à
une surveillance permanente de vos locaux, que Le
massacre de Pour ne se répète pas!
El paraît qu'on a pris vôtre fichier. C'est aussi |
pôur vous donner mes nom et adresse d’abonnée |
que je vous écrit. Mais surtout pour vous dire que
les gens de chéz nous ne sont pas assez miais pour
croire au «terrorisme de gauche» dans notre pays |
Front de la Jeunesse, VMO et |
| consorts) et pour vous affirmer mon soutien,
| même si je ne suis pas toujours d'accord avec
| votre manière de voir. Pourvu que Orwell se soit
| | trompé et que 1984 ne soit pas le sien.
Ecolo | pé et que 1984 ne soit pa
(terrorisme ici =
Amicalement, bien fermernent.
Marie-Paule Léonard
une double|
UNE LUTTÉ INEGALE CONTRE UN ADVERSAIRE COMMODE
L ele CCC Le | menée systématiquement. Les démocrates n'ont
€ sigle « \ “# |
| mais de prendre en main, et très sérieusement, la
pas à courber la tête. Il ne s’agit pas de pleurnicher
défense de la démocratie et des droits de l'homme.
Sans faiblesse ni complaisance.
PCMLB:-Info
B.P. 194
1060 Bruxelles
le terrorisme d’état
D'abord et avant tout, rappelons que la
bourgeoisie a installé son pouvair en France
en 1793 grâce à la Terreur, Tous les éfats ont
toujours été terroristes, mais ils l'ont été plus |
violemment à leur naissance et à l'imminence
de leur mort. Et ceux qui, ajourd'hui, soit
par désespoir, soit parce qu'ils sont victimes |
de. la propagande que le régime faif en faveur
du terrorisme en le présentant comme le nec
plus ultra de la subversion, en essayant même
quelquefois de le pratiquer, ceux-là ne savent
pas qu'ils ne font que concurrencer l'Etat sur
son propre terrain. [is ne Saverit pas que sur
le terrain qu'il s'est lui-même construit,
lPEtat est toujours le plus fort, qu'il aura tou-
| jours le dernier mot, Et tout ce qui ne détruit
| pas l'emprise de l'Etaï sur les ponulations, le
| renforce. Le. renforcement inoul de ous les
| pouvoirs étatiques de contrôle dans les pays
touchés ces dernières années est là pour nous
rappeler que sous prétexte de lutte contre le
terrorisme spectaculaire, l'Etat profite de
celle conjonciure pour lancer une vaste
offensive contre tous les milieux les plus radi-
caux et les plus avancés.
nous n'avons
pas choisi
Chères Amies,
Chers Amis,
Malgré les risques — aussi bien des contrôles
téléphoniques que postaux — après les événe-
ments récents, je ne peux m'empécher de vous
témoigner ma profonde sympathie et mon soutien
le plus absolu.
Si des opérations policières sont parfois justi-
fiées, je n'aperçois pas la nécessité réelle d'agir
ainsi vis-à-vis du 22 Mars, de la Maison de l’Armé-
$ | rique Latine et de son mouvement, et moins
Pour Etoio, cetté bavure scandaleuse est le reflet de | q Ë
encore vis-à-vis d’autres organisations d'aide au
Tiers Monde.
Le fond de ma pensée, je ne l’écrirai pas, par
précaution. Mais je crois quand-même que —
même si certaines divergences existent parfois
entre nous — Île temps est venu de crier que nous
| n'avons pas choisi Gol, pas plus que Pinochet ni
Mobutu et autres
&«devrions» respecter.
À toutes et à tous, je renouvelle mon amitié,
mon soutien et mon désir — si cela peut être utile
P£rsONnages QUE TOUS
| — de vous être utile moi-même.
Claude
collet
anti-mammouth
Sud-Luxembourg, fin octobre 84
Les gentils petits cochons d'Ardennes
et Gaume (qui n’ont pas été agressés
par le gros mammouth préhistori-
que), se proclament solidaires des
|«abusés», victimes des attaques du
| monstre velu.
| Ils étudient, avec le concours des bra-
| conniers, un collet anti-mammouth.
Signé:
«R», Journal des Travailleurs
du Sud-Luxembourg
71, rue d'Hoffschmidt
6720 Habay-la-Neuve
Depuis vendredi passé, les lec-|
teurs d’Alternative Libertaire ont |
en fout Cas.une certitude: c'est |
qu'ils sont tous microfiche-B-és |
maintenant. Votre lecteur,
Patrick V.
Il est d’ailleurs notoire que
le rôl e Ne BP
4 éte
«soëialisme » » ou. ou chinois, ou cube ds
en sont réduits à répandre sans retenue leurs
mensonges sur la démocratie bourgeoise, pour la
sauvegarde de laquelle ils acceptent volontiers tous
les sacrifices, et même de s’en passer. Ainsi, c’est
sans protestation, et en hommage au fétiche des
garanties démocratiques, qu'est passé le décret
gouvernemental sur la garde à vue, sur l’augmenta-
tion des peines pour. les délits de terrorisme, et sur
la «détention de documents subversifs » *, tandis
que les nouvelles dispositions sur la détention
préventive permettent désormais de garder un
accusé en prison pendant douze ans sans aucun
procès. Dorénavant, la magistrature italienne, dont
la courtisanerie n’a jamais été un secret d’Etat et
n'a plus à être prouvée, ne devra même plus se
donner la peine de démontrer la culpabilité de qui
que ce soiït pour le condamner de facto à 12 ans, et
cela pour commencer : à partir de maintenant
l'accusation coïncide avec la condamnation, et la
fiction de la légalité démocratique en Italie est
terminée même en tant que fiction. L'Italie est
une république démocratique fondée sur l'exploita-
tion du travail et sur les lettres de cachet.
Distribué par Lé fin mot de l'histoire, BPn°274 « 75866 Paris 18
Quand l'arbitraire ne craint plus d’apparaître
pour ce qu'il a toujours été, quand être coupable ou
innocent n’a plus aucune importance puisque la {|
condamnation devient la seule certitude, celui qui
combat lParbitraire n'a plus à craindre d’être
coupable : condamné pour condamné, autant l’être
pour un crime honorable, On ne peut se laisser
gouverner innocemment. Et, en attendant de
détruire toutes les prisons, donnons à l’ennemi de
bonnes raïsons de les remplir, non certes en
tombant dans le piège bien monté du terrorisme,
mais bien plutôt en combattant à visage découvert
et de toutes les manières tous ceux qui aujourd’hui
s’en servent et le pratiquent, ministres, politiciens,
patrons et policiers.
De nos jours, le jésuitisme intellectuel appelle
« démocratie » l'arbitraire, « liberté » la liberté de
mentir, ét « témoignage » la délation systématique
et obligatoire: «Sic delatores, genus hominum
publico: exitio repertum et he poenis quidem
umquam sSalis coercitum, per praemia elicie-
bantur »”, disait Tacite, qui cependant, contraire-
ment à nos intellectuels, avouait préférer les
dangers. de la liberté à la quiétude de l'esclavage.
Les mêmes intellectuels, après avoir débattu du
courage en long et en large, ont fiérement conclu
qu'il faut avoir aujourd'hui le courage d’être lâche.
Le raisonnement le plus en vogue ces temps-ci est
simple : si l’on aime la démocratie, il faut la
défendre ; pour la défendre, il faut combattre ses
ennemis ; pour combattre les ennemis de la
démocratie, aucun sacrifice n’est trop grand : la
noblesse du but justifie tous les moyens ; pas de
démocratie pour les ennemis de la démocratie ! Ce
qui n’était pas essentiellement une démocratie a
maintenant cessé de l'être visiblement.
* Celui quil posséde des documents subversifs est passible de 4 ans de
prison. (N.D.T.).
* « Ainsi on attire maintenant par des récompenses les délateurs, en-
geance créée pour la ruine publique, et que pourtant le châtiment même
ne retient jamais assez. »
IL N° EXISTE PAS D'AFFAIRES SECRETES DE LA REVOLUTION
la presse sur le phénomène terroriste.
Tous les actes de terrorisme, tous les attentats
qui ont frappé et qui frappent l'imagination des
hommes, ont été et sont ou des actions offensives
où des actions défensives. S'ils font partie d’une
stratégie He l'expérience a montré depuis
longtemps qu'ils sont toujours voués à l’échec. Si
au contraire is font partie d’une stratégie défen-
sive, l'expérience montre que ces actes peuvent es-
pérer quelque succès, qui n’est cependant que mo-
mentané et précaire. Les attentats des Palestiniens
et des Irlandais, par exemple, sont des actes de te-
rorisme offensifs ; par contre la bombe de la piazza
Fontana et l'enlèvement d’Aldo Moro, par exem-
ple, sont des actes défensifs.
Toutefois ce n’est pas seulement la stratégie
qui change, selon qu'il s’agit d’un terrorisme offen-
sif ou défensif, mais ce sont aussi les stratèges. Les
désespérés et'les illusionnés recourent au terro-
risme offensif ; par contre ce sont foujours et seule-
ment les Etats qui recourent au terrorisme défensif,
soit parce qu'ils sont enfoncés dans quelque grave
crise sociale, comme l’État italien, soit parce qu’ils
la craignent, comme l'Etat allemand.
Le terrorisme défensif des Etats est pratiqué
par eux ou directement ou indirectement, ou avec
leurs propres armes ou avec celles d'autrui. Si les
Etats ont recours au terrorisme direct, celui-ci doit
être dirigé contre la population — comme cela s’est
produit par exemple avec le massacre de la piazza
Fontana, avec celui de l’Jtalicus, et avec celui de
Brescia. Si au contraire les Etats décident de recou-
rit à un terrorisme indirect, celui-ci doit être appa-
remment dirigé contre eux — comme cela s’est par
exemple produit dans l'affaire Moro.
Tous les unies À terroristes secrets sont
organisés et dirigées par une hiérarchie clandestine
aux militants de la clandestinité eux-mêmes, qui re-
flète parfaitement la division du travail et des rôles
propre à cette organisation sociale : en haut on dé- |
cide et en bas on exécute. L'idéologie et la disci-
pline militaire préservent le véritable sommet de
tout risque, et la base de tout soupçon. Tout sérvice
secret peut s'inventer un sigle « révolutionnaire » et
réaliser un certain nombre d’attentats, dont la
presse fera une bonne réclame, et à partir desquels
il lui sera aisé de former un petit groupe de rili-
tants naïfs, qu’il dirigera avec la plus grande ai-
sance. Mais dans le cas d'un petit groupe terroriste
constitue spontanément, il n'est rien de plus facile
au monde pour les corps détachés de l'Etat que de
s’y infiltrer et, grâce aux moyens dont ils disposent
et à l'extrême liberté de manœuvre dont ils jouis-
sent, de se rapprocher du sommet originel, et de s’y
substituer, soit par des arrestations déterminées
réalisées au moment opportun, soit par l'assassinat
des chefs originels. qui se produit en règle générale
lors d'un conflit armé avec les « forces de l’ordre »,
prévenues d’une telle opération par leurs éléments
infiltrés.
L’ Etat, affaibli à l'extrême par toutes Fe atta-
ques qu'il subit quotidiennement depuis dix ans, en
même temps que son économie, de la part du prolée-
tariat, d’une part, et par Pincapacité de ses ges-
tionnaires de l autre, peu taire ainsi i l'un une et l’autre
ratiq
+ un livre de gianfranco sanguinetti ( Li
S'il est un livre el il faut lire à pet comprend à
récupérer ue nid comme bras AbSte Het 4 sa pui sea
qui décapitèrent les BR, l'Etat a délibérément choisi de ne pas liquid er
contraire, de l’utiliser en se plaçant par des infiltrations policières à as
d’Aldo Moro est éclairé d’une lumière blême et livide : ce serait les serv
Moro pour l’empêcher de réaliser le compromis historique entre la dé
communiste, Une démonstration magistrale de l’instrumentalisation par
phénomène terroriste. Si en Belgique l’histoire ne nous a pas encore portés vers
extraits du livre Du terrorisme et de l’état que nous reproduisons Sur cette page.
faire rouler votre cerveau hors. des sentiers battus. Contre l’intoxication quotidienne et hel
chose, en se char geant sole en nel LS
rs Le speciale de à diese
pulation. « Nous sommes en guerre»
contre un ennemi si puissant que tout aut
cord ou conflit serait un acte de sabotage et de
sértion : ce n’est que pour protestercontre let
eg
risme que l’on a le droit de recourir à la grève géi + ie
rale. Le terrorisme, et « l'urgence »,.un état dur
gence et de « vigilance » perpétuels, voila les seuls
problèmes existants, où tout au moins les: seuls
dont il soit permis et nécessaire de s'occuper. To:
le reste n'existe pas, ou est oublié, eten tout cas est
tu, éloigné, refoulé dans l’inconscient social, devant
la gravité de la question de l’éordre public » », Et
face au devoir universel de sa défense, tous: sont ir a
vités à la délation, à la bassesse, à la peur : Ja lâ-
cheté devient pour la première fois dans l’histoire.
une qualité sublime, la peur est toujours justifiée, le
seul « courage » qui ne soit pas méprisable est celui
d’approuver et de souteriir tous les mensonges, tous
les abus et toutes les infamies de l'Etat. Puisquela
crise actuelle n’épargne aucun pays de la planète, il
n’existe plus aucune frontière géographique dela
paix, de la guerre, de la liberté, de la vérité cette
frontière passe à l’intérieur même de chaque pays,
et chaque Etat s’arme et déclare la guerre a la vé-
_rité,
Je n’ai qu’une chose à vous dre respectés
mystificateurs : au contraire de vous, j'ai bien
connu, dans les treize dernières années, une grande
partie des révolutionnaires d'Europe — connus éga-
lement de toutes les polices —- qui ont le plus contri-
bué, par la théorie et par la pratique, à réduire le
capitalisme à ses conditions actuelles : eh bien a
cun d'eux, sans aucune exception, n'a jamais prati
qué et encore moins applaudi le terrorisme specta-
culaire moderne - ce qui me paraît évident. 17
n'existe pas d'affaires secrètes de la révolution:
tout ce qui est aujourd’hui secret appartient au
pouvoir, c’est-à-dire à la contre-révolution. Eticeci,
toutes les polices le savent parfaitement.
Il convient dès maintenant que vous ayez la
conscience tranquille sur un point, messieurs du
gouvernement : tant que votre Etat existera, et que
je serai vivant, je ne me lasserai jamais de dénoncer
le terrorisme de vos services paralleles, et cela
coûte que coûte : car c’est précisément le premier
intérêt du prolétariat et de la révolution sociale, en
ce moment et dans ce pays. Et ce justement parce
que, comme disait Courier, «politique connue, po-
litique perdue ». Et si cet Etat criminel veut conti-
nuer à mentir, à tuer et à provoquer toute la popu-
lation, il sera contraint dorénavant de jeterson”
masque « démocratique », d’agir en son nom propre
contre les ouvriers, en abandonnant l’actuelspecta-
cle de comédie dans lequel s’exhibent les services
secrets, qui entretiennent les illusions de quelques
militants naïfs sur la « lutte armée » afin de rendre
leurs provocations vraisemblables, et pour jeter en-
suite en prison des centaines de personnes, tandis
que nos policiers s’exercent au tir au pigeon en at-
tendant la guerre. civile,
v
ALTERNATIVE LIBERTAIRE - ASBL 22 MARS- N° 67- Novembre 84 - Page 41 |
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… nt int md AÈà abé ai
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À
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nis dans l'édito de notre numéro d'octobre, sur le groupe
0. Chabab, n’avait pu passer faute de place. Ce n'était que
voici. À vec, rapidement, une interview des quatre «brea-
Chabab, un article reprenant des passages sensationnels
rial paru en juillet dernier dans le très respectable et très à droite
al» — et Qui s'intitule: «Plus on est de fous, plus on
is oui. Les vrais libéraux d’outre-Atlantique se prononcent contre
restriction à l'immigration. Ils ont leurs raisons, bien entendu. Eton-
# jand-même. Un article, enfin, largement repris du journal français
«Le Matin», sur une «riposte organisée des Beurs», aux crimes racistes et
aux bavures policières. Et nos illustrations: des extraits de BD beurs
parues dans «Pilote», «Charlie» et «L'Echo des Savanes».
On voit déja, à l'horizon du numéro prochain, un papier où Sam et Amar
vous racontent l’histoire mouvementée des émissions de Radio Chabab,
depuis maintenant un an. Et, avec d’autres informations, un projet pour
ce petit journal, qu'on aimerait voir s’élargir, s'élargir, s'élargir…. Mais
vous verrez bien.
ciné-bougnoule
Qu'est-ce qui leur a donné l'idée,
Radio Chabab
vidéo
ces jeunes bougnoules, de faire du
cinéma? C'est vrai qu'on a longtemps dû se contenter d'Ormar Sharif sur les
écrans, même si ça change ces temps-ci dans le cinéma français, où, de
«Tchao Pantin» à la «Smala» — en passant par «Laisse béton» — on voit de
plus en plus de personnages et d'acteurs arabes un rien plus vraisemblables.
pue même, vidéo ou pas, c'était pas évident, au départ. Mohamed raconte
aventure des cinéastes en herbe de Radio Chabab, Marc, Fanchon et lui-
même,
Radio Chabab: Radio Chabob, ça commence avec
des émissions de radio. Alors, comment — ef
Pourquoi — avez-vous eu envie de füire de la
vidéo ?
Mohamed: Les émissions, on peut en reparler
avec ceux du groupe qui s'en occupent. Je veux
dire par là que Radio Chabab, ça a toujours été
pour nous un moyen, des moyens, de parler et de
trouver des formes d'expression. Bon, il y a eu
l'ambition d'organiser beaucoup de monde dans
le quartier, de leur proposer des arumations….
intelligentes. On en est un peu revenu, maïs c'est
aussi une autre discussion. Alors, tu as les émis-
sions, tu as le journal, tu as la vidéo: Radio Cha-
bab maintenant, c'est avant tout un groupe de
gens qui veulent réfléchir à la communication, el
apprendre à maîtriser des téchniques de communi-
cation, Mais pour répondre à ta question, quand
on æ fait le tour des projets qui nôus tenaient à
cœur, il y a eu dés copains qui ont tout de Suite
dit: la vidéo. C'est normal. La vidéo est partout,
C'est une téchnique nouvelle, relativement facile
et accessible. Et puis on voit tellement d'images,
on a envie d'ert faire qui soient bien à soi.
Radio Chabab: Quelles sont les premières diffi-
cultés que vous &vez rencontrées ?
Mohamed: Premièrement, un travail assez diffi-
cile, c'est la mise sur pied d'un scénario. On ne
s'imagine pas, c'est une technique complexe.
Ensuite, il faut trouver le matériel, et puis former
les gens.
Radio Chabab: Commençons par le scénario.
Mohamed: 11 a d'abord un choix de sujet. Pour
nous, c'était pas compliqué: il fallait raconter une
histoire qui pouvait arriver à un mec de la 2° G,
montrer des situations, des endroits où les copains
ny le temps. À Ixelles, pour nous, en particu-
ier Aprés, il faut bâtir l'histoire. Pendant plu-
sieurs réunions, chacun lançait dés idées. Le héros
était une fois un voyou, une autre fois le frère
d'un gars qui avait été balancé — et l& film racon-
tait sa recherche du donneur... Finalement, c'est
cette dernière idée qui à été retenue. Et puis la
farnille, le pére, la mére, les frères et sœurs, les
amis, Mles-flics..» Chaque personnage est construit
aveciles éléments fournis par tous, en vrac, el dont
on'essaie de sortir un truc cohérent. Même chose
pour les cadres de l’action. On fixe la structure
générale: qui?, qu'est-ce qu'il fait?, pourquoi?,
où? On précise. On essaie de fournir les réponses
au fur el à mesure du récit. On établit des dialo-
gues.de base. "A la fin de tout ça, vient le décou-
page technique, par séquences, plans, avec tous les
renseignements nécessaires. De toute façon, nous
voulions raconter une histoire. Le genre répor-
tage, a ne nous intéressait pas vraiment. Îl doit y
avoir l'influence des films, des feuilletons télé;
c'était trés «Un privé dans la ville». Pourquoi
pas 2 On voulait ulitiser des images de «Lawrence
d'Arabie» pour le générique. Tu vois ça: une
course de méharis, avec des guerriers armés
jusqu'aux dents, sur fonds de musique halywoo-
dienne. Et paf: une vue de la chaussée d’Ixclles,
déserte, sous la pluie, un dimanche matin.
Radio Chabab: Une fois voïre projet en Main,
vous avez j'ait quoi?
Mohamed: On s'est évidemment rendit compte
qu'il fallait suivre une formation. On s'est rensei-
gné, et on a trouvé le GSARA, un groupe audio-
visuel proche du PS, très ouvert à des amateurs
comme nous, et qui organise des stages de forma-
tion le week-end.
Radio Chabab: Ça s'est passé comment?
Mohamed: Après un cours théorique assez rapidé
sur la place de la vidéo dans les moyens de com-
rnunication, on nous a proposé une initiition pra-
tique à partir d’un court film à réaliser. On nous
avait mis en présence des appargils: carnéra, SON,
magnéto. Nous avons choisi de tourner nos pre-
mières images À Bruxelles-Molenbesk, dans le
quartier «Chicago», Il a fallu construire un petit
scénario, ct puis on est sorti en rue,
Radio Chabab: Raconie….
Mohamed: On a commencé par bafouiller, bien
sûr, On s'emmêlait joycusement les pinceaux avec
les boutons ct compagnie. Surtout qu'il fallait
synchroniser, On était à deux: parfois j’avais la
caméra et Marc s’occupait du son et du magnéto,
et on changeait. Le premier truc qu’on a filmé,
c'était un grafitti sur un mur: «Ïrmmigrés dehors».
C'était assez le vif du sujet, mais sans difficultés :
imagc fixe, et seulement le bruit constant des
bagnoles, Il y a une grande plaine de jeux, entre le
Théâtre flamand et le Marché aux Poissons: on a
filmé des petits kets et des fillettes qui jouaient.
Tout de suite, ils se sont groupés autour de nous,
par dizaines, ils riaient, nous prenaient pour des
reporters, voulaient jouer avec le matos, et tout le
monde voulait passer devant la caméra. On s’est
vraiment marré. Mais il y a eu aussi des choses qui
ont êté filmées quand les enfants parlaient... Des
choses émouvantes. On a filmé des plans très
beaux, dont on s'est aperçu au montage. Il y a eu,
à l'arrière-plan, une fillette qui dansait des danses
arabes, entourée d'une dizaine de garçons qui
frappaent dans leurs mains,
Radio Chabab: Vous travaillez sur quoi, à pré-
sent?
Mohamed: On apprend là technique de l’éclai-
rage, et le nouveau sujet est une interview d'inté-
ricur, avec un éclairage d'ambiance. Là, on va
réunir des copains de Radio Chabab, et causer.
On a aussi des prises de vue du quartier: chaussée
d'ixelles, parc de la Tulipe, chaussée de Wavre...
Et on va combiner tout ça au montage.
Radio Chabab: Vous êtes partis pour d'autres
Jens, bien d vous, après ?
Mohamed: Ah, c'est lé bul. Il faudra se procurer
du matériel, par prêt ou par location. Lés copains
formés au GSARA formeéront d'autres membres
du groupe. De touié façon, on va réaliser natre
premier projet, celui qui nous a branchés au
début. Et puis, on le montrera, on verra bien, Si
ca marche qui sait.
. édito |) 44
SSL
” v'+ F
SNS
(.: SUNE
LOCAL.
Sélim Mazari, un jeune Algérien
abattu mardi 16 octobre par un poli-
cier parisien pour avoir grillé un feu
rouge. La veille, un autre Algérien,
Amar Ben Mohamed, victime d’un
accident de voiture, sonne à la porte
d’une villa pour demander secours : il
est el à coups de carabine. Les
deux événements cornplètent ure liste
interminable d'agréssions, de crimes,
de bavures policières. Poussant cer-
tains Beurs à organiser une riposfe
violente... Les autorités avouent leur
impuissance à éviter un danger
d’escalade…
«Le Matins, 19 octobre #4
Mercredi 19 heures. Rue Ordener, à Paris,
des manifestants se sont rassemblés sur les lieux
où est tombé Sélim., Ils viennent de déposer une
gerbe à la mémoire du jeune homme. La manifes-
tation n'a fait l'objet d'aucune déclaration, et le
commissaire principal Jean Porie, «patron» du
18° arrondissement, s'avance au-devant du ©cor-
tège pour s’enquérir des intentions des organisa-
| teurs. Il n'ya pas de service d'ordre, aucune force
| de police: le commissaire Porte est suilement
| accompagné dé son chauffeur ef d'une jeune sla-
| giaire, Les deux hommes seront immédiatement
bousculés, injuriés, fouillés sans ménagement con-
tre leur voiture, dont la nette arrière volera en
éclats. Au cours de la bagarre, le chauffeur per-
dra une dent et le commissaire quelques larmes,
provoquées par un jet de bombe lacrymogène, Ils
n'étaient armés, ni l'un, ni l’autre. Et leurs agres-
seurs sont aujourd'hui recherchés par les hommes
de la deuxième division de PJ, chargée de
l'enquête.
Jeudi, O heure 36, rue Scribe. Une déflagra-
tion dans la nuit, tout contre l'Opéra: c'est une
bombe, de moyenne puissance, qui vient d’explo-
ser contre l'entrée du posie-vigie du Palais Gar-
nier. Aucun fonctionnaire à l'intérieur du Jocal: le
poste ne fonctionne que la nuit, Des dégâts maté-
riels sans grande importance, et, heureusement,
aucun blessé. Maïs l'origine criminelle ne fait
aucun doute. Et l'attentat sera très vile revenciqué
par un message adressé à Î"AFP: «Affaire Orde-
| ner. À chaque bavure, Boum, Objectif: point de
rendez-vous des tueurs reconûus par l'Etat, Pro-
chaine bavure, nous tuerons tous les autéurs et
complices... Avis». Signé: «Groupe
anti-bavures».
Le «Groupe anti-bavures»? Totalement
inconnu, tant du côté de la PJ qu'aux Renseigne-
ments Généraux. La menace est en 1out ças prise
au Sérieux, même si on s'efforce de rester serein au
Ministère de l'Intérieur, en mettant ces violences
sur le compte des «tensions exacerbées».
«Il est difficile, dit-on au Ministère, d'éviter
aujourd'hui les réaélions de la communauté
maghrébine. Tout cela est malheureusement impa-
rable...».
C'est Sur cette conclusion que s'achève l'arti-
cle du eMatins. Nous sommes, rappelons-le, Aa
veille d'une nouvelle Marche Pacifique des jeunes
Maghrébins sur Paris. Espérons que ce ne sera pas
la dernière manifestation de patience de la com-
munauté.
NOUS DANS NOTE Ÿ
MSC, CAPTAIN, |
ATOUT VOUS
SR D EXPUIQUER Te
les bd sur les immigrés
a| de la deuxième génération
fleurissent dans les magazines.
= à ici des extraits de pilote
# (page de droite) par christin
et goetzinger, et deux planches
4 de l'écho de savanes
BOUDYJELLAL/MECHKOUR
a LES BEURS
ÎLEST TARÉ CE CÉFRAN,
ON PEUT PLOS
FOUTRE LE NEZ DEHORG /
ROUE 1 CETTÉFONS
ON 4 BIEN FALL)
SPASSER
. ON VA DEMANDER ©
À CAP TAIN SAMIF
DE NOUS AIDER ï
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ON VIT PLUS. FAUT : po 5 Li
S'EN DÉBARRASSER | TÉLÉPHONER. SA
SON NUMÉRO:
T7 CAP'TAÏN SaMiR
| = MOM ÎDOLE ! FAÎTES
LL \ MOÏ CHEVALIER
MSP<) DE L'ORDRE DES
SE SUIS BAPTISÉE,
JE SUIS BAPTISÉE 1
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BTCDN susridens!
ALTERNATIVE LIBERTAIRE - Novembre 84 - Page 12
Editeur responsable: Serge Noël Adrésse de contact: 146, chaussée de Wavre
DO Mt ou A) GE!
| les bd sur les immigrés
| de la deuxième génération
fleurissent dans les magazines.
ici des extraits de pilote
(page de droite) par christin.
F| et goetzinger, et deux planches
_de l'écho de savanes
C'EST GAGNÉ / ]
BOUDJELLAL/MECHKOUR
IL EST TARÉ CE CÉFRAN,
POUF 1 CETTE FOIS ON MA DEMANDER
ON A BIEN FALL _ ON PEUT PLUS À CAP TAIN SAMIR
S PASSER. FOUTRE LE NEZ DEHORS / DE NOUS AIDER Y
D CUSOURS UN
A TÉLÉPHONER J'ai
D, SONAUMERO:
ON ViT PLUS, FAUT
$'EN D BARRASSER /
JE SUIS BAPTISÉE,
JE SUIS BAPTISÉ
77 CAF TRAIN SAMIR
ET MON IDOLE ! FAÎTES
<41 MOÏ CHEVALIER
<<) DE M'ORDRE DES
v D\ TUSTICIERS!
}
y D
La
LES BEURS
danse
NME
breake
C'est qui, qui disait l’autre jour, à la
télé, que les petits Maghrébins, c'est
nos Porto-Ricains et nos Noirs arné-
ricains à nous ? Ça causait de break
dance ét c'était pas tout à fait faux.
Quand il fait beau, soleil et compa-
gnie, parc de la Tulipe ou près du:
musée d'’ixelles, on peut les voir
remuer, Onduler, sauter, tourner. Ce
sont les «Furious Band».
Karim, Farid, Youssef et Khader, quatre
sportifs de quatorze à seize ans, des copains de
Radio Chabab. Ils sont venus parler de leur pas-
sion commune: breaker.
Radio Clhabab: Vorre groupe, «The Furious
Band», existe depuis combien de témps?
Karim: Depuis sept mois. Oui, à peu près sept
nois. Avant, On dansait chacun de son côté,
enfin, on breakait déjà pour s’amuser, quoi. Maïs
le groupe, c’est beaucoup plus sérieux pour nous.
Radio Chabab: Comment ça vous est venu, cette
envie?
Karim: Ben, on regarde la télé, El y a eu des
films... On s’est tout de suite dit: ça c’est pour
moi!
Farid: Tu sais, peu de gens arrivent à le faire vrai-
ment bien. Alors tu as le plaisir d'arriver à des
trucs difficiles. De plus en plus difficiles.
Youssef: Et puis, avec la break, on peut se défou-
ler à fond, C’est un vrai sport. Au départ, on allait
voir dans une boîte, le «Podium». On apprenait
en s'amusant. Mais au fur et 4 mesure que tu
découvres les difficultés, tu t'accroches, lu veux
vraiment y arriver, tu réussis. Et c'est ça qui est
super,
Khader: On s’entraîne en moyenne deux heures
par jour. Et ça c'est rien. Prends un groupe
comme les «Masters Streets» — c'est des copains
— ils s'entraînent encore plus. Mais eux, ils le font
uniquement pour gagner. Îls sont de six à neuf.
Leur nombre change. Nous, on veut rester à qua-
tre. Faire un groupe qui tienne bien.
Radio Chabab: De quof a-t-oh besoin pour faire
de la break?
Karim: Un training, des baskets et... unlocal. Au
début, on allait dans la cave des parents d'un
d’entre nous. Et puis, On est venu chez vous, à
Radio Chabab. S'il fait beau, on le fait en rue.
Youssef: Avant, tu avais les gants blancs et une
casquette. Maïs c'est démodé, c'était pour la
robotik, Plus personne fait ça. Tu vois, la diffé-
rence entre la robotik et la break, c'est que la
robotik, ben, comme son nom lé dit, consiste à
imiter des gestes de robots. C'est assez limité, La
break dance, c'est de la vraie danse, en souplesse,
vaaus. IE y a beaucoup plus de choses à ré4-
SET.
Radio Chabab: 7! y a beaucoup d'autres groupes?
Karim: Oh oui. 4 chaque concours, il y a cinq ou
six groupes. Nous, on en a déjà fait une quin-
zainé. Les premières fois, c'est terriblement
impressionnant. Mais maintenant, on pourrait se
produire devant mille personnes, on n'aurait pas
peur, Au contraire, les encouragements, ça nous
| aide à aller plus fort.
Farid: Il y a eu deux démonstrations à l’école. Les
copains en redemandaient. Ça nous fait plaisir.
Radio Chabab: Ef c'est utile, pour les filles ?
Youssef: Oui, oui (rires).
Karim: Oui, enfin, nous, c'est avant tout la break,
hein.
looky: nouveau truc
Radio Chabab: Vous allez dans une école?
Farid: On y a été. Mais le prof en savait moins que
nous, qui avons tout appris par nous-mêmes, On
m'a pas besain d’un prof.
Youssef: Nos chorégraphies, par exemple, on les
fait nous-mêmes, En regardant les nouveautés & la
télé, en combinant les idées de l'un et de l'autre,
Regarde, en ce moment, on est en train de mettre
au point un numéro à deux fois deux. Ce sont des
figures synchronisées. Karim et Khader vont te
montrer.
(On dégage un peu les chaises. Les deux brea-
kers s'y mettent. Leurs gestes, parfaitement
synchronisés, une minute de magie à l'improviste,
et sans musique).
Plus libéral que ça, tu meurs...
ouvrez les frontières!
«Il faut laisser les immigrés entrer librement dans notre pays, comme dans
tous les pays occidentaux. Mieux, il faut inscrire dans la Constitution cette
règle fondamentale: les frontières resteront désormais ouvertes. Car plus àl y
aura d'immigrés, plus grande sera nôtre prospérité».
Et bien non, ces mofs ne viennent pas d'un journal d’extrême-gauche ou
vendu aux intérêts pétroliers du Goife. C'est le journal sacré des conserva-
teurs, Gol de tous poils, du monde entier, qui prend ainsi position sans
s’embarrasser de nuances: le «Wall Street Journal», la gazette des financiers
américains,
Le 4 juillet dernier, sous le titre assez plaisant
«Plus on est de fous, plus où rit», l’austère quoti-
dien des cours en bourse et de l'économie capita-
liste pure et dure, donnait une étrange leçon de
«libéralisme» à nos libéraux locaux: «La richesse
d’une nation, écrit l'auteur du texte, n'est pas un
gâteau à la taille fixée une fois pour toutes, dont
les parts seraient progressivement réduites par
l'augmentation de la population», L'évolution de
l'écongrmie montre que la richesse matérielle est
uré création constante du travail des hommes.
«Les gouvernements européens, poursuit le
Wall Street, paient leurs immigrés pour qu'ils s'en
aillent, Pendant ce temps, les économies euro-
péennes s'enfonceni». A contraire, les USA
refusent de fermer leurs frontières, parce qu'ils
savent que leur richesse, et toute leur histoire,
reposent sur un renouvellement permanent dé la
population grâce à l'afflux de cultures, d'hommes
et de femmes jeunes, Et «les Etats-Unis connaïs-
sent un boom de l'emploi».
Refuser dé fermer les froniières, «c'est une
vue radicale, reconnaît le Wall Street, mais elle
correspond parfaitement aux bases du libéralisme.
Pour les vrais libéraux, lé droit de changer de pays
pour trouver un emploi fait partie des droits fon-
damentaux de l'hormine. Les Etats qui restreignent
l'immigation violent ces droits fondamentaux».
immigrés = chômage ?
faux !
«Quant à l'argument économique, il ne tient
pas», s'exclame le journal financier. Et le Wall
LS
HIS RE
Karim: Là, tu as vu un passage, au moment Où les
CEE
bras font des battements plus rapides.
nouvéau truc arrivé des USA illy a trois moisl
looky, C’est tout nouveau. On en reparlera
Radio Chabab: À supposer que ça marchecomme
vous voulez pour voire groupe, quels SonVos"
projets d'avenir? s 1
Youssef: Si vraimtent ça marche, faire dés tour
nois en France et en Hollande... Et continuera
s'améliorer, de toute façon. 2
WENS
QUE DE
TÉ PASSE,
LA BISE.
AfAS 5,
fCOT:
Street démontre que [a capacité économique d’un
pays dépend du système d'incitattons et de sanc-
tions organisé dans l'économie. Le journal rap-
pelle quelques principes de base du libéralisme
dont se réclament Jean Gol et autres Nals:
-Sanctionner ls non-travali en limitant les
subventions de tous ordres données par PElat
aux pauvres ci aux chômeurs:
=Rendre l'investissement plus attractif en
réduisant les impôts des entreprises et des riches.
À lobjection, selon laquelle un immigré
trouve moins facileinent du travail parce que 54
formation est inférieure à celle des travailleurs du
pays d'accueil, le Wall Street répond: «On
l'embauche quand mène car onle paiettrés-peu.
Et ce «três peu» représenté pour lui unbrevenu
supérieur à celui qu'il recevait dans son pays d'ori-
gine. Dès lors que le système d'incitation est ads
quat, l'immigration est un bienfait pour la pro>
duction et l’économie d’un pays»:
On le voit, si le Wall Street semble se permet-
tre quelques audaces en matière d'immigration, ce
n'est pas sous l'inspiration subite d'unesympathie
pour les pauvres et pour les travailleurs. C'estau
contraire sur base d'une logique ultra-libérale
incontournable. Le moins qu'on puisse cn penser,
c'est que, en tout cas, voilà des libéraux Guineris
quent pas de céder à la tentation facile d'un dis-
cours électoraliste raciste. La Belgique étant-gau:
vernéé depuis plus de sept ans par des politiciens
qui crient sur tous les toits qu’ils sont les-défen-
seurs les plus authentiques du libéralisme, com-
ment expliquer l'habitude qu'ils ont prise de met
tre les difficultés économiques sur le dosud'un
ccxcés d'immigration»? Serait-ce pour tenter de
cacher leur propre incapacité à trouver des solu-
tions nouvelles pour relancer l'économie belge?
- Page 12 Editeur responsable: Serge Noël
Adresse de contact: 146, chaussée de Wavre, 1050 Bruxelles
ALTERNATIVE LIBERTAIRE - ASBI 22 MARS - N° 67 - Novembre 84” Page 13
(]
*
7
2
t 124
[#4
| .
{
L
D
PR International fait état d'exécutions
massives, de longues détentions de prisonniers
nee sans jugement ou à l'issue de procès
sommaires et de mauvais traitements infllgés aux
détenus.
Le rapport de 144 pages comporte l'étude du
cas d'un certain nombre de prisonniers d'opinion
ainsi qu'un mémorandum soumis au gouverne-
ment chinois. Armnesty International s'est décla-
rée prête à publier les commentaires des autori-
tés chinoises, mais aucune réponse ne lui est
encoré parvenue.
Amnesty International constate que l'oppasi-
tion non-viclente a été éliminée en Chine à la suite
de la condamnation des militants politiques décla-
rés coupables de «délits contre-révolutionnairess
passibles de peines de 10 à 15 ans de prison.
Parmi les prisonniers, il y a des ouvriers et
des étudiants qui ont été actifs dans le «mouve-
ment démocratique qui a fait son apparition en
Chine en 1978, des prêtres catholiques derneu-
rés loyaux envers le Vatican ainsi que des Tibé-
tes.
Certains procès politiques ont eu lieu à huis |
| encore, la RTBF répète ce qui avait été dit précé-
Dans certains cas, les familles n'ont pas été avi | d i
| avaient demandé à intervenir lors de la session du
Dans d'autre cas, les prisonniers politiques
clos, en présence de personnes sélectionnées.
sées de la tenue des procès.
sont restés détenus pendant des années sans
inculpation ni jugement dans des camps de «réé-
ducation par le tavail:. Certains prisonniers
auraient été maintenus à l'isolement avec des
menottes jour et nuit pendant des jours et des |
semaines; ils auraient été battus et obligés de res-
ter debout sans mouvement et privés de nourri
ture pendant 24 heures.
Wei Jinsheng, rédacteur d'une revue non-
officielle maintenant interdite, aurait été maintenu
à l'isolement depuis son procès en 1979, nepou- |
vant prendre de l'exercice qu'une fois par mois.
D'après des renseignements parvenus à Amnesty
international, il Souffrirait à la suite de ce traite-
ment, de troubles mentaux et aurait été tranféré à
deux reprises dans un hôpital de Beijing pour y
être soigné.
Amnesty International ne dispose pas d'assez
de renseignements lui permettant d'estimer le
nombre, de prisonniers politiques. actuellement
détenus dans les prisons et les camps de travail
en Chine. D'anciens prisonniers disent qu'il y
aurait des détenus politiques dans la plupart des
établissements pénitentiaires du pays.
Exprimant ses inquiétudes au sujet d'une
vague d'exécutions massives qui a débuté en
août 1983 par le lancement d'une campagne
d'une ampleur nationale contre la criminalité,
Amnesty International indique que 44 crimes sont
désormais passibles de la peine capitale en Répu-
blique Populaire de Chine, parmi lesquels les |
délits contre-révolutionnaires, les vols, les détour- |
nements de fonds, les brutalités contre les fem- |
mes et le proxénétisme.
Les procédures utilisées lors des procès qui
ont abouti pendant cette campagne à des con-
damnations à mort ont été sommaires.
Les accusés peuvent être traduits en justice
sans avoir eu connaissance de l'acte d'accusa- |
tion. Les procédures d'appel ont été supprimées: |
le rapport cite des cas où les condamnés ont été
exécutés dans les six jours après l'infraction.
Amnesty International note que le droit pour |
une:personne à être présumée innocente jusqu'à |
ce que sa culpabilité ait êté légalement établie
n'est reconnue ni en droit, ni en pratique.
Les exécutions publiques devaient prendre
finen janvier 1 980 en vertu de la loi sur la procé-
dure pénale. Or, Arnnesty International cite des
cas où des exécutions ont encore eu lieu en
public, après quoi les corps des suppliciés sont
laissés à la vue de tous. Les exécutions ont lieu
par la méthode traditionnelle : un coup de feu dans
la nique de la victime agenouillée.
Rapport A.l.
Chine: ÿÆ FEAT Der d'opinion
et la peine de mort
en République Populaire de Chine
E.F.A.l., 144 pages, 130frs, |
tains accusés de soutenir des groupes nationais- |
| AM). Voyez LE
La RTEF, nn... nalsez: ? C est |
à ag instructif,
lehtndi28maista ts heures leréiactenret
présentateur Tom Goldschmid, après une brève
salade» sur le Nicaragua, parla de «l'injustice du |
partage des terres réservées à une minorité de pri-
vilégiés» (*});: mais il a fait mieux encore en affir- |
mant que les gens qui refusent de participer à la
reconstruction du pays «sont emprisonnés dans
des camps à un point tel qu'Amnesty {nternatio-
nal s'inquiète de la question» (*).
À ce moment, huit navires de fort tonnage et
de nationalités diverses (bien sûr... pas améri-
caine !) ainsi qu'un nombre plus élevé de bateaux
plus modestes, avaient déjà.été plus ou moins ava-
riés par des mines, dans les eaux cûtières et les
ports nicaraguayens. Ce n’est qu'en mai-jluin que
l'administration Reagan avoua — SOUS réserves —
sa culpabilité, sa machination infernale. Ce fut
une «indignation générale»; Mitterrand parla
d'envoyer des dragueurs de mines et la Belgique
déclara. qu'elle suivait Pévolution de la situa-
tion. Pas beau ça?
Mais la machination de Reagan aurait pu
réussir par le biais des risques d'une hausse du
montant des assurances et dès lors la réticence des |
armateurs à envoyer leurs navires dans cette zone. |
Fait assez comparabie à celui des risques de navi- |
gation dans le Golfe Persique, avec la différence. |
que la valeur du pétrole vaut le risque et le prix de |
Passurance, ce qui n’est pas le cas du Nicaragua.
aux yeux des «hommes d’affaires» pour lesquels
la vie des marins importe peu!
Le mercredi 10 octobré 84, à ]3 heures
demment: «deux opposants anti-sandinistes qui
Tribunal des Peuples ont vu leurs plaintes! décla-
rées légalement irrecevables» (*). Un de ces repré-
séntants fut interviewé: expulsé pour seize ans du
Nicaragua, réfugié aux USA (fallait s’en douter),
ses propos relevaient plus des grognements.d’une
vache réactiônnaïre que de la sincérité d’un vrai
| plaignant. Prudence oblige, la RTBF avait eu le |
soin de déclarer que les plaintes d'Amnesty Inter- |
national étaient «plus nuancées».
Autre plaignant.
dences curieuses, Amnesty International s'attaque
à ce pays, en un de ses moments les plus difficiles:
le minage des ports (mai 84). Ensuite, Amnesty se
tait pendant de nombreux mois et revient — sans
succès — à la charge, lors du Tribunal des Peu-
ples, puis fait parler d’elle peu après à la RTBF,
mais sans dévoiler ses arguments.
C'était évidemment une belle occasion, mais |
on peut se demander si le but réel d’Amnesty n’est |
pas plutôt de nuire au Nicaragua, fndic: message |
personnel, bonjour Alex) car la période actuelle |
— l'approche des élections — est évidemment une
période dangereuse, d'autant plus que les partis
d'opposition n'ont pas déposé leurs listes, Pour- |
tant, tous ont eu le temps: l'inscription des candi-
dats avait eu lieu du 25 mai au 25 juillet et la cam-
pagne électorale allait du 8 août au 31 octobre |
1984.
En plus de se demander ce que prépare |
l’opposition, on peut se demander quel est Le jeu |
| d’Amnesty International qui choisit les moments |
| les plus difficiles que vivent les Sandinistes pour |
partir en campagne. Incontestablement, Amnesty
ne.se manifeste que contre les régimes communis-
tes — le dernier exemple étant Sakharov... en
oubliant l’ouvrier ou le paysan qui pourrit aussi |
au goulag — et aux régimes auxquels on voudrait |
parce que cela plai- l
| rait à Reagan et à ses larbins (Tindemans…
| un record 1).
| Soyons logiques. Si la CI. A. trafique bien |
| dans le Coca Cola, les TV, les bananes, les oran- |
… pourquoi ne pas aussi trafiquer dans le |
donner une face semblable ….
ges, etc.
milieu des «délits d'opinion». Sous le couvert
d'un mouvement «humanitaire», Amnesty Inter-
national n'est-elle pas une organisation qui profite
bien plus à «certains Etats» qu'aux prisonniers
pour délit d'opinion?
Dernière remarque: je ne critique pas la
publicité faite autour de Sakharov, mais je trouve
anormal que des gens mocestes et des intellectuels |
aussi souffrent depuis dix ans chez Pinochet, sont
| disparus dans l'Argentine des généraux, que
| d’autres achèvent de vivre dans les geûles salvado-
riennes de Napoleon Duarte, Et-dans ces cas (non
restrictifs), Amnesty se tait. Alors? bu:
Claude
* Citations LS eR car non enregistrées.
ALTERNATIVE LIBERTAIRE - ASBL 22 MARS - N° 67 - Novembre 84 - Pabe 14
CSANIOUE, a
| problème social. La névrose est pla-
Amnesty International! |
Comparons les dates d'intervention de’ cet orgä- |
nisme humanitaire avec celles de la RTBF, du Fri
| bunal des Peuples (Bruxelles, 5, éet 7 octobre)et |
les phases diverses de la vie du Nicaragua, Coinci-
c'est |
Avec Reich,
la névrose Sebe: un |
nétaire. 90% des femmes et 70 à
80% des hommes sont. malades, |
atteints de névrose caractérielle. En
1927, Reich établit ces statistiques
après enquêtes. Il se lance avec une
équipe et les encouragements de
Freud dans l’entreprise de la Sexpol,
c'est-à-dire la sexologie politique.
C’est une vaste entreprise d'hygiène
mentale destinée à faire prendre
conscience aux masses de leur misère
sexuelle (cause directe du caractère
névrotique) et de l’urgent besoin de
donner à la pulsion sexuelle un maxi-
mum de chances et de moyens pour
sADARAUE le plus sainement possi-
7 |
Par la suite, l'histoire nous apprend que
Reich sera chassé des associations psychanalyti-
ques, trahi par les communistes qui l’avaient
d’abord fortement épaulé et chassé de l'Allema-
gne hitlérienne. Reich ne cessera, durant toute sa
vie de recherche, de thérapeute et d'homme
d'action, de fonder la névrose et la plupart des
maladies (surtout le cancer par exemple) sur |
l’absence de satisfaction sexuelle, rendant urgente. |
la recherche de moyens pour donner aux gens la |
capacité naturelle d’aimer que l'éducation a main- |
tenue complètement sous-développée.
Exilé en Amérique, et poursuivant son œuvre
de pionnier, Reich terminera sa vie enfermé dans
| un pénitencier de Pennsylvanie (pratiquement
assassiné!) en 1957 pendant qu'on brûlait ses
livrés par milliers en un immense autodafé dans
l’incinérateur de Manhattan. N'est-ce pas un acte
parmi d'autres du maccarthysme?
Les hommes névrosés ne cherchent-ils pas à
tuer la vie et ceux qui la défendent trop ouverte-
= ferrer
«Je désire qu'en aucune occasion, ni pro-
chaine, ni lointaine, ni pour quelque motif que ce
soit, on ne fasse devant mes restes des manifesta-
tions d’un caractère politique ou religieux, consi-
dérant que le temps qu'on emploie à s'occuper des
morts serait mieux employé à améliorer la condi-
tion où se trouvent les vivants, ce dont la plupart
auraient grand besoin». F. Ferrer (extrait de son
testament)
«Précisément, l4 démence de ceux qui ne
comprennent pas l’anarchie, provient de l'impuis-
sance où ils sont de concevoir une société raison-
nable». F. Ferrer {lors de son «procès»
«Je n'aurais qu'à prendre exactement le |
contre-pied de ce que j'ai vécu». F. Ferrer (com- |
ment fonder L'Ecole moderne?)
«Anarchistes, nous voulons détruire la pro- |
piété telle qu’elle existe, parce qu'elle est le pro- |
duit de l'exploitation de l'homme par l’homme,
du privilège octroyé par les gouvernants ou du |
droit du plus fort».
«Acrates, nousne voulons pas qu’il existe des
propriétaires de grandes étendues de terrain à côté
de familles qui n'ont pas où reposer leur corps,
| nous ne voulons pas d’héritiers de la misère». Æ.
| Ferrer (in Huelga General, sous le pseudonyme de
Cero)
ment? La ME erl Pen Aes À fut f JÉLERET
SEXO-P olitique
combattue par les psychanalystes réactionnaires,
les socialistes, les communistes, les nazis, les libé-
raux, bref tout le monde! Pourquoi? Qui est
parano? Reich (que les auteurs ont traité de fou et
de paranoïaque) ou les autres, les pouvoirs en
place?
r 1 F
tous bloqués.
La sexo-politique n'est pas qu'une théorie.
Elle a déjà ses martyrs. Elle a déjà mordu sur la
réalité sociale, elle dérange. Elle dérange notam-
ment nos rêves concernant nos projets de société.
Si nous voulons une autre société, suffit-il de pro-
poser un changement de la structure sociale sans
se soucier du problème que la frigidité endémique
pase de manière dramatique? La droite comme la
gauche sont composées de gens sexuellement et
affectivement bloqués. Alors? Ah si la sexualité
n'était qu'une sorte de petit pipi sans conséquence
pour la vie en société, un pipi privé! Mais ce n’est
pas le cas. Sans avoir la capacité de sentir le plaisir
de son corps et sans avoir la capacité de sortir de
soi dans l'amour, que deviennent les couples,
l'éducation des enfants, la conscience de ses res-
ponsabilités, la conscierice politique? On a eu la
malencontreuse idée de croire que Pamour cou-
paït de la politique, désengageait. Oui, l’idée de
l'amour, la représentation du bonheur, le rêve, le
sexe phantasmé, oui, toutes les mystiques écartent
de la réalité.
L'amour dont il s’agit ici, c’est du niveau de
l’éneraie, du plasma, de la cellule biologique, de la
réalité La plus organique: qui soit, du corps ouvert
aux autres corps. Seule cette ouverture pourrait
nous faire augurer d'une société différente.
Que vaut l'ouverture d'esprit d'un organisme
fermé? Qu'est-ce que la tolérance d'esprit dans
des corps violés et violents? Qu'est-ce qu'une thé-
RD psychologique procure à un corps qui souf-
re
Si ces questions vous intéressent, venez en
débattre avec moi le mercredi Id novembre à
20h30 au 82 rue Vanderschrick, 1060 Bruxelles,
tél, 02/537.72.95, Je suis thérapeute reichien
depuis une dizaine d'années.
«Si tous ceux qui font atjourd'hui l'éloge de
Ferrer et de son œuvre s'étaient joints à lui
lorsqu'il vivait et travaillait, si l’on avait fait pour
seconder Ferrer vivant toute la propagande par la
plume et par la parole qui s’est faite pour honorer
Ferrer mort, si l'on avait réuni alors toutes les res-
sources que l'on à réunies depuis, certes nous
n'aurions pas maintenant des places et des prome-
nades portant le nom du précurseur et du martyr,
mais nous aurions beaucoup d’écoles rationnalis-
| tes qui, parlant tous les idiomes du monde et étant
en relation, auraient été bientôt en mesure de
reméttre les destinées de l'humanité à une nouvelle
génération rationnellement éduquée.
.…. Bt si lon loue Ferrer, c’est peut-être parce que
| l'on est plié.au routinier culte des morts plus que
| négation de
par désir de continuer son œuvre; et ceci est
d'autant plus vrai que si nous cherchons des idées
chez ceux qui s’agitent pour honorer la mémoire
de Ferrer, nous ne trouverons que des politiciens
| qui préconisent l’enseignement obligatoire laïque,
| ou des pédagogues qui discourent sur le techni-
cisme de l'Ecole Moderne, c’est à peine s'ils réus-
sissent à exprimer une idée, le confondant tou-
| jours avec le type d'enseignement de l’école laï-
que: c’est uniquement ainsi qu'ils comprennent la
l’enseignement religieux
traditionnel». À. Lorenzo, (anarcho-syndicoliste,
urdes fondateurs de la CNT, collaborateur et ami
deiKerrer} Cercle Bakounine
Coordination libertaire à l'ULB
8, rue F. Terlinden
1040 Bruxelles
AMNESTY: INTERNATIONAL: | LA ROBE ET LE JUPON
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À 350 francs y compris frais de port
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distribué par nord-sud diffusion: 02/647: 76:07 |
_ damné
> - Albert Balencour
agressions, insécurité,.… en 1984 on tue pour peu d'argent.
‘arrive plus qu'aux autres. Les haines s'attisent. Face à la
la Société: la prison. Mettre à l'ombre, isoler, et pour le
is est-ce vraiment la solution ? Dans «Taule Errance», Albert
A5, à Forest, à Mons ou à Louvain, Pour Balencour, la prison est un leurre,
uade pas, elle détruit. Elle ne guérit pas, elle empoisonne.
alité d’un itinéraire trop banal. Après les homes, Balencour ne connaît que quel-
is de liberté entre chaque plongeon. Courte respiration. En juin 81, il est con-
à perpétuité par la Cour d’Assises du Brabant. Le 8 septembre 83, après six ans
| d'emprisonnement, Albert Balencour est retrouvé mort dans sa cellule. Les circonstances
de sa mort ne sont toujours pas clairement définies.
À Quelques mois avant celle-ci, évitant le tamis de la censure, l'auteur nous envoie un
… manuscrit poignant, précis, complet, intelligent, analysant avec une rare lucidité l'univers
carcéral belge. Un livre fort. Un réquisitoire sans faiblesse contre l'institution péniten-
mtiaire. Un document indispensable à ceux qui veulent mieux connaître l'envers des murs.
22 Mars Editions - asbl
L'’asbl 22 Mars, un outil d'expression critique. Une association qui pousse à la communi-
cation. Pionnière dans le mouvement des radios libres pour tendre le micro à ceux qui ne
l'avaient jamais. Pour faire entendre des voix différentes dans la jungle des ondes. Huit
ans d'imprimerie pour mieux dire sur papier nos révoltes et nos désirs. «Alternative Liber-
laire», un journal mensuel, Et puis, une maison d'édition. Hier à l'image du manuscrit-
témoignage d'Albert Balencour. Aujourd'hui, publiant «L'Fnjure» de Jules Brunin.
La philosophie de notre démarche d'édition tient en trois points:
* D'abord privilégier les livres écrits à la première personne du singulier. Des livres qui
osent dire «je», et, ce faisant, décrivent la trajectoire d'un individu en mouvement dans
une réalité sociale qu'il transforme.
* Ensuite, publier des manuscrits qui nous rendent à nos racines. Pour encourager le pas-
sage de notre patrimoine d'expériences d’une génération à une autre. Pour ne pas répefer
les mêmes erreurs, les mêmes mythes. Expliquer pourquoi aujourd’hui est sorti d'hier.
x Enfin, éditer des paroles de chez nous. La Belgique qu’on connaît parfois moins bien
que la France. Les mille et une vies qui refusent, transforment, construisent, ici et mainte-
nant, une société différente.
Ecrivons aujourd'hui ce que nous voulons pour demain.
Pierre D'Haenñens, Sébastien Houtart, Christiane Vanierschot,
Roger Noël-Babar, Claire Berge, Catherine Deman
un texte qui dérange l’ordre établi
J'imagine fort bien que, pour l'Empereur de Rome, le récit de la vie du
Christ devait être subversif. Un texte à proscrire parce qu'il dérangeait con-
sidérablement l’ordre établi. Le livre de Jules Brunin recèle toute la subver-
Sion qui naît de la conjonctioon amour-souffrance. Il fera scandale. Il sera
peut-être saisi parce que dans notre société, on ne peut jamais se substituer
à la justice pour régler ses comptes avec des personnes bien déterminées.
Et pourtant, on se met à rêver. Ne faut-il pas souhaiter que cet extraordi-
naire témoignage humain qui suinte des «maisons d'enfants» et des «pri-
sons» puisse être connu de beaucoup ?
Souhaiter même que les plus meurtris par ces coups de griffe aient la gran-
deur de renoncer à leur droit de réplique légitime au nom d’une «diffé-
rence» qui s'appelle la souffrance d’un homme, et qui mérite parfois qu’on
fasse semblant de ne pas avoir entendu l’injure ? Pour que l’injure dispa-
raisse et que ne subsiste que le témoignage forçant la réflexion. Et que
vienne l'aube d’un monde différent qui comporterait moins d'enfants mal-
heureux.
J'ai Pair de plaider. Non. Je me borne à essayer de comprendre. au-delà
Le injures nées dans la détresse, ce qui ne va pas et ce qu’il conviendrait de
changer.
Guido Van Damme
Il reste une lueur
Jules Brunin, un nom comme une souffrance qui n’en finirait plus, en
.déchirant une-vie d'enfant, de lacérer l'espoir d’un homme.
Jules Brunin’ deux mots parfois Espoir, malgré tout, parce que au fond de
Millusion noire, du désespoir aveugle, dans toute vie farouche, il reste une
lueur alors que tout s'éteint.
Delivre.en livre, Jules Brunin nous conte le malheur. Est-ce le sien ? Ou
celui de tous ces gosses errant à l'abandon, de home en home, où l’amour
est une famine de cœur ?
De livre en livre, Jules Brunin raconte. Il dit des futurs sans avenir ou nul
matin ne s'éclaire de soleil; des lendemains qui fredonnent des chants de
prison, qui hurlent, enfin, vers une justice humaine, figée et sourde, une
colère impuissante.
Charles-Laurent Gondanoff
Périodique mensuel
Supplément à Alternative Libertaire n°67
Novembre 1984
2, rue de l’Inquisition,
1040 Bruxelles - Tél. 02/736.27.76
Editeur responsable: Noël Roger
C.G.E.R. 001-1632181-38
Destinataire:
Taule Érrance
d’Albert Balencour
150 pages
Préface de Michel Cheval
300 francs avec frais de port
au compte 001-1632181-38
Jules brunin
Albert Bslencour
TAULE-ERRANCE
L’Injure
de Jules Brunin
300 pages
Présenté par Guido Van Damme
350 francs avec frais de port
au compte 001-1632181-38
l’injure
Jules brunin
auteur de «l'enfer des gosses»
à propos de son troisième livre:
Ecrire, c’est être seul avec soi-même, un très long moment.
C'est être partagé entre sa vérité et ceux que l’on aime.
C’est aussi prendre le risque de tout perdre
en vivant une sorte d’extase fiévreuse
où les signes et les mots n’ont jamais de fin.
Avoir élé le témoin de l’intolérable et le garder pour soi,
c’est vouloir rester solitaire et n'être qu’un lâche
honteusement accroupi devant son miroir.
Mais ne pas se taire, c’est par avance accepter de s'assumer
dans le fragile espoir que d'autres
trouveront le difficile chemin de la vérité.
Les angoisses vécues filtrent
au travers du prisme de la douleur
à l'instant même où celle-ci est la mieux ressentie.
Dès lors s’imprime un langage aigu
marqué de l'empreinte indélébile
de celui-ci, porté au paroxysme.
Mes souffrances, leurs souffrances, ont été intolérables
et nous en garderons les stigmates notre vie durant.
À la lecture du présent ouvrage, que chacun réagisse
selon ses conceptions, ses préjugés et sa conscience.
Quant à la mienne de conscience,
que l’on se rassure, elle se porte bien.
Jules Brunin
— > |
x el =,
n avec ce
t avec Napo-
hilosophie de la misère
creuset de l'idéologie fasciste en
France.
du côté liber-
Dès ses origines, l'Action française consi- |
dère l’auteur de Philosophie de la Misère comme
un maître. Le philosophe tient une place de choix
dans la chronique hebdomadaire précisément inti-
tulée Nos Maîtres. Cette place que lui consacre
l'Action française, Proudhon la doit, bien sûr, à
ce que les maurrassiens considèrent comme son
anti-républicanisme, son antisérmistime, sa haine
de Rousseau, son mépris pour la Révolution, la
démocratie et le parlementarisrne, son apologie de
la nation, de la famille, de la tradition et de la
monarchie (Ni droite, ni gauche, Zeev Sternhell -
Seuil, page 71).
Succulent pour un anarchiste? Non! De plus,
il n’a jamais été apprenti mais propriétaire d’une
imprimerie qu'il vend en 1843. Le 4 juin 1848, il
dur, dur..."
La lecture de l’article sur l’objection liber-
taire m'a profondément marqué pour cause que
cela rejoint mes pensées, Mais voilà, j'ai un gros
problème, c’est que je suis un penseur né et pour
libérer toutes mes pensées, c'est dur, très dur.
Comme dit mon paternel: «Quand oseras-tu
t'exprimer?». Bonne question, mais de là à la
mettre en pratique, c’est autre chose (sauf quand
j'ai bu un verre...).
Ce n’est pas la peur de m’exprimer, c’est que
cela ne veut pas sortir. Je suis, en d’autres termes,
un taiseux de nature. Est-ce que cela se guérit ? Si
vous connaissez un remède, vous me libèreriez
d'un immense boulet que je traîne depuis long-
temps,
C'est un rêve, ou plutôt un profond désir,
que de m'exprimer librement, Vous ne pouvez pas
savoir comme aime écouter des gens sensés, lire |
des choses sensées, écrire des: trucs sensés. Mais |
pouvoir faire sortir mes idées sensées (7), cela
serait génial. Enfin, cela arrivera peut-être un
jour.
La lecture d’Alternative Libertaire me fait
comprendre beaucoup de choses qui restaient
pour moi un point d'interrogation. Maïs il y a des
points de l'idéologie libertaire qui me semblent
fort utopiques. Est-ce que je comprends mal? A ce
sujet, j'aimerais avoir plus d'informations sur
cette idéologie (par exemple des titres de bouquins
qui m’aideraient à mieux comprendre — nd:
pourquoi ne pas passèr un de ces jours à
l'Alliance Libertaire ?}. De toute facon, dans mon
genre, je me considère comme marginal mais un
marginal assez limité dans ses actes. Je suppose
que la peur de l'autorité y est pour quelque
chose.
Philipper Charlier
dit «Fe»
vOS droits
Souvent désorientés face à des légis-
lations compliquées et à des institu-
tions rebutantes, des jeunes — de
plus en plus nombreux — onf pris
l'habitude de s'adresser au C.J.E.F.
(Conseil de la Jeunesse d’Expression
Française de Belgique) pour recevoir
conseils et informations.
C'est pourquoi il a décidé d'éditer deux
dépliants, l’un portant sur l'apprentissage dans les
classes moyennes, l’autre — d'une brûlante actua-
lité — sur la prolongation de la scolarité.
Ces deux dépliants sont distribués gratuite-
ment sur simple demande auprès du secrétariat du
C.J.E.F.
«Apprenti, avec nous défends tes droits»
répond à diverses questions relatives au contrat
d'apprentissage. «Que faire de l’obligation sco-
laire... quand on a entre 14 et 18 ans?» passe en
revue les diverses possibilités qui s'offrent aux jeu-
nes soumis à l’obligation scolaire: temps plein,
ternps partiel, formation, apprentissage...
C.J.E.F.
78, Galerie Ravenstein
1000 Bruxelles
Tél. 02/513.94.40
Ext. 45 ou 39
ALTERNATIVE LIBERTAIRE - ASBL 22 MARS - N° 67 - Novembre 84 Pages
| un exemplaire à chaque secrétariat d’organisa- |
est élu à Paris à l’Assemblée Nationale! En 1849,
il se réfugie en Belgique, condamné par les Assises
de la Seine. Mais il a le mal du pays (!}, retourne à
Paris et s'y fait arrêter. Il reviendra en Belgique, à
Bruxelles, de 1858 à 1862.
En 1851, il publie Zdée Générale de la Révolu-
rion au XIX® siècle, qu’il dédie par ces mots: «….
A vous Bourgeois, l'hommage de ces nouveaux |
essais; vous fûtes de tout temps les plus intrépides,
les plus hardis des révolutionnaires». Pas mal
pour un anarchiste? Non! pal
Olivier
singes
dangereux
J'ai beaucoup apprécié vos pages sur Le Pen.
schaer beek-sur-misèr
e Tiroirs vides, ventres creux. Quand les fascistes boivent, le
quent.
+ Depuis le 10 septembre, le Centre Public d'Aide Sociale de
ne paie plus le minimex (minimum d'existence) à quelque 1\
et isolés. Ces personnes se refrouvent ainsi sans ressources. L.
des Finances saisit des sommes dues par l'Etat au C.P.A°S: pourre
vrer des arriérés de sécurité sociale. Me
e Pour faire face à la situation, des organisations de charité (telles Sa nt-
Vincent de Paul, les Petits Riens) apportent une aide matérielle aux,
nécessiteux. Voici revenue l’époque des dames patronnessesL'aven |
incertain. Verrons-nous directement le XXI° siècle ou referons-nous "un.
petit détour par le XIX°?
mais je me méfie malgré tout. Certes, ni Hitler ni Ÿ
Bénito n’ont débuté ainsi,
Par contre, d’après des informations enten-
dues (notamment de mes parents), cela ne me
semble pas étranger aux tout débuts de Degrelle:
ridicule d’abord, mais qui fit un «boum» peu
avant 1940. C’est l'attaque allemande qui a poussé
beaucoup de rexistes à faire marche arrière, Mais
sans cette attaque, il reste probable que le rexisme
aurait encore gagné des voix.
Or la période actuelle — malgré de nettes dif-
férences — évoque malgré tout la lutte de
l'extrême-droite contre toute formation centriste
ou gauchiste (mal définies) ou anarchiste relative-
ment analogues à celles qui ont conduit au «Front
Populaire» en France.
Les Le Pen, Gol et autres singes dangereux ne
seraient-1ls pas — avec Nols et Simonet — les
rejets maudits de toutes les grèves de France et |
d’ailleurs : aussi bien mai 68 que nos grèves 1919-
1921 où la grève des tramways fut généralisée et
aboutit à la création de l’«Union civique belge»
dont le seul but (avec l’armée!) fut d'essayer de
comportement actuel de «nos» concitoyens,
l’aisance de certains, je ne serais étonnée de rien.
P.S. - Je me réjouis d'en apprendre sur |
«l'Association des Jeunes Marocains de Molen-
beek», C'est ma commune et je sais trop lopinion
des Belges.
CI.
e . GE
tout Savoir Fier
s .e.e
La Confédération des Organisations de Jeu-
nesse, indépendante et pluraliste, (COJ) a réalisé
un Fichier Technique d'information destiné aux
responsables des quelque trois cents organisations
de jeunesse et centres de jeunes reconnus par la
Communauté Française, Ce fichier se veut une
réponse concrète aux questions que se posent quo-
tidiennement ces responsables dans la gestion de
leur organisation: où s'adresser pour une aide à
l'animation, la formation; un prêt de matériel,
subside en équipement, un échange de jeunes,
etc..; quelles formalités respecter lors de la créa-
tion d’une asbl et pendant son existence; comment
conclure un contrat de travail; comment intro-
duire un projet dans le cadre de nombreux circuits
parallèles du travail (CST, TCT, FBI, etc...);
comment tenir une comptabilité, établir un bilan,
etc; quelles sont les différentes structures interna-
tionales de la jeunesse?
Subsidié par le Conseil de la Jeunesse
| d’Expression française (C.J.E.F.) et le Service de |
la Jeunesse, le fichier sera envoyé gratuitement en
tions de jeunesse, de centres de jeunes et, par
extension, aux secrétariats d'organisations d’édu-
cation permanente des adultes.
Pour obtenir des exemplaires supplémentai-
| res, introduire une demande auprès de
Brigitte Mertens |
Service de la Jeunesse
Galerie Ravenstein, 78
1000 Bruxelles
LE PEN, NOLS, GOL.... DES SINGES DANGEREUX
du poison
pour le tiers-monde
briser cette grève, parfaitement légitime. A voir le LEE RE
| Jusqu'à présent, la loi arnéricaine
interdit l'exportation de médica-
ments et de produits prohibés aux
U.S.A. La Food and Drug Adminis-
tration, l'organisme
d'approuver les nouveaux produits
introduits sur le marché arnéricain,
exerce un contrôle très sévère et veille
soigneusement sur la santé des con-
sommateurs américains.
Sous prétexte de créer des emplois et avec
| l'appui de l’administration Reagan, un projet |
| d’amendement, suscité par les firmes pharmaceu- |
tiques, a été déposé au sénat par les sénateurs
Edward Kennedy et Orrin Hatch. [l autorise la
fabrication et l'exportation de produits pharma-
ceutiques interdits aux U.S.A, pour autant que le
pays importateur soit doté d'une autorité compé-
tente en matière d’enregistrement des médica-
ments, reconnue par la F.D.A. ét que cette auto-
rité autorise l’importation de ces produits. En
l'absence d’un tel organe, on procëdera par analo-
ge avec un pays reconnu et c’est la F.D.A. qui
aura soixante jours pour prouver que le produit
risque de porter préjudice à la santé de la popula-
tion de ce pays. C’est donc la F.D.A. et non plus
l’exportateur qui devra, dans un délai très court,
prouver l'inacuité du médicament.
Les pays du tiers-monde sont déjà surchargés
de médicaments inefficaces, superflus, chers,
voire même dangereux et interdits dans leur pays
d'origine, alors qu’il y a une carence grave en
médicaments de base essentiels. Ïl nous faut réa-
gir, la santé des peuples du tiers-monde en
dépend. Cette loi, une fois votée, ne pourra
qu’aggraver la situation et prêter à des abus. De
| plus, elle créera un grave précédent alors que la
plupart des organismes internationaux (ONU,
Parlement européen, OMS) légifèrent pour l’ins-
tant en vue de mieux contrôler la qualité des.
exportations vers les pays du tiers-monde.
chargé.
food and drug administration
Grâce aux multiples réactions venues de
Pétranger et des Etats-Unis eux-mêmes, le projet
n'a pas été voté. Il est urgent d'écrire aux séna-
teurs Kennedy et Hatch pour leur faire part denos
préoccupations à ce sujet, manifester notre
inquiétude et leur demander de relire cet amende-
ment dans l'intérêt des peuples du”tiers-monde.
Ces lettres peuvent être envoyées à l'adresse sui-
vante:
Senator Orrin Hatch
Senator Edward Kennedy
U.S. Senate | -Sud Solidarité
Washington DC20510 Ts de Londres
U.S.A. 1050 Bruxelles
chômeur
droits
SOCIAUX
| «Calcul et taxation des allocations de
chômage», tel est le titre de la bro-
chure que vient d'éditer «Promotion
des Droits Sociaux».
La première partie de cette brochure 4 pour
but de montrer comment se fixe le montant des
allocations de chômage. Celui-ci dépend de trois
éléments : la dernière rémunération brute, la caté-
gorie à laquelle appartient le (la) chômeur(se),
c'est-à-dire: chef de ménage,
cohabitant(e), la durée du chômage.
En deuxième partie, la brochure aborde"le
problème du nouveau mode de taxation des allo-
cations de chômage en vigueur depuis le 1°" janvier
1984.
Promotion des Droits Sociaux
rue de la Porte Rouge, 4
1000 Bruxelles
Tél. 02/512.71.57
isolé(e), +
14
Rare
ICT
ee.
LTÉE
AL
[l
Ë
Je prostitue mes pensées pour un salaire
d’illusion à me faire croire que…; je prostitue mes
\ pas et mes actes pour.un salaire de misère, pour un
k salaire d’utopie à croire que là-bas, tout là-bas, les
L choses de la vie iront nettement mieux, probable-
ment mieux, du moins toujours mieux qu'ici. Là-
bas, ça doit toujours être meilleur qu'ici. À peine
ai-je fini de penser cela que déjà me monte au
cœur un goût marqué d'incertitude, Je connais
bien, même très bien, la puissance destructrice du
rêve et celle du mirage de l’espoir. Le prix à payer
ici est lourd de conséquences, Ici, au rembourse-
ment du rêve et de l’espoir, pas de crédit. La souf-
k france et la désillusion se paient cash d’une mon-
naie en constante réévaluation.
Elêner et se dissoudre dans cette masse
k gluante et aveugle.
Mourir dans cette masse stupide et répu-
gnante, pourquoi pas ?
Où trouver en ville un endroit stratégique
lorsqueipris d’une certaine nausée, d’un certain
dégoût profond de ce qui nous entoure, de ce qui
nous agresse, l'envie brûlante de vomir la moindre
, des choses que l'on touche, regarde, nous prend
avec force au point de se voir submergé brusque-
ment par une tempête de larmes? Où ? Où, sinon,
dans les W.C. publics, Malheureusement là aussi,
il nous faut faire attention, car en toute vraie
DAS
&)
est pas très conseillé d'y rester trop
ns quoi on vous prendra pour un
lésaxé de première catégorie, «Que
faire si longtemps enfermé dans les
homme-là?», sé demandera Madame
hiottes c'est pas fait pour chialer mais
bienpour chi... Dans ce monde où tout est vitesse
et cadence, production et consommation, les
W.C. eux-mêmes doivent avoir un rythme de pro-
duction et de consommation, pour ne pas dire une
cadence soutenue — il n'y à pas que les boulons
qui se font à la chaîne —, sinon la rentabilité de la
lunette ne nourrirait plus son homme, plutôt sa
femme. Les W.C. sont là pour se vider de la phase
bucale de notre existence, ils ne sont pas là pour
les constipés de la soupe quotidienne. Non, pour
eux, il existe une autre sorte de cabinet.
Ce n'est pas du coryza dont souffre le trou-
peau, mais d'un état de sénilité profond et mal-
heureusement permanent, à se demander s’il existe
vraiment une différence entre un troupeau de
bovidés et un troupeau d’homidés ?
Le premier avance et l'instinct grégaire fait le
reste.
Du reste, les éleveurs y trouvent leur juste
compte; alors pourquoi vouloir changer quelque
chose à cet état de fait, puisque tout est bien dans
le meilleur de leur monde.
Lorsque par hasard il y a surplus de viande
par rapport aux capacités des infrastructures du
pluricontrôle, «ils» s’arrangent entre eux pour
organiser des corridas et des jeux de cirque à
grande échelle, pour ne pas dire à l’échelle mon-
diale. Le troupeau s’en ira une fois de plus, les
oreilles pleines de chansons stimulantes et glandu-
laires, du plomb plein la cervelle vers un avenir
sans devenir.
Le troupeau est une entité amorphe, qui ne se
connaît plus d'envie. Il évolue dans une transe
quotidienne rigide et monochrome vers des jours,
des semaines, des mois et des années désertiques.
Le troupeau broute n’importe quoi par réflexe. Il
trouve de nouvelles saveurs 14 où il n’y en a pas, là
où on lui dit d’en trouver.
Non content d’être sourd et aveugle, il peut.se
vanter d’être stupide et lâche.
Il me revient une histoire à la mémoire, celle ls
d'un singe de cirque qui, un jour de représenta-
tion, refusa purement et simplement de faire son
numéro. Sans paniquer, le dresseur lui présenta
une banane; l’animal ne broncha pas d’un poil. Le
jouets. | :
Le M.A.E.P., se référant à la résolution
adoptée le 13 septembre 1982 à Strabsourg par le
Parlement européen, interdit pour cette Foire les
jouets de guerre «répliques exactes» et de science
fiction. À 2
Animation prévue tout au long de cette mati-
née: stands d'info, musique, théâtre, affiches...
Pour renseignements complémentaires:
02/672.36.59 (le soir), 673.52.01 (en soirée),
672.66.84 (la journée), 523.80.80, ext. 2694 (de 9
à 12h).
M.A.E.P.
71, avenue Schaller
1160 Bruxelles
au £gu é protéines
Parmi les prochaines activités du Gué, Centre
Thérapeutique et Culturel, pointons :
-le vendredi 23 novembre à 20h: André, Lydia et
leurs amis musiciens folks animeront une soirée
avec leurs guitares: ragtime, bluegrass, irlandais,
blues, ainsi que nombreux autres styles et rythmes
endiablés,
-le mercredi 5 décembre à 20h: Frère des Hommes
présentera un film sur le problème de l’alimenta-
tion: La faim, moi jamais ou l'étrange voyage des
protéines consacré aux cultures extensives dans le
Tiers-Monde, au gaspillage qui nous rend mala-
des. Le cas des circuits de la viande est exemplaire
du mal-développement alimentaire mondial.
Le Gué asbl
300 chaussée de Roodebeek
1200 Bruxelles
Tél. 770.53.97
VE ON 1 r
ki E5
dompteur lui en apporta une seconde, après quoi Is0#
le bestiole effectua son travail, et le brave public
pris dans le jeu de la supercherie applaudit cette È
belle prouesse, se disant que l’animal était quand
même bien malin.
Le troupeau rêve, Il veut de plus grandes mai-
sons, des loisirs mieux guidés et mieux organisés,
une alimentation industriellement plus saine. On
lui apprend à vouloir ce qu’on veut bien lui don-
ner, et le voilà criant victoire.
Les Hommes du troupeau sont devenus des
somnambules, ne connaissant plus leurs propres
{
désirs.
L'Homme du troupeau est quelqu'un de
dépossédé, même son ombre ne lui appartient
plus. Il ne découvrira son ombre que si on le lui
permet, et si par un cruel hasard il la découvre, il
se rend compte qu'il est en train de perdre la subs-
tance de son corps.
L'homme du troupeau n’est, ni ne pense, il
fonctionne,
Serait-il à bout de course? Est-il à la fin d’une
ou de sa trajectoire? Combien de temps encore
ira-t-il déambulant dans ce bourbier, dans ses
décombres de vie, dans ses débris de rêves sans
formes ?
Pourtant l'Homme du troupeau se dit heu-
reux grâce à Dieu, car il travaille, produit pour sa
progéniture. et ses maîtres, ainsi gagne-t-il le droit
de vivre. Soumis, il travaille comme uñe bête toute
sa vie pour en fin de compte se payer une belle
mort. En fait, au plus il aura travaillé, et bien tra-
vaillé, au plus ses cons-citoyens lui feront un bel
enterrement, allant même jusqu’à se rappeler avec
une certaine émotion tous les bons côtés de ce der-
nier; ils iront même jusqu’à l::i trouver des quali-
tés de dernières minutes.
Le salaire du troupeau; une vie stupide avec
la possibilité d’un bel enterrement!
Et moi, que me reste-t-il dans cette fatalité de
tous les jours, vais-je marcher et beugler au
rythme de ce troupeau dont je fais initialement
partie? Vais-je fermer les yeux et gentiment brou-
ter, ou prendre le risque de repartir, le cœur et le
cerveau déchirés et en lambeaux?
Pour le moment, je vais me rouler un stick et
me fondre dans les bras de Morphée. Un peu de
cendre sur le coin de la bouche et la nuit douce-
ment recouvre de son manteau pourpre
L'Eta...ble, où le troupeau sommeille d’une nui-
téc sans rêves.
Camille
- ASBL 22 MARS - N° 67 - Novembre 84 - Page 16
guerre froide
LJ
1°" mai
Le Comité du 1° Mai a été fondé le 1° mai
1977 pour sensibiliser la gauche et l'opinion démo-
cratique belge aux problèmes de la répression et de
ja dissidence dans les pays de l'Est. IlLa, au cours
des sept années écoulées, déployé demultiples
activités, avec des hauts et des bas: forum intérna-
tional début 1978, solidarité avec la Charte 77 puis
avec la Pologne, bulletin «D'’Ici d’Est», etc...
Aujourd'hui, la situation a fortement évolué:
1°les contradictions et les crises à l’Est se sont
multipliées. La voix des dissidents autrefois peu
entendue est largement écoutée désormais en
Occident. L'image de l'URSS s’est profondément
dégradée dans l’opinion, y compris de gauche,
surtout depuis la Pologne et l'Afghanistan;
2° un climat de guerre froide s’est installé dans les
relations Est-Ouest. L’antisoviétisme — que nous
réjetions dans notre manifeste de 1977 — est
devenu un leitmotiv, non seulement pour la droite
mais pour une partie de la gauche notamment
intellectuelle, qui nous invite à faire front devant
le péril totalitaire et militaire incarné par l'URSS:
3° simultanément, les préoccupations de crise chez
nous ont partiellement détourné l'attention des
mouvements politiques et syndicaux de ce genre
de problèmes (libertés à l’Est) pour lesquels est né
notre comité,
À situation changée, réflexion nouvelle: com-
ment nous situer ? Que faire? Où en sont les diver-
ses composantes de la gauche face au «socialisme
réel» et à la tension Est/Ouest?
Ces questions seront évoquées au cours d'une
sorte d’assemblée «baromètre», le 24 novembre à
14 heures.
Comité du 1° Mai
Av. du Bois de la Cambre, 16
1170 Bruxelles
mort
… enterrement
L'homme cache sa mort
comme il cache son sexe
comme il cache ses excréments
Edgard Morin
Même devant la mort, il n’y a pas d'égalité, A
ma gauche, les fossoyeurs, la classe ouvrière; à ma
droite. En fait, il n’y a qu’une sorte de mar-
chands: entrepreneurs de pompes funèbres, pré-
tres, communes. Sous couvert de services, ils
visent le profit et devant une famille en détresse.
obligée de consommer...
Toilette du défunt, mise en bière, faire-part et
annonce, cercueil, capitonnage, poignées, garni-
tures, Croix, fleurs, plaques, funerarium, chambre
funéraire, permis d’inhumer, transport, etc.
c’est l'entrepreneur (à choisir librement et sans se
presser).
Messes, lectures saintes, bénédictions, ser-
mons et ringningnin, c’est le curé (à éviter).
Concession de sépulture (*), transfert, urne
des cendres, etc... c’est la Commune.
Tout cela est-il indispensable ? Pas vraiment.
Moi, je me passerai du curé ét du bazar macabre
«offert» par les vautours de la mort. Il y a moyen
de simplifier, Mozart a bien été à la fosse com-
mune. il y a moyen de supprimer le tape à l'œil, le
superflu et une série de convenances, rites et tradi-
tions. Savez-vous par exemple qu’en France,
depuis mai 1976, il est possible de transporter un
corps sans cercueil dans son propre véhicule, de
l'hôpital à son domicile, dans un rayon de 200 km
et durant 18 à 36 heures, si des soins de conserva-
tion ont été effectués. On peut également véhicu-
ler soi-même un cercueil avec l'autorisation du
maire; il faut payer une taxe. de sortie à la com-
mune où a lieu le décès ainsi qu’une taxe d’entrée
à celle où doit avoir lieu l’inhumation! Les morts
ne votent pas, cet appel à l'égalité devant ja mort
restera donc lettré morte.
(*) Pas d'égalité, pas de justice dans les taxes pour
concession, Cela peut aller de 200 FB les 2m° dans
une commune rurale à 30.000 FB, voire: plus en
ville... Où l’on voit des snobs, radins des villes,
acheter une concession dans un charmant petit vil-
lage. En Italie, à Rozzano, deux gratte-ciel de
vingt étages accueillent quelque 15.000
dépouilles..… la recette pour monter enfin dans
l'échelle sociale.
PS, À Voir: Des Morts de Thierry Zéno, film
sur les rites qui accompagnent la mort.
Baud’huin Simon
Alias <R» comme R
de dispersion des cendres
71, rue d'Hoffschmidt
6720 Habay
sexisme
embauchez
des mâles
Le saviez-vous? L'arrêté royal du 24 décem.
bre 1968 sur le travail des femmes (Moniteur 31
décembre, Err. 6, février 1969, art. 1°), après mai
68 donc, est toujours d'application et stipule qu'il
est interdit d'occuper des travailleuses aux travaux
énumérés ci-après :
1° les travaux de peinture comportant l’usage de la
céruse, du sulfate de plomb ou tout produit conte-
nant ces pigments, pour autant que ces produits
renferment plus de 2 p.c. de poids de plomb cal-
culé à l'état métallique;
2° les travaux comportant le transport manuel de
charges dont le poids excède 27 kg. On entend par
transport manuel de charges au sens de la présente
disposition tout transport où le poids de la charge
est entièrement supporté par une seule femme, y
compris Le soulèvement ou la pose de la charge;
3°%les travaux comportant le transport manuel
régulier de charges dont le poids excède 15 kg. On
entend, au sens de la présente disposition, toute
activité consacrée de manière continue ou essen-
tielle au transport manuel de charges ou compor-
tant normalement, même de manière discontinue,
le transport manuel de charges. I! faut 4,6 fem-
mes pour soulever un malade de 70 kg. donc les
infirmières ne peuvent soulever des malades adul-
tes, Embauchez donc des mâles et renvoyez les
femelles à leurs casseroles.
4°les travaux manuels de terrassement, de
fouille et d'excavation du sol;
les travaux manuels effectués dans les caissons
à air comprimé.
Organisation Populaire
contre l’ Arbitrage
1030 Bruxelles
PROSTITUER SES PENSEES POUR UN SALAIRE
EN ‘do , où VFILAIT ”
octobre 84
vu par patrick
prqee
HET
cartoon: en décembre,
anniversaire: le 1! novembre,
à ÿ 5 DE MERS
salut au drapeau dans les écoles et les églises «crayon noir» sur l'orwellienne a
en janvier 85 notre dossier spécial des idées, des sensations, des répu
sur l’insoumission et l’objection… une lettre par la poste, pari
IRA TARUZELSKI GANDHI
GENDARME
vs
En D 7:
Le ZA", JE 283
” ÊEe à
économie: après la manifestation
devant l'ambassade du chili à bruxelles,
exportation de flics bruxellois vers santiago ?
haute finance:
la bbl lache la sidérurgie wallone
et investit dans la bande dessinée; spirou,
nouveau larbin.. du banquier albert frère
gravure + écriture
= édition
Dans le cadre des activités de l'Académie
Internationale d'été, une expérience:
Gravure + écriture = édition. Dans-un-climat
de liberté totale au niveau.de la création”, les
stagiaires réaliseront des images et des textes
sur un thème commun qu'ils auront choisi
ensemble et en feront une édition.
Les animateurs sont: Michel Barzin poursla
gravure et Michèle Beaujean pour l'écriture:
Tout le travail se déroulera dans les locaux de
l’Académie des Beaux Arts de Verviers du 26
au 30 décembre prochain.
L'hébergement est assuré dans le domaine de
Séroule, Logés, nourris, heureux, le tout
pour 4.000 francs. Que voulez-vous de plus?
Académie Internationale
d'été de Wallonie
15, rue de l’Eglise
6930 Grupont
élections américaines: en jouant.au yo-YO
avec le dollar, reagan fait ses armes
sur mondale
|
fric frac:
k. tous les partis allemands
mouillés par les pois de vin,
œ helmut kohl bientôt noyé?
escadrons de la mort:
jaruzelski débordé
Sur sa gauche-droîite
gauche-droite, gauche-droite…
_——
eme side
cosa nostra :
les capos de la mafia
se mettent à table’
et font tomber des têtes.
gouvernementales ? 70h =
Ô
67 - Novembre 84 - Page 17
PIF PAF POUF, LES CHEFS D'ETAT TOMBENT COMME DES MOUCHES ALTERNATIVE LIBERTAIRE - ASBL 22 MARS -:
arr y
ctobre, nous consacrions
ence donnée en mars der-
et Anarc >, Ce texte nous avait
reconstituer au fil des siècles le chemin
ne série de personnalités à la fois liber-
t maçonnes. Son seul défaut, qui était sa
é même, était de nous parler de l’histoire, de
ter silencieux sur la situation actuelle des anar-
istes maçons.
est cette lacune que nous comblons aujourd’hui
- reproduisant une interview d'une franc-
4 rement sur la misogynie d’une certaine franc-
| maçonnerie.
Ensuite, pour compléter notre enquête, nous avons
1 rencontré un anar-maçon des années 80. Pour la
\ facilité, nous l’appelerons «Paul». Il est membre du
u «Droit Humain», cette obédience fondée au début
de ce siècle, séparée du Grand Orient sur la ques-
tion pour eux et pour elles fondaméèntale de la
mixité. Pour mieux cerner notre interlocuteur, nous
à dirons qu'il a un passé de militant activiste, C’est
par le crochet du mouvement communiste qu'il a
; adhéré aux opinions libertaires. Avouons que les
cocos l’ont poussé dans le dos: il fut exclu du Parti
Communiste pour non-suivisme patenté de la juste
ligne. Une graine d'autonomie de pensée qui sem-
blait tout naturellement le conduire vers les rivages
anarcho-maçons.…. Babar
è
«Tous
les maçons
occidentaux
sont d’accord
sur un point :
la défense
de la laïcité»
F
Alternative Libertaire: Léo Campion nous a
dressé un tableau idyllique historique des relations
entre l’anarchisme et la franc-"naçonnerie. Y a-t-il
encore une place aujourd’hui pour les.ararchistes
dans la franc-maçonnerie de 1984? La rencontre
du 19° siècle est-elle due aux circonstances du
moment ou est-elle dans ses principes mêmes tou-
jours d'actualité? Pourquoi toi, libertaire, es-tu
entré dans une loge ? Quelle est pour toi la zone de
rencontre entre les deux? |
Paul: En fait, peur moi, la FM est un lieu de ques-
tionnement, de culture du doute. Un lieu où tout
peut être dit, où toutes les idées toutes faites peu-
vent être remises en question dans le cadre d’un
rituel particulier, C’est un lieu où je me suis senti
accepté tel que j'étais, anarchiste, avec mes idées
précises, bien ancrées en mai... C'est un lieu de
dialogue avec les autres, d'échange idéal, de déve-
lopperment personnel. Ce que je te dis là, c'est déjà
t'expliquer la zone de rencontre immédiate entre
anarchisme et franc-maçonnerie. Le refus de tous
les dogmes, de toutes les vérités toutes faites, sur
mesures. Une façon d'aborder la réalité de
manière assez sereine, Une façon de rérnettre en
cause les rapports autoritaires d’une société que
nous refusons,.
une structure
4 rs Li
où le pouvoir
.° à» ana AE né
n’est jamais définitif
La structure de la loge est une structure démocra-
tique, dans le sens libertaire de la «démocratie
directe», Le pouvoir n'est jamais acquis définiti-
vement par quelqu'un sur le dos des autres. Par
exemple, les responsabilités jusqu'au plus haut
niveau ne sont déléguées à des individus que pour
une période maximum de deux ans, jamais renou-
velable, Cette démocratie absolue a aussi ses exi-
gences: le «vénérable maître» d'une loge, même
s’il est des plus brillants, ne pourra l'être que pour
une période de maximum deux ans ét ce une
seule fois dans sa vie. Une manière de provoquer
la rotation obligatoire pour les postes de responsa-
bilités. Une façon de Abnner à chacun la possibi-
té de se découvrir, de se réveler à un poste de
«pouvoirs. Une obligation de retour à la base
aussi, pour ceux qui l’ont assumé, Une attitude
pas très sécurisante pour des individus qui ont tou-
jours été habitués à obéir dans le cadre précis
d’une hiérarchie, en famille, à l'armée, au
Pourquoi je Suis franc-maçonne
Paul: Le projet de société libertaire égalitaire n'est
effectivement pas celui de tous les F.M. D'autre
part, soyons lucides et constatons que tous les
mouvements sociaux déterminants ne sont pas
lancés par des «masses égalitaires» mais le plus
souvent par des minorités «éclairées». Ce n'est pas
être élitiste que de constater cette vérité. Rappelez-
vous mai 68 et le petit noyau d'étudiants de Nan-
terre qui provoquérent les événements et la grève
générale, Leur mouvernentn'était pas celui d’une
éhte et c’est pourtant un tout petit groupe qui l'a
lancé.
Je dois cependant à la vérité de dire qu'il n’y a pas
des masses de travailleurs manuels ou de chô-
meurs dans les loges, C'est certain que, sociale-
ment, on y trouve plus de professions libérales ou
d'enseignants que de plombiers... Ce n’est pas une
volonté délibérée de notre part. C’est souvent dif-
ficile pour moi de le vivre, Je veux dire que c'est
très ambigu. La lutfe pour la justice sociale et
pour le bien-être collectif est une lutte fondamen-
tale, indiscutablement, mais l'expérience nous
montre que donner la priorité aux changements
de structures sans changer l'homme, c'est un
leurre. On ne peut transformer la société sans se
transformer soi-même. Il ne suffit pas de nationa-
liser l’industrie pour obtenir une société harmo-
nieuse et autogestionnaire, Et je dois constater
que s'ilexiste un milieu où l’on n'a pas la possibi-
lité de se remettre individuellement en question,
c’est bien le milieu ouvrier, La F.M. c'est la remise
en question permanente de tous les dogmes, His-
toriquement, je constate que les organisations:
politiques ou syndicales (socialistes ou communis-
tes) qui luttent pour l'émancipation des travail-
leurs ne sont pas particulièrement adeptes de cette
remise en question. S’il y a si peu d'ouvriers en
FM, c'est, je crois, en partie parce que leurs orga-
nisations les ont surtout habitués à suivre aveuglé-
ment la «juste ligne», en définitive des dogmes
inattaquables, plutôt que de réfléchir par eux-
mêmes. Cela n'excuse rien maïs explique en partie
le constat actuel,
Le parti n'est pas tout
Vorelles - Las consélence, l& primauté
de l'individu n'est-ce pas en contradic-
Marthe Van de Meulebroeke, c'est une des premières figures que j'ai connues du féminisme
belge. Elle animalt, avec d'autres, le comité « A travail égal, salaire égal » créé au moment de
la grève des femmes de la FN pour l'égalilté des salaires.
Je n'a! pas été étonnée de la savoir soclaliste. Mais quand j'ai appris qu'elle était franc-
maçonne, je me suis posé des questions. Comment faire partie d’une loge alors que beau-
coup d'entre elles excluent encore les femmes ? Comment être socialiste et appartenir en
même temps à cette grande société secrète où se côtoient surtout intellecfuels et bourgeois
qui sen servent, dit-on, Comme tremplin, renforçant ainsi la hiérarchie sociale ?
« Je suis franc-maçonne, nous dit Marthe Van de Meulebroeke, parce que je suis d'accord
avec eux sur l'essentiel: penser avec son propre cerveau, avoir le courage et l'honnéteté,
d'aller jusqu'au bout dans l'incertitude »
Et cel engagement à été le fruit d'un long périple.
«IT y a une religion marxiste
que je rejette.
Le Parti prétend parler
au nom du prolétariat,
mais rien n’est moins sûr...»
filon avec l'action collective, l'angags-
ment ?
«Je pense que les Eglises et les partis
politiqués ont tendance à susciter l'a-
hénation. Ga né veut pas dire que je ne
m'engage pas. Mais mon engagement
est toujours conditionnel, C'est ma
CONSCIENCS Qui juge. Je relatimisel'au-
torité du parti. Je me suis engagée
dans le parti socialiste, puis dans l'U-
nion des Gauches Socialistes, Enfin de
nouveau au PS. En fait les struciures
me décoivent. Je ne me sens tout à faut
bien nulle part. Par fidélité à une cer-
laine idée du socialisme. Il faudrait être
réaliste quant aux Buts prochains, maâais
garder la distance critique quant aux
fondements mêmes de notre! société.
Celä supposerait qu'on ne range pas
l'idée d'une société sans classes au
rang des accessoires foikloriques. Cela
supposerait que l'onsessaie d'éduiquer
el de former les gens à la base au lieu
de penser à leur place. Tout partin'ést
qu'un moyën et il a tendance à se
préndré pour fin.»
Voyelles - Les principales loges sont
fermées aux femmes. Comment, dans
ces condilons, étre féministe af franc-
maçonne ?
“Je ne suis pas entrés dans la franc-
maçonnerie en tant que femme mais
comme être humain de sexe féminin.
J'ai taujours trouvé anormal que cer-
taines obédiences refusent les femmes
ALTERN
“ J'ar vécu dans un milieu de françcs-
maçons. Pélilé, je comptais les années
qui mé séparaient de mon entrée dans
la franc-maconnerig (à 18 ans où à 2
ans). À la crise d'adolescénce, jar tout
remis en question et le moraliéme
franc-macon m'ést apparu comme dé-
guet, J'étais un peu nietzschéenné à
l'époque, Or la franc-maçonnerie in-
siste sur le bien et le mal et 5es
adeples se mettaient automatiquement
du côté des gens «biens ils avaiant,
me semblait-il, une image trés narcissi-
que d'eux-mêmes. Leur conception de
la morale allait à l'encontre de ce que
jé pensais Alors: «la morale est rela-
tive, 1 faut « ETRE » par de-là le bienel
le mal:
Voyelles - Devlent-on maçon de père
en fils ?
On ne peut ignorer un certain deter-
minisme sogial. Mais on s engégeindi-
viduellement dans la framc-maçenne-
rie. Tout candidat maçon doit expli-
gquerses motivations devant un groupe
de lravail äppelé atelier
ll s'agit d'examiner s'il pourra s'intégrer
2 MARS - N° 67 - Novembre 84 - Page 18
BERTAIRE - ASBL 2
dans tel ou tel atelieræt s'il a les quali-
tés requises pour faire un bon maçon
Si le candidat est enfant de maçon,
certains ateliers sont encore plus cir-
conspects, On se méfie du confor-
mismée possible Onne naïl pas franc-
maçon, on le «devient.
Personnellement, j'ai suivi tout un péri-
ple. Je mme suis intéressée au christia-
nisme, au marxisme, Pour aboutir fina-
lernent à la conclusion {icihsimpimfiée}
Que le catholicisme, £'était Pie XII st le
communisme, Staline. Je ne voulais ni
l'un ni l'autre. Ni surtout ce qu'ils re-
présentaient d'oppression,
En 1948, je suis entrée dans une loge
tout en sachant que les maçons déten-
dalent des idées que je connaissais par
cœur, mais convaincue qu'ils avaient
raison sur l'essentiel, « 11 fautpéenser ce
qu'on pense avec s0û propre Cerveau
et avoir le courage et l'honnéteté d'al-
ler jusqu'au bout dans l'incertitudes
C'est le refus de lout dogmatisme.
“ Pour moi celte démarche va de soi et
constitue d'ailleurs la base de la santé
mentale Fourtant elle est constam-
ment. mise en Saiise au profit d'une
autorité qui dépasserait l'individu. »
Car dans I milieu que je fréquentais
les rapports hommes-femmes £e si-
tuaient sûr un plan intellectuel ét fra-
lernel {échanges d'idées, défense
d'une cause...)
Les maçons masculins sont encore les
plus nombreux mais les loges mixtes
sont en pléine expansion. Je pense
que c'est l'avenir de la franc-maconne-
rie.
Pourquoi certains maçons sont-ils op-
posés à la mixité ? Les constitutions
d'Anderson ne prévoient pas l'admis-
sion des femmes. Les candidats doi-
vent être des hommes probes-et libres.
Or les femmes n'étaient pas libres,
mais d'éternéelles mineures, confinées
dans ieur foyér ou dans leur salon. L'é-
ducation tendait à développer leur
émotivité plutôt que leurs facultés ra-
tionnelles.
Aujourdhui les femmes tiennent une
place de plus en plustgrande dans les
Structures socialés, économiques et
politiques. Si on prend l'esprit des
constitutions plutôt que la lettre, on ne
voit pas pourquoi elles ne feraient pas
du bon travail maçonnique.
Ceci dit, je trouve que les francs-ma-
UN FRANC-MACÇON CONNU RISQUE DE PERDRE SON EMPLOI
dd ten-
5 que j'ai visitées. Cette FE
nt à mon goût. Je ne perds pas
de. un jour ce qu’on appelait au
Parti Communiste le «prolo de service».
AL: L'histoire nous a monié des conflits
Sociaux, par exemple la Commune de Paris, où
des F.M. se trouvaient des deux côtes des barrica:
des. Qu'est-ce que tu fais si tu rencontres en loge
quelqu'un du bord opposé? F'a-t-il une lutte de
classes dans la F.M. ?
Paul: Les techniques et le langage utilisés en loge
ne permettent pas la violence et l'agressivité. La
lutte cles classes telle que nous la connaissons tous
les jours dans la société n'existe pas lors des
tenues. La pratique montre qu'effectivement les
nent, se sont ous
c’est une éthique personnelle de vie, pas un parti
politique.
A,L.: Dans l'exposé de Léo Campion, on cons-
fafe que, chronologiquement,
les anars F.M.
étaient d'abord anars avant de devenir F.M...
C'est ausstion cas. N'est-ce pas une manière de les
récupérer ?
Paul: J'ai sous les yeux un extrait du journal «Le
Monde» de septembre 1981. Je t’en lis un extrait:
« En 1968, la rue, le monde
politique, ont tenu un langage
qui paraissait être celui des ma-
çons, dit Roger Leray, grand
maître du Grand-Orient de
France. Si la maçonnerie devait
être rattachée à une racine poli-
tique, ce serait celle des liber-
taires. Notre langage a certaine-
ment eu des résonances jus
dans le monde profane. » Le fit
est qu'à l’époque un certain nom-
bre de responsables syndicalistes,
jourd’hui encore de ce précieux #7
renfort : « Plusieurs mil
ces jeunes ont été recrutés en
trois ou quatre ans. Nous avons
facilement battu le record
n'avions pas pris la décision de
les accepter, nous serions au-
jourd'hui une assemblée de vieil- Z
lards !» /
Ceci est très important. Pour moi, le mouvement:
libertaire est surtout animé par des êtres au carac-
tère «d'enfant libre ou d'enfant rebelle», selon la
définition que donne de ces termes l'analyse tran-
sactionnelle par exemple. Et cela n'a rien de péjo-
ratif pour moi. Souvent, l'enfant rebelle, quoi
qu’il sache exprimer très clairement son sens spon-
tané de l'injusticé, sa révolte profonde contre
celle-ci, le fait sans cadre de références précis. La
fusion entre mon adhésion à la F.M. et mon
essence libertaireme rappelle le passage de l'état
de réaction, de révolte pure et spontanée, à l'état
iers de 4 He
d'adhésions de 1924, au moment 7 |
du Cartel des gauches. Si nous 7
/
7
d’auto-construction, de formulation d'une alter-
échanges existent entre gens de bords différents.
native, à la fois pour soi et pour la société,
Mais il est clair qu'à l'extérieur, chacun rejoint
son camp. Cela ne m'a jamais empêché de me bat-
tre «fraternellements contre un F.M. Certains se
demanderant alors à quoi ça sert de discuter dans
l'espace de la F.M. pour se retrouver ensuite face
à face, En réalité, chacun, de tous les bords, se
retrouvant en loge, en tout cas au Droît Humain,
a la ferme volonté de rencontrer, d'écouter
lPautre. Ne pas être d'accord avec quelqu'un cela
n'empêche pas de prendre connaissance de ses
arguments. Ce n’est pas parce que lon à entendu
qu'on est d'accord avec lui. Je vis la F.M. à ce
miveau) comme un lien de compréhension
mutuelle, ceci sans abdiquer de mes convictions.
et non des moindres, des mili-
tants d'organisations d'extrême
gauche, se sont «initiés ». Fred
Zeller, alors grand orateur du
Grand-Orient, se félicite au-
ser les des mon Ne
sans en abdiquer aucune: |
l'adulte constructeur. La
d'approfondir les engagements den
plus de sérénité. Pour moi, c'est un p
en AUCUN Cas urte renonciation. |
En réalité, c’est une imtiation qui pourrait être
comparée à l'initiation des jeunes adultes chez cer-
tains peuples africains, le passage organisé par la
communauté de l'état d'adolescent à celui de
NN
C’est à la fois sa richesse et sa faiblesse, La F.M.,
fran
libération des
femmes. De leurs ateliers sont sorties
des actions peur le planning famitial et
çons ont fait avancer la
pour l'avortement, {ls ont aidé à la
Création d'un enseignement sérieux
pour les femmes. Pas toujours par fé-
rnirusrmé, mais parce qu'ils pensäient
au rôle important joué par les mêres
dans léducation: pour libérer lés en-
fants, il fallait d'abord éduquer es ma-
mans. Gatti de Gamond par exemple
était maçonne.»
Ni bon Dieu, ni saint Marx !
Voyelles - La franc-maçonnerfe n'est ni
une église, ni un parti, ce qui n'em-
péche pas les maçons de se siluer face
aux deux grandes idéologies scluélles,
l8 catholicisme et le communisme.
« Personnellement je ne suis pas indit-
férentesà certains courants chrétiens.
Mais ce qui me parait imbuvable et
malsain dans le catholicisme, C'est la
sacralisation de l'autorité. Toute bu-
reaucratie a tendance à abuser de san
pouvoir, (Je l'ai déjà diti Mais [a bu-
reaucratie catholique est ce que l'on
fait de mieux dans le genre. L'autorité
n'y est plus fonctionnelle, mais charis-
matique et pèse de tout son poïds sur
la conscience des croyants. Un exem-
ste significatif: Paul VI & interdit la
contraception (dite non naturelle) en
passant outre l'avis de la majorité de la
commission qui avait été chargée de
l'étude de ce problème. Le pape a donc
utilisé son prestige auréolé de sacre,
non pour émanciper, mais pour alièner
les consciences. Pour peser sur la vie
quotidienne des femmes et des
hommes dont certains n'oseront plus
juger par eux-mêmes. (On va dire que
j'ai un pape pendu au bout du nez,
mais dans le fond, cela va avec l'image
du franc-maçon ll}
Quand au communisme, tout dépend
comme on le définit. Il y a une religion
marxiste que je rejette. Le parti prétend
parter au nom du prolétartat, mais rien
n'est moins sûr.
Comme ailleurs, on excommunie. Je
crois cependant qu'il faut se battre
méme désespérément pour la justice
sociale. Et la méthode marxiste est un
bon outil.
Sentimentalement, j8 suis anarchiste.
Mais trop réaliste pour accepter de
mentéermer dans Une réverie impuis-
sante louslesmacons ne pensent pas
comme moi, J'étonnerai sans doute
beaucoup dé maçons en attribuant à la
maconnerie un côté anarchiste, car
bon nombre appartiennent aux classes
dominantes. Il y & cependant un point
commun entre l'anarchie et la franc-
mäconnerie : la libre-pensée. Maïs tous
les maçons ne sont pas forcément op-
posés, comme je lé suis, à [a Sépara-
tion entre gouvernants et gouvernés, »
IL FAUT PENSER AVEC SON PROPRE CERVEAU
Un pape au bout du nez
Voyelles - Aujourd'hui le recrutament
de ja franc-maçonnerie ne se fait plus
dans la noblesse ou dans la grande
bourgedisie. Sa base sociale s'est
transformée: employés, anselgnants,
professions libérales, culturelles. On
ne trouve pas encore d'ouvriers.
Qu'est-ce qui peut unir des gens si dif-
férents ? Souvent encore surtout l'anti-
cléricalisme.
« Si, des ouvriers, il y en à. Ça dépend
des régions. Ça dépend surtout des
ouvriers. En général, its n'ont guërs en-
vie de palabrer le soir. Dans les partis
non plus. Toutes les maconneries
continentale: sont d'accord sur un
paint : la défense de la laïcité.
Lés francs-maçons sont devenus anñti-
cléricaux par nécessité: parce que l'E-
glisé Catholique, alors toute-puissante,
les combattait, s'ächarnait contre eux.
Les catholiques ne sont donc plus en-
trés dans les loges et celles-ci ont évo-
lué vers le rationalisme.
Elles se sont battues pour l'enseigne-
ment officiel, pour la séparation de l'E-
glise et de l'Etat. La Grande loge d'An-
gleterre JE contre est restée plus
proche de la religion nationale. Parce
que c'est le protestäantismé qui à ins-
piré, mème créé la franc-maçonnerie. »
Voyelles - À lextréme-gauchs, on re-
proche parfois aux francs-maçons de
faire de la collaboration de classe,
d'apparenir 4 des groupés surtout
composés de bourgeois.
“ Pourquoi ne pourrait-on pas fréquen-
ter quelqu'un d'une autre classe ? Il ne
faut pas confondre haine et lutte des
classes. Je peux comprendre un chef
d'entreprise et combattre son projet s'il
est différent du mien. Marx d'ailleurs
ne disait pas que tous les bourgeois
étaient mauvais et tous les ouvriers
bons, !l disait que, bons ou mauvais, [is
étaient prisonniers de structures alié-
nantes. D'ailleurs si tout 8 une dimen-
sion politique, là dimension politique
n'est pas la seule. Dans une relation
humaine, les rapports fraternels sont
primordiaux.
C'est pour l'avoir méconnu, que les
partis de gauche finissent par se volati-
liser comme l'UG.S. A force de se ma-
nipuler les unsles âutres. Au nom de la
tactique abstraite, on devient inhu-
main. »
Le travail en loge
Voyelles - Comment fonctionnent les
loges ? Qu'y faltes-vous ?
« Normalement les maçons se réunis-
sent une fois par semaine. ls se re-
trouvent dans Un « atelier » pour dis-
cuter d'un sujet philosophique ou
d'une question d'actualité. Chacun ap-
porte des idées, certains formulent un
projet. On vient éclairer sa conscience
et puis on s'engage. La liberté de pen-
sér ét d'agir est totale Un maçon ne
peut jamais donner d'ordre à un autre
maçon. On n'exclut que pour motif
grave. Far exemple collaboration avec
l'ennemi durant la guerre, acte désho-
norant comme un faillite frauduleuse.
En Belgique les loges n'acceptent pas
les fascistes, Pendant la guerre de
1940, beaucoup de maçons ont été
poursuivis, incarcérés, exécutés. parce
que maçons. Le principe fasciste est à
l'opposé du principe maçonnique.»
Les atelièrs 8e regroupent en obé-
diencss, structures indépendantes qui
ont leurs appareils administratifs et
leurs règles propres décidées à la
base. llustration du principe démocra-
tique cher à la franc-maçonnerie. Ce
qui fait l'unité entre les loges c'est un
certain langage symbolique inspiré de
l'art de construire et qui pousse à l'ac-
tion. »
Une société secrète qui
“ pousse » ses membres ?
Voyelles - Ambition, myslére, politique
de la courte échelle, les critiques à l'é-
gard de la franc-maçonnerie ne man-
quent pas, tout comme les rumeurs qui
circulent nées du secret un peu vieux
Jeu dont s'entoure |s loge.
«“ Dans un sens, la réglé du secret me
gêne aussi. Ses origines sont corpora-
tistes: l'ordre des franc-maçons avait
des secrets de fabrication, de
construction, des signes de reconnais-
sance, Le secret s'est étendu à tout ce
qui se faisait en logé. Ce qu'il en reste
aujourd'hui ?
En fait là maçonnerie est prus une 50-
cièté fermée que secrète, En ce qui
concerne l'initiation par exemple, tout
le monde peut tout lire dans les livres.
Mais uné initiation 8e vit sur un plan
émotif comme un psychodrams. Tout
ire d'avance, aboutit à augmenter ses
défenses.
H y a aussi le secret dés noms. Au dé-
part, il était vital. Dans les pays catholi-
ques, un franc-maçon connL comme.
tel risquait de perdre son emploi. Du
temps dé Franco, il risquait sa vié. Les
nazis aussi ont persécuté l8s maçons.
D'ailleurs d'une façon générale, j'es-
time que l'option philosophique ou po-
litiquée de chacun est son problème.
Nous n'avons pas à la divulguer sans
son accord. C'est comme le secret du
vote, À chacun dé décider ce qu'il peut
ou veut dévoiler de sa pensée et de ses
choix. Comme Sartre, je réverais d'une
société où chacun serait transparent
L- “narci
c-maçonne
aux autres. Mais dans la société où
nous vivons, celte transparence servi-
rait le pouvoir. Ët quel pouvoir? Lui-
même opaque. Les micro-fiches &
constituent un bon exemple de l'idéal
du pouvoir |
Louise Michal, héroïne de la communs af
franc-maçonne céfébre.
Vovelles - Gn reproche aussi aux ma-
cons le pratigue de la courte échelle.
« C'est très comique. Si on avait laissé
faire les catholiques, les Hbre-panseurs
n'auraient jamais eu la moindre place.
La courte échelle se pratique partout.
Quels sont les parents qui, connaissant
un employé, un uissier ou un direc-
teur, laisseraient tomber ce piston
éventuel au moment d'assurer l'avenir
de leur enfant? il y en a, mais peu.
Chacun reproche à l'autre ce qu'il pra-
tique lui-même. Que des maçons
aident parfois d'autres maçons à trou-
ver une place, c'est vrai Mais la ma-
çonnérie n'est pas une société de pla-
cement. || y a d'ailleurs des règles. En
principe, à valeur égale, on peut préfé-
rer un maçon. Mais si le candidat maä-
çon n'est pas qualifié, il n'y a aucune
raison de le faire. D'ailléeurs les solida-
rités politiques interfèrent et bloquent
parfois les solidarités philosophiques:
Rien n'est automatique ou obligatoire.
Blen sûr on s'engage à aider des frères
et sœurs mais c'est quoi « aider »?
lt s'agit d'abord de s'écouter les uns les
autres, de se soutenir moralement, de
partager. Les candidats suspecis de
vouloir entrer par intérêt son rejetés.
Cependant des arrivistés « maçons »,
il y en a. Ils font du bruit à l'extérieur
ALTERNATIVE LIB LIBERTAIRE - ASBL 22 MARS - N° 67 - Novembre 84 - Page 19 =
mais on né las voit pas en loge Par
contre qui tient la logé debout? NM
Geux qui y font un travailréguiier et lui ei |L
sacritient temps, argent, énergie, sans
compter. Simplement parce que, pour
eux, ce travail a, en lui-même, un
sens. »
Pas de chef mais des grades
Voyelles - Une société d'idéal déma- |
cratique. Un cfrei, le « grand maître »
élu par ses pairs, une liberté à foule
épreuve, el pourtant des grades qui
dañs certaines loges, vont jusqu'à plu-
sieurs dizaines.
« Les grades ne supposent aucune
idée de hiéarchie. Ns ne donnent
aucun pouvoir. Un simple maître-ma-
con peut étre grand maitre. Chaque
grade correspond à une étape symboli-
que de l'expérience humaine. Ceux qui
y vont, marquent ainsi leur intérét pour
la recherchée philosophique.»
Voyellés - Marthe ast heureuse dans la
franc-maçonnerie. Elle y & trouvé, dit-
alle, de vrais amis, des échanges ap-
profondis aur tous les problèmes philo-
sophiques et sociaux qui nous agifent,
un leu où fester ef lancer les combats
qu'elle à menés sur le plan féministe él
politique. Il fauf dire qu'elle appartient
au « Droit Humain», une loge progres-
siste ot mixte, née d'un groupe de ms-
cons qui, à ie fin du siècle passé, avait |
voulu initlèr une femme, contre les |
coutumes du temps. Loulse Michel en
a fait partis, dit-on. Volià qui donne la |
coloration d'un groupe dans lequel
tout le monde ne reconnaitra pas peul-
Stre l85 fANCE-MAÇONS,
Propos recueillis par l
Suzanne Van Rokeghem 1 + |
et Dominique Burge
Pourquoi Francs-Maçons ? |
Le terme Franc-Maçon apparait,
pour la première fais en 1459: Lars,
d'une rencontre à Ratisbonne de | | |
toutes les loges compagnoniques
du Saint-Empire germanique qui
s'unissent 6n une Fédération, L'em-
| pereur ayant accorde à cette fédera- |
tion des privilèges spéciaux appelés |
aussi franchises, ses membres déci- |
dent de prendre le nam de «Frei-
| Mäurern, c'est-à-dire Francs-Ma-
| CONS. |
| En Angleterre, au 196 5. on parlait
| déjà de «free stone masons* pour
| désigner les maçons initiés qui sas
vaient tailler et travailler la pierre.
Le dépérissement de l'action révolutionnaire au
cours des dix dernières années, période qui laissait pré-
sager pourtant de plus grandes espérances, a abouti logi-
quement à l'installation de la gauche au pouvoir en
France. Logique découlant de cette évidence, qui s'im-
pose donc aujourd'hui en France, mais aussi en Grèce, en
Espagne, à savoir que c'est dans les périodes de stagna-
tion du mouvement révolutionnaire que la gauche réfor-
miste et parlementaire peut s'approprier les aspirations
au changement des masses.
ANT MAI 81
ALTERNATIVE LIBERTAIRE - ASBL 22 MARS - N° 67 - Novembre 84 - Page 20
QUAND JE PENSE G0'A LÉENAI
NODS AVIONS LES MÊMES
OPINIONS POLITIQUES -
ON
CHANGE :
Qu'il n'y ait rien à attendre d'un simple changement
de gouvernement amenant la gauche au pouvoir est une
autre évidence maintes fois énoncée. Un simple coup
d'oeil du côté des démocraties occidentales “avan-
cées” (RFA, Suède ou Pays-Bas) où le mensonge
démocratique fonctionne à plein, suffit à confirmer cette
théorie et comprendre que la gauche n'a intégré quel-
ques revendications de la classe ouvrièredans son dis-
cours électoraliste que pour mieux les vider de leur subs-
tance révolutionnaire.
Gauche ou droite ne sont que deux formes de ges-
tion du Capital, équivalentes finalement et pour cela
alternatives. À tel point que c'est le plus souvent
"l'usure du pouvoir” qui dicte le choix politique des élec-
teurs et amène ce balancement alternatif, cette merveille
de la démocratie qu'est le 50/50, un coup pour la gauche,
un coup pour la droite. Selon les besoins du moment ou
l'humeur - un peu manipulée tout de même - des élec-
teurs, les partis politiques devenus lobbies de gestion
naires, alterment au pouvoir, Jusqu'à présent, cela a
sauvé le capitalisme.
Ayant toujours dénoncé le parlementarisme et le jeu
électeral, nous faisons partie de cette minorité qui n'a
jamais cru au “changement” promis par les socialistes,
tout en étant conscients que l'arrivée de la gauche au
pouvoir en France pouvait comporter des aspects posi-
tifs, tant dans la forme -la réalisation de réformes presti-
gio-humanistes -, que dans le fond - ne serait-ce que la
fin de l'illusion, pour les travailleurs, de ‘l'alternative de
gauche” comme espoir de changement -. Pourtant, il ne
s'agit pas aujourd'hui de constater simplement que le
changement annoncé n'a pas eu lieu pour justifier la
continuité de notre lutte contre l'Etat. Le nouveau pou-
voir, en intégrant les aspirations d'une majorité d'élec-
teurs, en réalisant quelques réformes formelles { l'aboli-
tion de la peine de mort, par exemple ) limite nos possibi-
lités d'intervention. Ce qui était évident de dénoncer du
temps de la “droite”, dans le flou et l'ambiguité des
fronts anti-quelque chôse, est devenu beaucoup plus dif-
ficile à démontrer, si l'on veut éviter de se faire prendre
au piège du terrorisme et de la marginalisation. Les révo-
lutionnaires sont tout nus, et un peu seuls quand même.
Ïi faut aussi et surtout tenir compte de la démission
presque complète de l'extrêéme-gauche ét des tenants de
cette “nouvelle radicalité” révolutionnaire { tous ces
post-crypto-néo-situs ) qui avait émérgé dans les années
70. Si cette récession de la critique et de la pratique révo-
lutionnaire a permis l'arrivée de la gauche au pouvoir,
elle explique aussi comment un groupe aussi caricatural
qu'Action Directe accapare le devant de la scène politico-
révolutionnaire avec son léninisme archaïque, ses
notions primaires d'anti-impérialisme, son tiers-mon-
disme vaseux. Les vieux concepts léninistes ne sont pas
plus valables dans la réalité politico-sociale d'aujourd'hui
«Aux larmes, mégalos!», une brochure d’une
centaine de pages. Elle se présente extérieure-
ment comme un polar. En dernière page de cou-
verture, une parodie de la célèbre publicité
«Balafre» des romans de la «Série Noire». Mais
cette fois-ci l’eau de toilette s'appelle «Carlos».
Au-delà de l'humour permanent, les thèmes
abordés sont des plus sérieux. Qu'est-ce qui à
changé en France depuis l’arrivée de la gauche en
mai 81? La gauche, la droite, c’est vraiment la
même chose? Quelle différence entre le ferro-
risme et la violence révolutionnaire? Entre les
attentats d'Action Directe et les manifestations
radicales des ouvriers de La Chiers? À quelle
vieille sauce léniniste sont accommodés les restes
des groupes de lutte armée tiers-mondistes ?
Quelles stratégies inventer pour sortir des culs-
de-sace où ils sont enfermés, la lufte anti-
nucléaire, le combat des détenus, nos rapports
avec la justice,...? À chacun ses réponses. Ce
texte collectif, c’est certain, sort des sentiers bat-
lus et des banalités des discussions de café... Une
opinion à entendre, à écouter, à lire, .…
250 francs
port compris
au compte
22 Mars Editions
Pour toute correspondance S
B.P. 285, 1040 Bruxelles 4
qu'ils ne l'étaient hier. Leur résurgence à travers plu-
sieurs groupes en Europe, Action Dirécte ne semblant
être que le dernier avatar, n'est que l'aveu implicite de
l'incapacité pour ces pseudo-révolutionnaires de faire la
moindre critique radicale de la situation. Le refuge dans
les références aux luttes du passé, aux vieux discours,
les empêche"de-s'affronter, au-delà d'une phraséologie
creuse, aux nouvelles aliénations. Aujourd'hui, plus que
jamais la réalité socio-politique ne ressemble en rien aux
situations classiques et anciennes auxquelles s'était
confronté le vieux mouvement révolutionriaire.
T1 y a longtemps que l'on sait théoriquement que les
clivages droite/qauche sont dépassés, mais i s'agit
aujourd'hui de les dépasser dans ia pratique pour
essayer de définir de nouveaux angles d'attaque qui
soient efficaces dans la lutte contre le nouveau pouvoir,
contre tous les pouvoirs. Face à un gouvernement de
gauche, notre lutte ne peut être efficace que si elle s'at-
taque, en le démystifiant, au fondement du système
oppressif : la démocratie parlementaire Crtiquer le
socialisme, où plutôt le Parti Socialiste, c'est une néces-
sité, seulement la nécessité de la critique se doit d'être
surtout la critique dé la nécessité.
AIO MEET A DEX/AI Cr
> L?I LA REVOLU
La société capitaliste
n'est pas immuable, bien au
contraire; depuis ces vingt
dernières années elle ak:
bousculé toutes les certi- :
tudes établies, tout cé qu'on
croyait savoir sur 865 CADaACI- E
tés d'adaptation, élle s'est |
transformée, elle a muté, El:
elle a définitivement enterré E
tout ce qui demeurait de ce |?
19ème siècle que certains
regardent avec nostalgie.
Les énormes progrès tech- E £.
nologiques n'ont pas été, R |
bien entendu, sans influer K
sur les rapports sociaux, sur
les bases mêmes de ces rap- E
ports. Les seuls à ne pas
avoir suivi cette évolution ce sont les "révolutionnaires"
qui tout en se gargarisant de révolution continuent à
vivre sur les analyses du vieux capital défunt : ils igno-
rent tout du présent, simplifient et emboitent leur révolu-
tion dans les petits schémas anti-impénialistes et tiers-
mondistes « qui ont fait leur preuves ». Force est de
constater aujourd'hui, à travers la faillite des organisa-
tions lénino-révolutionnaires du type Brigades Rouges
ou Fraction de l'Armée Rouge, que le concept même de
révolution n'est plus crédible, tant il a été détourné, vidé
de son vrai Sens par ces organisations en mal de pouvoir.
L'idée léniniste de ia révolution { comme toute idéologie }
est fondamentalement contre-révolutionnaire { au sens
utopique du mot révolution ) et anti-émancipatrice, parce
qu'elle apparait comme un masque qui transformerait le
négatif en pseudo-positif : transformation du sacrifice,
transformation de |a violence, transformation de la
UNE VIOLENCE «OUVRIÈRE» LEGITIME ?
001-1632181-38
VIOLENCE REVOLUTIONNAIRE
CONTRE TERRORISME
misère présente, de la répression, de la production par
un retournement dialectique du code dé la valeur.
La croyance en l’imminence de la révolution est
aussi dangereuse ( démobilisatrice ) que celle en une
longue période de “préparation”. Laissons de côté les
astrologues de la révolution qui spéculent sur ses futures
chances, les « ici et maintenant, je ne crois pas que... »
sont le plus souvent un alibi pour ne jamais rien faire.
Aujourd'hui, il ne s'agit pas de croire mais simplement de
refuser, de combattre ce qui nous opprime, non pas au
nom d'une quelconque idéologie mais de nous-même, en
affirmant notre individualité en dehors de toute organi-
sation ou idéologie. Pour être révolutionnaire la pensée
doit se libérer des idéologies et des a priornismes. L'écla-
tement de l'utopie, c'est tout le contraire de l'idéologie
dialectique. Que l'on nous entende bien : le refus de
l'alibi révolutionnaire ne conduit pas à la démission, au
contraire, il fortifie nos convictions et notre refus du sys-
tème en déplaçant la problématique révolutionnaire sur
le terrain non-policé de la subjectivité.
Oui, le monde a changé, le “vieux monde" est mort
et les révolutionnaires sans révolution, ceux qui n'ont
pas su ou pas pu la faire, ont presque tous disparus avec
lui, fixés sur des objectifs déjà dépassés, sur l'éternel
recommencement des mêmes échecs, sur la réactivation
des idéaux, des vieilles nécessités, des faux espoirs. Tout
a changé et i n'y a guère aujourd'hui en France que les
quelques dinausores regroupés au sein d'Action Directe
pour exprimer le besoin « d'une réflexion sur l'organisa-
tion et la forme-Parti » , ces tartes à la crème rancies de
l'antique mouvement gauchiste. Voilà plus d'un siècle
que “la lutte finale" est commencée et leur discours est
toujours le même, toujours en réaction face à une situa-
tion. Comme toutes les organisations politiques depuis
1968, Action Directe s'épuise à cavaler derrière cette
nouvelle forme de lutte qui se veut autonome, sponta-
“même réactionnaire :
néiste et sauvage qui n'est que réactionnelle et parfois
c'est choisir d'avoir toujours un
train (de marchandises ) de
retard. Leur seul but est
d'exister et d'être reconnus
en tant qu'organisation
révolutionnaire ( et autant
que possible la seule et uni-
que capable de } et pour cela
is ont besoin de la politique
du troupeau puisque leur
logique est de rassembler
du monde pour devenir à
leur tour un ( contre )-pou-
voir et que cette logique
conduit à recruter sur la
base du plus petit commun
1 dénominateur.
VIOLENCE SANS CONSCIENCE...
Mais ce n'est pas tant au niveau théorique {| la criti-
que est tellement évidente et facile) que pratique,
qu'Action Directe pose problème à tous ceux qui, comme
nous, n'excluent a priori aucun moyen dans la lutte
contre le système, plus clairement dit qui n'excluent pas
l'usage de la violence comme moyen de contestation,
mais qui veulent éviter de tomber dans le piège du terro-
risme. $e démarquer politiquement d'Action Directe est
nécessaire et indispensable pour tout individu ou groupe
qui prétend lutter contre le système, mais cette démarca-
tion doit étre tout aussi évidente au niveau pratique afin
que l'utilisation de la violence retrouve son véritable
emploi subversif.
La violence ( révolutionnaire ) n'est jamais un argu-
ment en soi, encore moins une fin, mais elle peut s'avérer
nécessaire pour débloquer/créer une situation. La vio-
lence minoritaire n'est pas à exclure, même ep période
“calme”, à condition que ceux qui l'exercent aient au
moins la capacité de donner à léur acte un sens révolu-
tionnaire. Une action réduite au rang de fait dramatique
happé par l'actualité perd tout son contenu subversif.
Cette condition permet de comprendre à elle seule que
l'usage révolutionnaire de la violence soit très délicat
dans la société moderne.
Les vieux mythes ont la vie dure malgré la mort des
héros : on reste abasourdi de voir des groupes “révolu-
tionnaires” reprendre, bien après la Fraction de l'Armée
Rouge, l'idée de « lutte armée contre les métropoles de
l'impérialisme v. Faut-il souligner l'absurdité qui
consisté à affirmer le principe de la lutte armée comme
seul fait révolutionnaire, de créer une organisation pure-
ment spécialisée dans ce but ? Doit-on revenir sur ces
groupes hiérarchisés, cloisonnés, structurés { en partie à
cause des nécessités de la clandestinité ), planifiant la
violence, contrôlant tout, y compris eux-mêmes ? Vision
d'un parti espérant encadrer et récupérer toute manifes-
tation violente afin de pouvoir y recruter, parce que sa
perspective est essentiellement organisationnelle. Le
recours à la violence ne se justifie que comme partie
d'une pratique globale et non comme l'œuvre de justi-
ciers spécialistes qui se veulent indispensables
Mais le plus important est qu'en se laissant entraîner
dans le surenchère de la violence et en acceptant ( impli-
citement au moins } de revêtir les oripeaux de l'épouvan-
tail terroriste qui a déjà été largement utilisé en Italie ou
en Allemagne (et leur “logique” ne pouvait les mener
ailleurs }, Action Directe a permis au pouvoir de “terrori-
er", par l'effet d'amalgame, tout individu ou groupe qui
éssaierait d'exprimer son refus du système par des
moyens violents. Il faut se démarquer d'Action Directe
pour ne pas être assimilés et lutter contre la criminalisa-
tion terroriste dans laquelle le pouvoir voudrait nous
acculer.
Pour casser l'image terroriste que le pouvoir veut
donnér de nous, pour que la démarcation soit évidente et
claire, il faut que notre lutte s'attache à dénoncer le ter-
rorisme dans son expression la plus globale, c'est-à-dire
l'Etat. Le seul vrai terroriste, c'est l'Etat, quels que soient
leurs efforts pour persuader du contraire et malgré tous
les renversements dialectiques : les résistants étaient
des “Terroristen” recherchés par les nazis, les comman-
dos sionistes étaient terroristes aux veux des Anglais,
aujourd'hui ce sont les commandos palestiniens qui aux
yeux des Israéliens, et demain... La violence de l'Etat qui
se couvre sous les masques les plus divers est infiniment
plus grave et dévastatrice que la violence déclarée des
révolutionnaires, qui s'affirme en tant que telle comme
moyen de combattre une forme de pouvoir ou comme
catalyseur d'une révolte. La violence révolutionnaire
n'est que la nposte naturelle contre la violence institu-
tionnelle qui étouffe plus ou moins lentement la vie. ll
faut se méfier du mot violence, lui-même “piégé” et se
rappeler que la violence individuelle est moins grave que
la violence des Etats, mème si elle est plus immédiate-
ment spectaculaire.
Que le pouvoir n'ait pas encore réussi à rejeter dans
le camp terronste les sidérurgistés de la Chiers, qui ont
pourtant mené des actions tout aussi violentes et specta-
culaires qu'Action Directe suffit à comprendre le phéno-
mène de la violence révolutionnaire. Bien sûr, dans ce
cas la violence “ se légitimise “ - aux yeux de certains -
car elle Se situe clairement dans lé cadre d'un conflit
social, mais surtout parce qu'elle ne cherche pas à se jus-
tifier idéologiquement. Elle est l'œuvre d'individus quine
cats. Mais tout cela té
la ‘ révolution | prolétarienne' |
ouvrière, et. de l'autre bie:
des éléments bizarres tent Fe ÿ
Nous sommes tous partie intégrante du mouvement
social et si la sensibilité de certains ouvriers les pousse à
utiliser la violence pour dépasser le cadre étroit de. la
revendication syndicale, pour protester contre une situe
tion qui les concerne particulièrement en quoi cette vio-
lence est-elle plus légitime ? Nous, nous-prétendons
mener un combat beaucoup plus global Car nous nous
séentons concernés par l'ensemble du système d'oppres-
sion, et si demain notre sensibilité nous amenait à utili-
ser la violence pour essayer de détruire quelques par-
celles de ce qui nous opprime (lois, prisons travail.)
en quoi notre violence serait-elle moins “juste”, alors que
plus globalement dénonciatrice, que celle de ces ouvriers
qui ne dépasse pas - le plus souvent - le cadre parcellaire
du conflit social ? Est-ce cet aspect parcellaire qui légiti
mise leur violence, Messieurs les thuriféraires, ou est-ce
en tant que victimes privilégiées du Capital queles
ouvriers ont seuls le droit d'appliquer cette Légitime.
Défense que vous prônez ? 8
On ne peut prétendre que lé pouvoir socialiste a été.
contraint par la vague d'attentats de mettre en place ou.
de développer l'arsenal répressif que l'on sait. Le pouvoir
s'ést sans doute servi de ces attentats pour accélérerle
processus, mais le processus est inéluctable et inhérent,
à tout pouvoir étatique. Le fichier électronique par
exemple, existait déjà depuis quelques années Ge façon
clandestine { encore que !) presque “illégale, mais, id
faut être bien naïf pour croire que la police resterait la
seule entreprise du système capitaliste à ne pas chercher
à rentabiliser sa production en refusant d'utiliser l'ordi-
nateur. Que le procédé soit aujourd'hui légalisé, justifié,
moralisé, amélioré par le gouvernement de gauchen ‘est.
donc nullement paradoxal, bien au contraire, puisque
cela fait partie des taches essentielles d'un tel gouverne”
ment, c'est-à-dire grignoter du terrain là où la droitese
serait sans doute cassé les dents.
Il n’en reste pas moins que tous ces grignotages,ces
mesures liberticides sont en contradiction flagrante avec
le discours politique tenu par le P.S. avant son accession,
au pouvoir et c'est en exploitant ces contradictions que
nous pourrons élargir les failles du pouvoir et déchirer
totalement le voile humaniste dans lequel.se drape
encore le gouvernement socialiste.
Ecrit au cours de l'année 82,
LES REVOLUTIONNAIRES : SONT NUS
ALTERNATIVE LIBERTAIRE -
ASBL 22 MARS - N° 67 - NOR 84 - Page : 21
dd aan: EL L0
NO Hirousss
ALTERNATIVE LIBERT AIRE -
vous avez un proche en prison?
abonnez-le à alternative libertaire
engagez-le à nous écrire pour nous décrire
sa réalité carcérale.
a Le dans les prisons.
Nous voulons faire de ces journées un
moment privilégié de renconires, mais aussi,
à Tnt ad |
ou ayant lutté contre Fe ceux qui,
ic [Li # L
3 <a ei & |
es D nous ner Te en ces EnRe de
tidienne, différents lieux de la ville par
Los AO pEeIes de penUE 1!
=
re tous cest }
_ Transmuraille-Express, Canal-Sud
ALES Alfred Duméril
31 400: Toulouse. \
ASBL 22 MARS - N° 67 - Novembre 84 - Page 22
huit a:
Actuellement, je me trouve au
C.M.C. de la maison d'arrêt de
Saint-Gilles. Auparavant, j'étais à
Ypres où j'avais été placé suite à mon
extradition de France.
C'est en France (Toulouse) que j'ai entendu
parler pour la première fois de Passe-Muraille. Je
m'y suis intéressé sachant que je devais être
extradé (ce qui fut fait le 23 août 84) et que cette
émission me permettrait d'avoir un moyen
d’information, ce qui est très important, et aussi
un moyen d'expression, dans la mesure où mes let-
tres sont transmises par les bons soins de l’A.P,,
ce qui est assez difficile en France. Aujourd’hui,
je prends le risque de vous faire parvenir cette let-
tre par la voie normale et s’il se trouve que celle-ci
n’a pas été expédiée, je serai obligé d’avoir recours
aux mêmes procédés qu'en France.
Théoriquement, il n'y a pas de censure. Prati-
quement, c’est le contraire puisque nous sommes
contraints de laisser les lettres ouvertes. Il est vrai
qu'il y a certains établissements où le courrier est
fermé par le détenu, ce qui n’est pas le casici, ni à
Ypres, Enfin, c’est une question de divergences de
règlements intérieurs et le directeur est seul maître
dans sa prison!
Voilà trois dimanches que j'écoute Passe-
Muraille pour m’en faire une petite idée. Je dois
avouer que-parfois, pour ne pas dire bien souvent,
l'émission ressemble de par son contenu à la pré-
cédente par son uniformité. Je ne mets pas en
cause lés animateurs qui font ce boulot et n'en ont
que plus de mérite, d'autant plus qu'ils le font
bénévolement. Mais plutôt par l'insipidité du
courrier des auditeurs de derrière les barreaux.
A mon avis, on peut passer un moment tant
instructif qu'agréable sur les ondes, sans pour cela
avoir à écouter un duel d'insultes, Bien entendu,
c’est aux taulards d'arrêter leur comportement
infantile et de se comporter en adultes, ce quisn'est
pas évident, même s'ils sont considérés comme tels
devant l4 justice,
Comme je l'ai dit, je n'ai écouté que trois
émissions. Je n'ai retènm dans celle du 16 qu'une
lettre trés bonne, celle de Madeleine, et je ne dis
pas cela parceque c'est une-frangine. Par contre,
l'émission du 23 a été la meilleure qu'il m'ait été
donné d’entendré. Auparavant, j'ai trouvé qu'il
manquait des informations sur le monde carcéral.
A Jamioulx, on a évacué les détenus. 1l est juste de
penser qu’il y a des personnes qui ont quelqu'un
de cher là-bas et qui demeurent à Bruxelles: par
Passe-Muraille, elles peuvent espérer en apprendre
plus ou même faire appel à un témoin. Il en est de
même pour les quarante qui se sont fait tabasser à
Merksplas. Sans travestir les faits, on peut dénon-
cer la vérité pour que de telles choses ne se repro-
duisent pas.
Combien de faits similaires ont été passés
sous silence parce qu'il n'y avait aucun moyen
d'expression? Maintenant qu'il y a une radio qui
nous offre quatre heures sur les ondes, il faut que
les personnes concernées prennent conscience
pour que cessent ces brimades et persécutions, le
plus souvent impunies.
Dernièrement en France, les matons ont fait
une grève (privation de visites, de promenade et
de distribution de courrier) parce qu’un de leurs
collègues s'était fait tabasser. Faut croire que les
matons sont plus solidaires que nous. Et si par
malheur le gars se fait sautér, quelle que soît la
taule où il aura été incarcéré, il est certain qu'il se
retrouvera au cachot avec une grosse tête.
En France, le nouveau gouvernement, soi-
disant libéral, a supprimé les Q.H.S. ou plutôt,
pour étre précis, l'appellation. Aujourd’hui, cela
a été remplacé par l'isolernent, ce qui révient exac-
ternent au même, il n’y a que le qualificatif qui a
changé. Le traitement... inhumain... y reste le
même, J’ai pu constater qu'ici Aussi on a innové
avec l'ouverture de Lantin aux Q.H.S. dans cette
société civilisée qui traite les hommes au nom
d’une soi-disant liberté, en animaux.
Q.H.S., isolement ou autre, On trouve tou-
jours des qualificatifs pour cacher les choses les
plus abjectes. Et j'en parle en connaissance de
cause. Neuf mois en Q.H.S., ensuite transféré
dans une autre prison pour être placé en isole-
ment, Où? Dans les locaux des anciens Q.HL.S.!
Quand je suis arrivé en Belgique, je me suis dit:
«là au moins il n’y a pas de Q.H.5:». Quelle n'a
pas été ma déception en arrivant à Ypres où ilva
un quartier réservé pour l'isolement, Endroit où
j'ai été placé dès mon arrivée. Motif: mesure de
sécurité, ét non pas disciplinaire: un extradé ne
peut être puni ou condamné pour un délit autre
que celui qui a motivé son extradition. Mais
comme je me suis évadé en 79 de Namur... Faut
bien trouver un biais quelconque pour ôter au
candidat à la liberté son envie d'évasion. Et tous
les moyens sont bons, même les plus inhumains,
pour le faire entrer dans le système. Pour arriver à
ce résultat, On commence à enlever au détenu sa
combattivité et sa responsabilité à mener sa vie
selon son désir, pour le dépersonnaliser, ce qui fait
que le détenu tombe, sans s'en rendre compte,
de ratière
_ sous la dépendance de l’A.P. I yen a qui ont plus
de force de caractère que d’autres. On les catalo-
gue dangereux, Dangereux pour le système péni-
tencier. À coups de millions, on aménage où on
construit des quartiers «Q.H.S.», non pas pour
une hypothétique réinsertion, mais plutôt pour
avilir et briser ceux qui ont osé résister au système!
Quand il sort de là, il a enterré toutes ses illusions
et tous sentiments de bonté pour les remplacer par
la Haine à l'état pur. Qui est responsable de cette
métamorphose? La société: de par son silence,
elle devient complice.
En Allemagne et en Suisse, c'est à présent les
cellules sensorielles qui sont «à la mode». En gros,
cela consiste en une cellule nue, peinte en blanc,
lumière vingt-quatre heures sur vingt-quatre.
Aucun bruit ne pénètre dans la cellule, on ne voit
personne et la bouffe est remise par un guichet
sans que la porte ne s'ouvre. C’est tout ce qu'il y a
de plus barbare dans des pays «civilisés».
Il y a aussi la carotte et le bâton pour l’obten-
tion d'une liberté conditionnelle sous la promesse
d’avoir un comportement irréprochable selon les
crifères pénitentiaires; un tiers pour les primaires,
dont un pour cent qui en bénéficie, selon les statis-
tiques du Ministère de la Justice.
À mon avis, si on cherche vraiment À ce que
le détenu trouve une place dans la société, on
devrait d’abord l’inciter à s’instruire, lui donner
l'occasion d'apprendre une profession selon ses
capacités. Comme chaque peine mérite un salaire,
à défaut de celui-ci, les autorités pourraient au
moins accorder une remise de peine pour récom-
penser les réussites,
Je n'ai pas la prétention de chercher à faire
des réformes pénitentiaires (d’ailleurs c’est tou-
Jours mal vu) mais c'est une idée qui éviterait à
pas mal de taulards de rester dans l’inactivité com-
plète comme maintenant, la seule activité étant de
préparer des coups, tordus pour la plupart,
Etant étranger (Algérien), je ne cherché plus
à faire une quelconque revendication. En huit ans
de ratière, j'en ai fait plus qu'il ne se doit.
Aujourd’hui, je n’aspire qu’à une chose, c’est de
rentrer chez moi, du moins dans le pays dont je
porte la nationalité: l'Algérie, car je suis né en
France, pays OÙ Je ne me sens pas chez moi, pas
plus qu'ici Suriout-quandonvseslentend dire
presque quotidiennement. C’est malheureux à
dire, mais le racisme en Europe est comme le dol-
lar: en hausse. a HR:
et Saïd Boumedienne
doorheen
tralies
Depuis le 1 octobre, la V.R.I.
(Vrije Radio Leuven) émet tous les
lundis, de 10 à 11 heures, un pro-
gramme intitulé «Doorheen Tralies»
(à travers les barreaux ou... Passe
Muraille. .….).
Ce programme s'adresse aux détenus des
deux prisons de Louvain et émet à leur intention
de la musique et des informations de leur choix.
L'information est traitée avec la collaboration de
spécialistes de la Ligue des Droits de l'Homme,
Oikonde, les Criminologues Radicaux, efc,
«Doorheen Tralies» est la première initiative
du genre dans la région flamande et il est indénia-
ble qu'elle répond à l'attente de bon nombre de
détenus isolés qui, des années durant, sont privés
de visites ou de tout autre contact social avec le
monde extérieur. Ce programme de radio offre à
tous les prisonniers la possibilité d'exposer leurs
plaintes, leurs problèmes...
Gette initiative émane de quelques étudiants
en criminologie de l'Université de Louvain, assis-
tés par des individus issus des organisations préci-
tées.
L'objectif réel de cette émission est d'offrir
aux détenus un accès au monde extérieur, Mais
elle souhaîte aussi «conscientiser» ce monde exté-
rieur: que se passe-t-il dans une prison, quelles
sont les érreurs qui y sont-commises, quels sont les
préjugés des gens par rapport aux prisons et gtx
détenus, quelles sont les souffrances inutilement
vécues dans les deux prisons de Louvain et qui est
disposé, par exemple, à aider un prisonnier isolé à
résoudre ses problèmes ?
«Doorheen Tralies* permettra donc aux déte-
nus de témoigner mais donnera aussi la parole à
des spécialistes qui évoqueront la problématique
des prisons et, pourquoi pas, au personnel des éta-
blisserients pénitentiaires. Manifestement, les réa-
lisateurs de l'émission, souhaitent qu'elle soit plu-
raliste et diversifiée.
ŸY.R.L.
Dorheen Tralies
Kol. Begaultlaan, 28
3010 Dee
Pour toutes informations:
GREVES DE LA FAIM EN CASCADE DANS LES PRISONS FRANÇAISES
1
Le rôle du surveillant de prison est de
surveiller et de contraindre son sem-
blable après l’avoir enfermé, de le
soumettre au règlement draconien
qui interdit tout, et de lui accorder,
suivant son bon plaisir ou ses états
d'âme, les faveurs et accomodements
que l'usage et les techniques de sou-
mission et de domestication ont
éprouvés depuis longtemps! Des
faveurs et des calmants, des drogues
et la TV-Dalias que l’on accorde, que
l’on retire. la carotte ef le bâton.
La conscience professionnelle d’un surveil-
lant fait qu'il surveille bien, qu’il garde bien, que,
suivant le règlement — qui est aussi draconien
pour lui que pour le détenu — il fasse conscien-
cieusement ses appels quatre ou cinq fois par ser-
vice, ses vérifications de cales toutes les heures,
toutes les derni-heures, tous les quarts d'heure,
voire toutes les sept minutes comme au huitième
étage de Lantin, qu'il remplisse correcternent ses
petits papiers, qu'il signe ses cahiers, qu’il pointe
ses passages-coups-d’œil, qu’il réponde aux son-
nettes, qu’il ouvre et ferme les portes et les grilles,
qu’il récolte les courriers, demandes de rapport,
demandes pour remettre ou pour recevoir, qu'il
surveille les mouvements, les préaux, les chapelles
ou les activités, qu’il fasse ses rapports, qu'il éta-
blisse ses fiches personnelles de comportement,
qu'il fouille hommes et caveaux, qu'il contrôle
barreaux et serrures, et j'en passe.
C'est vrai que le public ne soupçonne pas.
C'est vrai que c’est difficile et peu glorieux...
C’est vrai que tout cela doit — et peut — être fait
avec humanité, sans mépris... Mais de là à procla-
mer que c'est là «la profession que nous
aimons». voilà qui nous inquiète vraiment.
Les brebis galeuses existent partout, c’est
vrai! Mais c’est surtout grave dans les corps
d'élite, assermentés, qui prétendent justement
réprimer la délinquance des autres et qui la répri-
ment parfoisstrès durement. comme ce fut juste-
ment le cas à Verviers lorsqu'en fin d’année der-
nière, la CGSP locale s’est érigée en tribunal de
flagrants délits pour condamner un détenu à neuf
jours de cachot à titre de punition pour faits sur-
venus à l'extérieur des murs, pour ensuite ridiculi-
ser son Ministre qui tentait, par un énormé men-
songe, de couvrir la bavure de son personnel...
e à VOUS
Bien sûr l’humanisation, sous des pressions
diverses, a fait des progrès, même si le contexte et
la pratique sont toujours dignes du moyen âge et si
le règlement et la sacro-sainte sécurité interdisent
tout.
Et que veut dire «revaloriser leur fonction» ?
Nous venons de dire ce qu’est la fonction de sur-
veillant. elle ne peut être que ce qu’elle est. On
ne peut être enfermeur, inquisiteur et rééducateur,
c’est inconciliable. Tout au plus peut-on faire
preuve de moins de mépris, dé moins de morgue et
d'agressivité, de plus d'humanité... Seuls les tech-
niciens et les moniteurs, moins engagés dans les
missions de contrainte et de surveillance, peuvent
parier de possibilités d'éducation, d’apprentis-
sage, pour autant qu'ils s’en sentent la vocation et
la volonté, Comme toujours, la revalorisation de
fonction dont on parle se limite en fait à la revalo-
risation des traitements et salaires.
Seuls des gens extérieurs à la chiourme peu-
vent tenter quelque chose pour récupérer quelques
uns parmi les hommes perdus... l’exception qui
confirme la règle. Et nous croyons que les. médias
doivent au contraire mettre le moindre fait-divers
en exergue pour démolir au plus vite ce système
carcéral qui détruit même son propre personnel,
puisqu'il y a toujours 25% de surveillants en
congé de maladie, C’est peut-être le seul moyen
d'amener les tenants du système, qui traitent
encore des hommes paumiés comme au temps de
leur arrière grand-père, à envisager autre chose de
plus humain, surtout de plus bénéfique, tant pour
les victimes que pour les coupables d’ailleurs.
Pour le reste, que la profession de surveillant
sait difficile et ingrate, nous ne le nierons pas.
Mais c’est tout de même une profession que l’on a
choisie, dans laquelle on s'engage comme à
l'armée, comme à la gendarmerie, On s'engage à |
obéir, à exécuter moyennant rétribution, En cas
de désaccord, on peut toujours démissionner.
Certains le font, et c’est très bien.
Que l’on puisse aimer cette profession et le
proclamer nous surprend et nous inquiète. Et si
celui qui le clame se sent mûr pour passer du côté
des services sociaux, qu’il le fasse: il y sera plus
utile qu'en tant que surveillant,
La première mesure d’humanisation devrait |
non pas être laxisme ou fermeté, mais bien non- |
recours à ce système destructeur et hurmiliant et |
non justifié pour les trois-quart de ceux qui y sont.
Liberté
120, rue de Messaney
6798 Aubange
vivent les chefs
Un an, le8 septembre, que le détenu
Balencour est mort à l’intérieur d’un
de ces établissements où l’on est
censé surveiller et conserver... Un an
que le Ministre de la Justice ef les
bonzes de son administration escla-
vagiste refusent de dire ou de recher-
cher la vérité sur cette mort annon-
cée, prévue, décrite par la victime
elle-même dans les lettres qu'elle
nous adressait dans les semaines ef les
jours précédents, la dernière 48 heu-
res avant le matin blême.….
Ïl n'était pas question de suicide, mais bien
d'agression. Certains membres du personnel
même le mettaient en garde et il était attentif. Il
fut cependant trouvé mort, suicidé par pendaison,
disait-on d’abord à l'Administration, avant
qu’elle ne se ravise et parle d’électrocution…
On peut mourir ainsi, c'est vrai, à condition
de le vouloir, d’abord, ce qui n'était sûrement pas
le cas pour un lutteur; à condition aussi de réunir
certaines conditions favorables...
Une petite enquête dans les succursales nous
fait constater qu'aucune note, aucune instruction
tendant à attirer l’attention, à recommander la
prudence ou la surveillance, à faire vérifier le
fonctionnernent correct des disjoncteurs aux cof-
frets de passerelles n’a jamais été adressée aux
directions. Ceci aurait tout de même été une
nécessité minimale, si.
Pour nous, ceci prouve que l’on ne croit pas
au suicide, à un accident provenant du non-
fonctionnement instantané des dispositifs de pro-
tection, On est convaincu qu’ils fonctionnent cor-
rectement d'une part et on sait ce qui s'est passé
d'autre part... Mais les intérêts suprêmes de
l’industrie imposent la nécessité et la persistance
d’un black out protecteur.
Rappelons que Balencour devait se trouver
allongé sur son lit dont le matelas est en mousse
D’ABORD EN SOLIDARITE AVEC LES BASQUES PUIS POUR DE MEILLEURES CONDITIONS DE DETENTION
synthétique ou de latex, parfaitement sec, isolant,
que les fils auraient été fixés sur la poitrine, donc
en surface et à peu de distance l’un de l’autre. Ceci
fait donc court-circuit franc et en surface. Le
corps ne fait pas ici résistance entre le secteur et la
terre, il n'y a pas assaut d'ampérage à travers le
corps en sa longueur. Le coffret de protection
devait immédiatement se déclencher, la victime,
volontaire ou non, en être quitte pour la secousse,
comme c’est souvent le cas pour qui fait profes-
sion d’électricien.
Dés secousses électriques jusqu’à 110 volts
s’emploient couramment en électrochocs, en
psychiatrie et en réanimation cardiaque. On ima-
gine que la secousse subie a dû faire bondir le |
corps, que la coupure immédiate du courant a dû |
donner le temps à des réactions instinctives et ani-
males de l’instinct de conservation de se manifes-
ter, que les fils ont dû se déplacer, se détacher.
Notre conviction d'initiés s'est faite, inébran- |
läble: Balencour a été assassiné ou mis en condi-
tion de pouvoir être exécuté par électrocutions
répétées. Le crime est maquillé. Par qui? [l déran-
geait autant certaine mafia de détenus, que
matons et directions. Beaucoup avaient à craindre
et à se réjouir.
Plutôt que de plaindre l’homme, qui était
jugé et se jugeait lui-même, jugeons ces industriels
qui, comme dans toute industrie, camouflent ce
qui ternit leur «image». Alors que toute atteinte à
la vie hors prison est sanctionnée de lourdes peines
de prison, on s'aperçoit que certaines morts ne
pèsent pas le même poids dans la balance. les
morts au champs d'honneur, les morts au cours de
bavures, les victimes de la route et du travail, les |
suicidés assassinés des prisons du roi.
On constate qu’en prison, les hommes, les |
droits," la dignité, la vie n’ont aucune valeur, que
les responsabilités, les défauts de prévoyance, les
refus d'aide à personne en danger, sont escamo-
fois parodie de jugement. Dans le grand cirque,
les pauvres clowns ont toujours tort... Vivent les
chefs! Liberté
120, rue de Messancy
6798 Aubange
j ; s à RE ë «| Ses |]
tés, ne sont jamais sanctionnés, même s’il y a par- |
un autre
système
Cette lettre a été écrite au nom de
toutes les Jîlles qui: ont maille à partir
avec la «justice» à cause des stupé-
Jfiants.
Ceci est une lettre que l'on m'a demandé de
vous faire parvenir afin de se faire entendre, pas
séulement par les juges, présidents, procureurs du
roi et compagnie, Nous, «femmes libérées», pri-
vées de liberté et incarcérées à Forest, nous avons
pris la décision de réagir contre les trop fortes pei-
nes qui sont infligées à des toxicomanes qui ont
commis des délits, non pas par plaisir, mais pour
subvenir à leurs besoins de toxicomanes. Nous
estimons que. ces personnes sont plus à soigner
qu’à punir aussi sévèrement.
Je vais vous citer trois cas — pas de noms
dans ce message — ce n’est pas seulement pour
nous mais aussi pour les autres toxicos qui tombe-
ront bêtement dans les mains de la justice. Les cas
que je citerai sont ceux qui m'ont le plus frappée.
Le prermier: une toxico a fait un casse de
10.000 FB. Sentence: 54 mois, sursis compris. Le
deuxième cas: une tOxico a pris un an pour trace
plus cinq ans de sursis qui sont tombés, soit six ans
ferme. Le troisième cas: une jeune femme a tué
son amant, Sentence: huit mois. Ah c’est vrai, elle
n'est pas stup.
À nos veux, si nous laissons faire la police et
la justice, la solution pour eux sera la plus simple:
les toxicos en prison et le plus longtemps possible.
Or, ce n’est vraiment pas la solution, parce que les
toxicos sont des malades sous l'emprise de la dro-
gue et après un moment, quand ils ont décroché,
ce ne sont plus des malades. Après avoir repris des
forces, regoûté aux plaisirs de la vie, revu les
arbres, les oiseaux, les saisons, l’amour — revivre
quoi — ils sont d’autres personnes, sans doute fra-
gilies, certainement très sensibles à ee qui les
entoure (je ne parle malheureusement pas de ceux
| qui sont restés «flippés»), parce que l'alcool et le
tabac rapportent à l'Etat, ce que la came ne fait
pas encore) mais tuent beaucoup plus que la
ALTERNATIVE LIBERTAIRE
parmi des alcolos
car l'alco
ne fais le procès €
sibles», seulement
International, le Minis À
tice: la Pere de nou
dit Den en ce n'est pa u! quer
nous mais bien pour tous les toxk
Le docteur Baudour avait, av
nés et moi-même, rédigé une let
exemplaires afin de toucher ee
Le docteur RE que jé respecte
été nearesté quatre mois et la Se cquil
tée. Dans sa lettre, nous parlions des problè:
délinquance qu’entraînait la situation que vit
société actuelle. Aucun'de nous ne peut dire:
n'en a pas entendu parler, mais c’est à cemom
là qu’il aurait fallu réfléchir, écouter, bouger
faut dire qu’entre 54 francs le Vial et 6.000 francs
le gramme, il ne faut pas faire un dessin: r. ke
J'ai parlé de cela avec un homme trés'ouvert,"
l'aumonier Philippe. Ii m’a tout de suite dit. qua
Fintérieur de la prison, ça ne risque pas de toucher
grand-monde, Mais si chez les hommes, condam-
nés Où pas, quelques uns peuvent se joindre à
notre action, rqu'ils nous le fassent savoir par
Passe-Muraille, parce que ce sera dur. Maïs nous
poursuivrons notre lutte, car nous le voulons.
fs
J'aimerais préciser que ce n’est pas une publi=
cité pour ou contre la came. Mais un plaidoyer
contre des pairs qui peuvent condamner des gosses
de 21 ans à 4, 5, 6 ans, sans réaliser que la révoite,
la haine peuvent envahir tout être humain. Jesou-
haïte du fond du cœur que ces juges, présidents et
procureurs soient un jour face à unsproblèmesimi
laire avec quelqu'un de proche d'eux, Alors peut
être enléveront-ils leur masque parce qu'ilslettrou”
veront hideux, et que le poids de la justicepèsera
lourd sur FU conscience,
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-N° 67 - Novembre 84 - Page 23
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Avec la participation de:
Roger Lallemand (Sénateur PS)
Olivier Deleuze (Député écolo)
Roger Noël- Babar (asbl 22 Mars)
Le 15 novembre 1984 à 20h x local 1302 H
(bâtiment H de l’Université Libre de Bruxelles, 2 avenue Héger à 1050 Bruxelles - Ixelles)