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Full text of "ALTERNATIVE LIBERTAIRE (belgique) - ARC MUND ANAR"

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S'il est un constat d’évidence à faire, 
c’est que le mouvement anarchiste 
n’est pas resté muet, ni dans la prati- 
que, ni dans la théorie en ce qui con- 
‘cerne l'éducation. Nous ferons donc 
un historique de ce qu’ont été les pra- 
tiques et les théories libertaires en 
matière d'éducation pour finir avec 
les bases de ce que devra être l’éduca- 
tion libertaire aujourd’hui. 


Les alternatives» à l'école ne datent pas 
d'hier. Comme nous le disent Fremion et Volny 
{1}: «à chaque époque, dans toutes les civilisa- 
tions où l'école est soumise à la loi de fer d'un 
pouvoir autoritaire ou d'une église, des projets et 
tentatives pour laisser vivre aux enfants leur vie 
naturelle naissent et durent au milieu dé la tem- 
pêtes. C'est surtout dans les années 1880-1920 
que le mouvement s'ampiifie. Mais là encore, le 
stalinisme, & guerre mondiale et l'Eglise catholi- 
que auront raison de bien des enthousiasmes,. 


ferrer.… 


Le premier à être victime de l'Eglise. catholi- 
que sera Francisco Ferrer, fondateur de l'Escuela 
Moderna (ancêtre de toutes les écoles moder- 
nes, Freiret compris). Assimilé à un terroriste, il 
sera fusillé en 1909. C'est en 1901, à Barce- 
one, qu'il fonde la première école moderne dans 
une Espagne profondément atteinte par l'analpha- 
bétisme. Il lui faudra mener une lutte achamée 
face à l'Eglise, véritable Etat dans l'Etat, qui 
n'accepte pas la remise en cause de son hégé- 
monie: tirer le peuple de son ignorance c'est 
mener une entreprise hautement subversive. Sa 
première tâche fut de créer des livres scolaires 
puis de former des éducateurs. Son école, ou 
plutôt son foyer d'éducation populairer est 
ouverte aux enfants comme aux adultes, de 
même qu'elle est mixte (n'oublions pas que nous 
sommes au début du siècle et qu'en Espagne, 
encore en 1980, la mixité n'existe toujours pas!). 
Son école se veut insérée dans la lutte des clas- 
ses où syndicats, groupements d'ouvriers, socié- 
tés de résistance travaillent à obtenir leur émanci- 
pation complète. En faveur de «l'éducation inté- 
grale» Ferrer privilégie malgré tout l'éducation 
intellectuelle, C'est sur le savoir livresque et la 
connaissance plus cérébrale qu'expérimentale 
que s'appuie l'école moderne. A la lumière 
d'autres, dont nous allons parler, sa pédagogie va 
moins dans le sens d'une éthique libertaire, sa 
vocation étant plus la création d'une éducation 
nationale laïque. 





A — — 


| Notons aussi au passage que les punitions n'exis- | 
| tent pas. 


| d'autres, a vu que la croissance démographique 
| est dangereuse. 
| sommaire en ce temps, pour l'éducation sexuelle 











robin. | 

Autre victime de l'Eglise catholique, Paul | 
Robin, fondateur de:l'orchelinat de Cempuis en | 
1880. Farouche partisan de d'éducation inté- 
grale» et de la mixité, léducation dans son école 
est la même pour garçons et filles. Grande nou- | 
veauté pour l'époque: un tiers du ternps est con- | 


sacré à l'éducation physique. Toute activité est | cieux et 
éducation <intégraler (globale) qui prenne en 


proposée aux enfants, jamais imposée. Les 
apprentissages manuels nombreux se font dans 


les ateliers que les élèves choisissent selon leur | 


gré. Ils peuvent aller dans les champs, faire toutes | 
les activités créatrices et artistiques, suivre les | 
cours en pleine nature... Freinet empruntera 
beaucoup à la méthode Robin. À douze ans, 


sions se règlent par là discussion entre les par- | 
ties. Il est l'ancêtre de l'éducation sexuelle ce qui | 


lui attirera les foudres des ecclésiastiques et des | À HIER “ 
ë q | à l'enfant un savoir». Ainsi, plutôt que d'imposer 


bourgeois bien pensants. À tel point qu'une cam- 


pagne de presse se déchaîne contre lui, fondée | 


esentiellement sur le fait que les cours sont mix- | 
tes. Ceci des 1891. Robin continue à enseigner | 
l'histoire des civilisations (et non des grandes | 
batailles), à apprendre l'horreur de la guerre. | 


«Pas de cerveaux sans mains, pas de mains sans | 


cerveaux», adopte:t-i| comme principe de base. | 


Ecolodiste avant la lettre, Robin, comme bien 
il lutte pour la contraception, 


des adultes et des femmes en particulier, publie 
des dizaines de brochures pour expliquer com- 
ment ne pas avoir d'enfants quand on en a trop. 
L'Eglise fait courir les calomnies les plus folles sur 
Cempuis, décrit par sa presse comme un vérita- 
ble bordel. Condamné pour ses écrits sur la santé 


des femmes, il s'exile en Nouvelle-Zélande. [lse | 


suicide en 1912. 


faure.… 

Poursuivant l'expérience de Robin, Sébastien 
Faure (1842-1945), vieux routier de l'anarchie, 
fonde en 1904 une ferme, la Ruche. !l loue vingt 
hectares pour y installer l'école (le miel cultivé sur | 
la propriété servira à alimenter les caisses). Il crée 
une coopérative qui achète les produits de la 
ferme et les distribue. Véritable modèle alternatif 
pour le prolétariat, la Ruche vivra jusqu'à la guerre 
mondiale où les difficultés financières auront 
Faure à l'usure. 

L'enseignement dispensé est celui «intégral» 
de Robin. La Ruche fonctionne comme un soviat 


ALTERNATIVE LIBERTAIRE - ASBL 22 MARS - N° 67 - Novembre 84 - Page 2 


| Aujourd'hui, 
| aident à mieux cerner la forme et le contenu que 








dont la direction dépend de l'assemblée génerale 
hebdomadaire composée des enseignants, des 
élèves les plus âgés, de Faure. 1ly a une cinquan- 
taine d'enfants à la Ruche dont beaucoup sont 
des enfants de victimes de la répression politique. 
On y apprend l'espéranto. Les enfants font ce 
qu'ils veulent jusqu'à dix ans où ils sont mis en 
apprentissage (ils papillonnent d'atelier en atelier 
— imprimerie, menuiserie... — deux, trois mois à 
chaque fois). Les enfants sont salariés et produi- 
sent pour l'école. L'éducation sexuelle et la mixité 
sont reprises de Robin. 


Comme l'expliquent Raynaud et Ambauves 


| (2) «avec l'expérience de P. Robin, la liberté de 
| l'enfant pressentie à des niveaux différents par 
| certains théoriciens anarchistes (Sbrner, Prou- 
| dhon st Bakounine) entre dans lé domaine de la 
| réalité. L'échec de l'autoritarisme de la famille et 


l'école n'était donc pas inéluctable, Mais 


| l'échec de Cempuis montrait cependant qu'un 
| système social autoritaire ne pouvait toiérer en 
| son sein de-tels îlots de liberté». Aussi convenait-il 
| de définir une stratégie de l'éducation libertaire 
| par rapport à la société existante et future. Bakou- 
| nine pensait qu'un changement de structures 
| économiques permettrait seul et nécessairement 
| une éducation «intégrale». Séhastien Faure, en 


replaçant l'éducation libertaire dans une dynami- 


| que de luttes autogestionnaires démontra au con- 


fraire que la liberté de l'enfant devait d'ores et 


| déjà être envisagée. C'est toute l'originalité de 
| son proief éducatif qui, de notre point de vue, 
. réprésente un aboutissement théorique synthéti- 


que de la mentalité anarchiste». 
C'est à partir d'exemples d'écoles de type 


| libertaire, parmi beaucoup d'autres en Europe 


(Espagne, Angleterre, URSS, Portugal, Allems- 


| gne, France), et à partir des premiers jalons théo- 


riques posés par Stirnèr, Proudhôn et Bakounine, 
que se sont élaborées les lignes conductrices de 


| ce qu'on appelle depuis un siècle «d'éducation 


libertaire» (le mot fut uHisé pour la première fois 
puis systématisé par Robin en 1895 lors de la 
création de son journal, Le Libertaire). 
des expériences concrètes nous 


doit se donner une éducation de caractère liber- 
taire. L'Histoire de ces histoires nous fournit des 
enseignements précieux et précis pour bâtir une 


compte les besoins de l'enfant et de l'adulte ainsi 
que les diverses façons de les extérioriser, res- 
pectant les spécificités régionales, culturelles… 


ï AT. 7 EURE D Si 
| les théoriciens anarchistes 
| l'enfant choisit un méfier qu'il va perfectionner. Au | 
| plan moral on lui apprend les notions de libertéet | 
| de fraternité. En 1883, Robin crée la première | 
colonié de vacances. Tous les problèmes et ten- | 


Max Stirner (1806-1856) est un des tout 
premiers à pressentir la finalité de l'éducation telle 
qu'elle se pratique encore aujourd'hui: intégration 
à un systeme social autoritaire: «Nous avons pris 
dès notre enfance l'habitude de nous résigner à 
tout ce qui nous était imposé, l'éducation impose 


un savoir (celui de la classe dominante évidem- 
ment}, développons ses possibilités créatrices, 
son rapport à la liberté. Stirner prône ici la liberté 
de l'enfant comme condition de celle de l'homme. 
Faut-il croire que cette évidence soit tellement 
dérangeañte pour ne pas être appliquée 
aujourd'hui encore ? 


lssu du peuple, Proudhon a envisagé l'éduca- 
tion dans une perspective de classe, comprenant 


bien que le peu d'instruction reçu par les enfants | 


du peuple consistait (consiste?) à donner à des 
enfants inférieurs juste un degré de savoir que 
réclame une consciencieuse obéissance. \|l 
dénonce l'existence de l'enseignement d'un côté 


TL) SAIS: MAMAN, JE NN 
VELX ALLER À LA MA: 
TERNÉLLE ETÉTUDER 
BEAUCOUP, COMME CA 
PLUSTARD JE NE DE- 
VIENDRAI PAS UNE FEM- 

: ME FRUSTRÉE 
ET MEDIOCRE 





COMME TOI 





«Tout projet particulier 

n'a de sens que comme 
partie d'un BOIeE deneiae 
J. Monot 


pour _— 





et de l'apprentissage de l'autre comme ne servant 
qu'à reproduire sous une autre forme la sépara- 
tion des pouvoirs et la distinction des classes. Il 
tire donc l'inévitable conclusion: +<Le système 
bourgeois est incapable d'offrir aux masses une 
instrüction sérieuse». 

Sa pensée en matière d'éducation basée 
essentiellement sur la philosophie du travail, Prou- 
dhon pense qu'il convient de réhabiliter le travail 
manuel et avance pour la première fais l'idée que 
l'instruction doit durer toute la vie. Bref, que l'édu- 
cation soit permanente. Comment en arriver dune 
éducation permarñente? «| s'agira dé faire d'un 
établissement public une institution économiques. 
L'Ecole ne sera plus coupée ni de la vie ni de la 
production. Unifiant l'intellectusl et le manuel, elle 
sera productrice de biens “économiques et par là 
même rentable et autonome d'un point de vue 
financier. La polytechnie permettra d'éviter que 
ces «ateliers-écolesr soient plus des ateliers que 
des écoles. La finalité reste la formation d'hom- 
mes et de femmes complèt({e)s. Proudhon a bien 
saisi là l'un des moyens d'émancipation de la 
classe ouvrière: «Le nombre de spécialistes 
réduit au minimum, chacun étant à même de eom- 
prendre les tenants et les aboutissants de son tra- 
vall, les travailleurs seraient à même de se passer 
de tous ces parasites qui tirent un profit social de 
l'ignorance humaines. 

Par là même, Proudhon replace donc le pro- 
blème de l'éducation et de l'enseignement dans 
uné perspective sociale: il donne les moyens à 
une éducation libertaire de sortir du marginalisme 
pour, en entrant dans le champ social et socié- 
taire, devenir authentiquement populaire. 


Bakounine, tout comme Proudhon, et ce sera 
une constante du mouvement anarchiste en 
matière d'éducation, constate et dénonce la divi- 
sion des hommes et des femmes en manuels, 
intelléctuels ou savants. || s'insurge contre la 
domination de la science issue principalement du 
dix-huitième siècle (le siëcle”des”lümières)"où 
s'est fondée l'idéologie bourgeoise : détentrice du 
savoir, la bourgeoisie le concrétise en pouvoir sur 
la vle de ceux qui «ne savent pass. Et comme le 
savoir n'est accessible qu'à caux qui ont le pou- 
voir.….! De même que Proudhon le réclame: pour 
sortir de ce cercle infernal at donner au peuple les 
moyens d'accéder au pouvoir, il faut se doter 
d'une instruction populaire qui sera l'une des 
bases de la société socialiste et qui n'instituera 
aucune hiérarchie entre manuels et intellectuels. 

I faut qu'il n'y ait eni ouvriers, ni savants mais 
seulement des hommes». Si à cette instruction 
manuelle et intellectuelle on ajoute, comme 
Bakounine, l'éducation physique, on obtient là ce 
qui est encore l'une des constantes du mouve- 
ment anarchiste: une éducation «intégrales. 


C'est sur ces bases théoriques que 5e sont 
fondées des expériences multiples comme La 
Ruche et Cempuis : l'éducation serait permanente 
et intégrale, ayant l'enfant pour but et non comme 
moven, avec comme régle de base la liberté et le 
respect de chacun dans sa spécificité ét sa 


faculté d'adaptation st d'évolution. Ouverte sur 


l'extérieur, car l'école doit être la vie, elle serait 
égale pour tous et constituerait un des piliers de 
base pour l'édification d'une société communiste 


| libertaire, 
| (1} Fremon-Volny, Les organes de l'histoire. 


L'éducation libertaire 


Alain 
Extrait du Q-Lotté 
Journal libertaire du Québec 
64 rue Moissonneuve, App. 4 
Québec GIR 2C3 


(2) Raynaud-Ambauves, 
(Ed. Spartacus). 


CA FAT FLAIGIR 
BE RÉCOUFORTER 
&A MAMAN ! 








UN AUTRE PROJET PEDAGOGIQUE QUE CELUI DE LOUIS MICHEL 


La grève des mineurs anglais, qui 
a débuté le 6 mars pour défendre 
70.000 emplois menacés par le 
N.C.B. (National Coal Board), se 
poursuit. 80% des mineurs sont tou- 
jours résolus à résister à la restructu- 
ration imposée par le gouvernement. 

La grève des débardeurs à commencé par un 
refus des ouvriers à Hunterston (Ecosse) de 
décharger du charbon jaune destiné à l'aciérie 
RBavenscraig. La cargaison a été déchargée par des 
membres de la I.S.T.G. (Iron and Steel Trades 
Confeteration), le plus important des syndicats 
de l'acier, hostile à la lutte des mineurs. Leur 
grève visait à s'opposer au plan gouvernemental 
de restructuration. Malheureusement, cette grève 
vient de se terminer avec l'accord de 60% seule- 
ment des ouvriers. Leurs chefs ayant négocié une 
solution préjudiciable à la lutte des mineurs, ceux- 
ci continuent. Le N.C.B. a essayé d'organiser un 
mouvernent en vue de la reprise du travail, mais 
sans succès perceptible. Un petit nombre de «jau- 
nes» ont passé les piquets de grève. 

La N.U.M. (National Union of Minewor- 
kers) refuse de négocier avant que la N.C.B. 
annule sa décision de fermer plusieurs mines, sou- 
tenue en cela par Thaitcher. Il est évident qu’un 
compromis ne sera pas possible. Les mineurs 
d'ailleurs ne se font aucune illusion: leur lutte sera 
longue et difficile. Lois de la récente conférence 
de à T.U.C., ils n’ont pas appelé à la grève géné- 
rale. Ils savent en effet qu'ils ne peuvent compter 
sur le soutien dont ils ont besoin. 





On assiste donc à l’une des grèves les plus 
acharnées de Grande Bretagne, depuis la grève 
générale de 1926. Deux mineurs ont été tués, six 
mille arrêtés, plusieurs milliers blessés, Mais même 
après sept mois de pauvreté, les mineurs consér- 
vent leur courage. 


Leur lutte continue uniquément grâce à 
l'assistance qu'ils réçoivent des syndicats et comi- 
tés de soutien. Le soutien étranger est d'ailleurs 
une source financière indispensable et constitue 
un encouragement pour les grévistes et leur 
famille. L'assistance des anarcho-syndicalistes 
(sections de PA.I.T. et. de l'O.V.B. en Hollande et 
de l’I.W.W.) est particulièreient appréciée. 


Il y a quatre ans, ! 


Pour éviter que la faim ne force les mineurs à 
répréndre le travail, 11 faut continuer à les soute- 
nir. Comment? En envoyant des dons financiers 
(mandats internationaux) à la D, AM. (Direct 
Action Movement), commission de langue fran- 
çaise; en envoyant des lettres de solidarité à la 
N.U.M, et à son journal «The Miner», St 
James’ House, Vicar Lane. Sheffield, Grande Bre- 
tagne et enfin en envoyant des badges, insignes 
d'organisations, etc qui pourront servir à une lote- 
rie destinée à récolter des fonds. 

D.A.M. 

Commission de Langue Française 
147, Marlborough Ave 

Hull 

Grande Bretagne 


LA PAGE DES ENFANTS: ROBIN DES BOIS, ZORRO, MICKEY, BABAR... ALTERNATIVE LIBERTAIRE - ASBL 22 MARS - N° 67 - Novembre 64="Pages 



















La en de iques ins- 
que la preuve soit la, 


voir avec la direction de la Société 
nérale, il nous a été assuré que le 


que de quatre millions — n'était pas 
provisionné». 
Parquet a relu ses notes avec une 


feinte compassion: «La banque n'a | 
reçu à cet égard aucune instruction de | 


la direction centrale de Bruxelles»... 





‘On n'en dira pas plus. La faillite est déclarée 
séance tenante, ce qui rend le jugement «exécu- 
toire sur minute». Le soir-même, 


teurs Delande et Bourlée, fait main basse — mais 


«en toute justice» — sur le patrimoine d'Emile | 
Sablon. Un homme apparemment sans foi niscru- | 


pule. 


Au fait, qui est Sablon? Un chef d'entreprise | 


honorable et coté: son affaire donne du travail à 
quatre cents personnes. La trentaine bien faite, 
plein de la volonté de se battre, le jugement du 14 
septembre ne l'a pas fait plier. 

l'est victime d'une injustice, de cela non seu- 
lement ilest sûr, mais il peut le prouver. À son 
sens, la motivation du tribunal est fondée, c'est 


évident, sur deux appréciations tofalement erro- | 
nées. Dans la première, il est affirmé que «depuis | 
mars 71, date de l’assignation en faillite, les défen- | 
à l'ONSS, | 
malgré diverses promesses». Or une attestation | 
délivrée par la Banque de Paris et des Pays-Bas | 


deurs n'ont effectué aucun versement à 


prouve exactement le contraire: 1,5 million à été 


Uour lega havé never heeni in better shape. 





1e 
effectué? D tons *Ù 


E 
_ proyisionné. Là encore l'argumentation et les pié- 
ces avancées par Sablon Brillent comme du vif 
“argent 


précise mot pour mot: «{/ n'est pas dans nos habi- 


| de nos clients. La réponse ne sera donnée que lors 








ation téléphonique que je viens | 


chèque de rnonsieur Sablon — chè-. 


Le représentant du 


De toute évidence, certains magistrats ont du mal | 





| bon sens ? 


le juge- | 
comrmussaire Jacquemin, accompagné des cura- | 








nsuite Fhistoire du chèque soi-disant non 








elles proviennent... de la banque elle- 
même. Dans une correspondance écrite, celle-ci 


tudes de donner des renseignements par téléphone 
au sujet de la provision d’un chèque émis par un 


de la présentation du chèque pour encaissement. 
Quel aveu. Si le tribunal avait simplement agi avec 
sérénité, dans sa manière de procéder, il lui aurait 
suffi d'attendre — ne füt-ce que quelques heures 
et l'ouverture des guichets — pour rendre son 
jugement et s'apercevoir que je compte était cou- 
vert. Mais non, «en rédigeant en connaissance de 
cause la feuille d'audience, de la Chevalerie se jai- 
sait le responsable direct d'un jugernent erroné. 
Le Tribunal commetfait un faux et en a fait usage. 
Alors que mon crédit n'éfait pas ébranlé». Telle 


est la vérité d'Emile Sablon. | 


Justice lui sera-t-elle donc rendue? Que du 
contraire: elle persiste, elle s’acharne, la Justice. | 


à supporter les contestations et, devant les juge- 
ments portés par leurs propres pairs, leur sens de 
la solidarité va littéralement se défoncer. 


Suite au verdict de 71, la deuxième Chambre 
du Tribunal correctionnel de Nivelles poursuit 
Sablon pour «émission de chèque sans provision» 
et le condamne, en 1976, à une peine de deux ans 
d'emprisonnement. Un an plus tard, la Cour 
d'Appel conforte la sentence: ce sera trois ans. La : 
cause semble définitivement entendue quand, le 4 | 
janvier suivant, vient le camouflel: la Cour de 
Cassation récuse les arrêts précédents et l’on se dit 
que tout va enfin se régler. Pas le moins du 
monde. Sablon, réintégré dans ses droits, a natu- 
rellement porté plainte contre le jugement rendu 
en 1971. Or c’est contre lui, Sablon, que des pour- 
suites sont à nouveau engagées du chef de «ban- 


queroute frauduleuse» par la seconde Chambre | 


du tribunal correctionnel de Nivelles. Celle-là 


même qui l’a condamné en 76, 

À ce point du dossier, on saisit mai — ou trop 
bien — dans une petite juridiction où les magis- | 
trats sont dmenés à se côtoyer quotidiennement, 


pourquoi il faudrait à tout prix que Sablon com- | 


paraisse une nouvelle fois devant dès juges qui, à | 


Ânatoc. 


+ 





ALTERNATIVE LIBERTAIRE - ASBL 22 MARS - N° 67 - Novembrebre 84 - Page 4 











tout le moins, pourraient ne pas avoir le recul 
indispensable pour apprécier objectivement les 
choses et les faits. C'est le bon sens même, non? 
Mais le bon sens, dans les prétoires, est souvent 
inconvenant. Aux demandes répétées d'être jugé 
devant une autre juridiction, les tribunaux vont 
chaque fois répondre négativement parce que «les 
circonstances invoquées ne sont pas de nafure à 
Jaire présumer, dans l'opinion générale, que le 
Tribunal Correctionnel se laisserait guider dans sa 
décision par des raisons autres que celles de la J'us- 
tice». Ce dernier acte, il faut le noter, date de 
1983, soit douze années après le début de toute 
l'affaire. Tant et si bien qu'on se demande effecti- 
vement s’il n’est pas digne d'intérêt, pour les pro- 
fanes du moins, de connaître le sentiment de cette 


| fameuse «opinion générale»: célle qu'invoque si 


généreusernent une certaine magistrature du siège. 





En fait, dans l'arrondissement de Nivelles, ile se | 
trouve personne de bonne foi pour oser soutenir | 
| que le Tribunal de Commerce ne fait pas l'objet 
| de critiques multiples, acerbes et concordantes. 


Mais comment donner caution à cet état d'esprit 
frondeur? Un coup d'éclat semble nécessaire. Il 
trouvera bientôt ses artificiers: Marius Larose et 
Michel Graindorge. «du sein du Tribunal de 
Commerce, dénoncent les deux hommes, ur 


| groupe, une bande, une clique, une mafla consti- 
| tue une association de malfaiteurs qui, au prix de 
combines et de magouilles, continue de détourrter 


des fonds et de refuser les reddifions de comptes 
réclamées par les faillis». C'est que Sablon n’est 


| désormais plus seul. À ses côtés, d'autres person- 


nes ont porté des accusations précises et graves. 
Contre les mêmes «beaux linges»: le président 
Léonard, les curateurs Bourlée, Delande et Ber- 
touille. 


civilement mort 


Sur le haut de la sonnette, une carte de visite 
collée avec du scotch: «Ligue de soutien des faillis 
et de leurs créanciers... Anpuyez fort pour son- 
ner». 

«Ça ne sert à rien, la sonnerie ne fonctionne 


| plus»: Marie-Louise Jacobs a retiré la chaîne qui 


rétient la porte du magasin d'antiquités. Enfin, ce 


| n'est pas exactement «le sien» parce qu'elle loge 


chez son fils, «depuis l'affaire, vous comprenez». 
D 


| En tout cas, son fils — tout comme elle — est 
amoureux fou des beaux arts et, dans les deux sal- | 
les d'exposition, il faut y regarder à deux fois pour | 
ne pas se cogner aux bibelots et aux meubles gom- | 
nés. Marie-Louise Jacobs continue à porter beau 
il est indélicat de lui. 
demander son âge. Et puis, il y a un autre petit 


mais, galanterie oblige, 


bémol dans son histoire à elle: à l'évidence, elle ne 
se retrouve pas complètement «sur la paille». 
C'est-à-dire qu'on pourrait croire — parce que les 
images d’'Epinal fonctionnent ainsi dans l’imagi- 
naire collectif — que les faillis sont tous des pau- 
vres gens. Ce n'est pas toujours vrai., En 1972, 


| date de ses premiers démêlés avec les tribunaux de | 
Nivelles, madame Jacobs-Veuve Demeter ne vivait | funes, La curatelle les a évacués, à la «va comme 
| pas non plus dans la misère: «Mon parrimoine | 


était évalué à 150 millions, mon cher monsieur». 


«Cent cinquante millions» : elle prononce le chif- 


fre comme si l'idéalisme de sa passion allait tran- 
quillement de soi, Dans les années 60, c’est cette 
même inspiration qui l'avait d’ailleurs décidée, 
elle et son mari, à créer une institution à vocation 
d'assistance scientifique et de mécénat pour les 
artistes. Pour cette embellie, elle n'avait pas lésiné 
sur les moyens: acquisitions de «la Charte de 
Christophe Colomb» et de collections de mon- 
naiés ancienrnés, tOufes en or, 


Malgré des fortunes diverses — erreurs nota- 


| riales, ventes judiciaires sur base de cahier de 





charges inaccessible, folles. enchéres — c'est pour 
1972 qu'elle préparait l'ouverture de son Centre 
Culturel et la création du «Prix Marie-Louise 
Demeter», quand tomba le bras de la Justice. Le 
20 juin 1972, madame Demeter-Jacobs, non- 
commerçante, ayant du crédit, n'étant pas en ces- 
sation de paiement, convoquée tardivernent, sans 
dossier, m conseil, absente, est déclarée en faillite 
d'office à titre personnel. 


«Je n'ai pas peur de le dire: quelques mafto- 
sis, déguisés en magistrats, On! galvaudé mon 
patrimoine. galvaudé, le mot n'est pas assez 
fort, Il y avait les curateurs successifs, Olivier Ber- 
touille et Philippe Cuvelier. Mais tout s'est fait 
sous le contrôle et la surveillance du Tribunal de 
Commerce, de Philiope Léonard». 


Philippe Léonard: dans toutes les pièces 


citées, il fait figure de personnage-clé. Non seule- 
ment parce que la chose jugée est de son ressort 
mais parce qu'en tant que magistrat, il couvre les 
agissements, tous les agissements, de ses subor- 
donnés. Michel Graindorge: «je ne comprends 
pas le non aboutissement des plaintes et lettres 
répétées, quarante-trois exactement, adressées au 
Ministre 4 la Justice. Faut-il que le président 
Léonard ait, pendant des années, corrompu de 
manière effective l». 


«Corrompu»…. est-ce que le mot n'est pas 
insolent? «Je vais vous parler de tout, cher mon- 
sieur, vous verrez bien par vous-même. Les mon- 
naies ? C'était une collection de trois cents pièces 
provenant d'une grande famille espagnole: wisi- 
gothiques, doblas, ducats, Louis d'or... Sur les 
conseils «avisés» de l'expert Franceschi, le cura- 
teur Bertouille en était arrivé à la conclusion 
qu'elles étaient principalement fausses. Bertouille 
était content: il allait pouvoir me confondre. 
Franceschi était heureux: en évaluant les pièces à 
moins de deux millions, il allait pouvoir les rache- 
ter lui-même à bas prix. Sans prévenir personne, 
Bertouille a préparé la vente, confiée par ses bons 
soins à l'expert Vinchon de Paris. Elle eut lieu à 
Bruxelles. Regardez les coupures de presse, c’est 
«Le Soir» du 22 mai 1974 les monnaies 5e sont 
vendues pour. dix-huit millions. Maïs quand on 


| lit, beaucoup plus tard, le livre de comptes du 
| curateur, gu'apprend-on? Trois millions ont dis- 


paru. On n’y trotive frace que de quinze. Deuxie- 
mement, l'argent y est porté avec un retard de six 
mois. Alors quela loi impose les versements à hui- 
taine. Où sont passés, pendant six mois, les dix- 
huit millions? Selon moi, dans une banque où le 
curateur les à déposés à terme. Cette combine lui a 
rapporté 900.000 francs d'intérêts». 


En 1974, ladite «faillite» pourrait en fait se 
clôturer sur le champ, les dix-huit millions cou- 
vrant largement «le passif» estimé. Rien de tel ne 
va se passer. Dix ans plus tard, les choses sont tou- 
jours en état, Mais on en a profité pour brader les 
livres et les vins. 

«Les livres, il n'y en avait pas moins de onze 
mille volumes, évalués à prês de douze millions de 


je le pousse» dans des entrepôts humides. Un 
désastre, Seul un tiers a pu être décemment mis en 
verte au prix d’un million dérisoire. Quant aux 
vins, c'est aussi scandaleux. Nous possédions 
douze mille bouteilles d'une valeur de quinze mil- 
lions. Ce sont les fournisseurs qui nous l'ont dit. 
Un jour, nous apprenons par le journal que les 
bouteilles sont mises en vente dans une localité 
pratiquement inconnue, Lillois. Au moment 
même où une autre vente de vin se lient à Bruxel- 
les. Des amis ont télénhoné à l'expert Renault 
pour savoir dans quelles conditions les enchères 
allaient avoir lieu. On leur a répondu: «Vous ne 
PONEZ pas assister à celte dégustation, elle est pu 





A NIVELLES-CHICAGO LE GANG A LA TOGE DES JUGES 





D ee ee men - + 0 Gen mn 


nt pm ge ge 


vée; sauf si vous obtenez l'autorisation du cura-. 
ir, cela voulait dire quel la dégustation 
ient s rictement ‘réservées à leurs 

| les douze mille vins fins, seules 
cg mille bouteilles ont été finalement vendues 
_pour 850. 000 francs! Que sont devenues les sept 
‘mille autres 2 «Elles étaient devenues impropres à 
la co consommation», ROUS a. répondu finement Oli- 
*vier Bertouille. Et ce n’est pas Jini, il y a encore la 











Charte de Christophe Colomb». 


La Charte, il faut le souligner, la presse en a 


parlé en son temps et le second curateur, Philippe 


Cuvelier, aussi. Mais lui, ce n'était pas exactement 
pour.les mêmes mobiles, Cuvelier s’est en effet 
déclaré publiquement «très fier de lur» re avoir 
vendu le manuscrit au prix de 150. 000 francs car 
«c'était un faux, pas même d'époque». Qr le 
manuscrit non seulement était d'époque —l'Uni- 
versité de Gand l'avait certifié dès 1967 — mais il 
s'agissait, qui plus est, d’un «faux de chancelle- 
rie» portant sa valeur à dix millions de dollars. 


Marius Larose, conseil de madame Jacobs: 
«Le manuscrit est appelé «jaux de chancellerie» 
parce qu "à son retour des Amériques, l'acte offi- 
ciel qui confère à Colomb avantages et titres héré- 
ditaires est contresigné par d'anciens membres de 
la Chancellerie qui ne sont plus en exercice, Bref. 
ayant séquestré le manuscrit, Cuvelier l’a envayé à 
New York où, en mars 1984, il s'est vendu pour 
3.000 malheureux dollars. Il faut vous dire que 
1492, ca compte pour les Américains. Chaque 
année, en actabre, il y a le «Colambus Day» qui 
est journée fériée. Alors, quand arrive le nouveau 
Centenaire de cette date historique, vous pensez 
bien qu'on assiste dans ce pays à une mobilisation 
générale où fout ce qui se rapporte à cetle fas- 
fueuse année prend une valeur sentimentale et 
pécuniaire extraordinaire. Or, en 1992, cela fera 
exactement un demni-millénaire, Question: celui 
qui a acheté dl Charte aux Etats-Unis, n'était-il 
pas un homme de paille ? Je ne crois pas aux coin- 
cidences, oute Larosé sentencieux: dernière- 


ment, Léonard, Cuvelier et Reñault se sont rendus | 


à New York. Ce n'était certainement pas pour y 
passer quelques jours de congés...». 


, 


«Association de malfrats dans la Justice de 
Mivelles?», «aGraindorge accuse avec Max le 
Jerailleur», «Croisade pour les faillis» : 


qué dans la presse, Les accusations non plus. 
Pourtant les échos venant des Palais et des Offices 
ministériels en sont restés comme assourdis, 


comme prisonniers du même règne: l’éternelle loi 


du silence. Ou loi du Milieu, c'est selon. 


«Bien sûr, les curateurs Bourlée, Cuvelier et | 


Delande m'ont assiené devant le Tribunal civil, 
commente Graindorge, ef ont déposé plainte con: 
tre moi du chef de calomnies. Mais ces quelques 
rares exceptions ne sont rien à côté du silence des 
Perquets, de l’Union des magistrats, de l’Union 
des juges consulaires. En temps normal, l'office 
du Procureur du Roi aurait réagi le lendemain aux 
accusations que je lance». C’est qu’à travers les 


requêtes en suspicion légitime lancées contre le | 
Fribunal de Commerce de Nivelles, il y a des hom- | 
mes nornmément visés pour des pratiques contes- | 
tables et la mise en cause d’une loi dont la philoso- | 


plie est aujourd'hui ouvertement contestée. 


La loi sur les faillites, on le sait trop peu, est 
ei effet complètement désuète, date de 1851 et n’a 
jamais été modifiée. C’est une règlementation de 
«police commerciale» permettant à l'appareil 
judiciaire de prendre toutes mesures utiles, immé- 
diates et draconiennes. Dans [a pratique, elle est 
terriblement opérationnelle: descente, scellés, 


inventaires, le failli se retrouve «vite fait, bien | 


fait» civilement mort, Bien sûr, le principe d'agir 


«vitement» ne serait pas faux en soi si on n’accor- | 
dait pas, dans le même temps, d'énormes pouvoirs | 


aux fonctionnaires chargés des poursuites. Le 
curateur, par exemple: choisi en raison de ses 


compétences, il est presque toujours avocat de | 
profession et désigné, à ce poste, selon le bon vou- 





LES MAGISTRATS FERONT TOUTE LA LUMIERE QUOIQU'IL E EN COUTE (LE SOIR, 1310) 





ces der- | 
niers mois, les titres acerocheurs n'ont pas man- f 





loir du Tribunal, Depuis 133 ans, il y a par consé- 


Re une place légalement ouverte à tous les arbi- 


aires puisqu’ aucun arrêté royal n° ‘est venu règle- 


 menter ni la désignation des. curateurs ni de 


système de leur rémunéralion. À Nivelles, comme 
Dieu le Père «fait la pluie: et le beau temps», c’est 
Philippe Léonard qui fait la loi, au plein sens du 
terme: en désignant systématiquement le tandem 
«Delande-Bourlée» à cette lucrative mission, 


Théoriquement, le curateur — en défendant 
la masse des créanciers — pourrait $ opposer à la 
faillite, la rapporter, au nom de leurs intérêts bien. 
compris. Dans la réalité, la chose est rarissime, 


| pratiques Masse oh 1 nee a ét | 
ruine DE $ st en ces ones que débute sa 


hésiter: il ya eu Faux, usage de faux et corruption. 
Associé à une certaine madame L. dans la 





gestion d’un fonds de commerce à Braine 
l’'Alleud, les ennuis de Pietro De Luca avaient vite | 


commencé: quatre mois seulernent après leur ins- 


Imaginez un banquier qui siège au tribunal 
et qui gère les saisies financières qu'il suggère 


Car pour les curateurs, plus la faillite s’alanguit et 
se prolonge, plus leurs honoraires s’amoncellent. 


Et comme les barêmes sont laissés à la libre discré- | 
tion de chaque tribunal, à Nivelles, faire partie de : 
| la curatelle tient du privilège: 


les émoluments y 
sont calculés selon le chiffre d’affaires brut des 
entreprises naufragées. 

En 1981], par exemple, le juge Léonard et le 
juge consulaire Rasquinet — un nom à retenir — 
estiment de concert «délai des honoraires promé- 
rités de Messieurs les curafeurs Bourlée et 


Delande» pour la faillite de l’usine Fabelta. Le | 
Tribunal va ainsi juger «juste de leur attribuer des 
honoraires de 1% sur le montant du chiffre. 


d'affaires brut réalisé soit... 38,6 millions». 


Mars 81, même faillite : à Bruno Renault, «en | 


qualité d'expert-gardien sous la surveillance des 


curateurs» sont attribués parce que «c'es juste», | 
6,9 millions. Deux ans plus tard, une nouvelle ral- | 


longe est accordée à l’expert-gardien:.. 12,3 mil- 


lions. 

Dans la faillite de la S.A. Van Hoegaerden- 
Boonen, le gardien Renault «promérite» 2,6 mil- 
lions. Et ainsi de suite. 

Mais dans l'arrondissement judiciaire de 
Nivelles, il est d’autres spécialités locales encore. 
Ainsi, dans chacun de ses jugements, Philippe 


Léonard se trouve-t-1l secondé par le juge consu- 
laire Rasquinet, «honorable» parmi les honora- | 


bles s’il en est, Car Rasquinet n'est pas seulement 


juge-assistant. Il n’a pas seulement la haute main 
sur le Centre de Dépistage ces faillites, Il n'est pas | 
seulement juge-commissaire chargé de veiller à la | 
«bonne gestion» des dites faillites. Non. c’est | 
| aussi un banquiér, le patron du Crédit Général de 
Nivelles. «Et alors ?». Graindorge: «Et alors? La | 
loi, dans ce cas-là, est formelle: tous les avoirs 


recueillis par les curateurs doivent être déposés à 


la Caisse de Dépôt et de Consignation, une caisse 
instituée officiellement pour recevoir les verse- | 


ments des sociétés faillies, Les intérêts y sont net- 
tement inférieurs à ceux des grandes banques. Et 


| Rasquinet là-dedans? Mais c'est justement chez 
| Rasquinet, à sa banque, que tout l'argent recueilli 
| par la curatelle transite longuement, sur des 


dépôts à long terme aux taux beaucoup plus éle- 


vés. À travers la confusion des rôles qui sont les | 
siens, on peut légitimement penser que Rasquinet | 
est un être intéressé au point d'en faire profiter sa | 1 
| la valeur du stock de manière à obtenir une lrTé- 


propre banque». 


mais c’est bien sûr ! 


Pietro De Luca est un homme consciencieux. 
Dans son attaché-case, les fardes sont méthodi- 
quement classées: à chaque année, sa couleur, Et 
il fait bien, car son dossier, sans être compliqué, 
est un véritable coupe-gorge d'actes de justice, de 
correspondances RU Me de mises en demeure, 
de rappels à l’ordre. 











: 


honoraires obligent 


tallation, son associée décide de rompre leur con- | 
vention. Retirée précipitamment de l'affaire, la | 
dame s'arrange alors pour obtenir, auprès du Tri- | 


bunal de Commerce, l’éviction de De Luca. Cela 
ne lui demandera pas beaucoup de peine. Avec 


l'aval du tribunal, elle obtient en 1974 la nomina- | 


tion d'un séquestre, Bruno Renault, et dépose le 


bilan comme si elle était encore — et méme seule | 
— propriétaire du commerce, «Eïait-ce encore un | 


curieux hasard? s'interroge De Luca dix ans 
après. L'avocat de madame L. éfait maître 
Delande et tout me porte à croire qu'il y avait cot- 
lusion évidente entre lui, l'expert, certains magis- 
trats et les curaleurs», 


Dans «l'affaire de Nivelles», de Luca est en 
quelque sorte le troisième homme. Son témoi- 
gnage sonne, bien sûr, comme la confirmation de 
tous les autres. Mais, plus encore, c'est un cas de 
figure où il transparaît que des actes illégaux ont 
été conduits avec l’aide d'un avocat — Willy 
Delande — professant, nous le savons aussi, les 
talents de curateur. Deélande, en l'espèce et pour 
un temps, est redevenu le défenseur d’une tierce 


pas de continuer à maintenir avec les membres de 
la curatelle des affinités privilégiées, une commu- 
nauté évidente d'intérêts. Justement, à propos de 
curateurs, c'est d'abord Olivier Bertouille qui est 
désigné et Renault, de séquestre qu'il était, 
devient expert chargé de le seconder dans sa tâche 
de liquidation des biens. 


Mille neuf cent septante quatre: le conseil de | 


De Luca écrit à l’expert Renault que son client 


| détient les fonds pour couvrir le passif. Effective- 


ment, De Luca a liquidé toutes les dettes dues aux 


fournisseurs, mais rien n'y fait. On serait même | 


tenté de dire: «Bien sûr». En 1976, le Tribunal 
de Commerce donne entièrement raison à 


madame L, Ainsi que le Tribunal du Travail | 


appartenant au même arrondissement. À Bruxel- 
les par contre, la Cour d'Appel et la Cour du Tra- 
vail sollicitées sont d’un avis contraire. À chaque 
fois. Qu'à cela ne tienne: quatre ans ont passé et, 
au lieu de consacrer au moins une partie des recet- 


| tes à l’apurement progressif de la faillite, on tente 


— sous l'œil approbateur et paternel de Renault et 
de Bertouille — de la rendre irréversible. D'une 
part, les deux hommes ont grossi inconsidérément 


médiable liquidation et le rachat à vil prix du reste 
de commerce par la famille de madame L. 
Ensuite, les émoluments du curateur et de son 
expert continuent à s’enfler à plaisir: le 21 septem- 
bre 1976, ils s’élèvent déjà à 400.000 francs. «Un 
jour, raconte De Luca, le curateur esi venu me 
réclamer 600.000 francs «pour couvrir le passif» et 
me permettre d'accéder à mon magasin. C'était 
inoui: 
d RASE sans aucune contrepartie évidemment. 


ALTERNATIVE LIBERTAIRE - 


La Cour d'Appel me donnait le droit | 








Nec De ta. & été He en faillite d'office sept 
ans plus tôt mais, pour ses avocats, il n’y a pas à | | I 





à leur donne 


ver, Le Tri 


avez déjà vu ça, Fe 
bunal qui récuse ne ordonn 


curateur cesse ou le ras 
ferme le mepans Paul Su peut 


commerce. Le coup de pu peut être 
Enfin. Par voie judiciaire, autorisation. est 
dée au curateur de vendre toutes les march 
Je matériel et le mobilier restants. Pour D Lu 


Le C rest AE Échos 


66 C'est todi les p'tits 


«Depuis le début, ils se sont dit, c'est un Ta- 
lien, ce type. I n'y comprendra rien. Etilrepar- 
tira dans son pays. Maïs moi, je me suis accroché: 
Et j'ai tout compris. Les curafeurs pouvaient'arré- 
ter de faillite. Tout dans tout, j'ai versé 1150/6000 
| francs pour la clôturer. Maïs ils ne voulaient pas. 


Delande, lPavocat de mon ancienne associée, «à 
chaque fois que le curateur recevait des fonds de 
ma part, intentait de nouvelles actions en justice 
pour empêcher la clôture. Depuis 1979, ma faillite 
court toujours. Vous savez pourguoi? Un jour, 
Bourlée m'a dit, fanfaron: «MonsieurDe Luca, 
les comptes sont là si vous voulez..». Et moijelui 
ai répondu: «Eï le pape, il est à Rome». Pour- 
quoi? Parce que si ma faillite est clôturée,«ils 


| devront me rendre leur comptabilité, les cura- 


teurs, et on s’apercevra qu'avec leur bénédiction"il 
y a eu détournement de fonds et d'actifs. Avant 
même de servir les intérêts de la famille L., "ils se 
sont servis les premiers. En grossissant la valeur 
des stocks, de 800.000 francs en 1974 à près dutri- 
ple deux ans plus tard, leurs honoraires s'enflaient 
d'autant, Sur mon affaire, ces escrocs on{ dûtous 


; Free S | cher au bas mot un million...». 
| personne, madame L. opposée directément à De | 
| Luca. Maïs tout cela ne l'empêche évidemment 


association 
de malfaiteurs 

Onze février 1982: les sénateurs PSE Sondag 
et Dumonceau de Bergendael interpellent, le 
Ministre de la Justice sur «/e caractère intempestif 
et brutal» de la faillite des entreprises Henricot, 
L'intervention, haute en couleur, n’est pas parti- 


| culiérement tendre à l'égard du «comporterrtent 


pour le moins léger du juge Léonard» : «Le Tribu- 
nal de Commerce a déclaré la faillite d'office dela 


| Société Henricot sans en respecter les conditions 


légales. Nous demandons des précisions sur le 
Jait que ce sont les mêmes curateurs qui furent 


| désignés au cours des dernières années pour.les 
| faillites Baladex, Fabelta, VHB.. Ÿ at-il une 
| règle de sélection el de désignation des curateurs 2? 
1 Le système actuel de la rémunération n'est-il pas 
| malsain? Est-ce bien le rôle des curateurs de 5e 


livrer à un véritable plaidoyer en faveur du main- 
tien de la faillite ?». 

Apparemment, la Ligue des Faillis 5e 
retrouve donc en très bonne compagnie. Etl'accu- 
sation, portée contre certains des membresles plus 
éminents du Tribunal de Commence de Nivelles, 
non dénuée de fondements. «C’est hier une as50- 
ciation de malfaiteurs, au sens pénal du terme, 
assure Michel Graindorge. Parce que ce sont des 


| individus «ayant des liens entre eux, agissant avec 


une certaine permanence dans le but d'attenter 
aux personnes ef aux biens...». Seule question qui 
reste pendante: et si Nivelles n’était pas le seul 
arrondissement à répondre, avec son Tribunal de 
Commerce, à cette perfide définition? ! 
Jean ne à 






ASBL 22 MARS - N° 67 - Novembre 84 - Page 5 































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| Notre pays compte actuellement 
| 524.000 chômeurs, c’est-à-dire 14% | 

_ de la population active. Selon l’heb- 
domadaire britannique «The Econo- 
mist», le chômage ne fera que croï- 

| tre. «The Economist» a fait réaliser 
| une enquête universitaire dans six 
pays européens sur l’évolution du | 
_ | chômage. Il en ressort que d'ici à | 
| 1990, les chômeurs représenteront | 
24% de la population active dans | 
notre pays. Un Belge sur quatre sera | 


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Originaires des quatre coins du pays, 
bon nombre de chômeurs envisa- 
geaient depuis quelque temps de créer 
un syndicat qui leur soit propre. Ce 
pas a été franchi voici quelques 
semaines à Anvers au cours d’une 
assemblée générale. Celle-ci a adopté 
deux motions, la première reprenant 
les objectifs de la nouvelle organisa- 
tion, la seconde pour la suppression 
du pointage journalier et contre la 
création d'une carte de travail, 


Le syndicat des chômeurs est une auto- 
organisation qui n'a aucun lien avec des partis 
politiques, des organisations d'intérêts ou des 
groupes de pression. À l'origine de cette initia- 
tive: la répression croissante dont sont victimes 
tes sans-emploi et qui se traduit par des sacrifices 
financiers, des sanctions, une discrimination 
sociale généralisée. En fait, ce syndicat de chô- 
meurs est plutôt un groupe d'action, un organe de 
concertation entre chômeurs ou comités actifs 
décidés à lutter et non pas une organisation struc- 
turée. Si ses fondateurs ont opté pour le terme 
«syndicat», c'est pour souligner la nécessité 
urgente d'une organisation qui défende les inté- 
rêts des chômeurs. Cette dernière considère en 


74-84: 10 ans déjà. Et en 10 ans: plus 
de 500.000 chômeurs, les revenus 
sans cesse rognés, des priX qui aug- 
mentent, des loyers qui augmentent, 
efc. efc…. 





Face à la crise, la risposte est difficile, le mou- 
vement ouvrier est désemparé, le discours de la 
droite passe de plus en plus et la politique d’austé- 
rité se met en place, s'attaquant aux acquis 
sociaux conquis de haute lutte. Pourtant, à la 
base, dans les groupes locaux, qu'ils soient des 
groupes de chômeurs de la CSC, des groupes de 
femmes, de jeunes, on s'organise, on se solidarise, 
on essaie de trouver des réponses concrètes aux 
problèmes quotidiens. Ainsi s'organisent des 
bourses de vêtements, des formations au français, 
aux mathématiques, des coopératives, des ateliers 
de couture, de cuisine, mais aussi des actions 
auprès des pouvoirs communaux, des actions de 
sensibilisation, etc. 


Tout cela porte ses fruits, concrètement, mais 
si nous voulons aller plus loin, si nous voulons 
vraiment une autre politique qui ne soit plus une 
politique d’exclusions, de remise en cause de la 
sécurité sociale, maïs une politique de formation, 
de répartition du temps de travail, de respect des 
droits acquis, il faut que ces expériences se coor- 
donnent, se complètent, se donnent les moyens 
d'agir dans un mouvement plus global. C’est 
pourquoi le M.O.C. du Brabant Wallon se pro- 
pose, out au long de cette année, de mener une 
campagne d’informatioon et d'action contre les 
exclusions et d'aboutir à l'élaboration d’un mani- 
feste contre les exclusions. Ce n’est qu’ensernble 
que nous y parviendrons. 


comment mener 
cette campagne ? 


Tout d’abord, en permettant aux groupes qui 
font déjà quelque chose de se rencontrer. Des 


AUTERNATIVE LIBERTAIRE.- ASBL 22 MARS - 


exclusions 


groupes de vie féminine également. La mutualité 


effet que les syndicats existants ne se préoccu- 
pent pas du sort des sans-emploi. Cependant, 
dans la mesure où la lutte ouvrière fait partie de 
leurs préoccupations, le syndicat des chômeurs 
les considère comme des alliés naturels avec les- 
quels il peut engager le dialogue. 


Le syndicat des chômeurs a mis en avant 
quatre revendications fondamentales : 
-un revenu décent pour tous les sans-emploi, 
c'est-à-dire pour tous ceux qui ne vivent pas d'un 
revenu professionnel. Par revenu décent, il con- 
vient d'entendre un minimum de 19.000 francs 
par mois; 
-un emploi décent pour tous ceux qui le désirent: 
-le démantèlement immédiat des services d'ins- 
pection de l'ONEm. Sous aucun prétexte, des 
individus ne peuvent être sanctionnés parce qu'ils 
n'ont pas de travail ou parce qu'ils ne sont pas à la 
recherche d'un emploi; 
-l'arrêt de la discrimination sociale à l'égard des 
chômeurs. 


Le syndicat des chômeurs exige donc la sup- 
pression immédiate du pointage quotidien. 
s'oppose d'ailleurs à toute forme de contrôle, qu'il 
soit hebdomadaire, mensuel ou sur appel comme 
en Allemagne de l'Ouest. De plus, il exige que les 
discussions relatives à la suppression du pointage 
d'une part et à la création de la carte de travail 
d'autre part soient totalement distinctes. Il s'élève 
d'ailleurs avec fermeté contre la création de cette 
carte. 


Depuis deux ans, les ministres Dehaene et 
Hansenne ont déclaré à plusieurs reprises que le 
pointage pourrait être supprimé. Jusqu'ici cepen- 
dant rien n'a été fait dans ce sens de sorte que de 
telles déclarations ne peuvent être considérées 
que comme de la démagogie destinée à calmer 
les esprits. Le syndicat des chômeurs exige que 
les ministres mettent un terme à leur petit jeu et 
qu'ils prennent de réelles initiatives en la matière. 






groupes de chômeurs, chômeuses s'organisent, les 


organise des services aux pensionnés, des assern- 
blées d’information aux malades... La J.O.C. 
organise des activités pour les jeunes, les Equipes 
Populaires font de la formation. Tout ce monde 
travaille parfois sur une même localité sans jamais 
se rencontrer. Ensemble, nous serions plus forts 
pour lutter contre les exclusions. 






Il faut ensuite informer, informer et encore 
informer. Aujourd’hui, c’est le discours de la 
droite qui passe. L'opinion publique sait-elle ce 
qu'est la vie d’un chômeur ? Saït-elle que des gens 
n'arrivent plus à payer leur loyer? Que certains 
s'éclairent à la bougie? Comment faire compren- 
dre à l'opinion que d'autres politiques sont possi- 
bles? C’est une action prioritaire que nous devons 
mener dans cette campagne. 














il faut aussi agir ensemble, répondre à des 
besoins concrets dans les localités. Nous y vivons 
et nous y agissons: il y existe des besoins auxquels 
personne ne répond. Des services existent dans 
nos organisations, services que d’autres ne con- 
naissent pas et qu'ils pourraient utiliser pour ren- 
dre leur action plus efficace. Nous proposons que, 
dans cette campagne, les groupes locaux se ren- 
contrent et décident ensernble de mener une action 
sur un problème qui n’est encore pris en charge 
par personne. 











Enfin, il est indispensable d’agir politique- 
ment, On ne peut se contenter d'actions locales, 
même si elles sont le point de départ indispensable 
et le plus important de notre action, Mais répon- 
dre uniquement aux besoins, c'est aussi mettre des 
emplâtres sur une jambe de bois. C’est aussi per- 
mettre à une société à deux vitesses de se dévelop- 
per sans que cela pose trop de questions, puisque 
des organisations sociales assurent des palliatifs. Il 
faut donc agir politiquement, condamner ce type 
de politique, proposer des alternatives globales, 
agir pour faire aboutir nos revendications. 

Infor-Moc 
14, rue des Canonniers 
1409 Nivelles 












N° 67 - Novembre 84 - Page 6 









Le pointage n'a d'autre ambition que celle 
défendue par la Fédération des Entreprises de 
Belgique, à savoir une sanction psychologique à 
l'égard des chômeurs. Leur rendre la vie dure afin 
d'obtenir d'eux qu'ils continuent à chercher un 
emploi. I! semble bien d'ailleurs que ce soit sur- 
tout la F.E.B. qui s'oppose à la suppression du 
pointage. |] est indiscutable que la F.E.B. cherche 
à entretenir la peur du chômage parmi les travai- 
leurs: si on ne respecte pas les conditions impo- 
sées par les patrons, gare! Bien entendu, une 
telle politique vise à créer des forces de travail 
meilleur marché. 


Les chômeurs sont las des humiliations quoti- 
diennes. D'autant que l’on constate que des gens 
sont sanctionnés parce que les instances respon- 
sables ne se préoccupent pas de leur procurer un 
emploi. Le Gouvernement et l& F.E.B. font 
comme si les files de chômage étaient consti- 
tuées de coupables. Or, si responsabilité il y a, ce 
n'est certainement pas dans le chef des chû- 
meurs. 

Des études ont démontré que les chômeurs 
ne sont pas davantage responsables du travail au 
noir qui est évalué à 15% de l'économie natio- 
nale. |! s'avère que les chômeurs ne sont à l'ori- 
gine que de 1% du travail presté en noir et ce 
alors qu'ils sont les premiers poursuivis et sanc- 
tionnés. || serait bon de consulter à ce sujet des 
études qui démontrent que les employeurs, eux, 
n'ont pas à craindre de sanctions pour le travail au 
noir qu'ils organisent. En matière de lutte contre le 
travail clandestin, le pointage quotidien est donc 
totalement inefficace. De plus, il empêche bon 
nombre de chômeurs de se livrer à des actions 
sociales. 


Il faut absolument que la discussion relative à 
la création d'une carte de travail sait dissociée de 
celle qui porte sur la suppression du pointage. 
D'ailleurs cette carte ne servira pas à organiser un 
contrôle du travail au noir comme il a été dit, parce 
qu'elle offre trop de possibilités de fraude. Ce 
système n'aurait aucune prise sur les 99% de tra- 
vail au noir effectué par des non-chômeurs. 
D'autre part, un chômeur pourrait facilement se 
procurer deux cartes en prétendant qu'il a perdu 
la première. |l pourrait dès lors remettre une carte 
à l'ONEm s'il souhaite percevoir des indemnités 
de chômage et conserver la seconde pour le con- 
trôle. 


Peu importe ce qui se trouve sur cette carte 
(tes cartes de banque ne comportent en effet 
qu'une longue série de chiffres). Ce qui importe, 
ce sont les informations que l'ordinateur pourra 
fournir sur ses détenteurs. Personne n'aura le 
moindre contrôle sur ces informations. Il est donc 
possible qu'un jour chaque employeur dispose de 
son propre ordinateur qui lui permettra d'obtenir 
toutes les informations possibles sur son person- 
nel. Il est évident que ces renseignements 
seraient utilisables en cas d'embauche ou de 
grève par exemple. De plus, au stade actuel du 


Jrène Grandadam 






Chomage CRT 
HA Diaz. Ro nr 


donc sans emploi. 


954.000 ! 


Au cours d’un symposium de la FGTB, le 20 

septembre dernier à Bruxelles, le nombre de 

chômeurs a été évalué comme suit: 

e 524.000 chômeurs indemnisés 

+150.000 sans-emploi n'ayant pas droit aux 
indemnités, dont 1.000 venant de quitter 
l'école 

*100.000 personnes mises au travail (stagiai- 
res, CST, etc...) 

“120,000 personnes suspendues 

* 35.000 chômeurs partiels 

* 25.000 personnes n'entrant pas en ligne de 
compte pour une indemnisation mais inscri- 
tes à l'ONEm comme demandeurs d'emploi. 


Au total: 954.000! Sur une population active 
de 4 millions d’individus. Soit 24% de ch0- 
meurs... 





LA PAUVRETE 


Moi, JAFFIPHE ve c'esT 
ov/L FAUDRAIT TAXER. 

CA INCTERAIT /ES GENS 

À DEVENIR RICHES. 





projet, chaque employeur pourrait exiger que son 
employé lui remette sa Carte de travail ce qui aug- 
menterait encore la pression qu'il pourrait exercer 
sur lui en la retenant, en la perdant... 


L'annonce de la création de cette carte de 
travail a été justifiée par les ministres de l'Emploi 
et du Travail Hansenne et des Affaires Sociales 
De Haene par le fait qu'elle permettrait de suppri- 
mer le pointage quotidien. Or voilà que le projet 
de loi n° 942 relatif à la carte de travail et qui sera 
prochainement soumis à l'approbation du Parle- 
ment ne prévoit rien quant au pointage. Il convient 
à ce sujet de préciser que la Belgique est le seul 
pays de la Communauté européenne à imposer le 
pointage quotidien. Au Luxembourg, le contrôle 
est hebdomadaire, en Italie, aux Pays-Bas, au 
Danemark, en lrlande et en Grèce, il est mensuel 
tandis qu'en France et en Angleterre, il est bimen- 
suel. L'alémagne de l'Ouest pratique un système 
sur appel. 

* » LA 
la petite histoire 
de la carte 

Le 7 août 1982, le ministre Hansenne 
annonce que le pointage journalier pourrait être 
supprimé pour le 1* janvier 1983, reconnaissant 
qu'il ne peut juguler le travail au noir ét qu'à cet 
effet serait créée une carte de travail. À la fin de 
l'année, chaque travailleur recevrait une petite 
carte de travail, une sorte de carte de banque 
reprenant son nom ainsi que ses numéros de 
sécurité sociale et de carte d'identité. Les sans- 
ernploi devraient remettre cette carte à l'ONEm 
afin de percevoir des indernnités de chômage. 
Cette carte faciliterait le contrôle de l'inspection 
sociale sur les chantiers et dans les entreprises: 
celui qui ne peut présenter sa carte est soup- 
çonné de travailler en noir. Hansenne précisait 
qu'en la matière un accord était intervenu au sein 
du gouvernement et que les partenaires sociaux 
ne s'y étaient pas opposés. Selon lui, la carte de 
travail permettrait de dépister les deux mille tra- 
vailleurs au noir ce qui entraînerait une économie 
de O,4 milliard. 


Le 14 septembre, De Standaard titre en pre- 
mière page que la F.E.B. exige le maintien du 
pointage journalier. Lors d’une réunion du comité 
de l'ONEm, le représentant des patrons & pro- 
posé que, pour des raisons psychologiques et 
indépendamment de la création de la carte, le 
pointage cornmunal soit maintenu. Outre ce con- 
trôle, d'autres mesurés (à préciser) peuvent 
encore être prises contre le travail au noir. Si on 
part du principe que le pointage est gênant et 
ennuyeux, a dit le porte-parole du patronnat, il a 
au moins l'avantage d'inciter les chômeurs à con- 
sentir des efforts personnels pour trouver du tra- 
vail. Enfin, il Se déclarait convaincu que la Sup- 
pression du pointage quotidien serait difficilement 
acceptée par la population active. 





524.000 CHOMEURS OFFICIELS x 954.000 CHOMEURS REELS 





… Le8 avril 83, il semble bien que la suppres- 
sion du pointage est reportée aux calendes grec- 
ques. D'un article publié dans De Morgen, il res- 
sort qu'une partie des 60,000 chômeurs partiels 
devront également pointer tous les jours. 


Dans un article du Sfandaard, le 10 avril 84, 
on reparle du projet de création d'une carte de 
travail. Dans le mémoire relatif à ce projet, on peut 

ire notamment:que «le contrôle, ét plus spéciale- 
ment le contrôle quotidien, n'offre plus de garan- 
ties suffisantes et n'a pas davantage un effet 
d'intimidation». L'article fait état d'une prise de 
position publique du ministre Dehaene qui dit que 
la création d'une carte de travail suppose la sup- 
pression du pointage quotidien. 


Le 8 juin 1984, De Morgen signale que le 
projet de loi sur la carte de travail a été approuvé 
par la commission des affaires sociales de la 
Chambre. Le journal remarque que, dans ce pro- 
jet, il n'est pas question de la suppression du 
pointage. Les amendements dans ce sens pré- 
sentés par l'opposition ont été systématiquement 
rejetés par les partis de la majorité «sous la pres- 
sion du ministre de la Justice Go». 


Le 13 juin 1984, De Morgen toujours men- 
tionne une nouvelle fois la prise de position publi- 
que du ministre des’affaires sociales Dehaene qui 
estime qu'«on ne doit pas attendre l'établissement 
de la carte de travail pour remplacer le pointage 
journalier par un contrôle hebdomadaire». 


Le 28 juin 1984, le conseil communal de 
Turnhout adopte une remarquable motion. À l'una- 
nimité, il considère que le contrôle journalier des 
chômeurs constitue une humiliation dénuée de 
sens et déplore que les victimes de la crise en 
soient considérées comme les boucs émissaires. 
Selon le conseil communal, la suppression du 
pointage quotidien pourrait entraîner une écono- 
mie d'argent et de temps pour les fonctionnaires 
communaux. Le contrôle ne répond pas à son but 
initial, à savoir la lutte contre le travail au noir. Le 
pointage quotidien rend plus difficile la recherche 
d'un emploi plutôt qu'il ne la stimule. Le conseil 
communal à également pris position contre la 
carte de travail en raison des problèmes qu'elle 
pose sur le plan de la vie privée. 


Le 10 août 1984, le comité de la CSC 
annonce en première page du Volksmacht que la 
suppression du pointage quotidien constitue pour 
alle une condition absolue à la création d'une 
carte deitravail. Pour elle, la carte doit être neutre, 
c'est-à-dire qu'elle ne peut mentionner aucune 
donnée essentielle (nom, prénom, date de nais- 
sance et numéro de registre national). La CSC se 
pose d'autres questions à ce sujet; qui réglera les 
différends? le travail au noir ne doit-il pas étre 
combattu d'abord chez les employeurs? Selon 
elle, il faut redéfinir le «travail autorisé», Les sanc- 
tions doivent être identiques à l'égard des 
employeurs et des travailleurs. Enfin, la carte ne 
peut être confiée à l'employeur qui pourrait la per- 
dre ou refuser de la restituer … 


points de vue 


Le 10 mai 1979, l'hebdomadaire Humo 
publie une interview d'Albert Schoofs qui évoque 
notamment le cas de Willy, un chômeur que le 
pointage journalier cblige à se rendre tous les 
jours:à Saint-Trond. Pour ce faire, il part de chez 
lui à 6 heures 30 et ne rentre qu'à 18 heures 30. 
«C'est dur, précisait Willy, mais je le fais, qu'il 
pleuve ou qu'il vente». Et Schoofs de répondre : 
«ll y a peu, les chômeurs ont été exemptés de 
pointage pendant deux jours en raison du mauvais 
temps, ce que je comprends, même si cette 
mesure a été fort critiquée. Mais qui a dû sortir par 
ce temps? Nous, les travailleurs! J'ai mis vingt 
minutes à pied pour me rendré à la gare. Per- 
sonne n'avait encore marché dans ma rue»... 


Le 31 août 1981, De Morgen a rendu pubili- 
que une note Interne de thérapie de choc» émise 
par le CEPIC, centre d'étude du PSC. Dans cette 
note, ilest notamment proposé d'obliger les chô- 
meurs, tout comme lé personnel communal, à 
ètre présent sept heures par jour ou trente-cinq 
heures par semaine à la maison communale, quel- 
ques contrôles devant être spérés chaque jour. 
Cette mesure pourrait mener à l'exclusion du chè- 
mage des travailleurs au noir et de ceux qui font 
leur ménage pendant la jeurnée… 


En août 1982, De Standaard publie les résul- 
tats d'une enquête réalisée par les inspecteurs 
sociaux qui concluent que les chômeurs ne pren- 
nent à leur compte qu'un pour cent du travail au 
noir. «Contrairement aux pensionnés, chômeurs 
temporaires et autres travailleurs au noir, les chô- 
meurs complets courent un véritable risque en 
cas de contrôle éventuel parce qu'ils doivent avoir 
sur eux leur carte de pointage paraphée par 
l'employeur». C'est pour cette raison que les ins- 
pecteurs sociaux ne croient pas à l'efficacité 
d'une carte de travail qui né constitue pas le 
moyen de combattre le travail illégal. Encore une 
fois, elle permettrait de contrôler les chômeurs 
mais pas les 99% de travail au noir effectués par 
les autres. 


Dans le périodique Pañnopticon (janvier 
1983), un fonctionnaire de l'inspection sociale, 


Guy Loenders, souligne que «pour l'employeur 
qui se base sur une analyse réelle des frais et pro- 
fits, la menace de pénalité en cas de travail au noir 
perd tous ses effets. Les amendes minimes, com- 
parées aux fortes marges bénéficiaires, ne sont 
considérées que comme uné utilisation positive 
du travail au noire. 


Dans un texte récent de la Ligue des Droits 
de l'Homme, John De Wit et Lode Van Outrive 
avancent une série d'arguments visant à la SUpo- 
pression du pointage journalier «qui est une 
atteinte au droit au travail et donc à l'article 6 puis- 
que les Belges qui ne peuvent user de ce droit 
parce qu'il n'y a pas d'emplois vacants sont dou- 
blement punis. Le citoyen est victime de sanc- 
tions parce que l'Etat et l'initiative privée man- 
quent à leurs devoirs. Le pointage ne répond plus 
à son but initial, à savoir la lutte contre le travail 
clandestin. Troisièmement, le pointage quotidien 
rend difficile la recherche d'un emploi. En ces 
temps difficiles sur le plan économique, il est 
important de nouer et d'entretenir des relations 
afin de savoir où existent des possibilités 
d'emploi. Ce processus est rendu difficile par le 
pointage journalier qui rend quasi-impossible la 
prise de rendez-vous. Ensuite, ce pointage 
entrave aussi toute possibilité de travail bénévole. 
Comme il est possible d'obtenir une exemption de 
pointage lorsqu'on s'engage volontairement dans 
des organisations d'utilité poublique, le véritable 
bénévolat est entravé. Ces organisations bénéfi- 
cient d'une sorte de possibilité de sanction à 
l'égard de leurs volontaires ce qui n'est pas très 
sain (Journal de la Ligue, mai 1984). 


Dans ce même texte, les deux arguments sui- 
vants sont avancés contre la création de la carte 
de travail: 
données elle comportera ce qui implique donc 
une atteinte possible à la vie privée. De plus, cette 
carte ne serait en fin de compte qu'une nouvelle 
édition du carnet de travail en vigueur au 19° siè- 
cle et il semble inadéquat qu'un employeur soit au 
courant de toutes les démarches et de toutes les 
erreurs que quelqu'un peut avoir faites durant sa 
carrière professionnelle. 

Dans Doppers Info, le journal destiné aux chô- 
meurs de la FGTB d'Anvers, quelques arguments 
sont développés en juillet 84 contre la création de 
la Carte de travail: le fait que le patron peut la con- 
server renforce la pression patronale sur les tra- 
vailleurs. Pour ce qui concerne le contenu de la 
carte, il est uniquement prévu qu'elle ne pourra 
contenir aucune information sur le passé profes- 
sionnel et sur la situation familiale des intéres- 
sés. Mais ce qui peut s’y trouver, c'est, par exem- 
ple, l'appartenance à un syndicat où les sanctions 
administratives prises dans le passé contre le tra- 
vailleur. «Que la carte permette de mieux lutter 
contre la fraude à la sécurité sociale, c'est de la 
vaste blague. Il suffira en effet d'avoir «perdu» sa 
carte et d'en demander une nouvelle pour être en 
possession de deux cartes de travail dont l'une 
servirait pour le travail et l'autre serait remise à 
l'organisme de sécurité sociale», écrit Joris Derre. 


«Dans le bureau de chômage de Louvain ont 
été affichées cet hiver plusieurs interdictions: un 
silence absolu doit régner, on ne peut pas fumer 
ni entrer avec des voitures d'enfants»( De Mor- 
gen, 17 juillet 1978). «Ces gens devraient, ne 
füt-ce qu'une seule fois, prendre place dans la 
fle. Entendre comment on nous traite, soit en 
aboyant, soit en lénifiant. L'ambiance dans le local 
de pointage est parfois infernale. || y a des gens 
qui ont la manie d'inspirer la peur aux autres. Ces 
jours-ci, ils clament que toutes les fermes 
mariées vont être exclues»... (De Standaard, 25 
novembre 1980). «Ce pointage journalier est une 
terreur, de la dictature. Dans ce pays, vous êtes 
tourmenté lorsque vous êtes chômeur. Je ne suis 
pas un homme difficile, mais je n'ai pas cotisé 
durant près de trente ans à la sécurité sociale 
pour être traité de la sorte» (NRC-Handelsblad, 3 
mars 1981). De nombreux chômeurs vivent ça 
tous les jours... 

Pastbus 20 


3000 Leuven | 


JX SUIS UN ÊTRE INUTILE. 
MALBRE ŒLA, LS RER SENT 
DE ME SUPPRIMER. 





tout d'abord, on ne sait pas quelles | 


Syndicat des Chômeurs | 








charité ? 
non merci 





Au lieu de me donner 8.000 francs 


| par mois pour élever, nourrir et 


habiller mon fils d’un an, ensuite ten- 
ter de survivre avec ce qui reste 
(???), ne pourriez-vous pas, 
messieurs-dames du C.P.A.S., 
m'aider à trouver un travail? 


À plusieurs reprises j'ai trouvé un travail 
mais dès que mes employeurs apprenaient qui je 
suis et l'endroit où se trouve mon mari, les portes 
se refermaient l’une après l’autre. Il est difficile de 
cacher certaines choses lorsque, deux fois par 
semaine, on va voir son mari à la visite. 


Que dire aussi de l’assistante sociale avec qui 
je suis obligée d’avoir un contact hebdomadaire ? 
Qu'a donc fait cette personne pour avoir le titre 
d’assistante sociale ? 

Que penser du labyrinthe administratrif où 
l’assistée sociale, telle une balle de tennis, est ren- 
voyée d’un bureau à l’autre et d’un formulaire 
administratif incompréhensible à un autre 
n'ayant vraiment rien à envier au premier? À ceci 
il faut ajouter un facteur chance: il est fréquent 
que tel fonctionnaire soit en congé ou malade (et 
oui! même les fonctionnaires sont «parfois» 
malades). 


Après quelques mois d'expérience, je me suis 
rendu compte que les C.P.A.S. cherchent à garder 
les gens dans l'ignorance de leurs droits et de leurs 
devoirs. À ce propos, 5 ‘il est vrai que chaque 
citoyen est en principe sensé connaître la loi et ses 
droits, qui peut prétendre les connaître tous et à la 
limite, si tel était le cas, les faire reconnaître ou 
exécuter est certes encore bien moins évident dans 
la vie de tous les jours. À qui s'applique donc l'ali- 
néa 1 de l’article 25 de la Déclaration universelle 
des Droits de l'Homme dont voici un extrait: 
Toute personne a droit à un niveau de vie suffisant 
pour assurer sa santé, son bien-être el ceux de sa 
famille, noïamment pour l'alimentation, le loge- 
ment, des soins médicaux, etc». Et l'alinéa 2 de ce 
même article 25: La maternité et l'enfance ont 
droit à une aide et une assistance spéciale. Tous les 
enfants, qu'ils soient nés dans le mariage ou hors 
mariage, jouissent de la même protection. 


Il y à un siècle ou deux, on aurait écrit ces tex- 
tes en latin afin d’être bien sûr que les personnes 
les plus directement concernées ne puissent en 
prendre connaissance, laissant ces lignes à une 
élite instruite ét donc non concernée, puisque nan- 
tie, Maintenant que ces textes sont disponibles 
dans toutes les langues, le pouvoir agit d’une 
manière plus subtile: c’est par le manque d’infor- 
mation que l’on tente de garder le peuple dans 
l'ignorance de ses droits. 





Bien plus que de l'argent, je crois queles 
C.P.A.S. devraient donner de l'information ne 
serait-ce que: information sur les documents a,se 
procurer ou à fournir, information sur le droit des 
personnes ou le fait dé ne pas y avoir droit, infor- 
mation sur les personnes à contacter et comment 
les contacter, information sur les différents servi- 
ces de tout ordre et de toute nature, sur leurs pos- 
sibilités, leurs limites. 


Il y a peu, j'ai lu un article trésintéressant sur 
plusieurs expériences en. France et en Belgique 
concernant des groupes autonomes autogérés. 
Pourquoi d'autres C.P.A.S. ne prennent-ils pas 
exemple sur ces diverses expériences qui ont'été 
tentées avec succès dans de nombreux cas?Je 
crois savoir pourquoi. Il faut un certain courage 
politique pour prendre de telles décisions permet- 
tant de rendre possibles des actions de cet ordre. 
C’est probablement la peur qu’un groupe auto- 
géré réussisse là où les lenteurs bureaucratiques de 
l'administration ont échoué. Je pense également 
que l’une des principales raisons est la/peur dela 
perte du contrôle des assistés sociaux qui,deve- 
nant autonomes et pouvant subvenir à leurs 
besoins, s’empresseraient de casser la «tutelle» 
envahissante des C.P.A.S. (quelle horreur, des 
pauvres qui en ont marre d'être pauvres et.qui 
veulent s’en sortir par le travail!)}. 


De plus, les personnes trouvant ou retrouvant 
leur autonomie financière, leur dignité aussi, sor- 
tiraient du système où elles sont (entre)tenues, I} 
est bien plus simple d'effectuer des contrôles sur 
des personnes entièrement dépendantes, n'ayant 
d’autres sources de revenus que ceux alloués par 
cette «charité» organisée que sont les C:P'A:S;: 


Pour un C.P.A.S., la difficulté réside aussi 
dans le fait qu'il doit être très difficile, presque 
inconcevable pour ces «maîtres», de faire con- 
fiance à un petit groupe de personnes, de leur don- 
ner là possibilité de s'épanouir bien plus digne- 
ment qu’en faisant la file chaque semaine devant 
un bureau d'aide sociale afin d’y recevoir de quoi 
survivre encore une semaine. Cela bien sûr devant 
le regard indifférent, voire moqueur, d'un person- 
nel déjà dégoûté de travailler avant de commencer 
son boulot. 


Pour terminer, jé tiens à dire que plusieurs 
personnes dans la même situation que la mienne 
(forcément, il ne nous est pas encore interdit de 
parler dans la file devant le bureau du C.P.A:S°) 
pensent comme moi, Tous nous aimerions nous 
en sortir, contrairement à ce que semblent.penser 
certains de nos dirigeants politiques. 


Il est très désagréable de dépendre d'un cen- 
tre d'aide sociale ét de subir toutes les vexations 


qu'entraîne une telle dépendance. 
M.W.R. 





BIENTOT DES REGIONALES À BRUXELLES ET EN WALLONIE? 


ALTERNATIVE LIBERTAIRE - ASBL 22 MARS - N° 67 - Novembre 84 -Pagen 































+ 


Mai 1989. La Belgique est toujours 
gouvernée par une coalition de 


droite, appuyée par un puissant 
appareil répressif: la gendarmerie. 
Du procès François, son état major a 
tiré quelques enseignements précieux. 
Certains politiciens et magistrats ont 
passé un compromis avec la gendar- 
merie. Pour réaliser leur grand rêve: 
asseoir un régime d’extrême-droite 
au moyen d'un coup d'état. 


Tel est en gros le thème de «Drugs», | 


un livre de Jef Geeraerts publié il y a 
moins d'un an. C’est avant tout un 
polar avec des ingrédients classiques : 
trafic de drogue, meurtres, 
enquêtes. C'est aussi un ouvrage de 
réflexion. Jef Geeraerts n'est pas un 


. visionnaire: cette histoire est le fruit 


de son imagination. Mais on se sur- 
prend à frémir. L'opération Mam- 
mouth: n'a-t-on pas assisté à la répé- 
fition générale de l'opération Octo- 


pus au cours de laquelle une rafle est | 
Le en une nuit, dans les milieux | 

e gauche? Toujours est-il que nous | 
avons pris une option pour la traduc- | 
tion ef la publication en français de | 
èe bouquin que nous espérons bien | 


publier dans les moïs qui viennent. 


au château du baron Jean-Philippe du Mes- 
nil à 5023 Marchovelette. Le lieutenant- 


général Dossogne, commandant de la gen- | 
darmerie vient de jurer fidélité à l'Eglise | 


catholique, au Roï des Belges et respect aux 
autorités civiles, religieuses, académiques et 
militaires. Dossogne est parrainé par Jean- 
Paul Mertens {J.P.M. ), politicien proche du 
CEPIC. La cérémonie terminée, J.P.M. 
décrit à ses compagnons l'Opération Octo- 
DES. 

En costume civil à présent, ils étaient installés 
dans des fauteuils de cuir démodés, affaissés, 


devant le feu de bois qui crépitait doucement et | 


buvaient un vieux Cognac de là cave du château, 
aménagée au début du siècle par le grand-père du 


Mesnil. J.P.M. tirait à sa «pipe de chevet», une | 


Dunhill usée, le général Dossogne fumait une ciga- 
retie américaine, Mesnil un havane de vingt centi- 
mètres de iong. Bloy d'Hespel ne fumaïit pas, il 


était assis dans sa position habituelle, regardant | 


droit devant lui, 
JP P.M. parlait depuis un bon moment sur un 
ton posé, concis, comme s’il présidait un conseil 


des commissaires. Il semblait bien connaître sa | 
matière: Le général Dossogne surtout lécoutait | 


avec une attention visible. 
«Après unaperçu général de la situation poli- 
tique et'socio-économique de notre pays qui peut 


être, compte tenu du problème qui nous occupe | 


aujourd'hui, qualifiée de «raisonnablement pro- 


metteuse», avec votre permission, je passerai au | 
stade du «pré-coupy» au cours duquel nous action- | 


nerons le premier lever, à savoir la «subversion 


gauchiste latente», par une provocation déguisée, | 
soigneusement préparée par nos milices. En prati- | 





: Réunion de lOrdre du Chêne Celtique 








lun livre 


'Ær 





Le 


nes avant la date du coup d'état, le pays sera | 
secoué par des attentats et des irrégularités con- | 
çus sur un mode classique. C'est-à-dire: en un | 


lieu prévu sera exécuté un attentat à la bombe ou 
un attentat contre un individu. Ce lieu ou ceite 
personne portera une étiquette d’extréme-droite, 
Ce sera par exemple le local du Front de la Jeu- 
nesse, de Forces Nouvelles ou de la Croix Celti- 
que, la maison d'un avocat ou d'un député de 
droiîte et même une église où un palais épiscopal, 
la maison de campagne d'un riche industriel, une 
librairie catholique, la rédaction d'un de nos jour- 
naux, etc... Les attentats seront... énergiques, il 
faut donc qu'ils provaquent des dégâts matériels 
importants afin que la presse et les autres médias y 
accordent la plus grande attention. Une deuxième 
vague d’attentats suivra, dès que l'opinion publi- 
que aura été suffisamment informée. Après quoi, 
des représailles bien compréhensibles seront opé- 
rées par la droite contre des organisatioons d'étu- 


locaux syndicaux, des librairies de gauche, des 
maisons et des propriétés de personnes notoire- 
ment à gauche. Naturellement, il devra s’ensuivre 
des confrontations entre les milices de gauche et 
de droite, avec victimes, voitures et immeubles 
endommagés, interventions de la police, dirigées 


contre les gauchistes qui seront bien entendu à | 
Porigine de tout ce désordre. Il ne faut surtout pas | 


que la situation s’apaise, bien au contraire, Une 
nouvelle vague d’attentats que nous mettrons au 
point contre des immeubles et des individus de 
droite devra la faire évoluer jusqu'à son point de 
fusion, dans une escalade jamais vue jusqu'ici. Et 
si par exemple la gauche ne réagit pas d’une 
manière assez résolue — nous savons, messieurs, 
que la gauche n’est pas suffisamment organisée et 
qu'elle n’est pas animée par la motivation néces- 
saire —, des membres déguisés de milices de droite 
agiront à sa place. Au bout de quélques semaines, 
un climat d'angoisse et d'insécurité régnera dans 
notre pays. Tous les médias et l’opinion publique 
exigeront des autorités une intervention efficace 
qui mette fin au malaise. Pas pour en revenir à un 


status quo, oh non! Pas davantage pour qu’un | 
coup d'état non sanglant renverse le gouverne- | ! 


ment actuel, mais pour restaurer certaines tendan- 
ces, principalement le caractère unitaire de la 
nation, C'est-à-dire la suppression des exécutifs et 
conseils régionaux, un couvre-feu provisoire, 
arrestation de certains gauchistes — car les irrégu- 


larités sont nées à gauche, n'est-ce pas? — inter- | 
diction de se rassembler et de manifester, censure | 


des médias, etc. L'organisation stratégique et tac- 
tique du coup proprement dit, je la laisse à des 


spécialistes en la matière, à savoir la gendarmerie, | 
l’arrnée et les différents services de renséigne- 
ments. Je crois d’ailleurs savoir que, vendredi pro- 


chain vraiseblablement, en séance secrète, le 


comité ministériel chargé de la sécurité fixera [a | 


date du coup d'état. Réunion à laquelle tu seras 


invité, Alex, ceci entre parenthèses. 11 me faut | 
naturellement ajouter que l'actuelle coalition gou- | 


vernémentale PSC-PRL restera en place et que 


seront maintenus les pouvoirs spéciaux. Et on pro- ! 
fitera de l’occasion pour y ajouter des arrêtés plus | 
sévères en matière de subversion, de sécurité, de | | 
liberté d'expression, de problèmes éthiques, de || 
droit pénal, d'immigration, de privacy, etc... La | | 
gendarmerie, et ceci te concerne, cher Alex, se | 
verra confier des tâches plus vastes: missions de | 
surveillance, de police et de prévention, patrouil- | 
- les, road blocks, razzias, actions coup de poing 


avec d'éventuelles provocations qui devront 
entraîner des interventions plus vigoureuses et 
dont je laisse la mise en pratique sur le terrain à 
l'imagination du Corps». 


(.) 


ALTERNATIVE LIBERTAIRE - ASBL 22 MARS - N° 67 - Novembre 84 - Page 8 


naire 


bonjour les dégâts! 





Nous n’éprouvons aucune sympathie 
pour aucun groupernent d'action 
«terroriste» en Belgique actuelle- 
ment, et surtout pas pour l’organisa- 
tion se faisant appeler «Cellules 
Communistes Cormbattantes» 





Car leurs actions tendent, objectivement, au 
renforcement de Fappareil répressif de l'Etat (qui 
de toute évidence n'a pas besoin qu'on l’aide à se 
renforcer), en donnant l’occasion à celui-ci de 
laisser'croire à la nécessité de ce renforcement, et 
d’en permettre ainsi la justification. 

Dans le cas précis des CCC, l'idéologie 
marxiste-léniniste dont elles semblent se réclamer 
nous fait douter au plué haut point de leur capa- 
cité à libérer quiconque de l'oppression du Capifa- 
lisme et de l'Etat. 

L'émergence d’un phénomène «terroriste» en 
Belgique sert trop bien les intérêts de certains — 
partisans d’un Etat fort, appareil d'Etat, partis 
politiques, puissances étrangères diverses — pour 
qu’on nesoit pas en droit de douter de la fiabilité 
politique et de l’origine réelle des CCC. Sont-elles 
infiltrées, manipulées, voire organisées où encore 
simplement utilisées par ceux & qui servent objecti- 
vement leurs actions: le résultat est le mème! 


Pour nous, la lutte nécessaire contre Le capi- 
talisme et l'Etat, vers l'autogestion généralisée et 
la libérté passe par des moyens compatibles avec 
ces fins. L'histoire nous montre que le terrorisme, 
s’il peut à la rigueur être compris (pas justifié) 
dans le cas limite d’une révolte qui-ne trouve pas 
d’autres moyens de s'exprimer, n’a jamais, utilisé 
comme mode d'action politique en soi, fait avan- 
cer la cause que nous entendons défendre. 


Face aux moyens de répression que possède 
P'Etat, face au contrôle de la presse par divers 
groupes financiers, dont le but n'est certes pas la 
création ou le maintien d’une opinion libre, les 
moyens des terroristes, quels qu'ils soient, seront 
toujours la partie faible du rapport de forces. 
L'illusion que peuvent créer quelques attentats 
fera rapidement place à l'amère réalité: sur le ter- 


Es + enr | rain de la violence, comme stratégie politique, 
| diants gauchistes dans les universités, contre des k 


l'Etat a toujours le dernier mot! 








Inquisition, perquisition “5%; 
et Palais de Justice 





Ce qui ne veut pas dire... 


Que nous soyons particulièrement altristés (ou 
réjouis) par les dégâts causés aux succursales 
de diverses entreprises ou partis politiques. 

Que nous sommes prêts à hurler avec les loups, en 
entrant dans la campagne d’hystérie anti- 
terroristes {ou anti-sympathisants) qui risque | 
de se jouer incessamment, Nous revendi- 
quons le droit de n'être ni avec l'Etat, ni avec 
les terroristes. 


Que nous resterons sans protester contre les cam- 
pagnes d’intimidation du type «opération 
Mammouth», opération qui, à elle seule, 
nous semble aussi grave pour la libertéique 
ls actions des CCC. 


À cet égard, l'opération Mammouth, censée 
être la recherche d'un groupe terroriste, nous 
apparaît comme un merveilleux prétexte à: 

-une énorme opération de remise à jour des 
fichiers; 

-une grande manœuvre de stigmatisation: sil'on 
n'a rien trouvé, on a quand même émis l'idée 
qu’on aurait pu trouver, et par là devient possible 
l’'amalgame d'une grande partie de la «gauche» à 
d'éventuels «terroristes», selon le bon vieux prin- 
cipe que l'on n’est pas perquisitionné si on n'a 
rien à se reprocher. 

-une répétition générale, visant à habituer l'opi- 
nion publique à un Etat policier de plus en plus 
omniprésent, le manque de réaction des démocra- 
tes est, À ce sujet, un symptomeé alarmant. 


En conséquence, 


-Nous affirmons notre désaccord et notre Opposi- 
tion à la pratique «terroriste» et à l’action «politi- 
que» des prétendues «Cellules Communistes 
Combattantes». 
-Nous exprimons notre indignation face à la très 
théâtrale «opération Mammouths, partie visible 
de l’iceberg qu’est le renforcement de‘la répression 
politique dans notre pays. 
-Nous engageons les groupes libertaires, les mili- 
tants et les sympathisants se réclamant du mouve- 
ment libertaire à réfléchir et à ne pas se mettre en 
position d'être (peu ou prou) pris dans le cercle 
vicieux répression-riposte, élément fondamental 
de l'engrenage ferroriste, 
Cercle Bakounine ULB 
Coordination Libertaire à lULB 
25 octobre 84 





Lu pôur vous par Christiane | 


 ruxelles dort encors. La 

2 grande ville appartient tou- 
jours aux métiers de la nuit, Un 
peu plus nombreux que d'ordi- 
naire en ce vendredi sur le 
coup de 4 h 30. : 

Rue de Louvain, la gendar- 
meérié se protège de chevaux de 
frise couleur rouille. Ils dissi- 
mulent mal l'animation qui 
règne, tant à l'intérieur qu'é 
l'extérieur. 

Un cortège de véhicules quit- 
te les lieux, se scinde place Ma- 
dou, éclate dans toutes les di- 
rections. Combis blancs rayés 
de rouge, Fans Roover aux vi- 
tres teintées de l'Escadron spé- 
cial d'intervention, voitures 
hanalisées trahies par l'anten- 
ne. Tout un eharroi prend la 
route pour une opération 
«Mammouths de grande échel- 
le. La chasse aux terroristes des 
«Cellules communistes combat- 
tantess passe des coulisses à la 
scène. 

L'un des actes de cette repré- 
sentation matinale se joue à 
quelques pas de la large chaus- 
sée de Louvain. Contrastes en- 
tre les projecteurs puissants de 
l'axe routier et les faibles am- 


La palme pour l'opération 
Mammouth à cet article 
de la Libre Belgique 
Engagez-vous 

dans la police, 

vous vivrez des aventures 
fantastiques. 

Plus besoin du feuilleton 
d’RTL pour se donner 
des frissons dans le dos. 
Le journalisme 

c'est quand même 

un beau métier... 


poules de la rue de l'Inquisi- 
tion. Dans l'ombre, le long du 
trottoir de pavés, un véhicule 
stationne parmi d'autres. Sem- 
blable à celui de Monsieur- 
Tout-le-Monde… si ce n'était 
sés occupants. Dans la rue de 
Pavie voisine, un chien Con- 
iraint sa maîtresse à la balade. 

Cinq heures précises. Go l Le 
claquement de quatre portières 
déchire le silence. Une demi- 
douzaine d'hommes courent. 
Un seul a l'uniforme de la poli- 
ce communale. Les autres, eru 
civil, ont glissé le brassard rou- 
ge frappé de la grenade de la 

endarmerie sur le bras gau- 

che. Plusieurs ont l'arme à la 
main. Certains ont revêtu le gi- 
let pare-balles. ak 

Les événements se précipi- 
tent. Le policier se dissimule, 
accroupi, derrière un taxi 
blanc à l'arrêt. Revolver au 
poing. Un gendarme traverse la 
rue de Pavie, prend position 
sur le trottoir. Un deuxième 
s'arrête face à l'immeuble por- 
tant le numéro 2, au carrefour 
des rues de Pavie et de l'Inqui- 
sition, l'arme pointée vers Îe 
deuxième étage éclairé. Derrié- 
re les volets clos du rez-de- 
chaussée, l'a.s.b.l. «22 marsr a 
établi ses quartiers généraux et 
son imprimerie bien outillée. 
Les milieux de gauché la con- 
naissent. Les services de sécuri- 
té aussi. 

D'autres gendarmes se ruent 
vers la porte, reculent à plu- 
sieurs épis pour prendre 
force et élan. Les coups dé bu- 
toir, sourds, mais secs, réveil- 
lent l'habitant d'en face. I] ap- 
paraît à sé fenêtre, l'ouvre pour 
a refermer bien vite sur in- 
jonction. «Polices. | 

Six minutes seront nécessai- 
res pour que la porte de bois 
cède aux assauts répétés. À son 
ouverture, l'un des gendarmes 
en observation prend appui sur 
le toit d'une voiture en station- 
nement pour mieux asseoir son 


arme. Les forces de l'ordre in- 
vestissent l'immeuble à la vi- 
tesse de l'éclair, occupent ses 
étages pour les avisiters de fa- 
con approfondie. Personne ne 
f'habite ce matin. Un émeétteur- 
récepteur crachote. 

Nous n'en saurons pas plus 
pour l'instant. Notre présence 
vient d'être jugée suspecte. 
5 h 15 : deux gendarmes s'ap- 
prochant, l'un de face, l'autre 
de côté : «Les mains sur la té- 
te !» Fouille corporelle rapide. 

- Que faites-vous icl ? 

- Journaliste. 

- Yous ne nous direz évidem- 
mént pas comment vous avez 
été renselgné ? 

- Votre carte de presse | 

Le stylo à bille court sur un 
morceau de papier. Les papiers 
d'identité sont ainsi recopiés. À 
la fenêtre du deuxième étage, 
deux yeux observent. Quelques 
instants de répit puis un appel : 
Monsieur!» Suit une invits- 
tion : «Puisque vous voulez être 
informé, on vous emmène au 
Palais de Justice où vous saurez 
tout...» 

Sans d'autres commentaires, 
une voiture pérNGUteS nous 
emmène vers la place Poelaert, 
grillant au passage des signali- 
sations lurnineusés au rouge. 
Un officler de police quitte son 
bureau au premier étage de 
l'annexe. L'Éhange de propos 
sera bref, malë des plus cour- 
tois: 

- Je vous demanderai de ne 
plus retourner dans le quartier. 
Pour des raisons de sécurité. On 
ne sait jamais... des coups de 
feu. 


De la rue de l'Inquisition, 


nous ne voyons plus qu'une, 


porte fermée, celle du numéro 
2, Deux policiers bruxellois 
aussi, en patrouille qui se 
volent agresser verbalement 
par un voisin : «Vous n'êtes qué 
des veaux...» 

Ph. V. 























































NI GOL NI LES CCC 








Depuis quelques semaines le souffle des explosions 
balaie la vie politique belge jusque dans ses racines. 
Des questions sont sur toutes les bouches : pourquoi 
le terrorisme en Belgique, que veulent les CCC? 
Réfléchissons ensemble et avançons les éléments 
d’une analyse qui, sans avoir la prétention d’être 
complète, a le mérite d'exister. En vrac. 


réfléchi ÎSS 








Compromis à la belge, Il est de couture de 
dire que la Belgique est un pays calme où il 
ne se passe jamais rien. Que c’est le pays de 
la paix sociale, de la concertation, de la 
négociation, de la discussion. Rappelons 
quand même que ce pays a été dans les trente 
cinq dernières années deux fois au bord de la 
guerre. civile. D'abord avec laffaire royale 
en 1950 où des forces qu’on ne peut pas qua- 
lifier de marginales étaient prêtes, à la faveur 
de la révolte sociale, à instaurer une républi- 
que socialiste wallonne, Ensuite, durant les 
événements de 1960-61 où l’on a vu un chimat 
pré-insurrectionnel se développer lors de la 
grève générale contre la Loi Unique. Belgi- 
que, pays de dialogue, hélas oui, sauf quand 
en face, du côté du pouvoir, on se fout de la 
gueule du populo. 


Intolérance., C'est le credo du libéralisme 
made-in-Jean Gol que de refuser de dialo- 
guer avec les gueux, surtout quand ceux-ci 
s'expriment directement par des grèves ou 
des manifestations. Cette attitude de mépris 
pour toute opposition est constitutive du 
phénomène terroriste. Jean Gol méprise tout 
qui refuse son credo à la libre entreprise et à 
la loi de la jungle. Il tend à mettre tout oppo- 
sant en accusation. Il chasse l’opposition de 
l’espace «démocratique», il la criminalise et 
l’oblige par son intransigeance à recourir à 
des moyens extra-légaux pour se faire enten- 
dre, 


Deux causes parmi d’autres. Il est, à notre 
avis, deux causes fondamentales à l’émer- 
gence du terrorisme en Belgique. D'abord le 
fait de vivre dans une situation politique blo- 
quée face à un pouvoir qui refuse d’entendre 


Le parti communiste vous l'avait dit: 
les CCC c'est les services secrets amé- 
ricains. Nous en apportons la preuve 
avec ces blasons. Fais-moi peur 
Johnny, Johnny, Johnny ka ha ha! 


Recon Team Alabama (variation) 
CCC (Command and Control 
Central) 





UNE REPETITION GENERALE ? 


les voix de l'opposition même si celle-ci, 
comme c’est le cas de l’opposition anti- 
missiles, rassemble quatre cent mille person- 
nes dans la rue et est aujourd’hui majoritaire 
sur ce sujet dans les sondages. Société blo- 
quée, tu parles, on s’en fout, tu tires, on 
t’écoute. C’est le texte que nous avions placé 
il y a quatre ans sur l’affiche expliquant le 
geste des trois de Vielsalm devant la RTBF. 
Elle est plus que jamais d’actualité face à un 
gouvernement qui refuse d'entendre nos cris, 
d'écouter nos protestations et nos proposi- 
tions. Ensuite, regardons dans notre propre 
jardin et trouvons y cet autre ferment du ter- 
rorisme qu'est le sentiment d’impuissance 
qui nous submerge depuis quelques années. 
Si l’on peut vivre face à un pouvoir autori- 
taire, en étant animé du souffle d’un com- 
bat, cela devient impossible quand on est 
privé de toute perspective de révolte positive, 
de la formulation d’une alternative et de vic- 
toires même limitées sur ce pouvoir, Ce 
sont nos défaites, toutes nos défaites qui ont 
fait le lit des CCC. C’est la faillite d’une 
extrême-gauche qui a démontré son incapa- 
cité à construire des situations de victoire qui 
ont poussé certains, et peut-on les blâmer, à 
utiliser d'autres moyens. Dans notre édito- 
rial, nous avons expliqué pourquoi nous 
sommes en complet désaccord avec ces 
méthodes, mais que cela ne nous empêche 
pas de comprendre que certains militants ne 
croient plus aux manifestations et aux tracts 
des gauchistes pour combattre le régime 
autoritaire qui s'affirme. Face à Gol, qui 
doute encore, après les quatre cent mille anti- 
missiles du 25 octobre 83 que le jeu démocra- 
tique n’est qu’un jeu de dupes. 


Command and Control Central 
Recon Team CCC. 


| 


OMS... 


Contradictoire. Et payons-nous le luxe et 
lhonnêéteté intellectuelle d'être contradictoi- 
res et de présenter à votre réflexion le con- 
traire de ce que nous venons de dire. Un 
autre scénario imaginerait que les CCC ne 
seraient qu’un groupe provocateur, infiltré 
et manipulé par une fraction de l’Etat qui ne 
parvient plus à imposer ses solutions en 
matière de défense nationale. Scénario 
parano qui verrait derrière l’étoile rouge des 
CCC une fraction de l’Etat qui obligerait 
l’opinion publique à quitter les eaux anti- 
missiles et pacifistes pour rejoindre son sein 
sécurisant face à «la barbarie terroriste». 
Cette analyse a le défaut d’envisager la réa- 
lité sous un angle paranoïaque, privant de la 
moindre initiative politique ceux qui peut- 
être sont effectivement des adversaires de 
l'Etat. Elle ne peut en tout cas pas être exclue 
d'office des éléments d’analyse. Ceci relève 
de votre liberté. 


Mammouth. 19 octobre, 5 heures du matin, 
De cing cents à mille policiers participent à la 
plus grande rafle jamais organisée en Belgi- 
que depuis la guerre. Relevons pour com- 
meéncer que l'opération Mammouth ne 
s'appuie en rien sur des faits issus d’une 
enquête policière. C’est une opération politi- 
que, une chasse aux sorcières. Les cent-vingt 
perquisitionnés n’ont pas été choisis en fonc- 
tion d'éléments de l’enquete sur les CCC, 
mais bien sur base des opinions présumées 
des personnes visées. Il est acquis 
aujourd’hui que les polices ont dressé une 
liste de cent-cinquante noms soupçonnés par 
elles «d’avoir recours à un moment où à un 
autre au terrorisme». De même, une autre 
liste de mille cinq cents noms cette fois a été 
constituée. Elle rassemblerait tous ceux qui, 
selon les polices, seraient prêts à porter aide 
aux terroristes. 

Ces listes noires où l’on trouve tout le monde 
et personne qui a un passé politique, sont 
d'autant plus dangereuses, et l’opération 
Mammouth est là pour nous le prouver, que 
parfois elles regroupent des gens qui n’ont 
jamais eu ou n’ont plus aucune accointance 
même avec les milieux dits «subversifs». 
Imaginez demain ces listes circulant, et vous 
comprendrez toutes les potentialités et tous 
les dangers d’une chasse aux sorciéres. A 
quand un Mac Carthy au gouvernement... À 
quand les interdictions professionnelles 
(Berufsverbot) telles qu’on les a connues en 
Allemagne de l'Ouest durant les années sep- 
tante. 


La peur, Pour arriver à ses fins, c’est-à-dire 
pour recréer un consensus social autour et 
pour la défense de l’État, du Gouvernement, 
Jean Gol se doit de jouer avec le feu. 
Lorsqu'il apparaît à la télévision, qu'il prend 
la parole à la radio, c’est d’abord la peur 
qu’il crée pour se présenter ensuite comme le 
seul homme fort capable de défendre la 
société. [1 est incontestable que les attentats 
des CCC, du moins les trois premiers contre 
des firmes d'armement, n’ont pas créé de 
traumatismes dans la population, bien plus, 
c'est parfois la sympathie qui accompagnait 
les actions des CCC contre les industries de 
mort. C'est le Pouvoir qui se doit de susciter 
et d'entretenir la panique pour nous obliger à 
rejoindre son bras protecteur. Quand on 
parle de la sauvegarde de l’ordre public, on 
oublie la manipulation de l’index, le chô- 


mage, les inégalités sociales quis S accentuent. 


LE 


Utilisation. Que l’opération Mammouth ait 1 ki 
également été utilisée par les polices Pour 


remettre à jour leurs fichiers sur ce que mon- 


sieur Gol appelle avec une pointe de crachat 


dans la bouche «la fourmillère de gauche», 
aujourd’hui personne n'en doute, C’est là 


sans doute qu’on perçoit la dimension dialec- 
tique du terrorisme. En croyant affaibli 


PEtat par la lutte armée, il le renforce en lui 
donnant prétexte de quadriller tous. les 
milieux subversifs. Et quand on s'appelle 
Gol et qu’on voit le KGB à tous les’coins\de 
rues de la Porte de Namur, ça donne des per- 
quisitions qui visent des associations de ten- 
dances aussi différentes qu’anarchistes, 

socialistes, chrétiennes, pacifistes, commu- 
nistes, tiers-mondistes, écologistes," Atout 
le moins un panel de mouvements. où vous et 
moi sommes sûrs de nous retrouver. 


Maïs où sont les copains ? Et malgré ce ratis- 
sage large on ne peut être que frappé de stu- 
péfaction en voyant la pratique inexistence 
des réactions face à la rafle de Gol: Dans 
n’importe quel scénario de politique-fiction 
des années septante, on n’aurait imaginé une 
telle rafale de perquisqitions sans une explo- 
sion de réprobation, Eh bien non, en 1984, 
Gol lache ses flics comme on lache des fauves 
et personne ne bouge. Quelques critiques 
modérées excusant presque  l’opération 
Mammouth nous arrivent du parti socialiste. 
Dans les milieux syndicaux, on en est pres- 
que à croire que l’opération Mammouth/n°a 
jamais existé, Faut-il que la dégénérescence 
de l’opposition soit telle que, cadenassée par 
la peur du terrorisme, elle se sente obligée de 
soutenir une logique porteuse de dangers 
pour la «démocratie» elle-même; "par la 
banalisation de procédures exceptionnelles: 
Faudra-t-il comme en Italie que des militants 
soient emprisonnés sans jugement pendant 
douze ans, comme le prévoient les lois 
d'exception anti-terroristes, pOur que nos 
bons esprits démocratiques et de gauche 
s'élèvent contre une offensive autoritaire de 
l'Etat qui, aujourd’hui, touche sa périphérie 
avant de toucher la gauche bien-pensante 
demain. | 

Répétition générale. Et soyons conscients de 
ce que l'opération Mammouth, du fait même 
de ses limites et de ses imperfections, n’est 
qu’une répétition générale d’une rafle qui 
cette fois-ci ne se contenfera plus de perquisi- 
tionner, mais placera sous les verrous"des 
prisons les militants soupçonnés. Ceux qui 
me taxeraient de paranoïa n’ont qu'à se ren- 
seigner sur les rafles organisées par. l'Etat 
aux moments agités de notre histoire (affaire 
royale, 60-61) dans les milieux communistes 
de l’époque. Aujourd’hui il ne s’agit encore 
(et heureusement, pourvu que ça dure) que 
de violences contre des biens. Demain, si par 


malheur il s'agissait de persotines, soyez sûrs” 


que le mammouth ne se contentera pas de 
vous réveiller avec une mitraillette sur l’esto- 
mac, mais vous mènera passer la nuit sui- 
vante en cellule. Gageons (l'espoir fait vivre) 
qu’à ce moment au moïns, les bons démocra- 
tes de gauche réagiront avec la plus extrême 
vigueur, refusant le piège infernal dans 
lequel ils sont tombés cette fois-ci: «être con- 
tre l’abus de pouvoir de l'Etat, c’est être 
pour le terrorisme». Notre position doit être 
nette: refuser l’installation d’un état fort et 
autoritaire venant directement de l’intérieur 
même des ministères ou par le biais du terro- 
risme. Notre choix c'est la liberté. Et notam- 
ment la liberté de se gouverner soi-même 
sans Gol, ni les CCC. 


Le Collectif du 22 Mars 


ALTERNATIVE LIBERTAIRE - ASBL 22 MARS - N° 67 - Novembre 84 "Page 9 














limitées, comme le montre 
e la fin du 19° siècle. 


Article 10 de la Constitutiort 

«Le domicile est inviolable: aucune visite domici- 
liaire ne peut avoir lieu que dans les cas prévus par 
la loi et dans la forme qu'elle prescrit». 

Par exception à ce principe, le Code d'Instruction 
Criminelle permet au Juge d’Instruction d'ordon- 
ner des perquisitions : 

Article 87: 

«Le Juge d'instruction se fransportera, s'il en est 
requis et pourra même se transporter d'office dans 
le domicile de l’inculpé pour y faire la perquisition 
des papiers, effets et généralement de tous les 
objets qui seront jugés utiles à la manifesfation-de 
la vérité». 

Article 88: 

«Le Juge d'Instruction pourra pareillement se 
transportér dans les autres lieux où il présumerait 


qu'on aurait caché les objets dont il est parlé à | 


Particle présent». 


«ll est certain que la Constitution ayant fait de | 
Finviolabilité du domicile une liberté garantie aux | 
citoyens, les cas de violation de cette liberté doi- | 
vent être commandés par les nécessités absolues de | 
l'instruction et de la découverte de la vérité» (Pan- | 


dectés}). 


En d'autres termes, pour ordonner une pérquisi- | 
tion, le magistrat instructeur doit avoir des indices 


graves, selon lesquels telle personne est suspecte 


d’avoir participé à l’infraction ou de posséder (de 


cacher!) des pièces à conviction. 


«Toutes les maisons ne sont pas ouvertes à la Jus- | 


lice, mais seulement celles qui sont frappées de 
suspicion» (M. Faustin Helie, Traité de l'Instruc- 
tion Criminelle). 


De cela, il convient de déduire que pour ordonner 
une perquisition, il faut d’abord une personne 
soupconnée d’avoir commis un crime ou un délit. 
Car, aux veux de la loi, la pérquisition ne vise pas 
à rechercher des infractions: elle constitue une 
mesure d'instruction-et est réservée à la recherche 
de preuves, Elle n’a pas pour but de découvrir des 
faits, mais d'acquérir des preuves d’une culpabi- 
lité présumée. Les auteurs contemporains du 
Code d'Instruction Criminelle considéraient 
comme illégal de requérir d’une façon vague et 
générale à charge d’inconnus. 








L Le Conseil de Fédération du Mouvé- 
ment Ecolo, à l'occasion de son 
assemblée mensuelle à Namur, a exa- 
miné la situation politique créée par 
| les attentats des Cellules Cormmunis- 
| {es Combaftantes et par l'opération 
Mammouth, rnenée par d’importan- 
tes forces de police pour lutter contre 
les activités terroristes de ce groupe. 





Ecolo estime qu'il faut mener une lutte active 
contre les groupes économiques et politiques qui, 
comme les institutions visées par les attentats, 
contribuent effectivement à la course suicidaire 
aux armements et alimentent les marchés de la 
mort de par le monde, Mais Ecolo condamne clai- 
rement et vigoureusement les moyens violents uti- 
lisés par les groupes extrémistes, de quelque bord 
qu'ils soient: la violence n'engendré jamais la 
démocratie. 


| Par ailleurs, les procédés utilisés par les 

enquêteurs dans le cadre de l'opération Mam- 
mouth pour trouver une piste pérmettant d'arrêter 
les auteurs des attentats sont inappropriés et met- 
tent en danger notre démocratie en banalisant 
l'usage de procédures exceptionnelles. 






ALRERNATIVE LIBERTAIRE - ASBL 22 MARS - N° 67 - Novembre 84 - Page 10 















ecrase la démocratie 















NS SP UD PRE me cap me DT Pme ere 
 — 


es orwell, 1984 








bombes et les fusées qui tombaient chaque 
jour sur Londres étaient lancées par le gou- 
vernement lui-même, «juste pour main'enir 
la population dans la terreur». C'était une 
idée à laquelle il n'avait litféralement jamais 
pensé...». 













Comment justifier dès lors légalernent 120 perqui- 
sitions effectuées auprès de «suspects» qui 
n'avaient aucun lien entre eux; comment justifier 
ce déploiement de forces, le réveil à $ heures du 
matin de personnes braquées par des revolvers et 
des mitraillettes et qui n'ont parfois été emmenées 
que pour être photographiées, même pas interro- 
gées! Comment justifier la saisie de livres vendus 
dans toutes les librairies et dont les liens avec un 
attentat sont pour le moins suprenants. 


Que le Ministre de ia Justice ait cru devoir faire 
une série de déclarations paraît peu compatible 
avec la sérénité et la mesure qui doivent présider,.à 
une instruction. La teneur dè ses déclarations est 
moins compatiblé encore avec les exigences de la 
loi en matière d'instruction pénale et de perquisi- 
tions: il n’est pas question d'indices sérieux, de 
culpabilité ou de recel de pièces à conviction, mais 
de déclarations politiques. 
Le citoyen Gol a le droit d’estimer inacceptable 
que d’aucuns aient des vues politiques divergentes 
des siennes, le Ministre de la Justice ne peut utili- 
ser les institutions judiciaires pour criminaliser 
une opposition, 
Collectif d'Avocats 
Bruxelles 


jean gol et cicéron 


| Longtemps après l'avènement de la société 
| du spectacle, la religion, qui a toujours été un 
prototype d'idéologie fonctionnelle pour 
tous les anciens pouvoirs, avail inventé le 


complet du Royaume de. Dieu. La religion ne | 

| faisait que projeter dans le monde métaphy- | 
sique la simple nécessité de fout pouvoir réel | 
et concret. Ainsi, Cicéron avait besoin 
d'ampliier le risque que corstituait Catilina, 
pour magnifier sa propre gloire de Sauveur de 
la patrie et justifier la multiplication de ses 

| propres abus. Pour tout pouvoir, la seule 

| catastrophe c'est d’être balayé par l’histoire. 

| Une fois affaibli ef sentant l'imminence de sa 

| Jin, il a toujours tenté de se consolider en fer- 

| grant de mener une lutte inégale contre un 


adversaire commode parce que non fonda- 
| menfaiement dangereux. L'histôtre est rem- 
| plie de semblables exemples. 





Ecolo constate ampleur des moyens.utilisés 
par les forces de l’ordre et ne peut s'empêcher de 
rappeler que, lors de l'incendie criminel de l'heb- 
domadaire Pour, les recherches effectuées n'ont | 
été entamées que pour le principe et ont été rapi- 
dement abandonnées. 







De plus, le Parquet a choisi comme cibles les 
milieux d’extrême-gauche, mais également des 
groupes non-violents et tiers-mondistes, soi-disant 
parce que la piste «menaït à des milieux proches 
de l’extrême-gauche dévoyée» comme le préten- 
dait le Ministre de la Justice à la RTBF. À l'évi- 
dence, les rmiliéux concérnés devaient être en prio- 
rité ceux qui se revendiquent de la violence politi- 
que, aussi bien à l'extrême-droîte qu’à l’extrême- 
gauche. Car le Ministre a reconnu lui-même que 
certains attentats revendiqués par les uns avaient 
été commis en réalité par les autres. L'opération a, 
en tous cas, permis à la police judiciaire d'amélio- 




















rer son état des lieux des mouvements progressis- | 





tes à Bruxelles et ailleurs, puisque des fichiers ont | 
été emportés. 

Enfin, la perquisition dans le bureau du séna- 
teur Yves de Wasseige constitue manifestement un 
abus, assimilable à une violation de l’immunité | 
parlementaire. 







Boujevard Charlemagne, 38 
1040 Bruxelles | 


diable, premier et suprême agent provoca- | | 
leur, qui devait assurer le triomphe le plus | | 4% ee 2 DE AR 
. pions ét avance ses cartes. [1 y a là une opération 











| Reichstag mais c'est le même scénario, en plus 
| mesquin. On accuse et désarme la gauche pendant 
1 que les nazis impunis, protégés, s'organisent, rem- 
| plissent leurs arsenaux, préparent leurs prochains 
| dynamitages. 


| Pabri d’un gouvernement lâche ou miné. Exigez 











Qui peut agir sous 
Est-ce l’action immature de jeunes 
angoissés par l'avenir bouché, le vide 
absolu, la nuit noire que leur offre le 
régime? Est-ce l’œuvre de despera- 
dos, de certains éléments d’une gau- 
che délirante aigris et déboussolés qui 
passent du piétinement stérile à la 
course à l’abîme? Mais ne s'agit-il 


pas de bien autre chose? N'est-il pas | 


remarquable que ces attentats tom- 


bent à pic pour renforcer les projets | 
de certains protagonistes d’une droite | 


musclée ? Si bien qu'on pourrait se 
trouver devant 
provocation-intoxicafion. 


En tout cas, le mammaouth Jean Gol n'a pas 





perdu son temps. Doté de sa nouvelle grande | 


police anti-terroriste, il a déclenché une opération 
qu'il a voulue spectaculaire. Interpellations, arres- 
tations, saisies d'archives, de fichiers, de machines 
à écrire, de ronéos, d'appareils offset, de carnets. 
d'adresses, perquisitions d'ordres divers, écoutes 


téléphoniques se sont multipliées en direction de | 


locaux politiques, d'imprimeries, de militants 
pacifistes, de dirigeants du mouvement wallon, de 


tiers-mondistes, de défenseurs des droits de | 
l'homme, etc, La flicaille était déchaînée, témoi- | 
gnant d’ailleurs d'un mépris total de la légalité | 


démocratique à tel point qu’elle est même allée, en 
s'en prenant au sénateur Yves de Wasseige, 


jusqu’à violer délibérément l'immunité parlemen- | 


taire. Rarement la démesure policière a atteint un 
tel degré dans notre pays. 


Opération d'intimidation visant à créer un | 


climat de peur et d’instabilité. Opération qui pro- 
longe les projets visant à museler les syndicats, la 
R.T.B.F., les jeunes, à imposer un enseignement 
aux bottes de la droite, à développer une politique 
raciste et xénophobe, à instaurer urie législation 
répressive, à institutionnaliser les pouvoirs spé- 
ciaux. Tout cela s'enchaîne. La droite place ses 





intimidation politique 

Le secrétariat fédéral du Mouvement Ecolo, réuni à 
Liège, marque sa profonde indignation quant à l’intimi- 
dation politique manifeste dont s’est rendu coupable le 
Parquet en violant le domicile privé du député Olivier 
Deleuze. Celui-ci s'apprétait, le jour-même, à interroger 
le Ministre de la Justice en séance publique de la Cham- 
bre à propos précisément de l'opération Mammouth. 


l'affaiblissement du pouvoir législatif par rappoprt aux 
pouvoirs exécutif et judiciaire, avec tout ce que cela 
comporte de meriaces pour la démocratie parlementaire. 

Des pouvoirs spéciaux au mépris de l’iramunité parle- 
mentairé, lé pas serait-il franchi? 

Ecolo attend que le Parlement, à l'unanimité des for- 
ces politiques qui y sont représentées, réAgissé vigOureu- 
sement pour défendre les prérogatives démocratiques de 
chacun de ses membres. 


coup de pub 
contre. . 
coup de gène 


Alors? On se fait sa petite publicité gratis sur 
les ondes de la Reuteubeu ? T1 fallait bien le coup 
de poing et de «génie» de Monsieur Gel pour qu’il 
soit question de l'imprimerie du 22 Mars au jour- 
ual parlé. 








Tout ceci n'a pas l’ampleur de l'incendie du 


Dénoncez! Dénencez la levée du nazisme à 


une surveillance permanente de vos locaux, que Le 
massacre de Pour ne se répète pas! 


El paraît qu'on a pris vôtre fichier. C'est aussi | 
pôur vous donner mes nom et adresse d’abonnée | 
que je vous écrit. Mais surtout pour vous dire que 
les gens de chéz nous ne sont pas assez miais pour 
croire au «terrorisme de gauche» dans notre pays | 
Front de la Jeunesse, VMO et | 
| consorts) et pour vous affirmer mon soutien, 
| même si je ne suis pas toujours d'accord avec 
| votre manière de voir. Pourvu que Orwell se soit 


| | trompé et que 1984 ne soit pas le sien. 
Ecolo | pé et que 1984 ne soit pa 


(terrorisme ici = 


Amicalement, bien fermernent. 
Marie-Paule Léonard 


une double| 





UNE LUTTÉ INEGALE CONTRE UN ADVERSAIRE COMMODE 


L ele CCC Le | menée systématiquement. Les démocrates n'ont 
€ sigle « \ “# | 


| mais de prendre en main, et très sérieusement, la 


pas à courber la tête. Il ne s’agit pas de pleurnicher 


défense de la démocratie et des droits de l'homme. 
Sans faiblesse ni complaisance. 

PCMLB:-Info 

B.P. 194 

1060 Bruxelles 





le terrorisme d’état 


D'abord et avant tout, rappelons que la 
bourgeoisie a installé son pouvair en France 
en 1793 grâce à la Terreur, Tous les éfats ont 
toujours été terroristes, mais ils l'ont été plus | 
violemment à leur naissance et à l'imminence 
de leur mort. Et ceux qui, ajourd'hui, soit 
par désespoir, soit parce qu'ils sont victimes | 
de. la propagande que le régime faif en faveur 
du terrorisme en le présentant comme le nec 
plus ultra de la subversion, en essayant même 
quelquefois de le pratiquer, ceux-là ne savent 
pas qu'ils ne font que concurrencer l'Etat sur 
son propre terrain. [is ne Saverit pas que sur 
le terrain qu'il s'est lui-même construit, 
lPEtat est toujours le plus fort, qu'il aura tou- 
| jours le dernier mot, Et tout ce qui ne détruit 
| pas l'emprise de l'Etaï sur les ponulations, le 
| renforce. Le. renforcement inoul de ous les 
| pouvoirs étatiques de contrôle dans les pays 
touchés ces dernières années est là pour nous 
rappeler que sous prétexte de lutte contre le 
terrorisme spectaculaire, l'Etat profite de 
celle conjonciure pour lancer une vaste 
offensive contre tous les milieux les plus radi- 
caux et les plus avancés. 


nous n'avons 
pas choisi 


Chères Amies, 

Chers Amis, 

Malgré les risques — aussi bien des contrôles 
téléphoniques que postaux — après les événe- 
ments récents, je ne peux m'empécher de vous 
témoigner ma profonde sympathie et mon soutien 
le plus absolu. 

Si des opérations policières sont parfois justi- 
fiées, je n'aperçois pas la nécessité réelle d'agir 
ainsi vis-à-vis du 22 Mars, de la Maison de l’Armé- 


$ | rique Latine et de son mouvement, et moins 
Pour Etoio, cetté bavure scandaleuse est le reflet de | q Ë 


encore vis-à-vis d’autres organisations d'aide au 
Tiers Monde. 


Le fond de ma pensée, je ne l’écrirai pas, par 
précaution. Mais je crois quand-même que — 
même si certaines divergences existent parfois 
entre nous — Île temps est venu de crier que nous 


| n'avons pas choisi Gol, pas plus que Pinochet ni 


Mobutu et autres 
&«devrions» respecter. 

À toutes et à tous, je renouvelle mon amitié, 
mon soutien et mon désir — si cela peut être utile 


P£rsONnages QUE TOUS 


| — de vous être utile moi-même. 


Claude 





collet 
anti-mammouth 
Sud-Luxembourg, fin octobre 84 


Les gentils petits cochons d'Ardennes 
et Gaume (qui n’ont pas été agressés 
par le gros mammouth préhistori- 
que), se proclament solidaires des 


|«abusés», victimes des attaques du 
| monstre velu. 

| Ils étudient, avec le concours des bra- 
| conniers, un collet anti-mammouth. 


Signé: 

«R», Journal des Travailleurs 
du Sud-Luxembourg 

71, rue d'Hoffschmidt 

6720 Habay-la-Neuve 










Depuis vendredi passé, les lec-| 
teurs d’Alternative Libertaire ont | 
en fout Cas.une certitude: c'est | 
qu'ils sont tous microfiche-B-és | 
maintenant. Votre lecteur, 

Patrick V. 









Il est d’ailleurs notoire que 
le rôl e Ne BP 
4 éte 





«soëialisme » » ou. ou chinois, ou cube ds 
en sont réduits à répandre sans retenue leurs 
mensonges sur la démocratie bourgeoise, pour la 
sauvegarde de laquelle ils acceptent volontiers tous 
les sacrifices, et même de s’en passer. Ainsi, c’est 
sans protestation, et en hommage au fétiche des 
garanties démocratiques, qu'est passé le décret 
gouvernemental sur la garde à vue, sur l’augmenta- 
tion des peines pour. les délits de terrorisme, et sur 
la «détention de documents subversifs » *, tandis 
que les nouvelles dispositions sur la détention 
préventive permettent désormais de garder un 
accusé en prison pendant douze ans sans aucun 
procès. Dorénavant, la magistrature italienne, dont 
la courtisanerie n’a jamais été un secret d’Etat et 
n'a plus à être prouvée, ne devra même plus se 
donner la peine de démontrer la culpabilité de qui 
que ce soiït pour le condamner de facto à 12 ans, et 
cela pour commencer : à partir de maintenant 
l'accusation coïncide avec la condamnation, et la 
fiction de la légalité démocratique en Italie est 
terminée même en tant que fiction. L'Italie est 
une république démocratique fondée sur l'exploita- 
tion du travail et sur les lettres de cachet. 


Distribué par Lé fin mot de l'histoire, BPn°274 « 75866 Paris 18 





Quand l'arbitraire ne craint plus d’apparaître 
pour ce qu'il a toujours été, quand être coupable ou 


innocent n’a plus aucune importance puisque la {| 


condamnation devient la seule certitude, celui qui 
combat lParbitraire n'a plus à craindre d’être 
coupable : condamné pour condamné, autant l’être 
pour un crime honorable, On ne peut se laisser 
gouverner innocemment. Et, en attendant de 
détruire toutes les prisons, donnons à l’ennemi de 
bonnes raïsons de les remplir, non certes en 
tombant dans le piège bien monté du terrorisme, 
mais bien plutôt en combattant à visage découvert 
et de toutes les manières tous ceux qui aujourd’hui 
s’en servent et le pratiquent, ministres, politiciens, 
patrons et policiers. 


De nos jours, le jésuitisme intellectuel appelle 
« démocratie » l'arbitraire, « liberté » la liberté de 
mentir, ét « témoignage » la délation systématique 
et obligatoire: «Sic delatores, genus hominum 
publico: exitio repertum et he poenis quidem 
umquam sSalis coercitum, per praemia elicie- 
bantur »”, disait Tacite, qui cependant, contraire- 
ment à nos intellectuels, avouait préférer les 
dangers. de la liberté à la quiétude de l'esclavage. 
Les mêmes intellectuels, après avoir débattu du 
courage en long et en large, ont fiérement conclu 
qu'il faut avoir aujourd'hui le courage d’être lâche. 
Le raisonnement le plus en vogue ces temps-ci est 
simple : si l’on aime la démocratie, il faut la 
défendre ; pour la défendre, il faut combattre ses 
ennemis ; pour combattre les ennemis de la 
démocratie, aucun sacrifice n’est trop grand : la 
noblesse du but justifie tous les moyens ; pas de 
démocratie pour les ennemis de la démocratie ! Ce 
qui n’était pas essentiellement une démocratie a 
maintenant cessé de l'être visiblement. 
* Celui quil posséde des documents subversifs est passible de 4 ans de 
prison. (N.D.T.). 


* « Ainsi on attire maintenant par des récompenses les délateurs, en- 
geance créée pour la ruine publique, et que pourtant le châtiment même 
ne retient jamais assez. » 





IL N° EXISTE PAS D'AFFAIRES SECRETES DE LA REVOLUTION 








la presse sur le phénomène terroriste. 


Tous les actes de terrorisme, tous les attentats 
qui ont frappé et qui frappent l'imagination des 
hommes, ont été et sont ou des actions offensives 
où des actions défensives. S'ils font partie d’une 
stratégie He l'expérience a montré depuis 
longtemps qu'ils sont toujours voués à l’échec. Si 
au contraire is font partie d’une stratégie défen- 
sive, l'expérience montre que ces actes peuvent es- 
pérer quelque succès, qui n’est cependant que mo- 
mentané et précaire. Les attentats des Palestiniens 
et des Irlandais, par exemple, sont des actes de te- 
rorisme offensifs ; par contre la bombe de la piazza 
Fontana et l'enlèvement d’Aldo Moro, par exem- 
ple, sont des actes défensifs. 

Toutefois ce n’est pas seulement la stratégie 
qui change, selon qu'il s’agit d’un terrorisme offen- 
sif ou défensif, mais ce sont aussi les stratèges. Les 
désespérés et'les illusionnés recourent au terro- 
risme offensif ; par contre ce sont foujours et seule- 
ment les Etats qui recourent au terrorisme défensif, 
soit parce qu'ils sont enfoncés dans quelque grave 


crise sociale, comme l’État italien, soit parce qu’ils 


la craignent, comme l'Etat allemand. 

Le terrorisme défensif des Etats est pratiqué 
par eux ou directement ou indirectement, ou avec 
leurs propres armes ou avec celles d'autrui. Si les 
Etats ont recours au terrorisme direct, celui-ci doit 
être dirigé contre la population — comme cela s’est 
produit par exemple avec le massacre de la piazza 
Fontana, avec celui de l’Jtalicus, et avec celui de 
Brescia. Si au contraire les Etats décident de recou- 
rit à un terrorisme indirect, celui-ci doit être appa- 
remment dirigé contre eux — comme cela s’est par 
exemple produit dans l'affaire Moro. 





Tous les unies À terroristes secrets sont 
organisés et dirigées par une hiérarchie clandestine 
aux militants de la clandestinité eux-mêmes, qui re- 
flète parfaitement la division du travail et des rôles 


propre à cette organisation sociale : en haut on dé- | 


cide et en bas on exécute. L'idéologie et la disci- 
pline militaire préservent le véritable sommet de 
tout risque, et la base de tout soupçon. Tout sérvice 
secret peut s'inventer un sigle « révolutionnaire » et 
réaliser un certain nombre d’attentats, dont la 
presse fera une bonne réclame, et à partir desquels 
il lui sera aisé de former un petit groupe de rili- 
tants naïfs, qu’il dirigera avec la plus grande ai- 
sance. Mais dans le cas d'un petit groupe terroriste 
constitue spontanément, il n'est rien de plus facile 
au monde pour les corps détachés de l'Etat que de 
s’y infiltrer et, grâce aux moyens dont ils disposent 
et à l'extrême liberté de manœuvre dont ils jouis- 
sent, de se rapprocher du sommet originel, et de s’y 
substituer, soit par des arrestations déterminées 
réalisées au moment opportun, soit par l'assassinat 
des chefs originels. qui se produit en règle générale 

lors d'un conflit armé avec les « forces de l’ordre », 
prévenues d’une telle opération par leurs éléments 
infiltrés. 


L’ Etat, affaibli à l'extrême par toutes Fe atta- 
ques qu'il subit quotidiennement depuis dix ans, en 
même temps que son économie, de la part du prolée- 
tariat, d’une part, et par Pincapacité de ses ges- 
tionnaires de l autre, peu taire ainsi i l'un une et l’autre 


ratiq 
+ un livre de gianfranco sanguinetti ( Li 


S'il est un livre el il faut lire à pet comprend à 


récupérer ue nid comme bras AbSte Het 4 sa pui sea 
qui décapitèrent les BR, l'Etat a délibérément choisi de ne pas liquid er 
contraire, de l’utiliser en se plaçant par des infiltrations policières à as 
d’Aldo Moro est éclairé d’une lumière blême et livide : ce serait les serv 
Moro pour l’empêcher de réaliser le compromis historique entre la dé 
communiste, Une démonstration magistrale de l’instrumentalisation par 
phénomène terroriste. Si en Belgique l’histoire ne nous a pas encore portés vers 
extraits du livre Du terrorisme et de l’état que nous reproduisons Sur cette page. 
faire rouler votre cerveau hors. des sentiers battus. Contre l’intoxication quotidienne et hel 





chose, en se char geant sole en nel LS 
rs Le speciale de à diese 


pulation. « Nous sommes en guerre» 
contre un ennemi si puissant que tout aut 
cord ou conflit serait un acte de sabotage et de 
sértion : ce n’est que pour protestercontre let 


eg 


risme que l’on a le droit de recourir à la grève géi + ie 
rale. Le terrorisme, et « l'urgence »,.un état dur 





gence et de « vigilance » perpétuels, voila les seuls 


problèmes existants, où tout au moins les: seuls 


dont il soit permis et nécessaire de s'occuper. To: 


le reste n'existe pas, ou est oublié, eten tout cas est 


tu, éloigné, refoulé dans l’inconscient social, devant 


la gravité de la question de l’éordre public » », Et 


face au devoir universel de sa défense, tous: sont ir a 
vités à la délation, à la bassesse, à la peur : Ja lâ- 
cheté devient pour la première fois dans l’histoire. 
une qualité sublime, la peur est toujours justifiée, le 
seul « courage » qui ne soit pas méprisable est celui 
d’approuver et de souteriir tous les mensonges, tous 
les abus et toutes les infamies de l'Etat. Puisquela 
crise actuelle n’épargne aucun pays de la planète, il 
n’existe plus aucune frontière géographique dela 
paix, de la guerre, de la liberté, de la vérité cette 
frontière passe à l’intérieur même de chaque pays, 
et chaque Etat s’arme et déclare la guerre a la vé- 


_rité, 





Je n’ai qu’une chose à vous dre respectés 


mystificateurs : au contraire de vous, j'ai bien 
connu, dans les treize dernières années, une grande 
partie des révolutionnaires d'Europe — connus éga- 
lement de toutes les polices —- qui ont le plus contri- 
bué, par la théorie et par la pratique, à réduire le 
capitalisme à ses conditions actuelles : eh bien a 
cun d'eux, sans aucune exception, n'a jamais prati 
qué et encore moins applaudi le terrorisme specta- 
culaire moderne - ce qui me paraît évident. 17 
n'existe pas d'affaires secrètes de la révolution: 
tout ce qui est aujourd’hui secret appartient au 
pouvoir, c’est-à-dire à la contre-révolution. Eticeci, 
toutes les polices le savent parfaitement. 

Il convient dès maintenant que vous ayez la 
conscience tranquille sur un point, messieurs du 
gouvernement : tant que votre Etat existera, et que 
je serai vivant, je ne me lasserai jamais de dénoncer 
le terrorisme de vos services paralleles, et cela 
coûte que coûte : car c’est précisément le premier 
intérêt du prolétariat et de la révolution sociale, en 
ce moment et dans ce pays. Et ce justement parce 
que, comme disait Courier, «politique connue, po- 
litique perdue ». Et si cet Etat criminel veut conti- 
nuer à mentir, à tuer et à provoquer toute la popu- 
lation, il sera contraint dorénavant de jeterson” 
masque « démocratique », d’agir en son nom propre 
contre les ouvriers, en abandonnant l’actuelspecta- 
cle de comédie dans lequel s’exhibent les services 
secrets, qui entretiennent les illusions de quelques 
militants naïfs sur la « lutte armée » afin de rendre 
leurs provocations vraisemblables, et pour jeter en- 
suite en prison des centaines de personnes, tandis 
que nos policiers s’exercent au tir au pigeon en at- 
tendant la guerre. civile, 


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ALTERNATIVE LIBERTAIRE - ASBL 22 MARS- N° 67- Novembre 84 - Page 41 | 






















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CE 


nis dans l'édito de notre numéro d'octobre, sur le groupe 
0. Chabab, n’avait pu passer faute de place. Ce n'était que 
voici. À vec, rapidement, une interview des quatre «brea- 
Chabab, un article reprenant des passages sensationnels 
rial paru en juillet dernier dans le très respectable et très à droite 
al» — et Qui s'intitule: «Plus on est de fous, plus on 

is oui. Les vrais libéraux d’outre-Atlantique se prononcent contre 
restriction à l'immigration. Ils ont leurs raisons, bien entendu. Eton- 
# jand-même. Un article, enfin, largement repris du journal français 
«Le Matin», sur une «riposte organisée des Beurs», aux crimes racistes et 
aux bavures policières. Et nos illustrations: des extraits de BD beurs 
parues dans «Pilote», «Charlie» et «L'Echo des Savanes». 


On voit déja, à l'horizon du numéro prochain, un papier où Sam et Amar 
vous racontent l’histoire mouvementée des émissions de Radio Chabab, 


depuis maintenant un an. Et, avec d’autres informations, un projet pour 
ce petit journal, qu'on aimerait voir s’élargir, s'élargir, s'élargir…. Mais 


vous verrez bien. 


ciné-bougnoule 


Qu'est-ce qui leur a donné l'idée, 


Radio Chabab 





vidéo 


ces jeunes bougnoules, de faire du 


cinéma? C'est vrai qu'on a longtemps dû se contenter d'Ormar Sharif sur les 
écrans, même si ça change ces temps-ci dans le cinéma français, où, de 
«Tchao Pantin» à la «Smala» — en passant par «Laisse béton» — on voit de 
plus en plus de personnages et d'acteurs arabes un rien plus vraisemblables. 
pue même, vidéo ou pas, c'était pas évident, au départ. Mohamed raconte 

aventure des cinéastes en herbe de Radio Chabab, Marc, Fanchon et lui- 


même, 


Radio Chabab: Radio Chabob, ça commence avec 
des émissions de radio. Alors, comment — ef 
Pourquoi — avez-vous eu envie de füire de la 
vidéo ? 

Mohamed: Les émissions, on peut en reparler 
avec ceux du groupe qui s'en occupent. Je veux 
dire par là que Radio Chabab, ça a toujours été 
pour nous un moyen, des moyens, de parler et de 
trouver des formes d'expression. Bon, il y a eu 
l'ambition d'organiser beaucoup de monde dans 
le quartier, de leur proposer des arumations…. 
intelligentes. On en est un peu revenu, maïs c'est 
aussi une autre discussion. Alors, tu as les émis- 
sions, tu as le journal, tu as la vidéo: Radio Cha- 
bab maintenant, c'est avant tout un groupe de 
gens qui veulent réfléchir à la communication, el 
apprendre à maîtriser des téchniques de communi- 
cation, Mais pour répondre à ta question, quand 
on æ fait le tour des projets qui nôus tenaient à 
cœur, il y a eu dés copains qui ont tout de Suite 
dit: la vidéo. C'est normal. La vidéo est partout, 
C'est une téchnique nouvelle, relativement facile 
et accessible. Et puis on voit tellement d'images, 
on a envie d'ert faire qui soient bien à soi. 


Radio Chabab: Quelles sont les premières diffi- 
cultés que vous &vez rencontrées ? 


Mohamed: Premièrement, un travail assez diffi- 
cile, c'est la mise sur pied d'un scénario. On ne 
s'imagine pas, c'est une technique complexe. 
Ensuite, il faut trouver le matériel, et puis former 
les gens. 


Radio Chabab: Commençons par le scénario. 


Mohamed: 11 a d'abord un choix de sujet. Pour 
nous, c'était pas compliqué: il fallait raconter une 
histoire qui pouvait arriver à un mec de la 2° G, 
montrer des situations, des endroits où les copains 
ny le temps. À Ixelles, pour nous, en particu- 
ier Aprés, il faut bâtir l'histoire. Pendant plu- 
sieurs réunions, chacun lançait dés idées. Le héros 
était une fois un voyou, une autre fois le frère 
d'un gars qui avait été balancé — et l& film racon- 
tait sa recherche du donneur... Finalement, c'est 
cette dernière idée qui à été retenue. Et puis la 
farnille, le pére, la mére, les frères et sœurs, les 
amis, Mles-flics..» Chaque personnage est construit 
aveciles éléments fournis par tous, en vrac, el dont 
on'essaie de sortir un truc cohérent. Même chose 
pour les cadres de l’action. On fixe la structure 
générale: qui?, qu'est-ce qu'il fait?, pourquoi?, 
où? On précise. On essaie de fournir les réponses 
au fur el à mesure du récit. On établit des dialo- 
gues.de base. "A la fin de tout ça, vient le décou- 
page technique, par séquences, plans, avec tous les 
renseignements nécessaires. De toute façon, nous 
voulions raconter une histoire. Le genre répor- 
tage, a ne nous intéressait pas vraiment. Îl doit y 
avoir l'influence des films, des feuilletons télé; 
c'était trés «Un privé dans la ville». Pourquoi 
pas 2 On voulait ulitiser des images de «Lawrence 
d'Arabie» pour le générique. Tu vois ça: une 
course de méharis, avec des guerriers armés 
jusqu'aux dents, sur fonds de musique halywoo- 
dienne. Et paf: une vue de la chaussée d’Ixclles, 
déserte, sous la pluie, un dimanche matin. 


Radio Chabab: Une fois voïre projet en Main, 
vous avez j'ait quoi? 


Mohamed: On s'est évidemment rendit compte 
qu'il fallait suivre une formation. On s'est rensei- 
gné, et on a trouvé le GSARA, un groupe audio- 
visuel proche du PS, très ouvert à des amateurs 
comme nous, et qui organise des stages de forma- 
tion le week-end. 


Radio Chabab: Ça s'est passé comment? 


Mohamed: Après un cours théorique assez rapidé 
sur la place de la vidéo dans les moyens de com- 
rnunication, on nous a proposé une initiition pra- 
tique à partir d’un court film à réaliser. On nous 
avait mis en présence des appargils: carnéra, SON, 
magnéto. Nous avons choisi de tourner nos pre- 
mières images À Bruxelles-Molenbesk, dans le 
quartier «Chicago», Il a fallu construire un petit 
scénario, ct puis on est sorti en rue, 


Radio Chabab: Raconie…. 


Mohamed: On a commencé par bafouiller, bien 
sûr, On s'emmêlait joycusement les pinceaux avec 
les boutons ct compagnie. Surtout qu'il fallait 
synchroniser, On était à deux: parfois j’avais la 
caméra et Marc s’occupait du son et du magnéto, 
et on changeait. Le premier truc qu’on a filmé, 
c'était un grafitti sur un mur: «Ïrmmigrés dehors». 
C'était assez le vif du sujet, mais sans difficultés : 
imagc fixe, et seulement le bruit constant des 
bagnoles, Il y a une grande plaine de jeux, entre le 
Théâtre flamand et le Marché aux Poissons: on a 
filmé des petits kets et des fillettes qui jouaient. 
Tout de suite, ils se sont groupés autour de nous, 
par dizaines, ils riaient, nous prenaient pour des 
reporters, voulaient jouer avec le matos, et tout le 
monde voulait passer devant la caméra. On s’est 
vraiment marré. Mais il y a eu aussi des choses qui 
ont êté filmées quand les enfants parlaient... Des 
choses émouvantes. On a filmé des plans très 
beaux, dont on s'est aperçu au montage. Il y a eu, 
à l'arrière-plan, une fillette qui dansait des danses 
arabes, entourée d'une dizaine de garçons qui 
frappaent dans leurs mains, 


Radio Chabab: Vous travaillez sur quoi, à pré- 
sent? 


Mohamed: On apprend là technique de l’éclai- 
rage, et le nouveau sujet est une interview d'inté- 
ricur, avec un éclairage d'ambiance. Là, on va 
réunir des copains de Radio Chabab, et causer. 
On a aussi des prises de vue du quartier: chaussée 
d'ixelles, parc de la Tulipe, chaussée de Wavre... 
Et on va combiner tout ça au montage. 


Radio Chabab: Vous êtes partis pour d'autres 
Jens, bien d vous, après ? 


Mohamed: Ah, c'est lé bul. Il faudra se procurer 
du matériel, par prêt ou par location. Lés copains 
formés au GSARA formeéront d'autres membres 
du groupe. De touié façon, on va réaliser natre 
premier projet, celui qui nous a branchés au 
début. Et puis, on le montrera, on verra bien, Si 
ca marche qui sait. 


. édito |) 44 


SSL 
” v'+ F 





SNS 

















(.: SUNE 
LOCAL. 





Sélim Mazari, un jeune Algérien 
abattu mardi 16 octobre par un poli- 
cier parisien pour avoir grillé un feu 
rouge. La veille, un autre Algérien, 
Amar Ben Mohamed, victime d’un 
accident de voiture, sonne à la porte 
d’une villa pour demander secours : il 
est el à coups de carabine. Les 
deux événements cornplètent ure liste 
interminable d'agréssions, de crimes, 
de bavures policières. Poussant cer- 
tains Beurs à organiser une riposfe 
violente... Les autorités avouent leur 
impuissance à éviter un danger 
d’escalade… 





«Le Matins, 19 octobre #4 


Mercredi 19 heures. Rue Ordener, à Paris, 
des manifestants se sont rassemblés sur les lieux 
où est tombé Sélim., Ils viennent de déposer une 
gerbe à la mémoire du jeune homme. La manifes- 
tation n'a fait l'objet d'aucune déclaration, et le 
commissaire principal Jean Porie, «patron» du 
18° arrondissement, s'avance au-devant du ©cor- 
tège pour s’enquérir des intentions des organisa- 


| teurs. Il n'ya pas de service d'ordre, aucune force 
| de police: le commissaire Porte est suilement 
| accompagné dé son chauffeur ef d'une jeune sla- 
| giaire, Les deux hommes seront immédiatement 


bousculés, injuriés, fouillés sans ménagement con- 
tre leur voiture, dont la nette arrière volera en 
éclats. Au cours de la bagarre, le chauffeur per- 
dra une dent et le commissaire quelques larmes, 
provoquées par un jet de bombe lacrymogène, Ils 
n'étaient armés, ni l'un, ni l’autre. Et leurs agres- 
seurs sont aujourd'hui recherchés par les hommes 
de la deuxième division de PJ, chargée de 
l'enquête. 


Jeudi, O heure 36, rue Scribe. Une déflagra- 
tion dans la nuit, tout contre l'Opéra: c'est une 
bombe, de moyenne puissance, qui vient d’explo- 
ser contre l'entrée du posie-vigie du Palais Gar- 
nier. Aucun fonctionnaire à l'intérieur du Jocal: le 
poste ne fonctionne que la nuit, Des dégâts maté- 
riels sans grande importance, et, heureusement, 
aucun blessé. Maïs l'origine criminelle ne fait 
aucun doute. Et l'attentat sera très vile revenciqué 
par un message adressé à Î"AFP: «Affaire Orde- 


| ner. À chaque bavure, Boum, Objectif: point de 


rendez-vous des tueurs reconûus par l'Etat, Pro- 
chaine bavure, nous tuerons tous les autéurs et 
complices... Avis». Signé: «Groupe 
anti-bavures». 


Le «Groupe anti-bavures»? Totalement 
inconnu, tant du côté de la PJ qu'aux Renseigne- 
ments Généraux. La menace est en 1out ças prise 
au Sérieux, même si on s'efforce de rester serein au 
Ministère de l'Intérieur, en mettant ces violences 
sur le compte des «tensions exacerbées». 


«Il est difficile, dit-on au Ministère, d'éviter 
aujourd'hui les réaélions de la communauté 
maghrébine. Tout cela est malheureusement impa- 
rable...». 


C'est Sur cette conclusion que s'achève l'arti- 
cle du eMatins. Nous sommes, rappelons-le, Aa 
veille d'une nouvelle Marche Pacifique des jeunes 
Maghrébins sur Paris. Espérons que ce ne sera pas 
la dernière manifestation de patience de la com- 
munauté. 


NOUS DANS NOTE Ÿ 
MSC, CAPTAIN, | 
ATOUT VOUS 


SR D EXPUIQUER Te 













les bd sur les immigrés 
a| de la deuxième génération 
fleurissent dans les magazines. 
= à ici des extraits de pilote 
# (page de droite) par christin 
et goetzinger, et deux planches 
4 de l'écho de savanes 






BOUDYJELLAL/MECHKOUR 


a LES BEURS 





ÎLEST TARÉ CE CÉFRAN, 
ON PEUT PLOS 
FOUTRE LE NEZ DEHORG / 


ROUE 1 CETTÉFONS 
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. ON VA DEMANDER © 
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DE NOUS AIDER ï 

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SON NUMÉRO: 


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SE SUIS BAPTISÉE, 
JE SUIS BAPTISÉE 1 


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BTCDN susridens! 





ALTERNATIVE LIBERTAIRE - Novembre 84 - Page 12 


Editeur responsable: Serge Noël Adrésse de contact: 146, chaussée de Wavre 






DO Mt ou A) GE! 


| les bd sur les immigrés 

| de la deuxième génération 
fleurissent dans les magazines. 
ici des extraits de pilote 
(page de droite) par christin. 
F| et goetzinger, et deux planches 
_de l'écho de savanes 





C'EST GAGNÉ / ] 







BOUDJELLAL/MECHKOUR 















IL EST TARÉ CE CÉFRAN, 










POUF 1 CETTE FOIS ON MA DEMANDER 
ON A BIEN FALL _ ON PEUT PLUS À CAP TAIN SAMIR 
S PASSER. FOUTRE LE NEZ DEHORS / DE NOUS AIDER Y 





D CUSOURS UN 
A TÉLÉPHONER J'ai 
D, SONAUMERO: 


ON ViT PLUS, FAUT 
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JE SUIS BAPTISÉE, 
JE SUIS BAPTISÉ 


77 CAF TRAIN SAMIR 
ET MON IDOLE ! FAÎTES 
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<<) DE M'ORDRE DES 
v D\ TUSTICIERS! 


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La 





LES BEURS 




























danse 
NME 


breake 


C'est qui, qui disait l’autre jour, à la 
télé, que les petits Maghrébins, c'est 
nos Porto-Ricains et nos Noirs arné- 
ricains à nous ? Ça causait de break 
dance ét c'était pas tout à fait faux. 
Quand il fait beau, soleil et compa- 
gnie, parc de la Tulipe ou près du: 
musée d'’ixelles, on peut les voir 
remuer, Onduler, sauter, tourner. Ce 
sont les «Furious Band». 


Karim, Farid, Youssef et Khader, quatre 
sportifs de quatorze à seize ans, des copains de 
Radio Chabab. Ils sont venus parler de leur pas- 
sion commune: breaker. 

Radio Clhabab: Vorre groupe, «The Furious 
Band», existe depuis combien de témps? 

Karim: Depuis sept mois. Oui, à peu près sept 
nois. Avant, On dansait chacun de son côté, 
enfin, on breakait déjà pour s’amuser, quoi. Maïs 
le groupe, c’est beaucoup plus sérieux pour nous. 


Radio Chabab: Comment ça vous est venu, cette 
envie? 


Karim: Ben, on regarde la télé, El y a eu des 
films... On s’est tout de suite dit: ça c’est pour 
moi! 

Farid: Tu sais, peu de gens arrivent à le faire vrai- 
ment bien. Alors tu as le plaisir d'arriver à des 
trucs difficiles. De plus en plus difficiles. 


Youssef: Et puis, avec la break, on peut se défou- 
ler à fond, C’est un vrai sport. Au départ, on allait 
voir dans une boîte, le «Podium». On apprenait 
en s'amusant. Mais au fur et 4 mesure que tu 
découvres les difficultés, tu t'accroches, lu veux 
vraiment y arriver, tu réussis. Et c'est ça qui est 
super, 

Khader: On s’entraîne en moyenne deux heures 
par jour. Et ça c'est rien. Prends un groupe 
comme les «Masters Streets» — c'est des copains 
— ils s'entraînent encore plus. Mais eux, ils le font 
uniquement pour gagner. Îls sont de six à neuf. 
Leur nombre change. Nous, on veut rester à qua- 
tre. Faire un groupe qui tienne bien. 











Radio Chabab: De quof a-t-oh besoin pour faire 
de la break? 


Karim: Un training, des baskets et... unlocal. Au 
début, on allait dans la cave des parents d'un 
d’entre nous. Et puis, On est venu chez vous, à 
Radio Chabab. S'il fait beau, on le fait en rue. 


Youssef: Avant, tu avais les gants blancs et une 
casquette. Maïs c'est démodé, c'était pour la 
robotik, Plus personne fait ça. Tu vois, la diffé- 
rence entre la robotik et la break, c'est que la 
robotik, ben, comme son nom lé dit, consiste à 
imiter des gestes de robots. C'est assez limité, La 
break dance, c'est de la vraie danse, en souplesse, 
vaaus. IE y a beaucoup plus de choses à ré4- 
SET. 
Radio Chabab: 7! y a beaucoup d'autres groupes? 


Karim: Oh oui. 4 chaque concours, il y a cinq ou 
six groupes. Nous, on en a déjà fait une quin- 
zainé. Les premières fois, c'est terriblement 
impressionnant. Mais maintenant, on pourrait se 
produire devant mille personnes, on n'aurait pas 
peur, Au contraire, les encouragements, ça nous 


| aide à aller plus fort. 


Farid: Il y a eu deux démonstrations à l’école. Les 
copains en redemandaient. Ça nous fait plaisir. 


Radio Chabab: Ef c'est utile, pour les filles ? 
Youssef: Oui, oui (rires). 

Karim: Oui, enfin, nous, c'est avant tout la break, 
hein. 


looky: nouveau truc 
Radio Chabab: Vous allez dans une école? 


Farid: On y a été. Mais le prof en savait moins que 
nous, qui avons tout appris par nous-mêmes, On 
m'a pas besain d’un prof. 


Youssef: Nos chorégraphies, par exemple, on les 
fait nous-mêmes, En regardant les nouveautés & la 
télé, en combinant les idées de l'un et de l'autre, 
Regarde, en ce moment, on est en train de mettre 
au point un numéro à deux fois deux. Ce sont des 
figures synchronisées. Karim et Khader vont te 
montrer. 

(On dégage un peu les chaises. Les deux brea- 
kers s'y mettent. Leurs gestes, parfaitement 
synchronisés, une minute de magie à l'improviste, 
et sans musique). 


Plus libéral que ça, tu meurs... 


ouvrez les frontières! 





«Il faut laisser les immigrés entrer librement dans notre pays, comme dans 
tous les pays occidentaux. Mieux, il faut inscrire dans la Constitution cette 
règle fondamentale: les frontières resteront désormais ouvertes. Car plus àl y 
aura d'immigrés, plus grande sera nôtre prospérité». 

Et bien non, ces mofs ne viennent pas d'un journal d’extrême-gauche ou 
vendu aux intérêts pétroliers du Goife. C'est le journal sacré des conserva- 
teurs, Gol de tous poils, du monde entier, qui prend ainsi position sans 
s’embarrasser de nuances: le «Wall Street Journal», la gazette des financiers 


américains, 

Le 4 juillet dernier, sous le titre assez plaisant 
«Plus on est de fous, plus où rit», l’austère quoti- 
dien des cours en bourse et de l'économie capita- 
liste pure et dure, donnait une étrange leçon de 
«libéralisme» à nos libéraux locaux: «La richesse 
d’une nation, écrit l'auteur du texte, n'est pas un 
gâteau à la taille fixée une fois pour toutes, dont 
les parts seraient progressivement réduites par 
l'augmentation de la population», L'évolution de 
l'écongrmie montre que la richesse matérielle est 
uré création constante du travail des hommes. 


«Les gouvernements européens, poursuit le 
Wall Street, paient leurs immigrés pour qu'ils s'en 
aillent, Pendant ce temps, les économies euro- 
péennes s'enfonceni». A contraire, les USA 
refusent de fermer leurs frontières, parce qu'ils 
savent que leur richesse, et toute leur histoire, 


reposent sur un renouvellement permanent dé la 
population grâce à l'afflux de cultures, d'hommes 
et de femmes jeunes, Et «les Etats-Unis connaïs- 
sent un boom de l'emploi». 


Refuser dé fermer les froniières, «c'est une 
vue radicale, reconnaît le Wall Street, mais elle 
correspond parfaitement aux bases du libéralisme. 
Pour les vrais libéraux, lé droit de changer de pays 
pour trouver un emploi fait partie des droits fon- 
damentaux de l'hormine. Les Etats qui restreignent 
l'immigation violent ces droits fondamentaux». 


immigrés = chômage ? 
faux ! 


«Quant à l'argument économique, il ne tient 
pas», s'exclame le journal financier. Et le Wall 


LS 
HIS RE 


Karim: Là, tu as vu un passage, au moment Où les 


CEE 


bras font des battements plus rapides. 
nouvéau truc arrivé des USA illy a trois moisl 
looky, C’est tout nouveau. On en reparlera 
Radio Chabab: À supposer que ça marchecomme 

vous voulez pour voire groupe, quels SonVos" 
projets d'avenir? s 1 
Youssef: Si vraimtent ça marche, faire dés tour 
nois en France et en Hollande... Et continuera 
s'améliorer, de toute façon. 2 












WENS 
QUE DE 
TÉ PASSE, 
LA BISE. 


























AfAS 5, 
fCOT: 


Street démontre que [a capacité économique d’un 
pays dépend du système d'incitattons et de sanc- 
tions organisé dans l'économie. Le journal rap- 
pelle quelques principes de base du libéralisme 
dont se réclament Jean Gol et autres Nals: 


-Sanctionner ls non-travali en limitant les 
subventions de tous ordres données par PElat 
aux pauvres ci aux chômeurs: 


=Rendre l'investissement plus attractif en 
réduisant les impôts des entreprises et des riches. 


À lobjection, selon laquelle un immigré 
trouve moins facileinent du travail parce que 54 
formation est inférieure à celle des travailleurs du 
pays d'accueil, le Wall Street répond: «On 
l'embauche quand mène car onle paiettrés-peu. 
Et ce «três peu» représenté pour lui unbrevenu 
supérieur à celui qu'il recevait dans son pays d'ori- 
gine. Dès lors que le système d'incitation est ads 
quat, l'immigration est un bienfait pour la pro> 
duction et l’économie d’un pays»: 


On le voit, si le Wall Street semble se permet- 
tre quelques audaces en matière d'immigration, ce 
n'est pas sous l'inspiration subite d'unesympathie 
pour les pauvres et pour les travailleurs. C'estau 
contraire sur base d'une logique ultra-libérale 
incontournable. Le moins qu'on puisse cn penser, 
c'est que, en tout cas, voilà des libéraux Guineris 
quent pas de céder à la tentation facile d'un dis- 
cours électoraliste raciste. La Belgique étant-gau: 
vernéé depuis plus de sept ans par des politiciens 
qui crient sur tous les toits qu’ils sont les-défen- 
seurs les plus authentiques du libéralisme, com- 
ment expliquer l'habitude qu'ils ont prise de met 
tre les difficultés économiques sur le dosud'un 
ccxcés d'immigration»? Serait-ce pour tenter de 
cacher leur propre incapacité à trouver des solu- 
tions nouvelles pour relancer l'économie belge? 





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Adresse de contact: 146, chaussée de Wavre, 1050 Bruxelles 


ALTERNATIVE LIBERTAIRE - ASBI 22 MARS - N° 67 - Novembre 84” Page 13 


(] 
* 
7 


2 


t 124 
[#4 
| . 
{ 





L 


D 































PR International fait état d'exécutions 
massives, de longues détentions de prisonniers 


nee sans jugement ou à l'issue de procès 


sommaires et de mauvais traitements infllgés aux 
détenus. 

Le rapport de 144 pages comporte l'étude du 
cas d'un certain nombre de prisonniers d'opinion 
ainsi qu'un mémorandum soumis au gouverne- 
ment chinois. Armnesty International s'est décla- 
rée prête à publier les commentaires des autori- 
tés chinoises, mais aucune réponse ne lui est 
encoré parvenue. 

Amnesty International constate que l'oppasi- 
tion non-viclente a été éliminée en Chine à la suite 
de la condamnation des militants politiques décla- 
rés coupables de «délits contre-révolutionnairess 
passibles de peines de 10 à 15 ans de prison. 

Parmi les prisonniers, il y a des ouvriers et 
des étudiants qui ont été actifs dans le «mouve- 
ment démocratique qui a fait son apparition en 
Chine en 1978, des prêtres catholiques derneu- 
rés loyaux envers le Vatican ainsi que des Tibé- 


tes. 


Certains procès politiques ont eu lieu à huis | 
| encore, la RTBF répète ce qui avait été dit précé- 
Dans certains cas, les familles n'ont pas été avi | d i 
| avaient demandé à intervenir lors de la session du 


Dans d'autre cas, les prisonniers politiques 


clos, en présence de personnes sélectionnées. 


sées de la tenue des procès. 


sont restés détenus pendant des années sans 
inculpation ni jugement dans des camps de «réé- 
ducation par le tavail:. Certains prisonniers 
auraient été maintenus à l'isolement avec des 


menottes jour et nuit pendant des jours et des | 


semaines; ils auraient été battus et obligés de res- 
ter debout sans mouvement et privés de nourri 
ture pendant 24 heures. 


Wei Jinsheng, rédacteur d'une revue non- 
officielle maintenant interdite, aurait été maintenu 


à l'isolement depuis son procès en 1979, nepou- | 


vant prendre de l'exercice qu'une fois par mois. 
D'après des renseignements parvenus à Amnesty 
international, il Souffrirait à la suite de ce traite- 
ment, de troubles mentaux et aurait été tranféré à 
deux reprises dans un hôpital de Beijing pour y 
être soigné. 

Amnesty International ne dispose pas d'assez 
de renseignements lui permettant d'estimer le 
nombre, de prisonniers politiques. actuellement 


détenus dans les prisons et les camps de travail 


en Chine. D'anciens prisonniers disent qu'il y 
aurait des détenus politiques dans la plupart des 
établissements pénitentiaires du pays. 

Exprimant ses inquiétudes au sujet d'une 
vague d'exécutions massives qui a débuté en 
août 1983 par le lancement d'une campagne 
d'une ampleur nationale contre la criminalité, 
Amnesty International indique que 44 crimes sont 


désormais passibles de la peine capitale en Répu- 
blique Populaire de Chine, parmi lesquels les | 
délits contre-révolutionnaires, les vols, les détour- | 
nements de fonds, les brutalités contre les fem- | 


mes et le proxénétisme. 


Les procédures utilisées lors des procès qui 
ont abouti pendant cette campagne à des con- 
damnations à mort ont été sommaires. 

Les accusés peuvent être traduits en justice 


sans avoir eu connaissance de l'acte d'accusa- | 
tion. Les procédures d'appel ont été supprimées: | 


le rapport cite des cas où les condamnés ont été 
exécutés dans les six jours après l'infraction. 


Amnesty International note que le droit pour | 
une:personne à être présumée innocente jusqu'à | 


ce que sa culpabilité ait êté légalement établie 
n'est reconnue ni en droit, ni en pratique. 


Les exécutions publiques devaient prendre 
finen janvier 1 980 en vertu de la loi sur la procé- 
dure pénale. Or, Arnnesty International cite des 
cas où des exécutions ont encore eu lieu en 
public, après quoi les corps des suppliciés sont 
laissés à la vue de tous. Les exécutions ont lieu 
par la méthode traditionnelle : un coup de feu dans 
la nique de la victime agenouillée. 

Rapport A.l. 

Chine: ÿÆ FEAT Der d'opinion 
et la peine de mort 

en République Populaire de Chine 


E.F.A.l., 144 pages, 130frs, | 






tains accusés de soutenir des groupes nationais- | 









































































































| AM). Voyez LE 














La RTEF, nn... nalsez: ? C est | 
à ag instructif, 





lehtndi28maista ts heures leréiactenret 
présentateur Tom Goldschmid, après une brève 


salade» sur le Nicaragua, parla de «l'injustice du | 
partage des terres réservées à une minorité de pri- 
vilégiés» (*});: mais il a fait mieux encore en affir- | 


mant que les gens qui refusent de participer à la 
reconstruction du pays «sont emprisonnés dans 
des camps à un point tel qu'Amnesty {nternatio- 
nal s'inquiète de la question» (*). 


À ce moment, huit navires de fort tonnage et 
de nationalités diverses (bien sûr... pas améri- 
caine !) ainsi qu'un nombre plus élevé de bateaux 
plus modestes, avaient déjà.été plus ou moins ava- 
riés par des mines, dans les eaux cûtières et les 
ports nicaraguayens. Ce n’est qu'en mai-jluin que 
l'administration Reagan avoua — SOUS réserves — 
sa culpabilité, sa machination infernale. Ce fut 
une «indignation générale»; Mitterrand parla 
d'envoyer des dragueurs de mines et la Belgique 
déclara. qu'elle suivait Pévolution de la situa- 
tion. Pas beau ça? 


Mais la machination de Reagan aurait pu 
réussir par le biais des risques d'une hausse du 
montant des assurances et dès lors la réticence des | 
armateurs à envoyer leurs navires dans cette zone. | 
Fait assez comparabie à celui des risques de navi- | 
gation dans le Golfe Persique, avec la différence. | 
que la valeur du pétrole vaut le risque et le prix de | 


Passurance, ce qui n’est pas le cas du Nicaragua. 
aux yeux des «hommes d’affaires» pour lesquels 
la vie des marins importe peu! 


Le mercredi 10 octobré 84, à ]3 heures 
demment: «deux opposants anti-sandinistes qui 


Tribunal des Peuples ont vu leurs plaintes! décla- 
rées légalement irrecevables» (*). Un de ces repré- 
séntants fut interviewé: expulsé pour seize ans du 
Nicaragua, réfugié aux USA (fallait s’en douter), 
ses propos relevaient plus des grognements.d’une 
vache réactiônnaïre que de la sincérité d’un vrai 


| plaignant. Prudence oblige, la RTBF avait eu le | 
soin de déclarer que les plaintes d'Amnesty Inter- | 


national étaient «plus nuancées». 
Autre plaignant. 


dences curieuses, Amnesty International s'attaque 
à ce pays, en un de ses moments les plus difficiles: 
le minage des ports (mai 84). Ensuite, Amnesty se 
tait pendant de nombreux mois et revient — sans 
succès — à la charge, lors du Tribunal des Peu- 
ples, puis fait parler d’elle peu après à la RTBF, 
mais sans dévoiler ses arguments. 


C'était évidemment une belle occasion, mais | 
on peut se demander si le but réel d’Amnesty n’est | 
pas plutôt de nuire au Nicaragua, fndic: message | 
personnel, bonjour Alex) car la période actuelle | 


— l'approche des élections — est évidemment une 
période dangereuse, d'autant plus que les partis 


d'opposition n'ont pas déposé leurs listes, Pour- | 


tant, tous ont eu le temps: l'inscription des candi- 
dats avait eu lieu du 25 mai au 25 juillet et la cam- 


pagne électorale allait du 8 août au 31 octobre | 


1984. 


En plus de se demander ce que prépare | 
l’opposition, on peut se demander quel est Le jeu | 
| d’Amnesty International qui choisit les moments | 
| les plus difficiles que vivent les Sandinistes pour | 


partir en campagne. Incontestablement, Amnesty 
ne.se manifeste que contre les régimes communis- 
tes — le dernier exemple étant Sakharov... en 


oubliant l’ouvrier ou le paysan qui pourrit aussi | 
au goulag — et aux régimes auxquels on voudrait | 
parce que cela plai- l 
| rait à Reagan et à ses larbins (Tindemans… 
| un record 1). 

| Soyons logiques. Si la CI. A. trafique bien | 
| dans le Coca Cola, les TV, les bananes, les oran- | 
… pourquoi ne pas aussi trafiquer dans le | 


donner une face semblable …. 


ges, etc. 
milieu des «délits d'opinion». Sous le couvert 
d'un mouvement «humanitaire», Amnesty Inter- 
national n'est-elle pas une organisation qui profite 
bien plus à «certains Etats» qu'aux prisonniers 
pour délit d'opinion? 

Dernière remarque: je ne critique pas la 
publicité faite autour de Sakharov, mais je trouve 


anormal que des gens mocestes et des intellectuels | 


aussi souffrent depuis dix ans chez Pinochet, sont 


| disparus dans l'Argentine des généraux, que 
| d’autres achèvent de vivre dans les geûles salvado- 


riennes de Napoleon Duarte, Et-dans ces cas (non 
restrictifs), Amnesty se tait. Alors? bu: 
Claude 


* Citations LS eR car non enregistrées. 





ALTERNATIVE LIBERTAIRE - ASBL 22 MARS - N° 67 - Novembre 84 - Pabe 14 


CSANIOUE, a 


| problème social. La névrose est pla- 


Amnesty International! | 
Comparons les dates d'intervention de’ cet orgä- | 
nisme humanitaire avec celles de la RTBF, du Fri 
| bunal des Peuples (Bruxelles, 5, éet 7 octobre)et | 
les phases diverses de la vie du Nicaragua, Coinci- 


c'est | 


Avec Reich, 


la névrose Sebe: un | 


nétaire. 90% des femmes et 70 à 


80% des hommes sont. malades, | 


atteints de névrose caractérielle. En 
1927, Reich établit ces statistiques 
après enquêtes. Il se lance avec une 
équipe et les encouragements de 
Freud dans l’entreprise de la Sexpol, 
c'est-à-dire la sexologie politique. 
C’est une vaste entreprise d'hygiène 
mentale destinée à faire prendre 
conscience aux masses de leur misère 
sexuelle (cause directe du caractère 
névrotique) et de l’urgent besoin de 
donner à la pulsion sexuelle un maxi- 
mum de chances et de moyens pour 
sADARAUE le plus sainement possi- 
7 | 


Par la suite, l'histoire nous apprend que 
Reich sera chassé des associations psychanalyti- 
ques, trahi par les communistes qui l’avaient 
d’abord fortement épaulé et chassé de l'Allema- 
gne hitlérienne. Reich ne cessera, durant toute sa 
vie de recherche, de thérapeute et d'homme 
d'action, de fonder la névrose et la plupart des 
maladies (surtout le cancer par exemple) sur | 





l’absence de satisfaction sexuelle, rendant urgente. | 
la recherche de moyens pour donner aux gens la | 
capacité naturelle d’aimer que l'éducation a main- | 


tenue complètement sous-développée. 


Exilé en Amérique, et poursuivant son œuvre 
de pionnier, Reich terminera sa vie enfermé dans 


| un pénitencier de Pennsylvanie (pratiquement 
assassiné!) en 1957 pendant qu'on brûlait ses 


livrés par milliers en un immense autodafé dans 
l’incinérateur de Manhattan. N'est-ce pas un acte 
parmi d'autres du maccarthysme? 

Les hommes névrosés ne cherchent-ils pas à 
tuer la vie et ceux qui la défendent trop ouverte- 


= ferrer 


«Je désire qu'en aucune occasion, ni pro- 
chaine, ni lointaine, ni pour quelque motif que ce 
soit, on ne fasse devant mes restes des manifesta- 
tions d’un caractère politique ou religieux, consi- 
dérant que le temps qu'on emploie à s'occuper des 
morts serait mieux employé à améliorer la condi- 
tion où se trouvent les vivants, ce dont la plupart 
auraient grand besoin». F. Ferrer (extrait de son 
testament) 

«Précisément, l4 démence de ceux qui ne 
comprennent pas l’anarchie, provient de l'impuis- 
sance où ils sont de concevoir une société raison- 
nable». F. Ferrer {lors de son «procès» 

«Je n'aurais qu'à prendre exactement le | 


contre-pied de ce que j'ai vécu». F. Ferrer (com- | 
ment fonder L'Ecole moderne?) 


«Anarchistes, nous voulons détruire la pro- | 
piété telle qu’elle existe, parce qu'elle est le pro- | 
duit de l'exploitation de l'homme par l’homme, 
du privilège octroyé par les gouvernants ou du | 
droit du plus fort». 


«Acrates, nousne voulons pas qu’il existe des 
propriétaires de grandes étendues de terrain à côté 
de familles qui n'ont pas où reposer leur corps, 


| nous ne voulons pas d’héritiers de la misère». Æ. 
| Ferrer (in Huelga General, sous le pseudonyme de 


Cero) 


ment? La ME erl Pen Aes À fut f JÉLERET 
















SEXO-P olitique 


combattue par les psychanalystes réactionnaires, 
les socialistes, les communistes, les nazis, les libé- 
raux, bref tout le monde! Pourquoi? Qui est 
parano? Reich (que les auteurs ont traité de fou et 
de paranoïaque) ou les autres, les pouvoirs en 
place? 


r 1 F 
tous bloqués. 

La sexo-politique n'est pas qu'une théorie. 
Elle a déjà ses martyrs. Elle a déjà mordu sur la 
réalité sociale, elle dérange. Elle dérange notam- 
ment nos rêves concernant nos projets de société. 
Si nous voulons une autre société, suffit-il de pro- 
poser un changement de la structure sociale sans 
se soucier du problème que la frigidité endémique 
pase de manière dramatique? La droite comme la 
gauche sont composées de gens sexuellement et 
affectivement bloqués. Alors? Ah si la sexualité 
n'était qu'une sorte de petit pipi sans conséquence 
pour la vie en société, un pipi privé! Mais ce n’est 
pas le cas. Sans avoir la capacité de sentir le plaisir 
de son corps et sans avoir la capacité de sortir de 
soi dans l'amour, que deviennent les couples, 
l'éducation des enfants, la conscience de ses res- 
ponsabilités, la conscierice politique? On a eu la 
malencontreuse idée de croire que Pamour cou- 
paït de la politique, désengageait. Oui, l’idée de 
l'amour, la représentation du bonheur, le rêve, le 
sexe phantasmé, oui, toutes les mystiques écartent 
de la réalité. 


L'amour dont il s’agit ici, c’est du niveau de 
l’éneraie, du plasma, de la cellule biologique, de la 
réalité La plus organique: qui soit, du corps ouvert 
aux autres corps. Seule cette ouverture pourrait 
nous faire augurer d'une société différente. 


Que vaut l'ouverture d'esprit d'un organisme 
fermé? Qu'est-ce que la tolérance d'esprit dans 
des corps violés et violents? Qu'est-ce qu'une thé- 
RD psychologique procure à un corps qui souf- 

re 


Si ces questions vous intéressent, venez en 
débattre avec moi le mercredi Id novembre à 
20h30 au 82 rue Vanderschrick, 1060 Bruxelles, 
tél, 02/537.72.95, Je suis thérapeute reichien 
depuis une dizaine d'années. 


«Si tous ceux qui font atjourd'hui l'éloge de 
Ferrer et de son œuvre s'étaient joints à lui 
lorsqu'il vivait et travaillait, si l’on avait fait pour 
seconder Ferrer vivant toute la propagande par la 
plume et par la parole qui s’est faite pour honorer 
Ferrer mort, si l'on avait réuni alors toutes les res- 
sources que l'on à réunies depuis, certes nous 
n'aurions pas maintenant des places et des prome- 
nades portant le nom du précurseur et du martyr, 
mais nous aurions beaucoup d’écoles rationnalis- 


| tes qui, parlant tous les idiomes du monde et étant 


en relation, auraient été bientôt en mesure de 
reméttre les destinées de l'humanité à une nouvelle 
génération rationnellement éduquée. 

.…. Bt si lon loue Ferrer, c’est peut-être parce que 


| l'on est plié.au routinier culte des morts plus que 


| négation de 


par désir de continuer son œuvre; et ceci est 
d'autant plus vrai que si nous cherchons des idées 
chez ceux qui s’agitent pour honorer la mémoire 
de Ferrer, nous ne trouverons que des politiciens 


| qui préconisent l’enseignement obligatoire laïque, 
| ou des pédagogues qui discourent sur le techni- 


cisme de l'Ecole Moderne, c’est à peine s'ils réus- 
sissent à exprimer une idée, le confondant tou- 


| jours avec le type d'enseignement de l’école laï- 


que: c’est uniquement ainsi qu'ils comprennent la 
l’enseignement religieux 
traditionnel». À. Lorenzo, (anarcho-syndicoliste, 
urdes fondateurs de la CNT, collaborateur et ami 


deiKerrer} Cercle Bakounine 
Coordination libertaire à l'ULB 

8, rue F. Terlinden 

1040 Bruxelles 


AMNESTY: INTERNATIONAL: | LA ROBE ET LE JUPON 



















"1 


QE nn me 





LÉ le 


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Lt mat 





% 300 francs directement à l’asbl 22 mars 

2, rue de l’inquisition - 1040 bruxelles 

téléphone: 02/736.27.76 (de 10 à 18h) 

À 350 francs y compris frais de port 

au compile 22 mars éditions 001-1632181-38 | 


% 420 francs dans les bonnes librairies à 
distribué par nord-sud diffusion: 02/647: 76:07 | 























_ damné 


> - Albert Balencour 
agressions, insécurité,.… en 1984 on tue pour peu d'argent. 
‘arrive plus qu'aux autres. Les haines s'attisent. Face à la 
la Société: la prison. Mettre à l'ombre, isoler, et pour le 
is est-ce vraiment la solution ? Dans «Taule Errance», Albert 


A5, à Forest, à Mons ou à Louvain, Pour Balencour, la prison est un leurre, 
uade pas, elle détruit. Elle ne guérit pas, elle empoisonne. 

alité d’un itinéraire trop banal. Après les homes, Balencour ne connaît que quel- 
is de liberté entre chaque plongeon. Courte respiration. En juin 81, il est con- 
à perpétuité par la Cour d’Assises du Brabant. Le 8 septembre 83, après six ans 





| d'emprisonnement, Albert Balencour est retrouvé mort dans sa cellule. Les circonstances 
de sa mort ne sont toujours pas clairement définies. 


À Quelques mois avant celle-ci, évitant le tamis de la censure, l'auteur nous envoie un 
… manuscrit poignant, précis, complet, intelligent, analysant avec une rare lucidité l'univers 
carcéral belge. Un livre fort. Un réquisitoire sans faiblesse contre l'institution péniten- 
mtiaire. Un document indispensable à ceux qui veulent mieux connaître l'envers des murs. 


22 Mars Editions - asbl 


L'’asbl 22 Mars, un outil d'expression critique. Une association qui pousse à la communi- 
cation. Pionnière dans le mouvement des radios libres pour tendre le micro à ceux qui ne 
l'avaient jamais. Pour faire entendre des voix différentes dans la jungle des ondes. Huit 
ans d'imprimerie pour mieux dire sur papier nos révoltes et nos désirs. «Alternative Liber- 
laire», un journal mensuel, Et puis, une maison d'édition. Hier à l'image du manuscrit- 
témoignage d'Albert Balencour. Aujourd'hui, publiant «L'Fnjure» de Jules Brunin. 


La philosophie de notre démarche d'édition tient en trois points: 

* D'abord privilégier les livres écrits à la première personne du singulier. Des livres qui 
osent dire «je», et, ce faisant, décrivent la trajectoire d'un individu en mouvement dans 
une réalité sociale qu'il transforme. 

* Ensuite, publier des manuscrits qui nous rendent à nos racines. Pour encourager le pas- 
sage de notre patrimoine d'expériences d’une génération à une autre. Pour ne pas répefer 
les mêmes erreurs, les mêmes mythes. Expliquer pourquoi aujourd’hui est sorti d'hier. 
x Enfin, éditer des paroles de chez nous. La Belgique qu’on connaît parfois moins bien 
que la France. Les mille et une vies qui refusent, transforment, construisent, ici et mainte- 
nant, une société différente. 


Ecrivons aujourd'hui ce que nous voulons pour demain. 





Pierre D'Haenñens, Sébastien Houtart, Christiane Vanierschot, 
Roger Noël-Babar, Claire Berge, Catherine Deman 


un texte qui dérange l’ordre établi 


J'imagine fort bien que, pour l'Empereur de Rome, le récit de la vie du 
Christ devait être subversif. Un texte à proscrire parce qu'il dérangeait con- 
sidérablement l’ordre établi. Le livre de Jules Brunin recèle toute la subver- 
Sion qui naît de la conjonctioon amour-souffrance. Il fera scandale. Il sera 
peut-être saisi parce que dans notre société, on ne peut jamais se substituer 
à la justice pour régler ses comptes avec des personnes bien déterminées. 
Et pourtant, on se met à rêver. Ne faut-il pas souhaiter que cet extraordi- 
naire témoignage humain qui suinte des «maisons d'enfants» et des «pri- 
sons» puisse être connu de beaucoup ? 


Souhaiter même que les plus meurtris par ces coups de griffe aient la gran- 
deur de renoncer à leur droit de réplique légitime au nom d’une «diffé- 
rence» qui s'appelle la souffrance d’un homme, et qui mérite parfois qu’on 
fasse semblant de ne pas avoir entendu l’injure ? Pour que l’injure dispa- 
raisse et que ne subsiste que le témoignage forçant la réflexion. Et que 
vienne l'aube d’un monde différent qui comporterait moins d'enfants mal- 
heureux. 

J'ai Pair de plaider. Non. Je me borne à essayer de comprendre. au-delà 
Le injures nées dans la détresse, ce qui ne va pas et ce qu’il conviendrait de 
changer. 


Guido Van Damme 


Il reste une lueur 


Jules Brunin, un nom comme une souffrance qui n’en finirait plus, en 
.déchirant une-vie d'enfant, de lacérer l'espoir d’un homme. 


Jules Brunin’ deux mots parfois Espoir, malgré tout, parce que au fond de 
Millusion noire, du désespoir aveugle, dans toute vie farouche, il reste une 
lueur alors que tout s'éteint. 


Delivre.en livre, Jules Brunin nous conte le malheur. Est-ce le sien ? Ou 
celui de tous ces gosses errant à l'abandon, de home en home, où l’amour 
est une famine de cœur ? 

De livre en livre, Jules Brunin raconte. Il dit des futurs sans avenir ou nul 
matin ne s'éclaire de soleil; des lendemains qui fredonnent des chants de 
prison, qui hurlent, enfin, vers une justice humaine, figée et sourde, une 
colère impuissante. 


Charles-Laurent Gondanoff 











Périodique mensuel 


Supplément à Alternative Libertaire n°67 
Novembre 1984 

2, rue de l’Inquisition, 

1040 Bruxelles - Tél. 02/736.27.76 
Editeur responsable: Noël Roger 
C.G.E.R. 001-1632181-38 





Destinataire: 


Taule Érrance 


d’Albert Balencour 
150 pages 
Préface de Michel Cheval 


300 francs avec frais de port 
au compte 001-1632181-38 


Jules brunin 


Albert Bslencour 


TAULE-ERRANCE 





L’Injure 

de Jules Brunin 

300 pages 

Présenté par Guido Van Damme 


350 francs avec frais de port 
au compte 001-1632181-38 








l’injure 
Jules brunin 


auteur de «l'enfer des gosses» 
à propos de son troisième livre: 


Ecrire, c’est être seul avec soi-même, un très long moment. 
C'est être partagé entre sa vérité et ceux que l’on aime. 
C’est aussi prendre le risque de tout perdre 

en vivant une sorte d’extase fiévreuse 

où les signes et les mots n’ont jamais de fin. 

Avoir élé le témoin de l’intolérable et le garder pour soi, 
c’est vouloir rester solitaire et n'être qu’un lâche 
honteusement accroupi devant son miroir. 

Mais ne pas se taire, c’est par avance accepter de s'assumer 
dans le fragile espoir que d'autres 

trouveront le difficile chemin de la vérité. 

Les angoisses vécues filtrent 

au travers du prisme de la douleur 

à l'instant même où celle-ci est la mieux ressentie. 

Dès lors s’imprime un langage aigu 

marqué de l'empreinte indélébile 

de celui-ci, porté au paroxysme. 

Mes souffrances, leurs souffrances, ont été intolérables 
et nous en garderons les stigmates notre vie durant. 

À la lecture du présent ouvrage, que chacun réagisse 
selon ses conceptions, ses préjugés et sa conscience. 
Quant à la mienne de conscience, 

que l’on se rassure, elle se porte bien. 


Jules Brunin 








— > | 
x el =, 
n avec ce 


t avec Napo- 
hilosophie de la misère 





creuset de l'idéologie fasciste en 
France. 


du côté liber- 


Dès ses origines, l'Action française consi- | 


dère l’auteur de Philosophie de la Misère comme 
un maître. Le philosophe tient une place de choix 
dans la chronique hebdomadaire précisément inti- 
tulée Nos Maîtres. Cette place que lui consacre 
l'Action française, Proudhon la doit, bien sûr, à 
ce que les maurrassiens considèrent comme son 
anti-républicanisme, son antisérmistime, sa haine 
de Rousseau, son mépris pour la Révolution, la 
démocratie et le parlementarisrne, son apologie de 
la nation, de la famille, de la tradition et de la 
monarchie (Ni droite, ni gauche, Zeev Sternhell - 
Seuil, page 71). 

Succulent pour un anarchiste? Non! De plus, 
il n’a jamais été apprenti mais propriétaire d’une 
imprimerie qu'il vend en 1843. Le 4 juin 1848, il 


dur, dur..." 


La lecture de l’article sur l’objection liber- 
taire m'a profondément marqué pour cause que 
cela rejoint mes pensées, Mais voilà, j'ai un gros 
problème, c’est que je suis un penseur né et pour 
libérer toutes mes pensées, c'est dur, très dur. 
Comme dit mon paternel: «Quand oseras-tu 
t'exprimer?». Bonne question, mais de là à la 
mettre en pratique, c’est autre chose (sauf quand 
j'ai bu un verre...). 


Ce n’est pas la peur de m’exprimer, c’est que 
cela ne veut pas sortir. Je suis, en d’autres termes, 
un taiseux de nature. Est-ce que cela se guérit ? Si 
vous connaissez un remède, vous me libèreriez 
d'un immense boulet que je traîne depuis long- 
temps, 

C'est un rêve, ou plutôt un profond désir, 
que de m'exprimer librement, Vous ne pouvez pas 


savoir comme aime écouter des gens sensés, lire | 
des choses sensées, écrire des: trucs sensés. Mais | 


pouvoir faire sortir mes idées sensées (7), cela 
serait génial. Enfin, cela arrivera peut-être un 
jour. 


La lecture d’Alternative Libertaire me fait 
comprendre beaucoup de choses qui restaient 
pour moi un point d'interrogation. Maïs il y a des 
points de l'idéologie libertaire qui me semblent 
fort utopiques. Est-ce que je comprends mal? A ce 
sujet, j'aimerais avoir plus d'informations sur 
cette idéologie (par exemple des titres de bouquins 
qui m’aideraient à mieux comprendre — nd: 
pourquoi ne pas passèr un de ces jours à 
l'Alliance Libertaire ?}. De toute facon, dans mon 
genre, je me considère comme marginal mais un 
marginal assez limité dans ses actes. Je suppose 
que la peur de l'autorité y est pour quelque 
chose. 

Philipper Charlier 
dit «Fe» 


vOS droits 


Souvent désorientés face à des légis- 
lations compliquées et à des institu- 
tions rebutantes, des jeunes — de 
plus en plus nombreux — onf pris 
l'habitude de s'adresser au C.J.E.F. 
(Conseil de la Jeunesse d’Expression 
Française de Belgique) pour recevoir 
conseils et informations. 





C'est pourquoi il a décidé d'éditer deux 
dépliants, l’un portant sur l'apprentissage dans les 
classes moyennes, l’autre — d'une brûlante actua- 
lité — sur la prolongation de la scolarité. 


Ces deux dépliants sont distribués gratuite- 
ment sur simple demande auprès du secrétariat du 
C.J.E.F. 


«Apprenti, avec nous défends tes droits» 
répond à diverses questions relatives au contrat 
d'apprentissage. «Que faire de l’obligation sco- 
laire... quand on a entre 14 et 18 ans?» passe en 
revue les diverses possibilités qui s'offrent aux jeu- 
nes soumis à l’obligation scolaire: temps plein, 
ternps partiel, formation, apprentissage... 

C.J.E.F. 

78, Galerie Ravenstein 
1000 Bruxelles 

Tél. 02/513.94.40 


Ext. 45 ou 39 
ALTERNATIVE LIBERTAIRE - ASBL 22 MARS - N° 67 - Novembre 84 Pages 


| un exemplaire à chaque secrétariat d’organisa- | 





est élu à Paris à l’Assemblée Nationale! En 1849, 
il se réfugie en Belgique, condamné par les Assises 
de la Seine. Mais il a le mal du pays (!}, retourne à 
Paris et s'y fait arrêter. Il reviendra en Belgique, à 
Bruxelles, de 1858 à 1862. 


En 1851, il publie Zdée Générale de la Révolu- 
rion au XIX® siècle, qu’il dédie par ces mots: «…. 


A vous Bourgeois, l'hommage de ces nouveaux | 


essais; vous fûtes de tout temps les plus intrépides, 
les plus hardis des révolutionnaires». Pas mal 
pour un anarchiste? Non! pal 

Olivier 


singes 
dangereux 


J'ai beaucoup apprécié vos pages sur Le Pen. 


schaer beek-sur-misèr 


e Tiroirs vides, ventres creux. Quand les fascistes boivent, le 


quent. 


+ Depuis le 10 septembre, le Centre Public d'Aide Sociale de 

ne paie plus le minimex (minimum d'existence) à quelque 1\ 

et isolés. Ces personnes se refrouvent ainsi sans ressources. L. 

des Finances saisit des sommes dues par l'Etat au C.P.A°S: pourre 


vrer des arriérés de sécurité sociale. Me 
e Pour faire face à la situation, des organisations de charité (telles Sa nt- 


Vincent de Paul, les Petits Riens) apportent une aide matérielle aux, 
nécessiteux. Voici revenue l’époque des dames patronnessesL'aven | 
incertain. Verrons-nous directement le XXI° siècle ou referons-nous "un. 


petit détour par le XIX°? 


mais je me méfie malgré tout. Certes, ni Hitler ni Ÿ 


Bénito n’ont débuté ainsi, 


Par contre, d’après des informations enten- 
dues (notamment de mes parents), cela ne me 
semble pas étranger aux tout débuts de Degrelle: 
ridicule d’abord, mais qui fit un «boum» peu 
avant 1940. C’est l'attaque allemande qui a poussé 
beaucoup de rexistes à faire marche arrière, Mais 
sans cette attaque, il reste probable que le rexisme 
aurait encore gagné des voix. 

Or la période actuelle — malgré de nettes dif- 
férences — évoque malgré tout la lutte de 
l'extrême-droite contre toute formation centriste 
ou gauchiste (mal définies) ou anarchiste relative- 
ment analogues à celles qui ont conduit au «Front 
Populaire» en France. 


Les Le Pen, Gol et autres singes dangereux ne 
seraient-1ls pas — avec Nols et Simonet — les 


rejets maudits de toutes les grèves de France et | 


d’ailleurs : aussi bien mai 68 que nos grèves 1919- 
1921 où la grève des tramways fut généralisée et 
aboutit à la création de l’«Union civique belge» 
dont le seul but (avec l’armée!) fut d'essayer de 


comportement actuel de «nos» concitoyens, 
l’aisance de certains, je ne serais étonnée de rien. 


P.S. - Je me réjouis d'en apprendre sur | 


«l'Association des Jeunes Marocains de Molen- 
beek», C'est ma commune et je sais trop lopinion 
des Belges. 

CI. 


e . GE 
tout Savoir Fier 
s .e.e 
La Confédération des Organisations de Jeu- 
nesse, indépendante et pluraliste, (COJ) a réalisé 
un Fichier Technique d'information destiné aux 
responsables des quelque trois cents organisations 
de jeunesse et centres de jeunes reconnus par la 
Communauté Française, Ce fichier se veut une 
réponse concrète aux questions que se posent quo- 
tidiennement ces responsables dans la gestion de 
leur organisation: où s'adresser pour une aide à 
l'animation, la formation; un prêt de matériel, 
subside en équipement, un échange de jeunes, 
etc..; quelles formalités respecter lors de la créa- 
tion d’une asbl et pendant son existence; comment 
conclure un contrat de travail; comment intro- 
duire un projet dans le cadre de nombreux circuits 
parallèles du travail (CST, TCT, FBI, etc...); 
comment tenir une comptabilité, établir un bilan, 
etc; quelles sont les différentes structures interna- 
tionales de la jeunesse? 


Subsidié par le Conseil de la Jeunesse 
| d’Expression française (C.J.E.F.) et le Service de | 


la Jeunesse, le fichier sera envoyé gratuitement en 


tions de jeunesse, de centres de jeunes et, par 
extension, aux secrétariats d'organisations d’édu- 
cation permanente des adultes. 


Pour obtenir des exemplaires supplémentai- 


| res, introduire une demande auprès de 


Brigitte Mertens | 


Service de la Jeunesse 
Galerie Ravenstein, 78 
1000 Bruxelles 


LE PEN, NOLS, GOL.... DES SINGES DANGEREUX 


du poison 
pour le tiers-monde 


briser cette grève, parfaitement légitime. A voir le LEE RE 
| Jusqu'à présent, la loi arnéricaine 


interdit l'exportation de médica- 
ments et de produits prohibés aux 
U.S.A. La Food and Drug Adminis- 
tration, l'organisme 
d'approuver les nouveaux produits 
introduits sur le marché arnéricain, 
exerce un contrôle très sévère et veille 
soigneusement sur la santé des con- 
sommateurs américains. 


Sous prétexte de créer des emplois et avec 


| l'appui de l’administration Reagan, un projet | 
| d’amendement, suscité par les firmes pharmaceu- | 
tiques, a été déposé au sénat par les sénateurs 


Edward Kennedy et Orrin Hatch. [l autorise la 
fabrication et l'exportation de produits pharma- 
ceutiques interdits aux U.S.A, pour autant que le 
pays importateur soit doté d'une autorité compé- 
tente en matière d’enregistrement des médica- 
ments, reconnue par la F.D.A. ét que cette auto- 
rité autorise l’importation de ces produits. En 
l'absence d’un tel organe, on procëdera par analo- 
ge avec un pays reconnu et c’est la F.D.A. qui 
aura soixante jours pour prouver que le produit 
risque de porter préjudice à la santé de la popula- 
tion de ce pays. C’est donc la F.D.A. et non plus 
l’exportateur qui devra, dans un délai très court, 
prouver l'inacuité du médicament. 


Les pays du tiers-monde sont déjà surchargés 
de médicaments inefficaces, superflus, chers, 
voire même dangereux et interdits dans leur pays 
d'origine, alors qu’il y a une carence grave en 
médicaments de base essentiels. Ïl nous faut réa- 
gir, la santé des peuples du tiers-monde en 
dépend. Cette loi, une fois votée, ne pourra 
qu’aggraver la situation et prêter à des abus. De 


| plus, elle créera un grave précédent alors que la 


plupart des organismes internationaux (ONU, 
Parlement européen, OMS) légifèrent pour l’ins- 


tant en vue de mieux contrôler la qualité des. 


exportations vers les pays du tiers-monde. 


chargé. 


food and drug administration 


Grâce aux multiples réactions venues de 
Pétranger et des Etats-Unis eux-mêmes, le projet 
n'a pas été voté. Il est urgent d'écrire aux séna- 
teurs Kennedy et Hatch pour leur faire part denos 
préoccupations à ce sujet, manifester notre 
inquiétude et leur demander de relire cet amende- 
ment dans l'intérêt des peuples du”tiers-monde. 
Ces lettres peuvent être envoyées à l'adresse sui- 
vante: 

Senator Orrin Hatch 
Senator Edward Kennedy 


U.S. Senate | -Sud Solidarité 
Washington DC20510 Ts de Londres 
U.S.A. 1050 Bruxelles 





chômeur 


droits 
SOCIAUX 


| «Calcul et taxation des allocations de 


chômage», tel est le titre de la bro- 
chure que vient d'éditer «Promotion 
des Droits Sociaux». 


La première partie de cette brochure 4 pour 


but de montrer comment se fixe le montant des 


allocations de chômage. Celui-ci dépend de trois 
éléments : la dernière rémunération brute, la caté- 
gorie à laquelle appartient le (la) chômeur(se), 
c'est-à-dire: chef de ménage, 
cohabitant(e), la durée du chômage. 

En deuxième partie, la brochure aborde"le 
problème du nouveau mode de taxation des allo- 
cations de chômage en vigueur depuis le 1°" janvier 
1984. 


Promotion des Droits Sociaux 


rue de la Porte Rouge, 4 


1000 Bruxelles 


Tél. 02/512.71.57 





isolé(e), + 














14 
Rare 
ICT 
ee. 
LTÉE 
AL 


[l 
Ë 





Je prostitue mes pensées pour un salaire 
d’illusion à me faire croire que…; je prostitue mes 
\ pas et mes actes pour.un salaire de misère, pour un 
k salaire d’utopie à croire que là-bas, tout là-bas, les 
L choses de la vie iront nettement mieux, probable- 
ment mieux, du moins toujours mieux qu'ici. Là- 
bas, ça doit toujours être meilleur qu'ici. À peine 
ai-je fini de penser cela que déjà me monte au 
cœur un goût marqué d'incertitude, Je connais 
bien, même très bien, la puissance destructrice du 
rêve et celle du mirage de l’espoir. Le prix à payer 
ici est lourd de conséquences, Ici, au rembourse- 
ment du rêve et de l’espoir, pas de crédit. La souf- 
k france et la désillusion se paient cash d’une mon- 
naie en constante réévaluation. 


Elêner et se dissoudre dans cette masse 
k gluante et aveugle. 


Mourir dans cette masse stupide et répu- 
gnante, pourquoi pas ? 


Où trouver en ville un endroit stratégique 
lorsqueipris d’une certaine nausée, d’un certain 
dégoût profond de ce qui nous entoure, de ce qui 
nous agresse, l'envie brûlante de vomir la moindre 

, des choses que l'on touche, regarde, nous prend 
avec force au point de se voir submergé brusque- 
ment par une tempête de larmes? Où ? Où, sinon, 
dans les W.C. publics, Malheureusement là aussi, 
il nous faut faire attention, car en toute vraie 


DAS 


&) 
























est pas très conseillé d'y rester trop 
ns quoi on vous prendra pour un 
lésaxé de première catégorie, «Que 
faire si longtemps enfermé dans les 
homme-là?», sé demandera Madame 
hiottes c'est pas fait pour chialer mais 
bienpour chi... Dans ce monde où tout est vitesse 
et cadence, production et consommation, les 
W.C. eux-mêmes doivent avoir un rythme de pro- 
duction et de consommation, pour ne pas dire une 
cadence soutenue — il n'y à pas que les boulons 
qui se font à la chaîne —, sinon la rentabilité de la 
lunette ne nourrirait plus son homme, plutôt sa 
femme. Les W.C. sont là pour se vider de la phase 
bucale de notre existence, ils ne sont pas là pour 
les constipés de la soupe quotidienne. Non, pour 
eux, il existe une autre sorte de cabinet. 


Ce n'est pas du coryza dont souffre le trou- 
peau, mais d'un état de sénilité profond et mal- 
heureusement permanent, à se demander s’il existe 
vraiment une différence entre un troupeau de 
bovidés et un troupeau d’homidés ? 


Le premier avance et l'instinct grégaire fait le 
reste. 


Du reste, les éleveurs y trouvent leur juste 
compte; alors pourquoi vouloir changer quelque 
chose à cet état de fait, puisque tout est bien dans 
le meilleur de leur monde. 


Lorsque par hasard il y a surplus de viande 
par rapport aux capacités des infrastructures du 
pluricontrôle, «ils» s’arrangent entre eux pour 
organiser des corridas et des jeux de cirque à 
grande échelle, pour ne pas dire à l’échelle mon- 
diale. Le troupeau s’en ira une fois de plus, les 
oreilles pleines de chansons stimulantes et glandu- 
laires, du plomb plein la cervelle vers un avenir 
sans devenir. 


Le troupeau est une entité amorphe, qui ne se 
connaît plus d'envie. Il évolue dans une transe 
quotidienne rigide et monochrome vers des jours, 
des semaines, des mois et des années désertiques. 
Le troupeau broute n’importe quoi par réflexe. Il 
trouve de nouvelles saveurs 14 où il n’y en a pas, là 
où on lui dit d’en trouver. 

Non content d’être sourd et aveugle, il peut.se 
vanter d’être stupide et lâche. 


Il me revient une histoire à la mémoire, celle ls 


d'un singe de cirque qui, un jour de représenta- 
tion, refusa purement et simplement de faire son 
numéro. Sans paniquer, le dresseur lui présenta 
une banane; l’animal ne broncha pas d’un poil. Le 



















jouets. | : 
Le M.A.E.P., se référant à la résolution 
adoptée le 13 septembre 1982 à Strabsourg par le 
Parlement européen, interdit pour cette Foire les 
jouets de guerre «répliques exactes» et de science 
fiction. À 2 


Animation prévue tout au long de cette mati- 
née: stands d'info, musique, théâtre, affiches... 


Pour renseignements complémentaires: 
02/672.36.59 (le soir), 673.52.01 (en soirée), 
672.66.84 (la journée), 523.80.80, ext. 2694 (de 9 
à 12h). 

M.A.E.P. 
71, avenue Schaller 
1160 Bruxelles 


au £gu é protéines 
Parmi les prochaines activités du Gué, Centre 
Thérapeutique et Culturel, pointons : 
-le vendredi 23 novembre à 20h: André, Lydia et 
leurs amis musiciens folks animeront une soirée 
avec leurs guitares: ragtime, bluegrass, irlandais, 
blues, ainsi que nombreux autres styles et rythmes 
endiablés, 


-le mercredi 5 décembre à 20h: Frère des Hommes 
présentera un film sur le problème de l’alimenta- 
tion: La faim, moi jamais ou l'étrange voyage des 
protéines consacré aux cultures extensives dans le 
Tiers-Monde, au gaspillage qui nous rend mala- 
des. Le cas des circuits de la viande est exemplaire 
du mal-développement alimentaire mondial. 


Le Gué asbl 
300 chaussée de Roodebeek 
1200 Bruxelles 
Tél. 770.53.97 
VE ON 1 r 


ki E5 


dompteur lui en apporta une seconde, après quoi Is0# 


le bestiole effectua son travail, et le brave public 


pris dans le jeu de la supercherie applaudit cette È 
belle prouesse, se disant que l’animal était quand 


même bien malin. 
Le troupeau rêve, Il veut de plus grandes mai- 


sons, des loisirs mieux guidés et mieux organisés, 


une alimentation industriellement plus saine. On 


lui apprend à vouloir ce qu’on veut bien lui don- 


ner, et le voilà criant victoire. 


Les Hommes du troupeau sont devenus des 
somnambules, ne connaissant plus leurs propres 
{ 


désirs. 


L'Homme du troupeau est quelqu'un de 
dépossédé, même son ombre ne lui appartient 
plus. Il ne découvrira son ombre que si on le lui 
permet, et si par un cruel hasard il la découvre, il 
se rend compte qu'il est en train de perdre la subs- 
tance de son corps. 


L'homme du troupeau n’est, ni ne pense, il 
fonctionne, 


Serait-il à bout de course? Est-il à la fin d’une 
ou de sa trajectoire? Combien de temps encore 
ira-t-il déambulant dans ce bourbier, dans ses 
décombres de vie, dans ses débris de rêves sans 
formes ? 


Pourtant l'Homme du troupeau se dit heu- 
reux grâce à Dieu, car il travaille, produit pour sa 
progéniture. et ses maîtres, ainsi gagne-t-il le droit 
de vivre. Soumis, il travaille comme uñe bête toute 
sa vie pour en fin de compte se payer une belle 
mort. En fait, au plus il aura travaillé, et bien tra- 
vaillé, au plus ses cons-citoyens lui feront un bel 
enterrement, allant même jusqu’à se rappeler avec 
une certaine émotion tous les bons côtés de ce der- 
nier; ils iront même jusqu’à l::i trouver des quali- 
tés de dernières minutes. 

Le salaire du troupeau; une vie stupide avec 
la possibilité d’un bel enterrement! 


Et moi, que me reste-t-il dans cette fatalité de 
tous les jours, vais-je marcher et beugler au 
rythme de ce troupeau dont je fais initialement 
partie? Vais-je fermer les yeux et gentiment brou- 
ter, ou prendre le risque de repartir, le cœur et le 
cerveau déchirés et en lambeaux? 


Pour le moment, je vais me rouler un stick et 
me fondre dans les bras de Morphée. Un peu de 
cendre sur le coin de la bouche et la nuit douce- 
ment recouvre de son manteau pourpre 
L'Eta...ble, où le troupeau sommeille d’une nui- 
téc sans rêves. 

Camille 


- ASBL 22 MARS - N° 67 - Novembre 84 - Page 16 








guerre froide 


LJ 
1°" mai 
Le Comité du 1° Mai a été fondé le 1° mai 
1977 pour sensibiliser la gauche et l'opinion démo- 
cratique belge aux problèmes de la répression et de 
ja dissidence dans les pays de l'Est. IlLa, au cours 
des sept années écoulées, déployé demultiples 
activités, avec des hauts et des bas: forum intérna- 
tional début 1978, solidarité avec la Charte 77 puis 
avec la Pologne, bulletin «D'’Ici d’Est», etc... 


Aujourd'hui, la situation a fortement évolué: 
1°les contradictions et les crises à l’Est se sont 
multipliées. La voix des dissidents autrefois peu 
entendue est largement écoutée désormais en 
Occident. L'image de l'URSS s’est profondément 
dégradée dans l’opinion, y compris de gauche, 
surtout depuis la Pologne et l'Afghanistan; 
2° un climat de guerre froide s’est installé dans les 
relations Est-Ouest. L’antisoviétisme — que nous 
réjetions dans notre manifeste de 1977 — est 
devenu un leitmotiv, non seulement pour la droite 
mais pour une partie de la gauche notamment 
intellectuelle, qui nous invite à faire front devant 
le péril totalitaire et militaire incarné par l'URSS: 
3° simultanément, les préoccupations de crise chez 
nous ont partiellement détourné l'attention des 
mouvements politiques et syndicaux de ce genre 
de problèmes (libertés à l’Est) pour lesquels est né 
notre comité, 

À situation changée, réflexion nouvelle: com- 
ment nous situer ? Que faire? Où en sont les diver- 
ses composantes de la gauche face au «socialisme 
réel» et à la tension Est/Ouest? 


Ces questions seront évoquées au cours d'une 
sorte d’assemblée «baromètre», le 24 novembre à 
14 heures. 

Comité du 1° Mai 
Av. du Bois de la Cambre, 16 
1170 Bruxelles 


mort 





… enterrement 


L'homme cache sa mort 
comme il cache son sexe 
comme il cache ses excréments 
Edgard Morin 
Même devant la mort, il n’y a pas d'égalité, A 
ma gauche, les fossoyeurs, la classe ouvrière; à ma 
droite. En fait, il n’y a qu’une sorte de mar- 
chands: entrepreneurs de pompes funèbres, pré- 
tres, communes. Sous couvert de services, ils 
visent le profit et devant une famille en détresse. 
obligée de consommer... 


Toilette du défunt, mise en bière, faire-part et 
annonce, cercueil, capitonnage, poignées, garni- 
tures, Croix, fleurs, plaques, funerarium, chambre 
funéraire, permis d’inhumer, transport, etc. 
c’est l'entrepreneur (à choisir librement et sans se 
presser). 


Messes, lectures saintes, bénédictions, ser- 
mons et ringningnin, c’est le curé (à éviter). 


Concession de sépulture (*), transfert, urne 
des cendres, etc... c’est la Commune. 


Tout cela est-il indispensable ? Pas vraiment. 
Moi, je me passerai du curé ét du bazar macabre 
«offert» par les vautours de la mort. Il y a moyen 
de simplifier, Mozart a bien été à la fosse com- 
mune. il y a moyen de supprimer le tape à l'œil, le 
superflu et une série de convenances, rites et tradi- 
tions. Savez-vous par exemple qu’en France, 
depuis mai 1976, il est possible de transporter un 
corps sans cercueil dans son propre véhicule, de 
l'hôpital à son domicile, dans un rayon de 200 km 
et durant 18 à 36 heures, si des soins de conserva- 
tion ont été effectués. On peut également véhicu- 
ler soi-même un cercueil avec l'autorisation du 
maire; il faut payer une taxe. de sortie à la com- 
mune où a lieu le décès ainsi qu’une taxe d’entrée 
à celle où doit avoir lieu l’inhumation! Les morts 
ne votent pas, cet appel à l'égalité devant ja mort 
restera donc lettré morte. 


(*) Pas d'égalité, pas de justice dans les taxes pour 
concession, Cela peut aller de 200 FB les 2m° dans 
une commune rurale à 30.000 FB, voire: plus en 
ville... Où l’on voit des snobs, radins des villes, 
acheter une concession dans un charmant petit vil- 
lage. En Italie, à Rozzano, deux gratte-ciel de 
vingt étages accueillent quelque 15.000 
dépouilles..… la recette pour monter enfin dans 
l'échelle sociale. 


PS, À Voir: Des Morts de Thierry Zéno, film 

sur les rites qui accompagnent la mort. 
Baud’huin Simon 
Alias <R» comme R 
de dispersion des cendres 
71, rue d'Hoffschmidt 
6720 Habay 





sexisme 


embauchez 
des mâles 


Le saviez-vous? L'arrêté royal du 24 décem. 
bre 1968 sur le travail des femmes (Moniteur 31 
décembre, Err. 6, février 1969, art. 1°), après mai 
68 donc, est toujours d'application et stipule qu'il 
est interdit d'occuper des travailleuses aux travaux 
énumérés ci-après : 


1° les travaux de peinture comportant l’usage de la 
céruse, du sulfate de plomb ou tout produit conte- 
nant ces pigments, pour autant que ces produits 
renferment plus de 2 p.c. de poids de plomb cal- 
culé à l'état métallique; 
2° les travaux comportant le transport manuel de 
charges dont le poids excède 27 kg. On entend par 
transport manuel de charges au sens de la présente 
disposition tout transport où le poids de la charge 
est entièrement supporté par une seule femme, y 
compris Le soulèvement ou la pose de la charge; 
3°%les travaux comportant le transport manuel 
régulier de charges dont le poids excède 15 kg. On 
entend, au sens de la présente disposition, toute 
activité consacrée de manière continue ou essen- 
tielle au transport manuel de charges ou compor- 
tant normalement, même de manière discontinue, 
le transport manuel de charges. I! faut 4,6 fem- 
mes pour soulever un malade de 70 kg. donc les 
infirmières ne peuvent soulever des malades adul- 
tes, Embauchez donc des mâles et renvoyez les 
femelles à leurs casseroles. 
4°les travaux manuels de terrassement, de 
fouille et d'excavation du sol; 
les travaux manuels effectués dans les caissons 
à air comprimé. 
Organisation Populaire 
contre l’ Arbitrage 
1030 Bruxelles 


PROSTITUER SES PENSEES POUR UN SALAIRE 











EN ‘do , où VFILAIT ” 


octobre 84 
vu par patrick 





prqee 








HET 


cartoon: en décembre, 







anniversaire: le 1! novembre, 


à ÿ 5 DE MERS 
salut au drapeau dans les écoles et les églises «crayon noir» sur l'orwellienne a 
en janvier 85 notre dossier spécial des idées, des sensations, des répu 


sur l’insoumission et l’objection… une lettre par la poste, pari 


IRA TARUZELSKI GANDHI 





GENDARME 





vs 






En D 7: 
Le ZA", JE 283 


” ÊEe à 








économie: après la manifestation 
devant l'ambassade du chili à bruxelles, 






exportation de flics bruxellois vers santiago ? 


haute finance: 
la bbl lache la sidérurgie wallone 
et investit dans la bande dessinée; spirou, 
nouveau larbin.. du banquier albert frère 






















gravure + écriture 
= édition 


Dans le cadre des activités de l'Académie 
Internationale d'été, une expérience: 
Gravure + écriture = édition. Dans-un-climat 
de liberté totale au niveau.de la création”, les 
stagiaires réaliseront des images et des textes 
sur un thème commun qu'ils auront choisi 
ensemble et en feront une édition. 





Les animateurs sont: Michel Barzin poursla 
gravure et Michèle Beaujean pour l'écriture: 
Tout le travail se déroulera dans les locaux de 
l’Académie des Beaux Arts de Verviers du 26 
au 30 décembre prochain. 


L'hébergement est assuré dans le domaine de 
Séroule, Logés, nourris, heureux, le tout 
pour 4.000 francs. Que voulez-vous de plus? 
Académie Internationale 

d'été de Wallonie 
15, rue de l’Eglise 
6930 Grupont 











élections américaines: en jouant.au yo-YO 
avec le dollar, reagan fait ses armes 
sur mondale 





| 






fric frac: 







k. tous les partis allemands 
mouillés par les pois de vin, 
œ helmut kohl bientôt noyé? 






escadrons de la mort: 
jaruzelski débordé 
Sur sa gauche-droîite 
gauche-droite, gauche-droite… 







_—— 








eme side 






cosa nostra : 
les capos de la mafia 

se mettent à table’ 

et font tomber des têtes. 


gouvernementales ? 70h = 
Ô 


67 - Novembre 84 - Page 17 









PIF PAF POUF, LES CHEFS D'ETAT TOMBENT COMME DES MOUCHES ALTERNATIVE LIBERTAIRE - ASBL 22 MARS -: 














arr y 


ctobre, nous consacrions 
ence donnée en mars der- 


et Anarc >, Ce texte nous avait 
reconstituer au fil des siècles le chemin 
ne série de personnalités à la fois liber- 
t maçonnes. Son seul défaut, qui était sa 
é même, était de nous parler de l’histoire, de 
ter silencieux sur la situation actuelle des anar- 
istes maçons. 
est cette lacune que nous comblons aujourd’hui 
- reproduisant une interview d'une franc- 


4 rement sur la misogynie d’une certaine franc- 
| maçonnerie. 

Ensuite, pour compléter notre enquête, nous avons 
1 rencontré un anar-maçon des années 80. Pour la 
\ facilité, nous l’appelerons «Paul». Il est membre du 
u «Droit Humain», cette obédience fondée au début 


de ce siècle, séparée du Grand Orient sur la ques- 
tion pour eux et pour elles fondaméèntale de la 
mixité. Pour mieux cerner notre interlocuteur, nous 
à dirons qu'il a un passé de militant activiste, C’est 
par le crochet du mouvement communiste qu'il a 
; adhéré aux opinions libertaires. Avouons que les 
cocos l’ont poussé dans le dos: il fut exclu du Parti 
Communiste pour non-suivisme patenté de la juste 
ligne. Une graine d'autonomie de pensée qui sem- 
blait tout naturellement le conduire vers les rivages 
anarcho-maçons.…. Babar 


è 


«Tous 

les maçons 
occidentaux 
sont d’accord 
sur un point : 
la défense 

de la laïcité» 





F 


Alternative Libertaire: Léo Campion nous a 
dressé un tableau idyllique historique des relations 
entre l’anarchisme et la franc-"naçonnerie. Y a-t-il 
encore une place aujourd’hui pour les.ararchistes 
dans la franc-maçonnerie de 1984? La rencontre 


du 19° siècle est-elle due aux circonstances du 
moment ou est-elle dans ses principes mêmes tou- 
jours d'actualité? Pourquoi toi, libertaire, es-tu 
entré dans une loge ? Quelle est pour toi la zone de 
rencontre entre les deux? | 
Paul: En fait, peur moi, la FM est un lieu de ques- 
tionnement, de culture du doute. Un lieu où tout 
peut être dit, où toutes les idées toutes faites peu- 
vent être remises en question dans le cadre d’un 
rituel particulier, C’est un lieu où je me suis senti 
accepté tel que j'étais, anarchiste, avec mes idées 
précises, bien ancrées en mai... C'est un lieu de 
dialogue avec les autres, d'échange idéal, de déve- 
lopperment personnel. Ce que je te dis là, c'est déjà 
t'expliquer la zone de rencontre immédiate entre 
anarchisme et franc-maçonnerie. Le refus de tous 
les dogmes, de toutes les vérités toutes faites, sur 
mesures. Une façon d'aborder la réalité de 
manière assez sereine, Une façon de rérnettre en 
cause les rapports autoritaires d’une société que 
nous refusons,. 


une structure 
4 rs Li 

où le pouvoir 

.° à» ana AE né 
n’est jamais définitif 

La structure de la loge est une structure démocra- 
tique, dans le sens libertaire de la «démocratie 
directe», Le pouvoir n'est jamais acquis définiti- 
vement par quelqu'un sur le dos des autres. Par 
exemple, les responsabilités jusqu'au plus haut 
niveau ne sont déléguées à des individus que pour 
une période maximum de deux ans, jamais renou- 
velable, Cette démocratie absolue a aussi ses exi- 


gences: le «vénérable maître» d'une loge, même 


s’il est des plus brillants, ne pourra l'être que pour 
une période de maximum deux ans ét ce une 
seule fois dans sa vie. Une manière de provoquer 
la rotation obligatoire pour les postes de responsa- 
bilités. Une façon de Abnner à chacun la possibi- 
té de se découvrir, de se réveler à un poste de 
«pouvoirs. Une obligation de retour à la base 
aussi, pour ceux qui l’ont assumé, Une attitude 
pas très sécurisante pour des individus qui ont tou- 
jours été habitués à obéir dans le cadre précis 
d’une hiérarchie, en famille, à l'armée, au 


Pourquoi je Suis franc-maçonne 





Paul: Le projet de société libertaire égalitaire n'est 
effectivement pas celui de tous les F.M. D'autre 
part, soyons lucides et constatons que tous les 
mouvements sociaux déterminants ne sont pas 
lancés par des «masses égalitaires» mais le plus 
souvent par des minorités «éclairées». Ce n'est pas 
être élitiste que de constater cette vérité. Rappelez- 
vous mai 68 et le petit noyau d'étudiants de Nan- 
terre qui provoquérent les événements et la grève 
générale, Leur mouvernentn'était pas celui d’une 
éhte et c’est pourtant un tout petit groupe qui l'a 
lancé. 


Je dois cependant à la vérité de dire qu'il n’y a pas 
des masses de travailleurs manuels ou de chô- 
meurs dans les loges, C'est certain que, sociale- 
ment, on y trouve plus de professions libérales ou 
d'enseignants que de plombiers... Ce n’est pas une 
volonté délibérée de notre part. C’est souvent dif- 
ficile pour moi de le vivre, Je veux dire que c'est 
très ambigu. La lutfe pour la justice sociale et 
pour le bien-être collectif est une lutte fondamen- 
tale, indiscutablement, mais l'expérience nous 
montre que donner la priorité aux changements 
de structures sans changer l'homme, c'est un 
leurre. On ne peut transformer la société sans se 
transformer soi-même. Il ne suffit pas de nationa- 
liser l’industrie pour obtenir une société harmo- 
nieuse et autogestionnaire, Et je dois constater 
que s'ilexiste un milieu où l’on n'a pas la possibi- 
lité de se remettre individuellement en question, 
c’est bien le milieu ouvrier, La F.M. c'est la remise 
en question permanente de tous les dogmes, His- 


toriquement, je constate que les organisations: 


politiques ou syndicales (socialistes ou communis- 
tes) qui luttent pour l'émancipation des travail- 
leurs ne sont pas particulièrement adeptes de cette 
remise en question. S’il y a si peu d'ouvriers en 
FM, c'est, je crois, en partie parce que leurs orga- 
nisations les ont surtout habitués à suivre aveuglé- 
ment la «juste ligne», en définitive des dogmes 
inattaquables, plutôt que de réfléchir par eux- 
mêmes. Cela n'excuse rien maïs explique en partie 
le constat actuel, 


Le parti n'est pas tout 


Vorelles - Las consélence, l& primauté 
de l'individu n'est-ce pas en contradic- 














Marthe Van de Meulebroeke, c'est une des premières figures que j'ai connues du féminisme 
belge. Elle animalt, avec d'autres, le comité « A travail égal, salaire égal » créé au moment de 
la grève des femmes de la FN pour l'égalilté des salaires. 
Je n'a! pas été étonnée de la savoir soclaliste. Mais quand j'ai appris qu'elle était franc- 
maçonne, je me suis posé des questions. Comment faire partie d’une loge alors que beau- 
coup d'entre elles excluent encore les femmes ? Comment être socialiste et appartenir en 
même temps à cette grande société secrète où se côtoient surtout intellecfuels et bourgeois 
qui sen servent, dit-on, Comme tremplin, renforçant ainsi la hiérarchie sociale ? 
« Je suis franc-maçonne, nous dit Marthe Van de Meulebroeke, parce que je suis d'accord 
avec eux sur l'essentiel: penser avec son propre cerveau, avoir le courage et l'honnéteté, 
d'aller jusqu'au bout dans l'incertitude » 

Et cel engagement à été le fruit d'un long périple. 


«IT y a une religion marxiste 
que je rejette. 

Le Parti prétend parler 
au nom du prolétariat, 
mais rien n’est moins sûr...» 


filon avec l'action collective, l'angags- 
ment ? 


«Je pense que les Eglises et les partis 
politiqués ont tendance à susciter l'a- 
hénation. Ga né veut pas dire que je ne 
m'engage pas. Mais mon engagement 
est toujours conditionnel, C'est ma 
CONSCIENCS Qui juge. Je relatimisel'au- 
torité du parti. Je me suis engagée 
dans le parti socialiste, puis dans l'U- 
nion des Gauches Socialistes, Enfin de 
nouveau au PS. En fait les struciures 
me décoivent. Je ne me sens tout à faut 
bien nulle part. Par fidélité à une cer- 
laine idée du socialisme. Il faudrait être 
réaliste quant aux Buts prochains, maâais 
garder la distance critique quant aux 
fondements mêmes de notre! société. 
Celä supposerait qu'on ne range pas 
l'idée d'une société sans classes au 
rang des accessoires foikloriques. Cela 
supposerait que l'onsessaie d'éduiquer 
el de former les gens à la base au lieu 
de penser à leur place. Tout partin'ést 
qu'un moyën et il a tendance à se 
préndré pour fin.» 


Voyelles - Les principales loges sont 
fermées aux femmes. Comment, dans 
ces condilons, étre féministe af franc- 
maçonne ? 


“Je ne suis pas entrés dans la franc- 
maçonnerie en tant que femme mais 
comme être humain de sexe féminin. 
J'ai taujours trouvé anormal que cer- 
taines obédiences refusent les femmes 


ALTERN 








“ J'ar vécu dans un milieu de françcs- 
maçons. Pélilé, je comptais les années 
qui mé séparaient de mon entrée dans 
la franc-maconnerig (à 18 ans où à 2 
ans). À la crise d'adolescénce, jar tout 
remis en question et le moraliéme 
franc-macon m'ést apparu comme dé- 
guet, J'étais un peu nietzschéenné à 
l'époque, Or la franc-maçonnerie in- 
siste sur le bien et le mal et 5es 
adeples se mettaient automatiquement 
du côté des gens «biens ils avaiant, 
me semblait-il, une image trés narcissi- 
que d'eux-mêmes. Leur conception de 
la morale allait à l'encontre de ce que 
jé pensais Alors: «la morale est rela- 
tive, 1 faut « ETRE » par de-là le bienel 
le mal: 





Voyelles - Devlent-on maçon de père 
en fils ? 

On ne peut ignorer un certain deter- 
minisme sogial. Mais on s engégeindi- 
viduellement dans la framc-maçenne- 
rie. Tout candidat maçon doit expli- 
gquerses motivations devant un groupe 
de lravail äppelé atelier 
ll s'agit d'examiner s'il pourra s'intégrer 











2 MARS - N° 67 - Novembre 84 - Page 18 


BERTAIRE - ASBL 2 


dans tel ou tel atelieræt s'il a les quali- 
tés requises pour faire un bon maçon 
Si le candidat est enfant de maçon, 
certains ateliers sont encore plus cir- 
conspects, On se méfie du confor- 
mismée possible Onne naïl pas franc- 
maçon, on le «devient. 
Personnellement, j'ai suivi tout un péri- 
ple. Je mme suis intéressée au christia- 
nisme, au marxisme, Pour aboutir fina- 
lernent à la conclusion {icihsimpimfiée} 
Que le catholicisme, £'était Pie XII st le 
communisme, Staline. Je ne voulais ni 
l'un ni l'autre. Ni surtout ce qu'ils re- 
présentaient d'oppression, 

En 1948, je suis entrée dans une loge 
tout en sachant que les maçons déten- 
dalent des idées que je connaissais par 
cœur, mais convaincue qu'ils avaient 
raison sur l'essentiel, « 11 fautpéenser ce 
qu'on pense avec s0û propre Cerveau 
et avoir le courage et l'honnéteté d'al- 
ler jusqu'au bout dans l'incertitudes 
C'est le refus de lout dogmatisme. 

“ Pour moi celte démarche va de soi et 
constitue d'ailleurs la base de la santé 
mentale Fourtant elle est constam- 
ment. mise en Saiise au profit d'une 
autorité qui dépasserait l'individu. » 


Car dans I milieu que je fréquentais 
les rapports hommes-femmes £e si- 
tuaient sûr un plan intellectuel ét fra- 
lernel {échanges d'idées, défense 
d'une cause...) 

Les maçons masculins sont encore les 
plus nombreux mais les loges mixtes 
sont en pléine expansion. Je pense 
que c'est l'avenir de la franc-maconne- 
rie. 

Pourquoi certains maçons sont-ils op- 
posés à la mixité ? Les constitutions 
d'Anderson ne prévoient pas l'admis- 
sion des femmes. Les candidats doi- 
vent être des hommes probes-et libres. 
Or les femmes n'étaient pas libres, 
mais d'éternéelles mineures, confinées 
dans ieur foyér ou dans leur salon. L'é- 
ducation tendait à développer leur 
émotivité plutôt que leurs facultés ra- 
tionnelles. 

Aujourdhui les femmes tiennent une 
place de plus en plustgrande dans les 
Structures socialés, économiques et 
politiques. Si on prend l'esprit des 
constitutions plutôt que la lettre, on ne 
voit pas pourquoi elles ne feraient pas 
du bon travail maçonnique. 

Ceci dit, je trouve que les francs-ma- 





UN FRANC-MACÇON CONNU RISQUE DE PERDRE SON EMPLOI 






dd ten- 








5 que j'ai visitées. Cette FE 
nt à mon goût. Je ne perds pas 
de. un jour ce qu’on appelait au 
Parti Communiste le «prolo de service». 


AL: L'histoire nous a monié des conflits 
Sociaux, par exemple la Commune de Paris, où 
des F.M. se trouvaient des deux côtes des barrica: 
des. Qu'est-ce que tu fais si tu rencontres en loge 
quelqu'un du bord opposé? F'a-t-il une lutte de 
classes dans la F.M. ? 


Paul: Les techniques et le langage utilisés en loge 
ne permettent pas la violence et l'agressivité. La 
lutte cles classes telle que nous la connaissons tous 
les jours dans la société n'existe pas lors des 
tenues. La pratique montre qu'effectivement les 





nent, se sont ous 


c’est une éthique personnelle de vie, pas un parti 
politique. 


A,L.: Dans l'exposé de Léo Campion, on cons- 
fafe que, chronologiquement, 


les anars F.M. 
étaient d'abord anars avant de devenir F.M... 


C'est ausstion cas. N'est-ce pas une manière de les 


récupérer ? 
Paul: J'ai sous les yeux un extrait du journal «Le 
Monde» de septembre 1981. Je t’en lis un extrait: 
« En 1968, la rue, le monde 
politique, ont tenu un langage 
qui paraissait être celui des ma- 
çons, dit Roger Leray, grand 
maître du Grand-Orient de 
France. Si la maçonnerie devait 
être rattachée à une racine poli- 
tique, ce serait celle des liber- 
taires. Notre langage a certaine- 
ment eu des résonances jus 
dans le monde profane. » Le fit 
est qu'à l’époque un certain nom- 
bre de responsables syndicalistes, 


jourd’hui encore de ce précieux #7 
renfort : « Plusieurs mil 

ces jeunes ont été recrutés en 
trois ou quatre ans. Nous avons 
facilement battu le record 





n'avions pas pris la décision de 
les accepter, nous serions au- 
jourd'hui une assemblée de vieil- Z 
lards !» / 


Ceci est très important. Pour moi, le mouvement: 


libertaire est surtout animé par des êtres au carac- 


tère «d'enfant libre ou d'enfant rebelle», selon la 


définition que donne de ces termes l'analyse tran- 
sactionnelle par exemple. Et cela n'a rien de péjo- 
ratif pour moi. Souvent, l'enfant rebelle, quoi 
qu’il sache exprimer très clairement son sens spon- 
tané de l'injusticé, sa révolte profonde contre 
celle-ci, le fait sans cadre de références précis. La 
fusion entre mon adhésion à la F.M. et mon 
essence libertaireme rappelle le passage de l'état 
de réaction, de révolte pure et spontanée, à l'état 


iers de 4 He 


d'adhésions de 1924, au moment 7 | 
du Cartel des gauches. Si nous 7 
/ 
7 








d’auto-construction, de formulation d'une alter- 


échanges existent entre gens de bords différents. 
native, à la fois pour soi et pour la société, 


Mais il est clair qu'à l'extérieur, chacun rejoint 
son camp. Cela ne m'a jamais empêché de me bat- 
tre «fraternellements contre un F.M. Certains se 
demanderant alors à quoi ça sert de discuter dans 
l'espace de la F.M. pour se retrouver ensuite face 
à face, En réalité, chacun, de tous les bords, se 
retrouvant en loge, en tout cas au Droît Humain, 
a la ferme volonté de rencontrer, d'écouter 
lPautre. Ne pas être d'accord avec quelqu'un cela 
n'empêche pas de prendre connaissance de ses 
arguments. Ce n’est pas parce que lon à entendu 
qu'on est d'accord avec lui. Je vis la F.M. à ce 
miveau) comme un lien de compréhension 
mutuelle, ceci sans abdiquer de mes convictions. 


et non des moindres, des mili- 
tants d'organisations d'extrême 
gauche, se sont «initiés ». Fred 
Zeller, alors grand orateur du 
Grand-Orient, se félicite au- 


ser les des mon Ne 
sans en abdiquer aucune: | 
l'adulte constructeur. La 
d'approfondir les engagements den 
plus de sérénité. Pour moi, c'est un p 
en AUCUN Cas urte renonciation. | 


En réalité, c’est une imtiation qui pourrait être 
comparée à l'initiation des jeunes adultes chez cer- 
tains peuples africains, le passage organisé par la 
communauté de l'état d'adolescent à celui de 


NN 


C’est à la fois sa richesse et sa faiblesse, La F.M., 


fran 


libération des 
femmes. De leurs ateliers sont sorties 
des actions peur le planning famitial et 


çons ont fait avancer la 


pour l'avortement, {ls ont aidé à la 
Création d'un enseignement sérieux 
pour les femmes. Pas toujours par fé- 
rnirusrmé, mais parce qu'ils pensäient 
au rôle important joué par les mêres 
dans léducation: pour libérer lés en- 
fants, il fallait d'abord éduquer es ma- 
mans. Gatti de Gamond par exemple 
était maçonne.» 


Ni bon Dieu, ni saint Marx ! 


Voyelles - La franc-maçonnerfe n'est ni 
une église, ni un parti, ce qui n'em- 
péche pas les maçons de se siluer face 
aux deux grandes idéologies scluélles, 
l8 catholicisme et le communisme. 


« Personnellement je ne suis pas indit- 
férentesà certains courants chrétiens. 
Mais ce qui me parait imbuvable et 
malsain dans le catholicisme, C'est la 
sacralisation de l'autorité. Toute bu- 
reaucratie a tendance à abuser de san 
pouvoir, (Je l'ai déjà diti Mais [a bu- 
reaucratie catholique est ce que l'on 
fait de mieux dans le genre. L'autorité 
n'y est plus fonctionnelle, mais charis- 
matique et pèse de tout son poïds sur 
la conscience des croyants. Un exem- 
ste significatif: Paul VI & interdit la 
contraception (dite non naturelle) en 
passant outre l'avis de la majorité de la 
commission qui avait été chargée de 
l'étude de ce problème. Le pape a donc 
utilisé son prestige auréolé de sacre, 
non pour émanciper, mais pour alièner 
les consciences. Pour peser sur la vie 
quotidienne des femmes et des 
hommes dont certains n'oseront plus 
juger par eux-mêmes. (On va dire que 
j'ai un pape pendu au bout du nez, 
mais dans le fond, cela va avec l'image 
du franc-maçon ll} 

Quand au communisme, tout dépend 
comme on le définit. Il y a une religion 
marxiste que je rejette. Le parti prétend 
parter au nom du prolétartat, mais rien 
n'est moins sûr. 

Comme ailleurs, on excommunie. Je 
crois cependant qu'il faut se battre 
méme désespérément pour la justice 
sociale. Et la méthode marxiste est un 
bon outil. 

Sentimentalement, j8 suis anarchiste. 
Mais trop réaliste pour accepter de 
mentéermer dans Une réverie impuis- 
sante louslesmacons ne pensent pas 
comme moi, J'étonnerai sans doute 
beaucoup dé maçons en attribuant à la 
maconnerie un côté anarchiste, car 
bon nombre appartiennent aux classes 
dominantes. Il y & cependant un point 
commun entre l'anarchie et la franc- 
mäconnerie : la libre-pensée. Maïs tous 
les maçons ne sont pas forcément op- 
posés, comme je lé suis, à [a Sépara- 
tion entre gouvernants et gouvernés, » 


IL FAUT PENSER AVEC SON PROPRE CERVEAU 








Un pape au bout du nez 


Voyelles - Aujourd'hui le recrutament 
de ja franc-maçonnerie ne se fait plus 
dans la noblesse ou dans la grande 
bourgedisie. Sa base sociale s'est 
transformée: employés, anselgnants, 
professions libérales, culturelles. On 
ne trouve pas encore d'ouvriers. 
Qu'est-ce qui peut unir des gens si dif- 
férents ? Souvent encore surtout l'anti- 
cléricalisme. 


« Si, des ouvriers, il y en à. Ça dépend 
des régions. Ça dépend surtout des 
ouvriers. En général, its n'ont guërs en- 
vie de palabrer le soir. Dans les partis 
non plus. Toutes les maconneries 
continentale: sont d'accord sur un 
paint : la défense de la laïcité. 

Lés francs-maçons sont devenus anñti- 
cléricaux par nécessité: parce que l'E- 
glisé Catholique, alors toute-puissante, 
les combattait, s'ächarnait contre eux. 
Les catholiques ne sont donc plus en- 
trés dans les loges et celles-ci ont évo- 
lué vers le rationalisme. 

Elles se sont battues pour l'enseigne- 
ment officiel, pour la séparation de l'E- 
glise et de l'Etat. La Grande loge d'An- 
gleterre JE contre est restée plus 
proche de la religion nationale. Parce 
que c'est le protestäantismé qui à ins- 
piré, mème créé la franc-maçonnerie. » 


Voyelles - À lextréme-gauchs, on re- 
proche parfois aux francs-maçons de 
faire de la collaboration de classe, 
d'apparenir 4 des groupés surtout 
composés de bourgeois. 


“ Pourquoi ne pourrait-on pas fréquen- 
ter quelqu'un d'une autre classe ? Il ne 
faut pas confondre haine et lutte des 
classes. Je peux comprendre un chef 
d'entreprise et combattre son projet s'il 
est différent du mien. Marx d'ailleurs 
ne disait pas que tous les bourgeois 
étaient mauvais et tous les ouvriers 
bons, !l disait que, bons ou mauvais, [is 
étaient prisonniers de structures alié- 
nantes. D'ailleurs si tout 8 une dimen- 
sion politique, là dimension politique 
n'est pas la seule. Dans une relation 
humaine, les rapports fraternels sont 
primordiaux. 

C'est pour l'avoir méconnu, que les 
partis de gauche finissent par se volati- 
liser comme l'UG.S. A force de se ma- 
nipuler les unsles âutres. Au nom de la 


tactique abstraite, on devient inhu- 


main. » 
Le travail en loge 


Voyelles - Comment fonctionnent les 
loges ? Qu'y faltes-vous ? 


« Normalement les maçons se réunis- 
sent une fois par semaine. ls se re- 





trouvent dans Un « atelier » pour dis- 
cuter d'un sujet philosophique ou 
d'une question d'actualité. Chacun ap- 
porte des idées, certains formulent un 
projet. On vient éclairer sa conscience 
et puis on s'engage. La liberté de pen- 
sér ét d'agir est totale Un maçon ne 
peut jamais donner d'ordre à un autre 
maçon. On n'exclut que pour motif 
grave. Far exemple collaboration avec 
l'ennemi durant la guerre, acte désho- 
norant comme un faillite frauduleuse. 
En Belgique les loges n'acceptent pas 
les fascistes, Pendant la guerre de 
1940, beaucoup de maçons ont été 
poursuivis, incarcérés, exécutés. parce 
que maçons. Le principe fasciste est à 
l'opposé du principe maçonnique.» 
Les atelièrs 8e regroupent en obé- 
diencss, structures indépendantes qui 
ont leurs appareils administratifs et 
leurs règles propres décidées à la 
base. llustration du principe démocra- 
tique cher à la franc-maçonnerie. Ce 
qui fait l'unité entre les loges c'est un 
certain langage symbolique inspiré de 
l'art de construire et qui pousse à l'ac- 
tion. » 


Une société secrète qui 
“ pousse » ses membres ? 


Voyelles - Ambition, myslére, politique 
de la courte échelle, les critiques à l'é- 
gard de la franc-maçonnerie ne man- 
quent pas, tout comme les rumeurs qui 
circulent nées du secret un peu vieux 
Jeu dont s'entoure |s loge. 


«“ Dans un sens, la réglé du secret me 
gêne aussi. Ses origines sont corpora- 
tistes: l'ordre des franc-maçons avait 
des secrets de fabrication, de 
construction, des signes de reconnais- 
sance, Le secret s'est étendu à tout ce 
qui se faisait en logé. Ce qu'il en reste 
aujourd'hui ? 

En fait là maçonnerie est prus une 50- 
cièté fermée que secrète, En ce qui 
concerne l'initiation par exemple, tout 
le monde peut tout lire dans les livres. 
Mais uné initiation 8e vit sur un plan 
émotif comme un psychodrams. Tout 
ire d'avance, aboutit à augmenter ses 
défenses. 

H y a aussi le secret dés noms. Au dé- 
part, il était vital. Dans les pays catholi- 
ques, un franc-maçon connL comme. 
tel risquait de perdre son emploi. Du 
temps dé Franco, il risquait sa vié. Les 
nazis aussi ont persécuté l8s maçons. 
D'ailleurs d'une façon générale, j'es- 
time que l'option philosophique ou po- 
litiquée de chacun est son problème. 
Nous n'avons pas à la divulguer sans 
son accord. C'est comme le secret du 
vote, À chacun dé décider ce qu'il peut 
ou veut dévoiler de sa pensée et de ses 
choix. Comme Sartre, je réverais d'une 
société où chacun serait transparent 





L- “narci 
c-maçonne 


aux autres. Mais dans la société où 
nous vivons, celte transparence servi- 
rait le pouvoir. Ët quel pouvoir? Lui- 
même opaque. Les micro-fiches & 
constituent un bon exemple de l'idéal 
du pouvoir | 





Louise Michal, héroïne de la communs af 
franc-maçonne céfébre. 


Vovelles - Gn reproche aussi aux ma- 
cons le pratigue de la courte échelle. 


« C'est très comique. Si on avait laissé 
faire les catholiques, les Hbre-panseurs 
n'auraient jamais eu la moindre place. 
La courte échelle se pratique partout. 
Quels sont les parents qui, connaissant 
un employé, un uissier ou un direc- 
teur, laisseraient tomber ce piston 
éventuel au moment d'assurer l'avenir 
de leur enfant? il y en a, mais peu. 
Chacun reproche à l'autre ce qu'il pra- 
tique lui-même. Que des maçons 
aident parfois d'autres maçons à trou- 
ver une place, c'est vrai Mais la ma- 
çonnérie n'est pas une société de pla- 
cement. || y a d'ailleurs des règles. En 
principe, à valeur égale, on peut préfé- 
rer un maçon. Mais si le candidat maä- 
çon n'est pas qualifié, il n'y a aucune 
raison de le faire. D'ailléeurs les solida- 
rités politiques interfèrent et bloquent 
parfois les solidarités philosophiques: 
Rien n'est automatique ou obligatoire. 
Blen sûr on s'engage à aider des frères 
et sœurs mais c'est quoi « aider »? 

lt s'agit d'abord de s'écouter les uns les 
autres, de se soutenir moralement, de 
partager. Les candidats suspecis de 
vouloir entrer par intérêt son rejetés. 
Cependant des arrivistés « maçons », 
il y en a. Ils font du bruit à l'extérieur 


ALTERNATIVE LIB LIBERTAIRE - ASBL 22 MARS - N° 67 - Novembre 84 - Page 19 = 






mais on né las voit pas en loge Par 
contre qui tient la logé debout? NM 
Geux qui y font un travailréguiier et lui ei |L 
sacritient temps, argent, énergie, sans 
compter. Simplement parce que, pour 
eux, ce travail a, en lui-même, un 
sens. » 


Pas de chef mais des grades 


Voyelles - Une société d'idéal déma- | 
cratique. Un cfrei, le « grand maître » 
élu par ses pairs, une liberté à foule 
épreuve, el pourtant des grades qui 
dañs certaines loges, vont jusqu'à plu- 
sieurs dizaines. 


« Les grades ne supposent aucune 
idée de hiéarchie. Ns ne donnent 
aucun pouvoir. Un simple maître-ma- 
con peut étre grand maitre. Chaque 
grade correspond à une étape symboli- 
que de l'expérience humaine. Ceux qui 
y vont, marquent ainsi leur intérét pour 
la recherchée philosophique.» 





Voyellés - Marthe ast heureuse dans la 
franc-maçonnerie. Elle y & trouvé, dit- 
alle, de vrais amis, des échanges ap- 
profondis aur tous les problèmes philo- 
sophiques et sociaux qui nous agifent, 
un leu où fester ef lancer les combats 
qu'elle à menés sur le plan féministe él 
politique. Il fauf dire qu'elle appartient 
au « Droit Humain», une loge progres- 
siste ot mixte, née d'un groupe de ms- 
cons qui, à ie fin du siècle passé, avait | 
voulu initlèr une femme, contre les | 
coutumes du temps. Loulse Michel en 
a fait partis, dit-on. Volià qui donne la | 


coloration d'un groupe dans lequel 
tout le monde ne reconnaitra pas peul- 
Stre l85 fANCE-MAÇONS, 

Propos recueillis par l 


Suzanne Van Rokeghem 1 + | 
et Dominique Burge 


Pourquoi Francs-Maçons ? | 


Le terme Franc-Maçon apparait, 
pour la première fais en 1459: Lars, 
d'une rencontre à Ratisbonne de | | | 
toutes les loges compagnoniques 
du Saint-Empire germanique qui 
s'unissent 6n une Fédération, L'em- 
| pereur ayant accorde à cette fédera- | 
tion des privilèges spéciaux appelés | 
aussi franchises, ses membres déci- | 
dent de prendre le nam de «Frei- 
| Mäurern, c'est-à-dire Francs-Ma- 
| CONS. | 
| En Angleterre, au 196 5. on parlait 
| déjà de «free stone masons* pour 
| désigner les maçons initiés qui sas 
vaient tailler et travailler la pierre. 




















Le dépérissement de l'action révolutionnaire au 
cours des dix dernières années, période qui laissait pré- 
sager pourtant de plus grandes espérances, a abouti logi- 
quement à l'installation de la gauche au pouvoir en 
France. Logique découlant de cette évidence, qui s'im- 
pose donc aujourd'hui en France, mais aussi en Grèce, en 
Espagne, à savoir que c'est dans les périodes de stagna- 
tion du mouvement révolutionnaire que la gauche réfor- 
miste et parlementaire peut s'approprier les aspirations 
au changement des masses. 


ANT MAI 81 





ALTERNATIVE LIBERTAIRE - ASBL 22 MARS - N° 67 - Novembre 84 - Page 20 





QUAND JE PENSE G0'A LÉENAI 
NODS AVIONS LES MÊMES 
OPINIONS POLITIQUES - 


ON 
CHANGE : 


Qu'il n'y ait rien à attendre d'un simple changement 
de gouvernement amenant la gauche au pouvoir est une 
autre évidence maintes fois énoncée. Un simple coup 
d'oeil du côté des démocraties occidentales “avan- 
cées” (RFA, Suède ou Pays-Bas) où le mensonge 
démocratique fonctionne à plein, suffit à confirmer cette 
théorie et comprendre que la gauche n'a intégré quel- 
ques revendications de la classe ouvrièredans son dis- 
cours électoraliste que pour mieux les vider de leur subs- 
tance révolutionnaire. 

Gauche ou droite ne sont que deux formes de ges- 
tion du Capital, équivalentes finalement et pour cela 
alternatives. À tel point que c'est le plus souvent 
"l'usure du pouvoir” qui dicte le choix politique des élec- 
teurs et amène ce balancement alternatif, cette merveille 
de la démocratie qu'est le 50/50, un coup pour la gauche, 
un coup pour la droite. Selon les besoins du moment ou 
l'humeur - un peu manipulée tout de même - des élec- 
teurs, les partis politiques devenus lobbies de gestion 
naires, alterment au pouvoir, Jusqu'à présent, cela a 
sauvé le capitalisme. 

Ayant toujours dénoncé le parlementarisme et le jeu 
électeral, nous faisons partie de cette minorité qui n'a 
jamais cru au “changement” promis par les socialistes, 
tout en étant conscients que l'arrivée de la gauche au 
pouvoir en France pouvait comporter des aspects posi- 
tifs, tant dans la forme -la réalisation de réformes presti- 
gio-humanistes -, que dans le fond - ne serait-ce que la 
fin de l'illusion, pour les travailleurs, de ‘l'alternative de 
gauche” comme espoir de changement -. Pourtant, il ne 
s'agit pas aujourd'hui de constater simplement que le 
changement annoncé n'a pas eu lieu pour justifier la 
continuité de notre lutte contre l'Etat. Le nouveau pou- 
voir, en intégrant les aspirations d'une majorité d'élec- 
teurs, en réalisant quelques réformes formelles { l'aboli- 
tion de la peine de mort, par exemple ) limite nos possibi- 
lités d'intervention. Ce qui était évident de dénoncer du 
temps de la “droite”, dans le flou et l'ambiguité des 
fronts anti-quelque chôse, est devenu beaucoup plus dif- 
ficile à démontrer, si l'on veut éviter de se faire prendre 
au piège du terrorisme et de la marginalisation. Les révo- 
lutionnaires sont tout nus, et un peu seuls quand même. 

Ïi faut aussi et surtout tenir compte de la démission 
presque complète de l'extrêéme-gauche ét des tenants de 
cette “nouvelle radicalité” révolutionnaire { tous ces 
post-crypto-néo-situs ) qui avait émérgé dans les années 
70. Si cette récession de la critique et de la pratique révo- 
lutionnaire a permis l'arrivée de la gauche au pouvoir, 
elle explique aussi comment un groupe aussi caricatural 
qu'Action Directe accapare le devant de la scène politico- 
révolutionnaire avec son léninisme archaïque, ses 
notions primaires d'anti-impérialisme, son tiers-mon- 
disme vaseux. Les vieux concepts léninistes ne sont pas 
plus valables dans la réalité politico-sociale d'aujourd'hui 



































«Aux larmes, mégalos!», une brochure d’une 
centaine de pages. Elle se présente extérieure- 
ment comme un polar. En dernière page de cou- 
verture, une parodie de la célèbre publicité 
«Balafre» des romans de la «Série Noire». Mais 
cette fois-ci l’eau de toilette s'appelle «Carlos». 
Au-delà de l'humour permanent, les thèmes 
abordés sont des plus sérieux. Qu'est-ce qui à 
changé en France depuis l’arrivée de la gauche en 
mai 81? La gauche, la droite, c’est vraiment la 
même chose? Quelle différence entre le ferro- 
risme et la violence révolutionnaire? Entre les 
attentats d'Action Directe et les manifestations 
radicales des ouvriers de La Chiers? À quelle 
vieille sauce léniniste sont accommodés les restes 
des groupes de lutte armée tiers-mondistes ? 
Quelles stratégies inventer pour sortir des culs- 
de-sace où ils sont enfermés, la lufte anti- 
nucléaire, le combat des détenus, nos rapports 
avec la justice,...? À chacun ses réponses. Ce 
texte collectif, c’est certain, sort des sentiers bat- 
lus et des banalités des discussions de café... Une 
opinion à entendre, à écouter, à lire, .… 











250 francs 
port compris 
au compte 
22 Mars Editions 








Pour toute correspondance S 
B.P. 285, 1040 Bruxelles 4 


qu'ils ne l'étaient hier. Leur résurgence à travers plu- 
sieurs groupes en Europe, Action Dirécte ne semblant 
être que le dernier avatar, n'est que l'aveu implicite de 
l'incapacité pour ces pseudo-révolutionnaires de faire la 
moindre critique radicale de la situation. Le refuge dans 
les références aux luttes du passé, aux vieux discours, 
les empêche"de-s'affronter, au-delà d'une phraséologie 
creuse, aux nouvelles aliénations. Aujourd'hui, plus que 
jamais la réalité socio-politique ne ressemble en rien aux 
situations classiques et anciennes auxquelles s'était 
confronté le vieux mouvement révolutionriaire. 

T1 y a longtemps que l'on sait théoriquement que les 
clivages droite/qauche sont dépassés, mais i s'agit 
aujourd'hui de les dépasser dans ia pratique pour 
essayer de définir de nouveaux angles d'attaque qui 
soient efficaces dans la lutte contre le nouveau pouvoir, 
contre tous les pouvoirs. Face à un gouvernement de 
gauche, notre lutte ne peut être efficace que si elle s'at- 
taque, en le démystifiant, au fondement du système 
oppressif : la démocratie parlementaire  Crtiquer le 
socialisme, où plutôt le Parti Socialiste, c'est une néces- 
sité, seulement la nécessité de la critique se doit d'être 
surtout la critique dé la nécessité. 


AIO MEET A DEX/AI Cr 
> L?I LA REVOLU 





La société capitaliste 
n'est pas immuable, bien au 
contraire; depuis ces vingt 
dernières années elle ak: 
bousculé toutes les certi- : 
tudes établies, tout cé qu'on 
croyait savoir sur 865 CADaACI- E 
tés d'adaptation, élle s'est | 
transformée, elle a muté, El: 
elle a définitivement enterré E 
tout ce qui demeurait de ce |? 
19ème siècle que certains 
regardent avec nostalgie. 
Les énormes progrès tech- E £. 
nologiques n'ont pas été, R | 
bien entendu, sans influer K 
sur les rapports sociaux, sur 
les bases mêmes de ces rap- E 
ports. Les seuls à ne pas 
avoir suivi cette évolution ce sont les "révolutionnaires" 
qui tout en se gargarisant de révolution continuent à 
vivre sur les analyses du vieux capital défunt : ils igno- 
rent tout du présent, simplifient et emboitent leur révolu- 
tion dans les petits schémas anti-impénialistes et tiers- 
mondistes « qui ont fait leur preuves ». Force est de 
constater aujourd'hui, à travers la faillite des organisa- 
tions lénino-révolutionnaires du type Brigades Rouges 
ou Fraction de l'Armée Rouge, que le concept même de 
révolution n'est plus crédible, tant il a été détourné, vidé 
de son vrai Sens par ces organisations en mal de pouvoir. 
L'idée léniniste de ia révolution { comme toute idéologie } 
est fondamentalement contre-révolutionnaire { au sens 
utopique du mot révolution ) et anti-émancipatrice, parce 
qu'elle apparait comme un masque qui transformerait le 
négatif en pseudo-positif : transformation du sacrifice, 
transformation de |a violence, transformation de la 








UNE VIOLENCE «OUVRIÈRE» LEGITIME ? 


001-1632181-38 












VIOLENCE REVOLUTIONNAIRE 
CONTRE TERRORISME 





misère présente, de la répression, de la production par 
un retournement dialectique du code dé la valeur. 

La croyance en l’imminence de la révolution est 
aussi dangereuse ( démobilisatrice ) que celle en une 
longue période de “préparation”. Laissons de côté les 
astrologues de la révolution qui spéculent sur ses futures 
chances, les « ici et maintenant, je ne crois pas que... » 
sont le plus souvent un alibi pour ne jamais rien faire. 
Aujourd'hui, il ne s'agit pas de croire mais simplement de 
refuser, de combattre ce qui nous opprime, non pas au 
nom d'une quelconque idéologie mais de nous-même, en 
affirmant notre individualité en dehors de toute organi- 
sation ou idéologie. Pour être révolutionnaire la pensée 
doit se libérer des idéologies et des a priornismes. L'écla- 
tement de l'utopie, c'est tout le contraire de l'idéologie 
dialectique. Que l'on nous entende bien : le refus de 
l'alibi révolutionnaire ne conduit pas à la démission, au 
contraire, il fortifie nos convictions et notre refus du sys- 
tème en déplaçant la problématique révolutionnaire sur 
le terrain non-policé de la subjectivité. 


Oui, le monde a changé, le “vieux monde" est mort 
et les révolutionnaires sans révolution, ceux qui n'ont 
pas su ou pas pu la faire, ont presque tous disparus avec 
lui, fixés sur des objectifs déjà dépassés, sur l'éternel 
recommencement des mêmes échecs, sur la réactivation 
des idéaux, des vieilles nécessités, des faux espoirs. Tout 
a changé et i n'y a guère aujourd'hui en France que les 
quelques dinausores regroupés au sein d'Action Directe 
pour exprimer le besoin « d'une réflexion sur l'organisa- 
tion et la forme-Parti » , ces tartes à la crème rancies de 
l'antique mouvement gauchiste. Voilà plus d'un siècle 
que “la lutte finale" est commencée et leur discours est 
toujours le même, toujours en réaction face à une situa- 
tion. Comme toutes les organisations politiques depuis 
1968, Action Directe s'épuise à cavaler derrière cette 
nouvelle forme de lutte qui se veut autonome, sponta- 


“même réactionnaire : 








néiste et sauvage qui n'est que réactionnelle et parfois 
c'est choisir d'avoir toujours un 
train (de marchandises ) de 
retard. Leur seul but est 
d'exister et d'être reconnus 
en tant qu'organisation 
révolutionnaire ( et autant 
que possible la seule et uni- 
que capable de } et pour cela 
is ont besoin de la politique 
du troupeau puisque leur 
logique est de rassembler 
du monde pour devenir à 
leur tour un ( contre )-pou- 
voir et que cette logique 
conduit à recruter sur la 
base du plus petit commun 
1 dénominateur. 





VIOLENCE SANS CONSCIENCE... 


Mais ce n'est pas tant au niveau théorique {| la criti- 
que est tellement évidente et facile) que pratique, 
qu'Action Directe pose problème à tous ceux qui, comme 
nous, n'excluent a priori aucun moyen dans la lutte 
contre le système, plus clairement dit qui n'excluent pas 
l'usage de la violence comme moyen de contestation, 
mais qui veulent éviter de tomber dans le piège du terro- 
risme. $e démarquer politiquement d'Action Directe est 
nécessaire et indispensable pour tout individu ou groupe 
qui prétend lutter contre le système, mais cette démarca- 
tion doit étre tout aussi évidente au niveau pratique afin 
que l'utilisation de la violence retrouve son véritable 
emploi subversif. 

La violence ( révolutionnaire ) n'est jamais un argu- 
ment en soi, encore moins une fin, mais elle peut s'avérer 
nécessaire pour débloquer/créer une situation. La vio- 
lence minoritaire n'est pas à exclure, même ep période 
“calme”, à condition que ceux qui l'exercent aient au 
moins la capacité de donner à léur acte un sens révolu- 
tionnaire. Une action réduite au rang de fait dramatique 
happé par l'actualité perd tout son contenu subversif. 
Cette condition permet de comprendre à elle seule que 
l'usage révolutionnaire de la violence soit très délicat 
dans la société moderne. 

Les vieux mythes ont la vie dure malgré la mort des 
héros : on reste abasourdi de voir des groupes “révolu- 
tionnaires” reprendre, bien après la Fraction de l'Armée 
Rouge, l'idée de « lutte armée contre les métropoles de 
l'impérialisme v. Faut-il souligner l'absurdité qui 
consisté à affirmer le principe de la lutte armée comme 
seul fait révolutionnaire, de créer une organisation pure- 
ment spécialisée dans ce but ? Doit-on revenir sur ces 
groupes hiérarchisés, cloisonnés, structurés { en partie à 
cause des nécessités de la clandestinité ), planifiant la 
violence, contrôlant tout, y compris eux-mêmes ? Vision 
d'un parti espérant encadrer et récupérer toute manifes- 
tation violente afin de pouvoir y recruter, parce que sa 
perspective est essentiellement organisationnelle. Le 
recours à la violence ne se justifie que comme partie 
d'une pratique globale et non comme l'œuvre de justi- 
ciers spécialistes qui se veulent indispensables 
Mais le plus important est qu'en se laissant entraîner 
dans le surenchère de la violence et en acceptant ( impli- 
citement au moins } de revêtir les oripeaux de l'épouvan- 
tail terroriste qui a déjà été largement utilisé en Italie ou 
en Allemagne (et leur “logique” ne pouvait les mener 
ailleurs }, Action Directe a permis au pouvoir de “terrori- 

er", par l'effet d'amalgame, tout individu ou groupe qui 
éssaierait d'exprimer son refus du système par des 
moyens violents. Il faut se démarquer d'Action Directe 
pour ne pas être assimilés et lutter contre la criminalisa- 
tion terroriste dans laquelle le pouvoir voudrait nous 
acculer. 


Pour casser l'image terroriste que le pouvoir veut 
donnér de nous, pour que la démarcation soit évidente et 
claire, il faut que notre lutte s'attache à dénoncer le ter- 
rorisme dans son expression la plus globale, c'est-à-dire 
l'Etat. Le seul vrai terroriste, c'est l'Etat, quels que soient 
leurs efforts pour persuader du contraire et malgré tous 
les renversements dialectiques : les résistants étaient 
des “Terroristen” recherchés par les nazis, les comman- 
dos sionistes étaient terroristes aux veux des Anglais, 
aujourd'hui ce sont les commandos palestiniens qui aux 
yeux des Israéliens, et demain... La violence de l'Etat qui 
se couvre sous les masques les plus divers est infiniment 
plus grave et dévastatrice que la violence déclarée des 
révolutionnaires, qui s'affirme en tant que telle comme 
moyen de combattre une forme de pouvoir ou comme 
catalyseur d'une révolte. La violence révolutionnaire 
n'est que la nposte naturelle contre la violence institu- 
tionnelle qui étouffe plus ou moins lentement la vie. ll 
faut se méfier du mot violence, lui-même “piégé” et se 
rappeler que la violence individuelle est moins grave que 
la violence des Etats, mème si elle est plus immédiate- 
ment spectaculaire. 

Que le pouvoir n'ait pas encore réussi à rejeter dans 
le camp terronste les sidérurgistés de la Chiers, qui ont 
pourtant mené des actions tout aussi violentes et specta- 
culaires qu'Action Directe suffit à comprendre le phéno- 
mène de la violence révolutionnaire. Bien sûr, dans ce 
cas la violence “ se légitimise “ - aux yeux de certains - 
car elle Se situe clairement dans lé cadre d'un conflit 
social, mais surtout parce qu'elle ne cherche pas à se jus- 
tifier idéologiquement. Elle est l'œuvre d'individus quine 


cats. Mais tout cela té 
la ‘ révolution | prolétarienne' | 


ouvrière, et. de l'autre bie: 
des éléments bizarres tent Fe ÿ 


Nous sommes tous partie intégrante du mouvement 
social et si la sensibilité de certains ouvriers les pousse à 
utiliser la violence pour dépasser le cadre étroit de. la 
revendication syndicale, pour protester contre une situe 
tion qui les concerne particulièrement en quoi cette vio- 
lence est-elle plus légitime ? Nous, nous-prétendons 
mener un combat beaucoup plus global Car nous nous 
séentons concernés par l'ensemble du système d'oppres- 
sion, et si demain notre sensibilité nous amenait à utili- 
ser la violence pour essayer de détruire quelques par- 
celles de ce qui nous opprime (lois, prisons travail.) 
en quoi notre violence serait-elle moins “juste”, alors que 
plus globalement dénonciatrice, que celle de ces ouvriers 
qui ne dépasse pas - le plus souvent - le cadre parcellaire 
du conflit social ? Est-ce cet aspect parcellaire qui légiti 
mise leur violence, Messieurs les thuriféraires, ou est-ce 
en tant que victimes privilégiées du Capital queles 
ouvriers ont seuls le droit d'appliquer cette Légitime. 
Défense que vous prônez ? 8 

On ne peut prétendre que lé pouvoir socialiste a été. 
contraint par la vague d'attentats de mettre en place ou. 
de développer l'arsenal répressif que l'on sait. Le pouvoir 
s'ést sans doute servi de ces attentats pour accélérerle 
processus, mais le processus est inéluctable et inhérent, 
à tout pouvoir étatique. Le fichier électronique par 
exemple, existait déjà depuis quelques années Ge façon 
clandestine { encore que !) presque “illégale, mais, id 
faut être bien naïf pour croire que la police resterait la 
seule entreprise du système capitaliste à ne pas chercher 
à rentabiliser sa production en refusant d'utiliser l'ordi- 
nateur. Que le procédé soit aujourd'hui légalisé, justifié, 
moralisé, amélioré par le gouvernement de gauchen ‘est. 
donc nullement paradoxal, bien au contraire, puisque 
cela fait partie des taches essentielles d'un tel gouverne” 
ment, c'est-à-dire grignoter du terrain là où la droitese 
serait sans doute cassé les dents. 

Il n’en reste pas moins que tous ces grignotages,ces 
mesures liberticides sont en contradiction flagrante avec 
le discours politique tenu par le P.S. avant son accession, 
au pouvoir et c'est en exploitant ces contradictions que 
nous pourrons élargir les failles du pouvoir et déchirer 
totalement le voile humaniste dans lequel.se drape 
encore le gouvernement socialiste. 


Ecrit au cours de l'année 82, 








LES REVOLUTIONNAIRES : SONT NUS 


ALTERNATIVE LIBERTAIRE - 


ASBL 22 MARS - N° 67 - NOR 84 - Page : 21 








dd aan: EL L0 
NO Hirousss 





ALTERNATIVE LIBERT AIRE - 


vous avez un proche en prison? 
abonnez-le à alternative libertaire 
engagez-le à nous écrire pour nous décrire 
sa réalité carcérale. 








a Le dans les prisons. 


Nous voulons faire de ces journées un 
moment privilégié de renconires, mais aussi, 








à Tnt ad | 
ou ayant lutté contre Fe ceux qui, 


ic [Li # L 
3 <a ei & | 
es D nous ner Te en ces EnRe de 
tidienne, différents lieux de la ville par 


Los AO pEeIes de penUE 1! 


= 


re tous cest } 
_ Transmuraille-Express, Canal-Sud 
ALES Alfred Duméril 





























31 400: Toulouse. \ 


ASBL 22 MARS - N° 67 - Novembre 84 - Page 22 





huit a: 


Actuellement, je me trouve au 
C.M.C. de la maison d'arrêt de 
Saint-Gilles. Auparavant, j'étais à 
Ypres où j'avais été placé suite à mon 
extradition de France. 








C'est en France (Toulouse) que j'ai entendu 


parler pour la première fois de Passe-Muraille. Je 


m'y suis intéressé sachant que je devais être 
extradé (ce qui fut fait le 23 août 84) et que cette 
émission me permettrait d'avoir un moyen 
d’information, ce qui est très important, et aussi 
un moyen d'expression, dans la mesure où mes let- 
tres sont transmises par les bons soins de l’A.P,, 
ce qui est assez difficile en France. Aujourd’hui, 
je prends le risque de vous faire parvenir cette let- 
tre par la voie normale et s’il se trouve que celle-ci 
n’a pas été expédiée, je serai obligé d’avoir recours 
aux mêmes procédés qu'en France. 

Théoriquement, il n'y a pas de censure. Prati- 
quement, c’est le contraire puisque nous sommes 
contraints de laisser les lettres ouvertes. Il est vrai 
qu'il y a certains établissements où le courrier est 
fermé par le détenu, ce qui n’est pas le casici, ni à 
Ypres, Enfin, c’est une question de divergences de 
règlements intérieurs et le directeur est seul maître 
dans sa prison! 


Voilà trois dimanches que j'écoute Passe- 
Muraille pour m’en faire une petite idée. Je dois 
avouer que-parfois, pour ne pas dire bien souvent, 
l'émission ressemble de par son contenu à la pré- 
cédente par son uniformité. Je ne mets pas en 
cause lés animateurs qui font ce boulot et n'en ont 
que plus de mérite, d'autant plus qu'ils le font 
bénévolement. Mais plutôt par l'insipidité du 
courrier des auditeurs de derrière les barreaux. 


A mon avis, on peut passer un moment tant 
instructif qu'agréable sur les ondes, sans pour cela 
avoir à écouter un duel d'insultes, Bien entendu, 
c’est aux taulards d'arrêter leur comportement 
infantile et de se comporter en adultes, ce quisn'est 
pas évident, même s'ils sont considérés comme tels 
devant l4 justice, 


Comme je l'ai dit, je n'ai écouté que trois 
émissions. Je n'ai retènm dans celle du 16 qu'une 
lettre trés bonne, celle de Madeleine, et je ne dis 
pas cela parceque c'est une-frangine. Par contre, 
l'émission du 23 a été la meilleure qu'il m'ait été 
donné d’entendré. Auparavant, j'ai trouvé qu'il 
manquait des informations sur le monde carcéral. 
A Jamioulx, on a évacué les détenus. 1l est juste de 
penser qu’il y a des personnes qui ont quelqu'un 
de cher là-bas et qui demeurent à Bruxelles: par 
Passe-Muraille, elles peuvent espérer en apprendre 
plus ou même faire appel à un témoin. Il en est de 
même pour les quarante qui se sont fait tabasser à 
Merksplas. Sans travestir les faits, on peut dénon- 
cer la vérité pour que de telles choses ne se repro- 
duisent pas. 

Combien de faits similaires ont été passés 
sous silence parce qu'il n'y avait aucun moyen 
d'expression? Maintenant qu'il y a une radio qui 
nous offre quatre heures sur les ondes, il faut que 
les personnes concernées prennent conscience 
pour que cessent ces brimades et persécutions, le 
plus souvent impunies. 

Dernièrement en France, les matons ont fait 
une grève (privation de visites, de promenade et 
de distribution de courrier) parce qu’un de leurs 
collègues s'était fait tabasser. Faut croire que les 
matons sont plus solidaires que nous. Et si par 
malheur le gars se fait sautér, quelle que soît la 
taule où il aura été incarcéré, il est certain qu'il se 
retrouvera au cachot avec une grosse tête. 


En France, le nouveau gouvernement, soi- 
disant libéral, a supprimé les Q.H.S. ou plutôt, 
pour étre précis, l'appellation. Aujourd’hui, cela 
a été remplacé par l'isolernent, ce qui révient exac- 
ternent au même, il n’y a que le qualificatif qui a 
changé. Le traitement... inhumain... y reste le 
même, J’ai pu constater qu'ici Aussi on a innové 
avec l'ouverture de Lantin aux Q.H.S. dans cette 
société civilisée qui traite les hommes au nom 
d’une soi-disant liberté, en animaux. 

Q.H.S., isolement ou autre, On trouve tou- 
jours des qualificatifs pour cacher les choses les 
plus abjectes. Et j'en parle en connaissance de 
cause. Neuf mois en Q.H.S., ensuite transféré 
dans une autre prison pour être placé en isole- 
ment, Où? Dans les locaux des anciens Q.HL.S.! 
Quand je suis arrivé en Belgique, je me suis dit: 
«là au moins il n’y a pas de Q.H.5:». Quelle n'a 
pas été ma déception en arrivant à Ypres où ilva 
un quartier réservé pour l'isolement, Endroit où 
j'ai été placé dès mon arrivée. Motif: mesure de 
sécurité, ét non pas disciplinaire: un extradé ne 
peut être puni ou condamné pour un délit autre 
que celui qui a motivé son extradition. Mais 
comme je me suis évadé en 79 de Namur... Faut 
bien trouver un biais quelconque pour ôter au 
candidat à la liberté son envie d'évasion. Et tous 
les moyens sont bons, même les plus inhumains, 
pour le faire entrer dans le système. Pour arriver à 
ce résultat, On commence à enlever au détenu sa 
combattivité et sa responsabilité à mener sa vie 
selon son désir, pour le dépersonnaliser, ce qui fait 
que le détenu tombe, sans s'en rendre compte, 


de ratière 


_ sous la dépendance de l’A.P. I yen a qui ont plus 
de force de caractère que d’autres. On les catalo- 
gue dangereux, Dangereux pour le système péni- 
tencier. À coups de millions, on aménage où on 
construit des quartiers «Q.H.S.», non pas pour 
une hypothétique réinsertion, mais plutôt pour 
avilir et briser ceux qui ont osé résister au système! 
Quand il sort de là, il a enterré toutes ses illusions 
et tous sentiments de bonté pour les remplacer par 
la Haine à l'état pur. Qui est responsable de cette 
métamorphose? La société: de par son silence, 
elle devient complice. 


En Allemagne et en Suisse, c'est à présent les 
cellules sensorielles qui sont «à la mode». En gros, 
cela consiste en une cellule nue, peinte en blanc, 
lumière vingt-quatre heures sur vingt-quatre. 
Aucun bruit ne pénètre dans la cellule, on ne voit 
personne et la bouffe est remise par un guichet 
sans que la porte ne s'ouvre. C’est tout ce qu'il y a 
de plus barbare dans des pays «civilisés». 


Il y a aussi la carotte et le bâton pour l’obten- 
tion d'une liberté conditionnelle sous la promesse 
d’avoir un comportement irréprochable selon les 
crifères pénitentiaires; un tiers pour les primaires, 
dont un pour cent qui en bénéficie, selon les statis- 
tiques du Ministère de la Justice. 


À mon avis, si on cherche vraiment À ce que 
le détenu trouve une place dans la société, on 
devrait d’abord l’inciter à s’instruire, lui donner 
l'occasion d'apprendre une profession selon ses 
capacités. Comme chaque peine mérite un salaire, 
à défaut de celui-ci, les autorités pourraient au 
moins accorder une remise de peine pour récom- 
penser les réussites, 

Je n'ai pas la prétention de chercher à faire 
des réformes pénitentiaires (d’ailleurs c’est tou- 
Jours mal vu) mais c'est une idée qui éviterait à 
pas mal de taulards de rester dans l’inactivité com- 
plète comme maintenant, la seule activité étant de 
préparer des coups, tordus pour la plupart, 


Etant étranger (Algérien), je ne cherché plus 
à faire une quelconque revendication. En huit ans 
de ratière, j'en ai fait plus qu'il ne se doit. 
Aujourd’hui, je n’aspire qu’à une chose, c’est de 
rentrer chez moi, du moins dans le pays dont je 
porte la nationalité: l'Algérie, car je suis né en 
France, pays OÙ Je ne me sens pas chez moi, pas 
plus qu'ici Suriout-quandonvseslentend dire 
presque quotidiennement. C’est malheureux à 
dire, mais le racisme en Europe est comme le dol- 


lar: en hausse. a HR: 
et Saïd Boumedienne 


doorheen 
tralies 


Depuis le 1 octobre, la V.R.I. 
(Vrije Radio Leuven) émet tous les 
lundis, de 10 à 11 heures, un pro- 
gramme intitulé «Doorheen Tralies» 
(à travers les barreaux ou... Passe 
Muraille. .….). 


Ce programme s'adresse aux détenus des 
deux prisons de Louvain et émet à leur intention 
de la musique et des informations de leur choix. 
L'information est traitée avec la collaboration de 
spécialistes de la Ligue des Droits de l'Homme, 
Oikonde, les Criminologues Radicaux, efc, 

«Doorheen Tralies» est la première initiative 
du genre dans la région flamande et il est indénia- 
ble qu'elle répond à l'attente de bon nombre de 
détenus isolés qui, des années durant, sont privés 
de visites ou de tout autre contact social avec le 
monde extérieur. Ce programme de radio offre à 
tous les prisonniers la possibilité d'exposer leurs 
plaintes, leurs problèmes... 

Gette initiative émane de quelques étudiants 
en criminologie de l'Université de Louvain, assis- 
tés par des individus issus des organisations préci- 
tées. 

L'objectif réel de cette émission est d'offrir 
aux détenus un accès au monde extérieur, Mais 
elle souhaîte aussi «conscientiser» ce monde exté- 
rieur: que se passe-t-il dans une prison, quelles 
sont les érreurs qui y sont-commises, quels sont les 
préjugés des gens par rapport aux prisons et gtx 
détenus, quelles sont les souffrances inutilement 
vécues dans les deux prisons de Louvain et qui est 
disposé, par exemple, à aider un prisonnier isolé à 
résoudre ses problèmes ? 

«Doorheen Tralies* permettra donc aux déte- 
nus de témoigner mais donnera aussi la parole à 
des spécialistes qui évoqueront la problématique 
des prisons et, pourquoi pas, au personnel des éta- 
blisserients pénitentiaires. Manifestement, les réa- 
lisateurs de l'émission, souhaitent qu'elle soit plu- 
raliste et diversifiée. 

ŸY.R.L. 
Dorheen Tralies 
Kol. Begaultlaan, 28 

3010 Dee 


Pour toutes informations: 








GREVES DE LA FAIM EN CASCADE DANS LES PRISONS FRANÇAISES 


1 





Le rôle du surveillant de prison est de 
surveiller et de contraindre son sem- 
blable après l’avoir enfermé, de le 
soumettre au règlement draconien 
qui interdit tout, et de lui accorder, 
suivant son bon plaisir ou ses états 
d'âme, les faveurs et accomodements 
que l'usage et les techniques de sou- 
mission et de domestication ont 
éprouvés depuis longtemps! Des 
faveurs et des calmants, des drogues 
et la TV-Dalias que l’on accorde, que 
l’on retire. la carotte ef le bâton. 





La conscience professionnelle d’un surveil- 
lant fait qu'il surveille bien, qu’il garde bien, que, 
suivant le règlement — qui est aussi draconien 
pour lui que pour le détenu — il fasse conscien- 
cieusement ses appels quatre ou cinq fois par ser- 
vice, ses vérifications de cales toutes les heures, 
toutes les derni-heures, tous les quarts d'heure, 
voire toutes les sept minutes comme au huitième 
étage de Lantin, qu'il remplisse correcternent ses 
petits papiers, qu'il signe ses cahiers, qu’il pointe 
ses passages-coups-d’œil, qu’il réponde aux son- 
nettes, qu’il ouvre et ferme les portes et les grilles, 
qu’il récolte les courriers, demandes de rapport, 
demandes pour remettre ou pour recevoir, qu'il 
surveille les mouvements, les préaux, les chapelles 
ou les activités, qu’il fasse ses rapports, qu'il éta- 
blisse ses fiches personnelles de comportement, 
qu'il fouille hommes et caveaux, qu'il contrôle 
barreaux et serrures, et j'en passe. 


C'est vrai que le public ne soupçonne pas. 
C'est vrai que c’est difficile et peu glorieux... 
C’est vrai que tout cela doit — et peut — être fait 
avec humanité, sans mépris... Mais de là à procla- 
mer que c'est là «la profession que nous 
aimons». voilà qui nous inquiète vraiment. 


Les brebis galeuses existent partout, c’est 
vrai! Mais c’est surtout grave dans les corps 
d'élite, assermentés, qui prétendent justement 
réprimer la délinquance des autres et qui la répri- 
ment parfoisstrès durement. comme ce fut juste- 
ment le cas à Verviers lorsqu'en fin d’année der- 
nière, la CGSP locale s’est érigée en tribunal de 
flagrants délits pour condamner un détenu à neuf 
jours de cachot à titre de punition pour faits sur- 
venus à l'extérieur des murs, pour ensuite ridiculi- 
ser son Ministre qui tentait, par un énormé men- 
songe, de couvrir la bavure de son personnel... 


e à VOUS 


Bien sûr l’humanisation, sous des pressions 
diverses, a fait des progrès, même si le contexte et 
la pratique sont toujours dignes du moyen âge et si 
le règlement et la sacro-sainte sécurité interdisent 
tout. 


Et que veut dire «revaloriser leur fonction» ? 
Nous venons de dire ce qu’est la fonction de sur- 
veillant. elle ne peut être que ce qu’elle est. On 
ne peut être enfermeur, inquisiteur et rééducateur, 
c’est inconciliable. Tout au plus peut-on faire 
preuve de moins de mépris, dé moins de morgue et 
d'agressivité, de plus d'humanité... Seuls les tech- 
niciens et les moniteurs, moins engagés dans les 
missions de contrainte et de surveillance, peuvent 
parier de possibilités d'éducation, d’apprentis- 
sage, pour autant qu'ils s’en sentent la vocation et 
la volonté, Comme toujours, la revalorisation de 
fonction dont on parle se limite en fait à la revalo- 
risation des traitements et salaires. 


Seuls des gens extérieurs à la chiourme peu- 
vent tenter quelque chose pour récupérer quelques 
uns parmi les hommes perdus... l’exception qui 
confirme la règle. Et nous croyons que les. médias 
doivent au contraire mettre le moindre fait-divers 
en exergue pour démolir au plus vite ce système 
carcéral qui détruit même son propre personnel, 
puisqu'il y a toujours 25% de surveillants en 
congé de maladie, C’est peut-être le seul moyen 
d'amener les tenants du système, qui traitent 
encore des hommes paumiés comme au temps de 
leur arrière grand-père, à envisager autre chose de 
plus humain, surtout de plus bénéfique, tant pour 
les victimes que pour les coupables d’ailleurs. 


Pour le reste, que la profession de surveillant 
sait difficile et ingrate, nous ne le nierons pas. 
Mais c’est tout de même une profession que l’on a 
choisie, dans laquelle on s'engage comme à 


l'armée, comme à la gendarmerie, On s'engage à | 


obéir, à exécuter moyennant rétribution, En cas 
de désaccord, on peut toujours démissionner. 
Certains le font, et c’est très bien. 


Que l’on puisse aimer cette profession et le 
proclamer nous surprend et nous inquiète. Et si 
celui qui le clame se sent mûr pour passer du côté 
des services sociaux, qu’il le fasse: il y sera plus 
utile qu'en tant que surveillant, 


La première mesure d’humanisation devrait | 
non pas être laxisme ou fermeté, mais bien non- | 
recours à ce système destructeur et hurmiliant et | 


non justifié pour les trois-quart de ceux qui y sont. 
Liberté 

120, rue de Messaney 

6798 Aubange 








vivent les chefs 


Un an, le8 septembre, que le détenu 
Balencour est mort à l’intérieur d’un 
de ces établissements où l’on est 
censé surveiller et conserver... Un an 
que le Ministre de la Justice ef les 
bonzes de son administration escla- 
vagiste refusent de dire ou de recher- 
cher la vérité sur cette mort annon- 
cée, prévue, décrite par la victime 
elle-même dans les lettres qu'elle 
nous adressait dans les semaines ef les 
jours précédents, la dernière 48 heu- 
res avant le matin blême.…. 


Ïl n'était pas question de suicide, mais bien 
d'agression. Certains membres du personnel 
même le mettaient en garde et il était attentif. Il 
fut cependant trouvé mort, suicidé par pendaison, 
disait-on d’abord à l'Administration, avant 
qu’elle ne se ravise et parle d’électrocution… 

On peut mourir ainsi, c'est vrai, à condition 
de le vouloir, d’abord, ce qui n'était sûrement pas 
le cas pour un lutteur; à condition aussi de réunir 
certaines conditions favorables... 


Une petite enquête dans les succursales nous 
fait constater qu'aucune note, aucune instruction 
tendant à attirer l’attention, à recommander la 
prudence ou la surveillance, à faire vérifier le 
fonctionnernent correct des disjoncteurs aux cof- 
frets de passerelles n’a jamais été adressée aux 
directions. Ceci aurait tout de même été une 
nécessité minimale, si. 

Pour nous, ceci prouve que l’on ne croit pas 
au suicide, à un accident provenant du non- 
fonctionnement instantané des dispositifs de pro- 
tection, On est convaincu qu’ils fonctionnent cor- 
rectement d'une part et on sait ce qui s'est passé 
d'autre part... Mais les intérêts suprêmes de 
l’industrie imposent la nécessité et la persistance 
d’un black out protecteur. 


Rappelons que Balencour devait se trouver 
allongé sur son lit dont le matelas est en mousse 





D’ABORD EN SOLIDARITE AVEC LES BASQUES PUIS POUR DE MEILLEURES CONDITIONS DE DETENTION 


synthétique ou de latex, parfaitement sec, isolant, 
que les fils auraient été fixés sur la poitrine, donc 
en surface et à peu de distance l’un de l’autre. Ceci 
fait donc court-circuit franc et en surface. Le 
corps ne fait pas ici résistance entre le secteur et la 
terre, il n'y a pas assaut d'ampérage à travers le 
corps en sa longueur. Le coffret de protection 
devait immédiatement se déclencher, la victime, 
volontaire ou non, en être quitte pour la secousse, 
comme c’est souvent le cas pour qui fait profes- 
sion d’électricien. 

Dés secousses électriques jusqu’à 110 volts 
s’emploient couramment en électrochocs, en 
psychiatrie et en réanimation cardiaque. On ima- 


gine que la secousse subie a dû faire bondir le | 
corps, que la coupure immédiate du courant a dû | 


donner le temps à des réactions instinctives et ani- 
males de l’instinct de conservation de se manifes- 
ter, que les fils ont dû se déplacer, se détacher. 





Notre conviction d'initiés s'est faite, inébran- | 


läble: Balencour a été assassiné ou mis en condi- 
tion de pouvoir être exécuté par électrocutions 
répétées. Le crime est maquillé. Par qui? [l déran- 
geait autant certaine mafia de détenus, que 
matons et directions. Beaucoup avaient à craindre 
et à se réjouir. 


Plutôt que de plaindre l’homme, qui était 
jugé et se jugeait lui-même, jugeons ces industriels 
qui, comme dans toute industrie, camouflent ce 
qui ternit leur «image». Alors que toute atteinte à 
la vie hors prison est sanctionnée de lourdes peines 
de prison, on s'aperçoit que certaines morts ne 
pèsent pas le même poids dans la balance. les 
morts au champs d'honneur, les morts au cours de 


bavures, les victimes de la route et du travail, les | 


suicidés assassinés des prisons du roi. 


On constate qu’en prison, les hommes, les | 


droits," la dignité, la vie n’ont aucune valeur, que 
les responsabilités, les défauts de prévoyance, les 
refus d'aide à personne en danger, sont escamo- 


fois parodie de jugement. Dans le grand cirque, 
les pauvres clowns ont toujours tort... Vivent les 
chefs! Liberté 
120, rue de Messancy 

6798 Aubange 


j ; s à RE ë «| Ses |] 
tés, ne sont jamais sanctionnés, même s’il y a par- | 


un autre 


système 


Cette lettre a été écrite au nom de 
toutes les Jîlles qui: ont maille à partir 
avec la «justice» à cause des stupé- 
Jfiants. 


Ceci est une lettre que l'on m'a demandé de 
vous faire parvenir afin de se faire entendre, pas 
séulement par les juges, présidents, procureurs du 
roi et compagnie, Nous, «femmes libérées», pri- 
vées de liberté et incarcérées à Forest, nous avons 
pris la décision de réagir contre les trop fortes pei- 
nes qui sont infligées à des toxicomanes qui ont 
commis des délits, non pas par plaisir, mais pour 
subvenir à leurs besoins de toxicomanes. Nous 
estimons que. ces personnes sont plus à soigner 
qu’à punir aussi sévèrement. 


Je vais vous citer trois cas — pas de noms 
dans ce message — ce n’est pas seulement pour 
nous mais aussi pour les autres toxicos qui tombe- 
ront bêtement dans les mains de la justice. Les cas 
que je citerai sont ceux qui m'ont le plus frappée. 


Le prermier: une toxico a fait un casse de 
10.000 FB. Sentence: 54 mois, sursis compris. Le 
deuxième cas: une tOxico a pris un an pour trace 
plus cinq ans de sursis qui sont tombés, soit six ans 
ferme. Le troisième cas: une jeune femme a tué 
son amant, Sentence: huit mois. Ah c’est vrai, elle 
n'est pas stup. 


À nos veux, si nous laissons faire la police et 
la justice, la solution pour eux sera la plus simple: 
les toxicos en prison et le plus longtemps possible. 
Or, ce n’est vraiment pas la solution, parce que les 
toxicos sont des malades sous l'emprise de la dro- 
gue et après un moment, quand ils ont décroché, 
ce ne sont plus des malades. Après avoir repris des 
forces, regoûté aux plaisirs de la vie, revu les 
arbres, les oiseaux, les saisons, l’amour — revivre 
quoi — ils sont d’autres personnes, sans doute fra- 
gilies, certainement très sensibles à ee qui les 
entoure (je ne parle malheureusement pas de ceux 


| qui sont restés «flippés»), parce que l'alcool et le 


tabac rapportent à l'Etat, ce que la came ne fait 


pas encore) mais tuent beaucoup plus que la 


ALTERNATIVE LIBERTAIRE 





parmi des alcolos 
car l'alco 























ne fais le procès € 
sibles», seulement 


International, le Minis À 
tice: la Pere de nou 


dit Den en ce n'est pa u! quer 
nous mais bien pour tous les toxk 


Le docteur Baudour avait, av 
nés et moi-même, rédigé une let 
exemplaires afin de toucher ee 
Le docteur RE que jé respecte 


été nearesté quatre mois et la Se cquil 
tée. Dans sa lettre, nous parlions des problè: 
délinquance qu’entraînait la situation que vit 
société actuelle. Aucun'de nous ne peut dire: 
n'en a pas entendu parler, mais c’est à cemom 
là qu’il aurait fallu réfléchir, écouter, bouger 
faut dire qu’entre 54 francs le Vial et 6.000 francs 
le gramme, il ne faut pas faire un dessin: r. ke 


J'ai parlé de cela avec un homme trés'ouvert," 
l'aumonier Philippe. Ii m’a tout de suite dit. qua 
Fintérieur de la prison, ça ne risque pas de toucher 
grand-monde, Mais si chez les hommes, condam- 
nés Où pas, quelques uns peuvent se joindre à 
notre action, rqu'ils nous le fassent savoir par 
Passe-Muraille, parce que ce sera dur. Maïs nous 
poursuivrons notre lutte, car nous le voulons. 


fs 


J'aimerais préciser que ce n’est pas une publi= 
cité pour ou contre la came. Mais un plaidoyer 
contre des pairs qui peuvent condamner des gosses 
de 21 ans à 4, 5, 6 ans, sans réaliser que la révoite, 
la haine peuvent envahir tout être humain. Jesou- 
haïte du fond du cœur que ces juges, présidents et 
procureurs soient un jour face à unsproblèmesimi 
laire avec quelqu'un de proche d'eux, Alors peut 
être enléveront-ils leur masque parce qu'ilslettrou” 
veront hideux, et que le poids de la justicepèsera 
lourd sur FU conscience, 


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-N° 67 - Novembre 84 - Page 23 





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« Une société 






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… FAITES Que | 4 À 21 de cette société 

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aventure 
possible » 


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auraient pris le train en marche, un rappel Visuel de quelques-unes des créa- 
tions de ces derniers mois. Le noir et blanc ne vous permettra que d’avoir une 
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que. Vous avez des idées, vous savez dessiner, vous prenez des photos, 
écrivez-ROus, proposez-nous, nous réaliserons ensemble.De-toute-matière, 
n’oubliez-pas.-si-ee-rest-déjé fait, U6 Vous abonner ou de vous réabonner en 
versant 600 francs pour onze numéros au compte 001-0536851-32. À vous 
retrouver le mois prochain à l’extrême-centre dé votre journal préféré. 








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Cela fait plusieurs mois, voire plusieurs années, que vous recevez gratuitement dans votre 
boîte aux lettres notre mensuel Alternative Libertaire. Vous n'êtes pas sans savoir que l’austé- 
rité sévit partout et notamment dans les associations qui, comme la nôtre, loin des rivages 
commerciaux, tentent de porter une action, une parole de changement social. 


En quelques années, le prix du papier a pratiquement doublé, le timbrage périodique est passé 

de 60 centimes à 2 francs. Malgré cela, nous voulons continuer à vous rendre, du moins nous 

l’'espérons, un service d’information- réflexion via notre journal. C'est pourquoi nous vous 

. demandons de bien vouloir participer au financement de ce service, ne fût-ce qu'en ce qui 
concerne les frais d'envoi ( 100 francs par an). 


Vous avez pu constater qu'Alternative Libertaire s’est sensiblement amélioré. La forme qui 
tend à mieux mettre en valeur ce qui doit être dit. Le fond avec une ouverture large à tous ceux 
qui veulent par ce biais (4.000 exemplaires) communiquer avec les autres. Alternative Liber- 
taire, plus que jamais, se veut lieu, miroir de nos réalités. Pour faire connaître vos activités, vos 
actions où vos réflexions, c’est le média qu'il ne faut pas oublier. Les 1.100 abonnés, les 200 





asbl] 22 mars 





. envois à la presse, les 800 envois aux collectivités, le reste distribué en promotion, ne man- 





queront pas d'informer le «milieu» que vous voulez sans doute toucher. Les journaux qui se. 
proposent cet objectif ne sont plus légion, les défendre, les aider à vivre c'est un peu vous 
ménager un canal de communication. Voilà une raison plus que valable de faire l'effort de 
J abonnement, en nous versant 600 francs pour un an au compte 001 0536851 -32. 





En espérant votre réponse positive, 
En sanerent vous retrouver prochainement dans les colonnes d'Alternative ee 


Le Collectif de l'asbl 22 Mars 


Cercle Bakounine- ULB |cooraination Libertaire à l’ULB) 


«un C, ça va! 
(rois é, bonjour les dégâts » 


Conférence-débat le terrorisme et la répression en Belgique (les CCC, l’opération Mammouth) 


Avec la participation de: 


Roger Lallemand (Sénateur PS) 
Olivier Deleuze (Député écolo) 
Roger Noël- Babar (asbl 22 Mars) 


Le 15 novembre 1984 à 20h x local 1302 H 
(bâtiment H de l’Université Libre de Bruxelles, 2 avenue Héger à 1050 Bruxelles - Ixelles) 





OSZAR »